Le maire d'Auxerre et le conseil municipal conviaient, lundi matin, dans la grande salle du conseil, à une rencontre avec un homme peu ordinaire, José Gualinga. Depuis des décennies, les Amérindiens sont massacrés et leur culture et patrimoine piétinés, par l'ignorance et la cupidité des hommes. Certaines tribus résistent tant bien que mal en s'efforçant de préserver leur culture et leurs terres sacrées.

José Gualinga est le représentant officiel du peuple Kichwa à Sarayaku en Equateur. Un peuple de 1 200 habitants qui vit en forêt de la cueillette, chasse et pêche et de cultures itinérantes. Le territoire qu'il couvre est menacé de déforrestation par les projets de forages pétroliers. La dynamite est déjà enfouie dans le sol. José Gualinga se bat pour préserver ses modes de vie et sa culture. La biodiversité très riche est menacée dans le bassin de l'Amazone.

Avec son bâton de pélerin et une traductrice, il popularise cette lutte de par le monde en prenant les opinions publiques à témoin et en mobilisant des ressources. Lundi à Auxerre et Paris, mardi, à Genvève pour une conférence, l'homme, lui-même menacé dans son intégité physique et que l'on tente de corrompre, ne ménage pas se peine.

Harmonie

Son discours est simple. Deux philosophies, deux systèmes de vie s'opposent car ils ne se connaissent pas. José Gualinga prône l'harmonie par le rapprochement et l'information, le respect mutuel et la tolérance. Fondamentalement, son action utilise le droit, la loi, la constitution, bref, le système qui gouverne les pays dits développés, pour défendre les droits de son peuple et péréniser le projet le plus audacieux de son histoire : celui de la « Frontière de Vie », projet si insensé que nul ne le croyait possible avant que Sarayaku ne commence à le créer sur le terrain…

Sarayaku est probablement la communauté indienne devenue la plus connue en Équateur pour avoir réussi à résister depuis plus de 15 ans aux multinationales du pétrole. Ecoutez José Gualinga parler du "sacré" dans cette vidéo et expliquer que le mot "merci" n'existe pas dans sa langue...

VIDEO// Accueil à la mairie, présentation, Interview de José GUALINGA, interview de Chantal DHOUKAR, présidente de la commision internationale du conseil régional de Bourgogne

 
 

 

« Nous nous demandons si un peuple petit comme le nôtre peut changer le monde. Peut-être pas ! Mais nous sommes sûrs que dans chaque coeur, il y a un peuple qui lutte avec la même force et si petit soit-il, nous sommes le symbole de la puissance de la vie. »
José GUALINGA, Dirigeant des Affaires internationales du Peuple Kichwa de Sarayaku –
Equateur – Amazonie

 

INTRODUCTION
 

Face à l’urgence du défi climatique et à la nécessité de nous mobiliser pour
préserver les ressources de notre planète, nous vous présentons ici le projet
« Frontière de Vie », un projet de sauvegarde de la forêt amazonienne, unique et
hors du commun, mené par la communauté Kichwa de Sarayaku en Equateur.
Ce projet, à la fois culturel, interculturel et écologique, prend peu à peu de
l’ampleur. Non seulement en Equateur où cette communauté très dynamique a su
sensibiliser des personnalités politiques ainsi que d’autres communautés à rallier sa
cause. Mais aussi en Occident puisque le premier – et à l’heure actuelle, le plus
important – groupe, s’est constitué en Belgique dans la région de Theux (près de
Verviers) en octobre 2003.
« Frontière de Vie-Belgique », depuis lors, s’est mis au service du groupe de
travail indien qui pilote le projet à partir de Sarayaku, au coeur même de la forêt
amazonienne. La France et l’Allemagne ont ensuite créé leurs propres groupes de
soutien.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, quelques mots sur le projet « Frontière de
Vie ». Il s’agit de créer une immense frontière végétale de 300 kms de long, formée
de cercles d’arbres de couleurs, aux limites du territoire de Sarayaku (135.000
hectares de forêt primaire) en signe d’opposition pacifique aux compagnies
pétrolières qui convoitent depuis de nombreuses années ce vaste territoire. Une
manière très symbolique pour ce peuple réputé pour son courage et sa détermination
d’affirmer sa volonté de préserver son mode de vie, sa culture, ses connaissances
ancestrales ainsi que la forêt qui l’abrite, le nourrit et le soigne.
A travers ce geste fort, les habitants de Sarayaku font appel à toutes les bonnes
volontés qui souhaitent s’unir et se mobiliser pour sauver notre planète. La Frontière
de Vie est donc bien plus qu’une suite d’îlots de biodiversité au coeur de la forêt
amazonienne. Elle est aussi appel à nos coeurs et à nos consciences. Ouverture au
dialogue et au rapprochement des cultures, souhait d’échanges et de réflexions sur
nos conceptions de la Vie et le rôle de l’Homme, invitation à créer des passerelles et
à trouver des solutions pour que chacun puisse vivre selon ses croyances et son
mode de vie, tout en respectant la Terre et chaque peuple qui y vit.

