Les Français ont participé à des tables rondes avec des sociétés iraniennes mardi 4 février "Une sorte de speed-dating", souffle l'un d'eux. Ils ont visité, mercredi, plusieurs sites industriels avant leur départ. "Parmi la délégation, nous avons de grands groupes (Safran, Airbus, Total, GDF-Suez, Renault, Alcatel, Alstom et L'Oréal) mais aussi des PME", explique Thierry Courtaigne, vice-président de Medef International. "Certains viennent pour actualiser leurs dossiers, prendre des contacts, dit-il. Certaines entreprises se demandent déjà quand elles reprendront leurs affaires en Iran, d'autres sont à la recherche d'opportunités".

 

Fabrice HERRAULT était du voyage au nom de l'AJA XXL (DR)



La délégation représente notamment les secteurs pétrolier, automobile, agroalimentaire, pétrochimique, aéronautique ou médical, jugés prioritaires par les Iraniens pour relancer leur économie.
Il y a même l'AJ Auxerre XXL, représentée par Fabrice Herrault, qui souhaite montrer aux responsables de clubs de football le "savoir-faire du club bourguignon en terme de formation des joueurs". Guy Cotret, homme d'affaires mandaté par un fond d'investissements, Paris Luxembourg Participations (PLP), a pris les commandes de l’AJA en 2013. Son but avoué a toujours été de "capitaliser sur ce que ce club sait si bien faire depuis longtemps, c'est à dire la formation".

Au cours de ce déplacement, du 2 au 5 février, les dirigeants d'entreprise français ont rencontré Mohammad Nahavandian, directeur de cabinet du président Hassan Rohani, et des membres de la Chambre de commerce iranienne, rapporte l'agence de presse iranienne Irna.

 

Un marché de 75 millions d'habitants

Les conditions de cette visite sont claires, alors que la République islamique est toujours sous le coup de sanctions internationales, notamment un embargo pétrolier et bancaire. Le Medef "se rend en Iran à titre exploratoire", a souligné à Paris le porte-parole du Quai d'Orsay Romain Nadal.
L'accord intérimaire entré en vigueur le 20 janvier pour six mois ne concerne que l'industrie automobile, l'aéronautique, l'or et les métaux précieux ainsi que les exportations pétrochimiques.
Il y a un énorme marché à reprendre avec ses 75 millions d'habitants. Les autorités iraniennes ont réservé "un très bon accueil" aux représentants français. "Les Iraniens sont très intéressés : en bref, ils nous disent "venez, tout est à prendre", affirme l'un des participants.  Un responsable iranien a notamment invité les sociétés françaises à investir dans le secteur énergétique, vital pour l'économie.

 

Partenariat commercial dégradé

La mission exploratoire de Medef International a un fort retentissement. Elle s'est aussi attiré des critiques. Washington dénonce une initiative malvenue.

John Kerry, le secrétaire d'Etat américain, s'en est ému auprès du ministre des Affaires étrangères français, Laurent Fabius. Plusieurs hauts responsables du Trésor américain et du Département d'Etat ont fait valoir que « l'Iran n'est pas ouvert pour les affaires », même après un accord provisoire visant à réduire le programme nucléaire iranien en échange d'un allégement des sanctions. Les négociations doivent reprendre le 18 février, en vue d'un accord définitif.

Bercy a défendu hier le Medef. Pour Pierre Moscovici, le ministre français de l'Economie, interrogé en marge du Salon des entrepreneurs, cette délégation est « un pari sur l'avenir ». « Si un jour l'Iran changeait d'attitude, alors il y aurait, on le sait, des opportunités économiques et commerciales importantes pour l'ensemble des pays. »

« Les relations commerciales servent les relations politiques, souligne Ali Rastbeen, président de l'Académie de géopolitique de Paris, d'origine iranienne. La France, ce n'est pas que Total, Peugeot ou Renault, c'est aussi l'indépendance, l'égalité, les droits de l'homme, le droit des femmes. » Selon lui, la population iranienne a une vraie appétence pour une présence française, d'autant que « la France n'est vraiment plus présente au Moyen-Orient, que ce soit en Irak, en Syrie et même au Liban »

Mais il existe également un ressentiment contre des entreprises françaises qui se sont éloignées de l'Iran pendant les sanctions, raconte un journaliste de Téhéran. Il décrit un sentiment de trahison éprouvé par les Iraniens quand il n'a plus été possible de trouver des pièces détachées de chez Peugeot ou quand les produits cosmétiques n'ont plus été distribués que par des pays du Golfe qui les surtaxaient. Quatrième partenaire commercial en 2000, la France n'est plus que quinzième. (Avec L'Expansion, les Échos, France 3)