L'association pour la Sauvegarde de la Puisaye rassemblait facilement plus de 3 000 personnes lors des assemblées générales. C'était il y trente ans. Fondée en 1987, l'association entend préserver l'environnement visuel et sonore en Puisaye-Forterre ainsi que son patrimoine.

Aujourd'hui, et plus que jamais, on l'aura compris, l'éolien est au centre des débats. Ce qui ne fait aucune ombre aux nombreuses autres préoccupations des membres de l'association en hausse, cette année (environ 130).

L'objectif de la réunion débat organisée, samedi en fin de matinée à Thury près de Lain, était de partager les connaissances et informations afin de sensibilier les uns et les autres aux enjeux de l'éolien qui pointe le nez au hasard des virages et des collines.

À travers témoignages et expertises de divers intervenants dont Jean-Marie Virely, chercheur au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), Charles de Couessin, nouveau vice-président de l'association Pour la Sauvegarde de la Puisaye-Forterre, une vie professionnelle dans l'aviation civile, Stéphane Simpson, président de la FNAIM 89, Régis Doin, adjoint au maire de Fontenoy, Claude Conte maire de Thury, Jean-Philippe Saulnier-Arrighi, président de la communauté de communes de la Puisaye-Forterre, maire de Moulins-sur-Ouanne, Laurent Delorme président de l'association Pour la Sauvegarde du territoire, Isabelle Froment-Meurice vice-présidente de conseil départemental, adjointe au maire de Villiers-Saint-Benoît et Jacques Maruéjol, animateur médiateur de la table ronde, conseiller municipal de Sainte-Colombe-sur-Loing.

L'objectif était d'informer et de mettre sur la table tous les éléments connus du dossier. Et ce fut fait de manière intelligente et dans le respect des points de vue des uns et des autres, pendant que deux hirondelles rustiques de fenêtre faisaient le printemps dans l'encadrement. Sans doute les plus familières car elles vivent au plus près de nous mais hélas c'est une espèce en voie de disparition. Près de 50% d'entre elles ont disparu selon la Ligue de protection des oiseaux qui a tiré la sonnette d'alarme il y a quatre ans.

Une preuve tangible que si Thury est menacé par le jaillissement de mats sur les collines alentours qui dessinent de sublimes plaines  de culture, la présence de ces hirondelles survivantes est un témoignage de préservation et de vitalité incroyable.

 

 On se demande ce que pensent ces deux hirondelles rustiques de Thury des grands mats perchés qui jaillissent dans le paysage ailleurs pour le moment...  ? (DR)

 

 

Et pourtant, la communauté de Thury lutte pour se maintenir dans un contexte difficile.

Si une classe va fermer, à la rentrée prochaine, dans ce village de quelques 500 habitants où l'internet rame en très haut bas débit ce qui est très pénalisant notamment pour l'agriculture, les projets et la volonté des élus ne manquent pas.

L'église Saint-Julien dont la façade impressionne, a été l'objet de travaux de couverture à hauteur de près de 500 000 euros. C'était indipensable pour préserver ce patrimoine qui est aussi un lieu de culte fréquenté. Lors des travaux, des surprises heureuses, telle une porte ont été exhumées.

Les travaux ont permis de reprendre la charpente et de changer la toiture. Le coût de l'opération s'est élevé à 478.000 euros. Les subventions ne permettaient pas de couvrir tous les frais. D'où l'idée originale lancée par le conseil municipal de Thury. Il a proposé à des mécènes de parrainer une ou plusieurs tuiles. En échange de leurs dons, les donateurs se sont vus proposer de voir leurs noms inscrits sur les tuiles. 1 400 ont été vendues, soit 2% de la toiture.

Autre projet, l'aménagement d'une grande bâtisse à vendre pour en faire un endroit multi-services, café-restaurant-épicerie, lieu de détente et de rencontre.
Ce projet devrait pouvoir être accompagné par la région BFC qui propose des dispositifs de financement allant dans ce sens.

Il est frappant de constater que le repas qui a suivi l'assemblée générale de l'association pour la sauvegarde de la Puisaye-Forterre, fut servi au pied du camion spécialisé dans la restauration de base, garé devant la salle des fêtes, la salle aux hirondelles. En toute convivialité. Des visites de la terrasse de l'église étaient proposées à celles et ceux que ne rebuterait pas l'ascension des marches nombreuses jusqu'au sommet et son panorama magnifique de la campagne environnante.