José GUALINGA à Auxerre, lundi matin, salle du conseil à la mairie  (DR)

MENACES SUR LA FORET AMAZONIENNE
(berceau de la biodiversité – menaces sur cette biodiversité et les peuples
autochtones)


Ce n'est plus un secret pour personne : hormis quelques réserves naturelles,
c'est aujourd'hui l'ensemble de la forêt amazonienne qui est menacée et avec elle,
l'ensemble de toutes les forêts tropicales du monde.
La forêt équatorienne est probablement, avec celle du Pérou, un des épicentres
de la biodiversité mondiale, contenant au moins 10.000 espèces de plantes, et
refuge de nombreuses espèces animales.
On a beau savoir, dire et redire, que c'est là une catastrophe incommensurable,
un désastre pour la biodiversité, voire une menace sérieuse pour la survie de
l'humanité, rien n'y fait : la destruction continue, année après année.
Les peuples vivant dans ces forêts ont bien sûr été les premiers touchés par cette
destruction sans précédent. Beaucoup ont purement et simplement disparu. La
plupart ont vécu un terrifiant démantèlement culturel et social. Ceux qui restent,
souvent très conscients de ce qui les attend, luttent pied à pied pour leur survie et
leur dignité.
Les peuples autochtones d'Amazonie équatorienne n'ont pas fait exception à ce
sort funeste. Ceux vivant au nord du pays ont connu dans les années 60 l’arrivée des
compagnies pétrolières. Agissant avec un mépris odieux tant pour les peuples que
pour la forêt, ces compagnies créèrent rapidement un désastre écologique inouï :
tant de pétrole et de ses résidus s'écoulèrent dans les rivières et les lagunes qu'on le
compare à plusieurs dizaines de fois le naufrage de l'Exxon Valdez. Les colons
amenèrent la drogue, la corruption, la prostitution. Les peuples indiens, épuisés et
malades, durent pour la plupart abandonner leurs terres et rejoindre les bidonvilles
de cités violentes.
Aujourd'hui, les peuples indiens du sud du pays, dont les Kichwas de Sarayaku,
font front pour refuser ce sort dégradant.
Sarayaku, en particulier, s'est démarqué depuis 10 ans par sa ténacité farouche.
Ce furent des années terribles, éprouvantes et harassantes, pour ce petit peuple de
1200 habitants. Mais les Kichwas ont tenu bon et aujourd'hui, les compagnies
multinationales ne sont toujours pas parvenues à s'implanter en leurs terres.

L’EQUATEUR, LE PETROLE ET SARAYAKU
(Equateur : bref aperçu situation politique, économique et sociale – Zones
d’exploitation du pétrole - Sarayaku face à la menace du pétrole : faits
marquants et avancées)


