En fixant à 1 million de participants leur seuil de satisfaction, ils pouvaient à juste titre crier victoire sur tous les plateaux hier soir. Les estimations des instituts sur cette participation étaient bien plus élevées (4 à 5 millions) : ils n’avaient aucune référence antérieure. La balle est au centre avec plus de 2 millions de votants.

En ce qui concerne les résultats, à l’heure où j’écris cette note, François Hollande est en tête mais avec une marge d'avance plus faible que celle prévue, là encore, par les sondeurs. Le second tour, que certains imaginaient de pure forme, sera beaucoup plus compliqué que les partisans de Hollande le pensaient et la presse avec eux. On peut, à ce titre, noter la force de l’appareil du PS qui permet à Martine Aubry de ne pas simplement figurer, mais de pouvoir, in fine, gagner.

La vraie surprise, tout le petit monde médiatique le souligne, c’est la percée très significative d’Arnaud Montebourg, relativement peu connu du plus grand nombre il se hisse au 3ème rang et avec plus de 17%. Il pèse très fort sur le deuxième tour, et surtout sur l’avenir à moyen terme du PS.

Cette irruption de Montebourg dans le trio de tête est éloquente. Il n’est pas un éléphant du PS ; il n’a pas un appareil derrière lui ; il proposait un véritable changement en particulier sur la « gestion » de la mondialisation débridée et de l’organisation européenne.

En dehors des personnalités, des physiques et des costumes, il y a dans ce résultat et autour des idées lancées pendant la campagne un socle dur qui vient de loin et que la crise ne fait que solidifier : les questions européennes et la mondialisation folle des financiers. Il vient de loin et pour tout dire de 2005 et du référendum sur le TCE, auquel les Français avaient répondu NON. Ce vote a été détourné, bafoué par les assemblées au moyen du triste traité ersatz de Lisbonne. Hollande, Aubry et les autres ont toujours été des partisans de cette Europe-là, celle du OUI pourtant refusé. Arnaud Montebourg avait quant à lui recommander le NON : il reste cohérent. Les résultats dans notre département, l'Yonne, champion du NON en 2005, confirme l'importance de l' Item : Montebourg y réalise un score nettement au dessus de sa moyenne Nationale (22%)

Les discours au soir du premier tour des deux participants au second font tous appel aux électeurs de Monteboug. Le député de Saône et Loire donnera ces recommandations ce soir à la TV, mais au-delà, ce socle dur écoutera les propositions nouvelles, les arrondis, les discrets infléchissements pour se déterminer. L'équation n'est pas si simple à résoudre pour les deux européistes convaincus arrivés en finale.

Il faut noter que ces divergences sur l’exercice de l’Union en Europe ne sont pas présentes qu’au seul sein du PS institutionnel. Ces préoccupations à l'encontre d’une construction européenne bancale et inopérante, se protégeant mal ou pas, occupe le Front de Gauche de Mélenchon, fait le fond de commerce du FN de Marine Le Pen bien sûr, mais également au sein de l’UMP et de la droite Républicaine existent même non avouées ou estompées.

Le NON à cette Europe là était majoritaire en 2005; il l’est encore mais aucun des responsables les plus en vue n’osent véritablement aborder la question. Philippe Séguin, en son temps, avait déjà décrit par le menu tous les avatars du fédéralisme et de la « course en avant » vers une Europe s'éloignant des Nations et des peuples. La crise ne fait que renforcer ses prédictions. Il faudra bien qu’un jour cette majorité bafouée trouve une réponse : Montebourg, sans être très précis, a semblé la prendre en compte. Pourtant, hier soir sur les plateaux TV, tous les analystes, politologues et politiques se gardaient bien d’évoquer cette question fondamentale.

Pour terminer cette note écrite à chaud, il convient de remarquer l'extrême cruauté de la vie publique et de la politique, dans laquelle aucune situation n'est jamais acquise. L'effondrement de Ségolène Royal en porte témoignage. Même dans sa région elle ne peut qu'arriver 3ème derrière Aubry et surtout Hollande qui caracole très largement en tête. Une région dont elle avait fait une rampe de lancement. Plus de 17 millions d'électeurs en 2007 ne font pas un printemps 2012.

Thierry Mandon (Montebourg) sur LCP

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