Jean-Marc Nobilo, directeur du Centre de formation de l'AJA (DR)

 


Baptiste Malherbe, amoureux du club depuis gamin, de responsable de la communication arrivé à l'AJA en juin 2006 en provenance de Gueugnon, est monté en grade : directeur délégué adjoint avant d'être écarté l'année de la descente en Ligue 2.  Puis directeur général après un passage éclair à Lorient où Guy Cotret est allé le chercher. Il était aussi recruteur en chef jusqu'à l'année dernière puisque c'est lui qui animait la cellule de recrutement. Aujourd'hui la cellule composée de 7 observateurs est coordonnée par JL Escayol et A Pascalou, depuis le mois de novembre 2014 (DR)

 

Le torchon ne brûle pas encore, mais le conflit entre le directeur du centre de formation et le directeur général de l'AJA, est réel et grave. Le premier regrette publiquement que le second lui mette des bâtons dans les roues au quotidien et "souhaite orienter la formation dans une orientation qui n'est pas conforme à la formation d'une manière générale et encore moins en rapport avec l'histoire de la formation à l'AJA". Et cela dans un contexte concurrentiel de plus en plus difficile.

Ce n'est pas nouveau ni original. Les relations n'ont jamais été faciles d'une manière générale, entre l'administratif et le sportif. La tradition à l'AJA pendant des décennies fut la prééminence du sportif incarnée par Guy Roux, au travers de son statut de manager à l'anglaise car c'est Outre-Manche qu'il a appris les bases du métier.

En clair, Baptiste Malherbe et Jean-Marc Nobilo ne sont pas sur la même longueur d'onde et ce dernier l'a fait savoir par une mise en garde (lire ci-dessous sa déclaration) car il estime que la ligne rouge a été franchie.

On peut dire que deux logiques s'affrontent. L'une administrative et gestionnaire, l'autre sportive.

L'enjeu : Malherbe (autrement dit Cotret et le conseil d'administration de la SAOS) souhaite réduire le budget du centre de formation de 4, 5 millions environ à 2,5, la saison prochaine, au cas où l'AJA ne monterait pas en Ligue 1. Ce qui impliquerait de revoir toute l'organisation, de réduire les effectifs de joueurs enrôlés au centre de formation et l'encadrement.

Baptiste Malherbe afirme agir dans l'untérêt supérieur du club et avec l'assentiment du Président et des membres du conseil d'administration. "Tout le monde connaît les difficultés financières de l'AJA et des baisses du budget actuel et à venir."

Ils sont environ 65-70 jeunes actuellement au centre de formation de l'AJA. Ils furent 90 à l'époque de Bernard David. Aujourd'hui, Baptise Malherbe veut amputer l'effectif de 22 joueurs au prétexte qu'il y aurait donc trop de joueurs au centre de formation et notamment chez les 16-17. Ils sont en effet 35.

Jean-Marc Nobilo qui a instauré une nouvelle méthode, plus scientifique, de travail et d'évaluation permanente, fonctionne avec des groupes larges, permettant des entraînements qualitatifs avec le staff (préparateur physique, entraîneur des gardiens, entraîneurs des 19 et 17). Cela permet la mise en place d'ateliers de travail (2 ou 3) et favorise la mixité des âges et gabarits dans des confrontations à thème.

La réforme voulue par celui que Nobilo nomme et qualifie de "cadre administratif", si elle s'applique, fera voler en éclats l'édifice construit.

 

Nobilo le premier choix de Cotret

 

Successeur de Rafaël Gueirreiro dans des conditions difficiles, Jean-Marc Nobilo, formateur de toujours et ex-entraîneur du Havre en Ligue 2, a été débauché par Guy Cotret dont ce fut le premier acte fondateur après son arrivée à la présidence du club sauvé du dépôt de bilan par un financier Emmanuel Limido.

En deux années, Nobilo a obtenu des résultats objectifs incontestables et inespérés vu le contexte.

La première année, il a maintenu l'équipe B de l'AJA en CFA 2 et a remporté la Coupe Gambardella avec son staff, bien sûr, et les éducateurs qui ont formé cette jeune génération de talents, avec mention à Daniel Duroir qui a eu ces jeunes en 13 et 15.

La deuxième année, il a fait monter l'équipe B en CFA. Et a développé des liens forts avec Jean-Luc Vannuchi assurant une parfaite entente et courroie de transmission entre l'élite du centre de formation et le groupe pro.

Cette troisième année, le maintien de l'équipe B en CFA est en bonne voie après un début de saison remarquable et inattendu dans un groupe difficile avec de grosses écuries. Par ailleurs toutes les équipes de jeunes sont en haut de tableau, le pompon étant tenu par les - 17 ans (U 17) de Jérémy Spender leaders de leur championnat, une cuvée qui promet. Ce n'est pas rien. Idem pour les -15 entraînés par David Vandenbossche.

Guy Cotret a toujours affirmé sa plus totale confiance dans celui qu'il est allé chercher.

