Le président André Villiers a dirigé une séance relativement calme empreinte d'apaisement à la veille des fêtes et de la trêve (DR)

 

 

André Villiers, le président du département, résume calmement, en aparté et en une phrase, assis au coin d'une table dans le cellier de la préfecture.

"À quoi sert de définir une stratégie ...? D'avoir une vision ....? Une politique ...? Lorsqu'on coche les cases obligatoires et incontournables de nos obligations légales, il ne reste plus rien.... pire, il nous manque de l'argent pour pouvoir boucler le budget. Alors, dans ces conditions, il faut être réaliste et pragmatique. Nous n'avons pas d'autre choix. Palabrer ne mène à rien, c'est du temps perdu ..."

Constat froid voire glacé, assez terrifiant d'impuissance malgré les désirs, comme dans le Soleil se lève aussi d'Hemingway. Le département appelé à disparaître à l'horizon 2020, serait-il déjà mort ? Mort politiquement, mort idéologiquement, mort humainement, mort symboliquement ?

En cette fin d'exercice, le conseil départemental cherche 9 millions d'euros pour pouvoir équilibrer son budget 2016, en cours de préparation. Il sera voté au mois de mars. Le 15 janvier, la prochaine assemblée plénière débattra des orientations budgétaires. Mais à quoi bon .... si ce n'est le respect de la loi qui s'impose aux collectivités dans l'exercice de la procédure budgétaire.

 

L'Yonne blacklistée

 

L'Yonne n'est pas un département riche, cela se saurait. Thomas Jefferson le troisième président des États-Unis au début du 19è siècle, l'avait noté dans son carnet de voyage, en observant défiler nos campagnes à petites parcelles et les bourgs rachitiques à bord d'un train.

Blacklisté en queue de peloton des départements vertueux sur le plan financier et budgétaire, le département de l'Yonne n'est plus en capacité d'autofinancement. Il arrive en queue de peloton dans l'hexagone et fait partie des cinq départements à espérer une aide exceptionnelle de l'État, par une modulation des charges afférentes au RSA (revenu de solidarité active) complément de ressources aux démunis et l'éventuelle conservation des recettes liées aux droits de mutation.

De réunion en réunion, les élus de la majorité, comme de l'opposition, scrutent toutes les lignes budgétaires afin de débusquer d'éventuelles économies. Le mouvement associatif globalement a déjà vu l'année dernière les subventions diminuer de l'ordre de 20 %. Et ça va continuer quitte à remettre en cause des emplois aidés d'éducateurs. Dans le domaine social, domaine essentiel des compétences du conseil départemental (70% des dépenses), la réduction des effectifs est en cours et pose des problèmes. 

Comment alors trouver les 9 millions d'euros pour équilibrer le prochain budget ?  Réaliser d'autres économies par la suppression d'actions choisies (la filière truffe à Noyers, la coopération avec la Géorgie, le financement pour 150 000 euros de places à l'AJA), la réorientation globale de la politique menée avec des coupes claires douloureuses et des choix forts ? Ou encore, se tourner vers l'État qui asphyxierait les collectivités par la réduction des dotations globales de fonctionnement qui vont s'étaler jusqu'en 2020 ?

Enfin, recours à des demandes d'aides exceptionnelles (c'est fait) et en dernier ressort - car quelqu'un doit payer - levée de l'impôt ? À nouveau encore et encore, comme l'année dernière tranférant la douloureuse sur le foncier dont l'augmentation fait très mal aux classes moyennes ?

lI reste aussi la baisse de l'investissement, pour restaurer la capacité d autofinancement nette qui est devenue déficitaire dans l'Yonne.
Il nous souvient que le Jovinien Nicolas Soret, lors du débat budgétaire 2015, avait pointé que le département payait des agents pour aller collecter les déchets sur les voies départementales, notamment sur les aires de repos. Or, la com com du Jovinien passe, tous les jours, avec ses camions poubelles devant les mêmes aires.