L’Equateur est un petit pays d’Amérique du Sud dont une caractéristique notoire,
au niveau politique, est la succession effrénée de dictateurs et de générauxprésidents
renversés par la population.
Durant le « boom pétrolier » des années 70, l’Etat équatorien a emprunté des
sommes très importantes à l’étranger. Mais au début des années 80, la récession
paralyse l’économie du pays, l’entraînant vers une dette extérieure énorme. En 2000,
l’instabilité politique du pays est telle que le dollar remplace désormais la monnaie
nationale.
Pris entre le marteau et l’enclume, l’Etat équatorien se trouve contraint de
rembourser sa dette. Le pétrole est une des principales ressources du pays…
Au Nord du pays, près de 1.500.000 hectares de forêts sont déjà en exploitation.
500 kilomètres de routes y ont été construites pour permettre l’installation de 400
puits de pompage. Ces puits génèrent quotidiennement 17 millions de litres de
déchets toxiques non traités. Ces déchets sont déversés dans des bassins à ciel
ouvert qui débordent lors des pluies tropicales et se répandent dans la forêt. Dans
certaines rivières, toute vie a disparu. Les populations indiennes qui vivaient sur ces
territoires ont été décimées par les problèmes respiratoires, les cancers et les
troubles neurologiques.
En 1995, l’Equateur ouvrait dix nouveaux blocs de 200.000 hectares à une future
exploitation, dont celui où vit la communauté Kichwa de Sarayaku.
Certains d’entre eux se situent dans des zones déclarées réserves mondiales de
la biosphère par l’ONU.
On estime que les réserves pétrolières d’Equateur pourraient être épuisées en
une quinzaine d’années, les compagnies laissant derrière elles un désastre
écologique et une situation désespérée pour les 200.000 derniers habitants de la
forêt.
Venons-en à présent à la communauté Kichwa de Sarayaku.
Sarayaku est une importante communauté indienne située au coeur de
l’Amazonie équatorienne. Environ 1200 habitants y vivent encore aujourd’hui de
façon traditionnelle, de chasse, de pêche, d’agriculture et d’élevage. Ils gèrent
environ 135 000 hectares de territoires ancestraux dont, à la suite d’une longue lutte,
ils ont obtenu de l’Etat équatorien les titres de propriété collective.
La forêt primaire de Sarayaku, riche en biodiversité et en plantes médicinales est
encore intacte et sans pollution.
La connaissance ancestrale est détenue par les Yachaks (chamanes).
Les
yachaks sont des guérisseurs, des guides spirituels mais aussi les gardiens de
l’environnement. Ils ont joué un grand rôle tant dans la lutte de la communauté que
dans le projet « Frontière de Vie ».
Citons au passage quelques faits marquants dans l’histoire de ces habitants face
à la menace du pétrole :

En 1992, les nationalités indigènes d’Amazonie sortent de la forêt en une
impressionnante marche sur Quito. Après 500 kilomètres de marche, ils atteignent la
capitale de l’Equateur, perchée en haut de la Cordillère des Andes. Ils y resteront
des semaines, occupant les places principales de la ville, jusqu’à être reçus au
Palais du Gouvernement où ils négocieront de spectaculaires avancées dans la
Constitution Equatorienne.
L’Equateur devient un état pluriculturel et reconnaît des droits spécifiques aux
peuples autochtones.
Les habitants de Sarayaku obtiennent les titres de propriété officiels de leur
territoire, ce qui est une avancée historique incontestable.
L’exploitation du sous-sol, par intérêt national, reste possible mais nécessite leur
consultation et leur accord.
C’est bien là que le bât blesse…
En effet, en 2003, l’Etat équatorien bafoue ce droit. Des compagnies pétrolières,
accompagnées par l’armée, pénètrent sur leur territoire, malgré l’opposition des
habitants, pour y effectuer des explorations sismiques.
Imaginez les 1200 habitants de Sarayaku menant une lutte acharnée, pacifique et
non violente, pendant plusieurs mois, face à plus de 600 ouvriers protégés par 400
militaires armés !
Ces ouvriers parviennent à enfouir des centaines de kilos de dynamite dans le
sous-sol. Et pourtant, quelques semaines avant leur explosion, c’est la victoire
inattendue de Sarayaku ! En quelques jours, les mille étrangers se retirent…
Sarayaku a en effet déposé plainte contre l’Etat équatorien pour viol de sa
constitution. La Cour Interaméricaine des Droits de l’Homme (basée à Washington et
au Costa Rica) a déclaré la plainte recevable et a ordonné le retrait de la Compagnie
et des militaires !
Fin 2005, cette même Cour impose à l’Etat équatorien de retirer à ses frais les
1400 kilos d’explosifs enfouis dans le sous-sol de Sarayaku. Un an de travail pour
300 personnes et au minimum deux millions de dollars de frais ! Une sanction qui a
de quoi faire réfléchir…
Notons encore que le mois de janvier 2007 voit l’élection d’un nouveau président
à la tête de l’Equateur : Rafael Correa (dont l’épouse est belge). Bien que non
indigène, Correa a été soutenu, durant sa campagne, par l’immense majorité des
Amérindiens, notamment à Sarayaku, assurant qu’aucune exploration ni exploitation
pétrolière n’aurait lieu dans les territoires des peuples indigènes sans leur
consentement.
Peu de temps après son arrivée au pouvoir, Correa a également remporté, par
referendum, l’accord du peuple équatorien pour la création d’une assemblée
constituante qui aurait le pouvoir de modifier la Constitution.
Son ministre de l’Energie et des Mines visite Sarayaku, promet formellement de
retirer les explosifs.
Le président Correa fait ensuite sensation en proposant, pour la première fois au
monde, la non-exploitation du pétrole dans une vaste zone de réserve naturelle de la
forêt, projet soutenu par la fondation Clinton.
On le voit : Les temps changent ! Mais les pétroliers ne désarment pas,
manipulent l’opinion, créent de fausses communautés indiennes…
Sarayaku n’est pas encore sauvé !