Pourtant, depuis un certain temps, les signes négatifs s'accumulent au Centre de formation de l'AJA dont tout le monde s'accorde pour dire qu'il a été et est surdimensionné (un investissement de 9 millions d'euros financés aux 3/4 par les collectivités)

D'abord, la cession de la direction et de la gestion des études à une société privée parisienne, spécialisée en cours par correspondance. Elle a vite jeté l'éponge. La pyramide, les Ferreri, Boli, Cantona, Dutuel, c'était une autre époque.

Depuis la rentrée de septembre 2015, tous les joueurs-élèves sont scolarisés au collège-lycée Saint-Joseph. Retour dans le public (même si St-Jo relève du privé et du patro au travers du père Joël Rignault). Il faut savoir qu'une alternative existait : le collège Paul-Bert en face de l'AJA et le lycée Fourier qui s'engageait à fournir les professeurs. Aujourd'hui, les jeunes scolarisés à Saint-Jo qui avait la préférence du père Joël Rignault dépositaire des valeurs de l'Abbé-Deschamps, passent 50 minutes par jour dans les cars, autant de temps perdu.

Objectivement, les cours dispensés à Saint-Jo dont le proviseur est un grand afficionado de l'AJA, ont profondément modifié la façon d'entraîner au centre de formation.

Les conditions d'entraînement ont régressé et sont désormais du même ordre que le sport-études de Fourier du point de vue des horaires d'entraînement. Le mardi au lieu de s'entraîner à 10 heures, les joueurs s'entraînent à midi et déjeunent à 14 heures, puis s'entraînent à nouveau à 15h30, obligés parfois d'aller sur le synthétique pour profiter de l'éclairage. Nous n'allons pas ici évoquer le jeudi (10h-11h30) propulsé à 16h30 non plus que le vendredi où à St Jo on bosse à fond jusqu'à 13 heures avant de partir en week end.

À quoi sert de se doter d'un outil extraordinaire d'entraînement (et de le vanter pour le vendre) si ce n'est pas pour en profiter ...?

Ensuite la non réalisation de projets voulus par Emmanuel Limido, à savoir la mise en place d'un système d'offres de prestations de formation de joueurs, de cadres et d'entraîneurs.

Fabrice Hérault, premier directeur général de l'ère Limido, viré par Guy Cotret parce qu'il a estimé qu'il emmenait le club dans le mur car il ne prenait pas les décisions utiles de réductions des coûts, a été missionné par Emmanuel Limido à l'international afin de nouer les contacts utiles et "vendre" l'AJ Auxerre en terme de prestations et pourquoi pas au-delà : vente du club. C'est en cours.

 

Le rang du Centre de formation en jeu

 

L'avocat administrateur de la SAOS AJA, Jean-Luc Michaud, représentant Corinne Limido en phase de succession après le décès de son mari, a réussi à expliquer, dernièrement, dans une même interview au quotidien local, une chose et son contraire : il y a 12 touches d'acheteurs intéressés... mais il ne veut pas vendre, ce n'est pas l'objectif. Comprenne qui pourra.

Et puis, un kinésithérapeute a quitté l'AJA au centre de formation pour convenance personnelle. Or pas question de le remplacer (économie oblige).

Reste Darras à 2/3 temps. Il se trouve que le classement des centres de formation dont se vante l'AJA car elle figure encore en bonne position au top, dépend de critères objectifs d'équipement, d'encadrement et de résultats obtenus. Or un des critères est qu'il faut un kiné à plein temps.

Dans le même ordre d'idée, un autre sujet de préoccupation est la nécessité d'avoir deux formateurs. Nobilo et Turpin ont le titre. Or Turpin prend sa retraite à la fin de l'année. Yohann Radet devrait décrocher son diplôme prochainement. Et Spender, un homme qui a une capacité de vision club, devrait suivre l'année prochaine.

Si Nobilo quitte l'AJA, avant le terme de son contrat qui court sur quatre ans (Juin 2013-Juin 2017), il manquerait un formateur. Pas grave direz-vous. Sauf que dans les critères de classement des centres de formation, cela compte.  Autrement dit, l'AJA de centre de premier choix catégorie 1A, pourrait rapidement dégringoler en catégorie 2 ou catégorie 3. L'enjeu ? Le classement national, les subventions, les droits (plus de candidats joueurs).

Enfin, il faut savoir que TOUS les entraîneurs du centre de formation de l'AJA sont en fin de contrat et pas un seul d'entre eux n'a été contacté par Guy Cotret président de l'AJA. Seul Jean-Marc Nobilo a un contrat qui court cette année et l'année prochaine.

Pas sûr. Nobilo n'est jamais resté longtemps dans un club. S'il devait avoir un point faible, ce serait celui-là.

Or pour constuire la durée et la stabilité sont des piliers indispensables. Les remises en cause permanentes avec changement de règles du jeu au gré des circonstances ne sont pas favorables. La formation, ADN de l'AJA est-elle entrain de muter génétiquement ?

 

Pierre-Jules GAYE

 

 

Extrait d'une coupure de l'Yonne républicaine du samedi 26 décembre en page sportive (DR)