Alors vous allez dire, quelles sont les conclusions du débat ?

 

Un territoire impuissant par définition

 

Pour faire court, il n'y en a pas. C'est l'impasse. Et aucune réponse n'a été apportée aux interrogations des uns et des autres à commencer par celles, précises et particulièrement pertinentes de Laurent Delorme le président reconduit de l'association.

Le territoire ne dispose pas des outils utiles pour manager le développement de l'éolien, depuis que la loi a changé en faveur de la décision communale. C'est du moins l'affirmation de Jean-Philippe Saulnier-Arrighi, qui au-delà, conseiller régional d'opposition LR, d'une région PS qui a vu son schéma régional éolien annulé par le tribunal administratif de Lyon, ne sait strictement pas de quoi demain sera fait, du moins est-ce l'impression que l'on a eu à l'entendre sur le sujet.

Et puis, de toutes façons, il a d'autres chats à fouetter, d'autres projets. Élu président de la grande communauté de communes de la Puisaye-Forterre au mois de janvier, le maire avocat de Moulins-sur-Ouanne avoue n'avoir pas eu le temps de se retourner d'autant que les choses n'ont pas été préparées sur le plan opérationnel. En outre, il va falloir (pour la comcom) abandonner des compétences car il est impossible de tout faire. Les priorités sont déjà définies, comme celle de l'aménagement d'un hôtel 3 étoiles à Saint-Fargeau, avec l'aide de la région, qui fait tant défaut à la Puisaye. Ou encore projet plus lointain, celui d'une usine biomasse qui utilise le bois des haies de Puisaye, pour chauffer. Sans compter le projet de lier Briare au Bourdon puis Moutiers par les voies navigables de France, levier du tourisme.
De Briare, porte d'entrée sur la Puisaye, le circuit mènerait vers Rogny et ses écluses jusqu'au lac du Bourdon de Saint-Fargeau, avec l'aménagement d'une vraie base de loisirs sur 50 ha avec une vraie autonomie de l'utilisation de l'eau. Puis, direction Moutiers qui, en plus d'étangs, dispose désormais d'une gare du train touristique de Puisaye.

En vérité, le pape par excellence de la Puisaye-Forterre résume sa réponse d'un mot. La Forterre dont le paysage et la réalité se prêtent aux mats éoliens, est l'espace privilégié pour le développement de l'éolien.

Un verdict ? Ou une feuille de route ?

Sachant que la comcom de Puisaye-Forterre n'a aucune prise sur la question, force est de constater que c'est un coup d'épée dans l'eau.

Les questions fondamentales demeurent.

L'énergie éolienne a-t-elle du sens dans un territoire (l'Yonne) le moins venté de Bourgogne Franche-Comté ? Qui pourtant et curieusement, possède le taux le plus élevé d'éoliennes ...? Comment l'expliquer ?

Les terroirs semblent cernés par l'offensive éolienne : Préhy, Saint-Cyr-les-Colombs, Irancy, Forterre, Puisaye... le sentiment partagé est que l'information ne filtre pas et encore moins la concertation. Les avants-projets autrefois vérouillés, sont désormais évolutifs à souhait. Autrement dit, au prétexte de libéralisme, c'est la jungle et sa loi. Sur l'autel de la transition énergétique. C'est n'importe quoi.

 

Pierre-Jules GAYE

 

 

 

Laurent Delorme président de l'Association pour la Sauvegarde de la Puisaye-Forterre

 

 De gauche à droite : Régis Doin, adjoint au maire de Fontenoy, Stéphane Simpson, président de la FNAIM 89, Charles de Couessin, nouveau vice-président de l'association pour la sauvegarde de la Puisaye-Forterre, une vie professionnelle dans l'aviation civile,
Jean-Marie Virely, chercheur au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), Jean-Philippe Saulnier-Arrighi, président de la comcom de Puisaye-Forterre,

 

 

Une salle remplie d'auditrices et  d'auditeurs attentifs

 

 La place de Thury et la façade de l'église Saint-Julien dont les fondations remontent au VIème siècle

 

Une hirondelle ne fait pas le printemps. Deux si. Comme à Thury