José GUALINGA interviewé par AUXERRE TV dans le couloir à l'étage de la mairie d'Auxerre

SISA NAMPI - LA FRONTIÈRE DE VIE
(Genèse du projet – développement – les premières clairières)


Lors de ces nombreux événements, les habitants de Sarayaku ont toujours mené
leur lutte de façon pacifique et non violente, utilisant les moyens juridiques et
médiatiques à leur disposition.
Cependant, face aux pressions croissantes dont ils sont l’objet dès le début des
années 2000, ils franchissent un nouveau cap à la demande de Don Sabino, un des
principaux chamane de Sarayaku. Don Sabino demande à la communauté de créer
un « Grand Chemin Vivant de Fleurs » (traduction littérale de l’expression kichwa qui
désigne ce que nous appelons la « Frontière de Vie »).
Il s’agit en pratique de créer de vastes cercles d’arbres à fleurs de couleur
éclatante entourant la totalité de leur territoire.
En octobre 2003, Don Sabino, Dona Corina, son épouse et José Gualinga, leur
fils, par ailleurs Dirigeant des Affaires internationales de Sarayaku et époux de
Sabine Bouchat, coopérante belge au développement à Sarayaku, se rendent en
France et en Belgique afin de rencontrer des personnalités et de faire connaître leur
situation et leur projet.
« Frontière de Vie Belgique » est officiellement fondée en août 2004 en présence
de José Gualinga.
De quelques personnes motivées (pour la plupart des amis de Sabine Bouchat,
originaires de Theux près de Verviers), le groupe s’agrandit peu à peu, chacun
apportant son talent au projet. Pour se faire connaître, l’association est présente sur
différents évènements ou organise ses propres activités. Patiemment mais sûrement,
les outils se préparent et s’expérimentent, les questions affluent, les projets et idées
regorgent.
Pendant ce temps, à Sarayaku, les discussions se poursuivent. Cette
communauté, répartie en plusieurs villages à travers la forêt, est dotée d’un
Gouvernement traditionnel et s’autogère selon des principes hautement
démocratiques.
Ce Gouvernement encadre de nombreux groupes de travail, dont le groupe «
Atayak », regroupant une trentaine d’hommes et de femmes de savoirs de la
communauté (chamans, guérisseurs, sages-femmes, professeurs etc).
Atayak a pour mission de veiller à la préservation et à la transmission des
connaissances traditionnelles du peuple Kichwa. Il devient le coeur du projet
Frontière de Vie, projet qui est approuvé par la totalité de la population, réunie en
assemblée plénière.
Atayak prend alors une série de mesures, donnant au projet des bases solides et
concrètes :
Il crée une charte de partenariat entre lui et les groupes de soutien internationaux,
entame une importante mission de diplomatie auprès des communautés voisines en
vue de délimiter de manière exacte les limites du territoire de Sarayaku et donc le
tracé de la Frontière de Vie, informant et sensibilisant les communautés indiennes
voisines à ce projet et à ses enjeux.
Atayak décide ensuite de créer une pépinière en vue des plantations dans les
futures clairières. Près de 5000 plants sont donc mis en terre et soignés.
Et en novembre 2006, les plantations commencent…