Selon l'élu socialiste président de la com com, il pourrait très bien, avec une petite convention légère, faire ce boulot là d'autant que ce n'est pas ça qui va déséquilibrer les tournées selon lui. Et le conseil départemental le paierait au prorata des tonnages collectés. Ainsi le département ferait une économie de ressources humaines, ou plus exactement dès lors qu'il ne peut licencier des fonctionnaires, pourrait les utiliser à d'autres tâches et missions.

 

Les bras armés tordus

 

Les élus se cassent la tête de manière pathétique parfois, pour dégoter l'introuvable trésor de guerre qui résoudrait - provisoirement - les problèmes. Ou de faire parler l'imagination comme Christophe Bonnefond (Auxerre Venoy) qui voudrait relancer la déviation sud en proposant de commencer par construire un pont alors que deux ouvrages d'art sont prévus. Ou d'appeler les comcoms et agglos à souscrire au schéma haut débit (il n'y en a que 11 actuellement) qui n'a pas encore été validé par l'État pour un défaut initial en février 2014.

Valérie Leuger, conseiller  départemental LR, très impliquée comme la plupart des nouveaux élus qui ont renouvelé à 75% l'assemblée départementale en mars 2014, a posé la question, vendredi, en séance plénière, de la récupération des sommes mises à disposition par le Département à Yonne Active Création, bras armé du département, avec Yonne Développement et Yonne Équipement, dans le domaine du développement économique, compétence qui sera celle de la grande région dorénavant, loi NOTRe oblige, à partir du 1er janvier 2016.

Ces sommes qui, en dix ans, représentent environ 2 millions d'euros ont servi et servent à YAC pour prêter de l'argent aux entreprises. Une fois les emprunts remboursés, ces sommes devraient être restituées au Département le 1er janvier 2016, estime Valérie Leuger.

Son collègue Christophe Bonnefond rétorqua que cela pourrait mettre en difficulté des entreprises voire des emplois. Formule saillie saisissante et culpabilisante. Pour Valérie Leuger l'argument ne tient pas. Cela ne peut pénaliser les entreprises car on parle d'argent déjà remboursé à YAC. André Villiers prudent, écarta la patate chaude et dit attendre les directives (d'application) pour y voir plus clair.

Mais alors que vont devenir Yonne Développement, Yonne Équipement et Yonne Active Création, les trois associations bras armés du Département en matière de développement économique et d’emploi ? Dès lors que la compétence économique est dévolue par la loi aux seules régions.

Nicolas Soret (Joigny) indiqua devant l'assemblée que la Comcom du Jovinien qu'il préside, était prête à entrer au capital (et peut-être d'autres comcoms aussi) pour autant que la région Bourgogne Franche-Comté se substitue au Département dans la gouvernance des trois satellites. Le Département devra céder deux tiers des actions qu’il possède dans les trois organismes dont le destin est en points de suspension.

André Villiers le visage madré, redoute que des territoires soient laissés pour compte avec ce nouveau dispositif qui n'est pas encore en place. Il entend bien conserver un tiers du capital. Conservant un pied symbolique (?) dans le domaine de la compétence économique. S'agira-t-il d'une minorité de blocage ?

La rentrée de janvier promet d'être chaude. Ou plutôt froide. Comme une douche. En attendant le père Noël va passer dans les chaumières. Espérons qu'il n'a pas trop grossi pour passer dans les cheminées. Ce serait le comble.

 

Pierre-Jules GAYE

 


Valérie Leuger (Hauts d'Auxerre) : quid des prêts du Département à Yonne Active Création ? (DR)

 

Nicolas Soret (Joigny) prêt en tant que président de la comcom du Jovinien à entrer au capital de Yonne Active Créative avec la région (DR)

Malika Ounès, vice-présidente (Auxerre-Monéteau) a présenté le rapport sur les nouvelles technologies de l'information (DR)

 

Anne Jérusalem (Tonnerre) et Françoise Roure (Joigny) DR

 

L'ordre du jour : des dossiers techniques en cascade (DR)

 

Les hauts fonctionnaires du CD 89 : tous les services sont à double commande, un élu et un gestionnaire, l'un est censé contrôler l'autre et inversement (DR)

 

 Les conseillers départementaux en session vendredi, dans la Pyramide place de la préfecture (DR)