UN SYMBOLE POUR L’HUMANITE

(Force et message du symbole – description des clairières)


Ce projet titanesque a pour objectif de créer un symbole puissant, à vocation
internationale, pour tous les peuples qui luttent pour préserver la démocratie, la
biodiversité, les droits humains et un avenir de paix pour les générations futures.
Les habitants de Sarayaku ont cet incroyable objectif de frapper la conscience
planétaire en créant une première mondiale : une immense Frontière d’arbres à
fleurs à laquelle individus, communautés et peuples pourront s’associer.
Pour rassurer celles et ceux qui nous interrogent sur la création des clairières au
coeur de la forêt, nous précisons que les Kichwas n’abattent pas d’arbres mais qu’ils
choisissent des endroits de friche ou de broussailles. On ne construira donc pas un
symbole de Vie en détruisant la forêt !
Les cercles d’arbres font 50 mètres de diamètre, soit une superficie d’environ
2000 m2. Il y aura, en final, un cercle tous les 6 kilomètres sur une distance de 300
kilomètres.
Le 1er cercle, déjà planté, s’appelle Tiam, ce qui signifie, en kichwa, « Point de
résistance ».
Chacun des autres cercles aura son propre nom, sa propre histoire, sa propre
disposition particulière.
Les arbres, lorsqu’ils seront adultes, auront de 30 à 40 mètres de haut, avec une
frondaison de 12 à 15 mètres.
Les plantations ont commencé fin 2006. Depuis lors, six « points de résistance »
ont déjà été plantés aux différents points cardinaux du territoire. D’autres expéditions
sont prévues pour 2008.

PARRAINAGE ET ASPECTS FINANCIERS
(Bons de parrainage – coût d’une clairière)


Pour recevoir le soutien financier nécessaire à la concrétisation de ce projet, nous
proposons des bons de parrainage de différents montants pour permettre à chacun
et à chacune de parrainer, selon ses moyens, une des clairières de la Frontière de
Vie.
On nous demande souvent combien coûte le parrainage d’un arbre dans une
clairière. La réponse n’est pas simple car de nombreux paramètres entrent en jeu.
Ouvrir une clairière dans la forêt puis la replanter avec des arbres particuliers
représente à chaque fois une expédition éprouvante. Chaque « clairière » demande
au minimum le travail d’une dizaine de personnes pendant un mois. Certaines de ces
clairières sont situées à plusieurs dizaines de kilomètres de Sarayaku au coeur de la
forêt vierge. Et durant tout ce temps, ces personnes choisies parmi les plus forts et
endurants de la communauté ne peuvent ni chasser ni pêcher pour leurs familles !
On estime qu'une clairière représente en moyenne un coût global d’environ 3 à
5000 euros (incluant essentiellement l'infrastructure logistique, les transports,
l'outillage, la nourriture, le soutien aux familles etc).
Le projet total (qui s'étale sur plus de 10 ans) prévoit l'ouverture de dizaines de
clairières (qu'il faudra entretenir pendant le temps de croissance). Il est très possible
que les communautés indiennes voisines (Shuars, Ashuars, Huaronis etc) prolongent
le tracé de la Frontière sur leurs propres territoires…
Il est important de dire que les Indiens de Sarayaku se sont engagés à réaliser ce
projet avec ou sans argent, sans aucune forme de soumission ou de mendicité mais
ils sont heureux de trouver des partenaires qui les soutiennent, les aident à réaliser
le projet dans d’assez bonnes conditions et ils entretiennent avec eux des rapports
de partage, de respect et d’échange.

AUTRES VOLETS DU PROJET FRONTIÈRE DE VIE
(Sasi-wasi – Tayak wasi – Sacha-Rua etc)
Le projet de la Frontière de fleurs est « l’enveloppe extérieure » d’un projet plus
vaste comprenant de nombreux aspects. Citons parmi eux :
- Sasi-Wasi, un centre de traitement, de guérison et de réhabilitation des
savoirs ancestraux (entre autres, la connaissance des plantes et remèdes
traditionnels, ainsi que de la médecine ancestrale). La première phase de ce projet a
été financée par la Fondation France-Libertés (présidée par Mme Danielle
Mitterand.) Un second centre suivra, consacré à l’initiation traditionnelle des
chamanes et au partage des savoirs avec l’extérieur – autres communautés
indiennes, chercheurs etc.
- Tayak-Wasi, un projet d’éducation interculturelle, d’enseignement et de
revalorisation des connaissances ancestrales (école maternelle et primaire bilingue -
espagnol et kichwa - mise sur pied par Sabine Bouchat et la coopération belge). Ce
projet est fonctionnel depuis plusieurs années.
- Sacha-Rua, un jardin botanique pédagogique en lien avec le centre Sasi-
Wasi. Il comprendra sur plusieurs hectares l’essentiel des plantes médicinales
utilisées par les habitants.
A noter aussi : l’ouverture en 2007 d’un centre informatique avec accès au web,
en pleine forêt, grâce à un satellite et à l’énergie solaire ; la construction d’un centre
de documentation, de création de matériel pédagogique et d’archivage des
connaissances ; l’ouverture d’un centre d’accueil pour des groupes d’éco-touristes ;
la formation d’un cinéaste autochtone et la réalisation de deux films vidéos ; un projet
de potabilisation des eaux du village etc.

CONCLUSION


Les habitants de Sarayaku ont su utiliser avec une créativité étonnante les outils
du monde moderne : camp de la paix, campagnes TV, pétitions internationales
lancées sur le web, réalisations vidéos, luttes juridiques au plus haut niveau.
La « Frontière de Vie » est une nouvelle démarche, s'ajoutant aux précédentes,
pour marquer durablement les esprits au niveau international.
Les habitants de Sarayaku ne se disent pas opposés à une utilisation raisonnée
et propre du pétrole. Eux-mêmes en consomment modérément. Mais ils souhaitent
au minimum un moratoire à l'exploitation effrénée actuelle afin de définir les
conditions d'une exploitation juste et durable. On en est loin.
Si nous voulons que le « Chemin de Fleurs », rêvé à Sarayaku, se concrétise un
jour dans la forêt amazonienne et devienne ce symbole universel rêvé par eux, des
dizaines d’associations et des centaines de personnes devront se mobiliser, à travers
le monde, pour le soutenir tant par leurs pensées que leurs actes.
Comme le disait José Gualinga, il y a de bons et de mauvais Occidentaux comme
il y a de bons et de mauvais Indiens. La question n’est donc pas de savoir qui est le
meilleur peuple mais d’unir les personnes qui ont envie de bouger.
Le débat n’est pas non plus entre « tradition » ou « modernité », entre « vie
naturelle » ou « technologie ». Ce qui s’invente à Sarayaku est à la fois totalement
neuf et totalement ancré dans des racines millénaires.
Sarayaku nous invite à dépasser ces clivages qui nous séparent et nous
empêchent de penser l’avenir. Il prépare depuis des mois un « Plan de Vie », qu’il
révèlera prochainement, avec sa propre vision de la crise planétaire que nous
traversons, crise écologique, politique, morale et spirituelle.

 

> Menace actuelle de destruction de 3,8 millions d’hectares de forêt primaire et de 7 nationalités indiennes en Amazonie
> Processus historique devant la Cour Interaméricaine des Droits de l'homme - CIDH - http://sarayaku.org/?page_id=521 : réaffirmation de l'obligation d'obtenir le consentement libre, préalable et informé des population indienne en cas de projets industriels sur leur territoires http://sarayaku.org/?page_id=544 . Une avancée majeure vers l’obtention d’une possible jurisprudence en faveur des peuples autochtones. Visite in situ  exceptionnelle de la CIDH en avril en équateur.
> Déclaration Kawsak Sacha (Forêt Vivante) : Initiative novatrice des Peuples autochtones en résistance pacifique pour faire reconnaitre leurs territoires comme sacrés et patrimoine de la culture et de la biodiversité kichwa  http://sarayaku.org/?page_id=53
> Construction d'une société post-pétroliére : plan de Vie,  Sumak Kawsay (bien vivir en armonía), rencontre avec le mouvement des territoires et quartiers en transition, droit de la nature
> Apport des peuples autochtones face au Changement Climatique : préparation de Rio+20