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eur découverte ? Une méthode efficace et inédite pour dessaler l'eau de mer.

S'attaquer à cette problématique avec succès laisse présager, dans un futur proche, un accès à l'eau potable plus aisé au milliard de personnes qui n'en bénéficient pas à l'heure actuelle.

La quasi totalité de l'eau présente sur notre planète n'est pas potable parce qu'elle est salée.

Or, briser le lien qui unit le sel de l'eau de mer est extrêmement compliqué.

Pour autant, les chercheurs Adrien Nicolaï et Patrick Senet ont modélisé numériquement une méthode permettant de garantir une dessalinisation efficace.

Des expériences se basant sur leurs travaux ont été menées par la suite aux Etats-Unis par des chercheurs des Universités de Pennsylvanie, réussissant effectivement à séparer le sel de l'eau, à l'échelle nanoscopique.

 



 

Le 26 mars 2018

La surface de la Terre est recouverte à plus de 70% d’eau. Difficile d’imaginer qu’il puisse exister des endroits où boire de l’eau potable est impossible. Pourtant plus d’un milliard de personnes à travers le globe ne peut y accéder. La raison ? Près de 97% de l’eau terrienne est contenue dans des océans d’eau salée. Le processus pour dessaler l’eau de mer est à la fois gourmand en énergie et couteux, les interactions unissant l’eau et le sel étant extrêmement compliquées à briser.

C’est ce que veulent améliorer les enseignants-chercheurs Adrien Nicolaï et Patrick Senet, du laboratoire Interdisciplinaire Carnot de Bourgogne (ICB). Leur étude, conjointement menée avec des chercheurs des universités de Pennsylvanie, a été publiée en février dans la revue Nano Letters.
Les chercheurs ont travaillé avec des matériaux à deux dimensions, une catégorie de nanomatériaux d’épaisseur d’un à trois atomes. Ces fines couches sont exposées à un faisceau ionique capable de percer des trous de la taille d’un atome, faisant de ces matériaux poreux, des tamis nanoscopiques.

Les expériences ont été menées aux Etats-Unis. Elles s’appuient sur les simulations numériques de ces nouvelles membranes filtrantes et sur une modélisation du phénomène réalisées au laboratoire ICB, en utilisant la puissance du Centre de Calcul de l’université de Bourgogne (CCuB). « Cette expertise de modélisation est unique et, chose rare en Europe, nous avons reçu un financement direct de l’US Air Force pour mener à bien nos travaux », commente Patrick Senet.

Grâce à des pores aussi petits, lorsqu’une solution salée est déposée sur ce nanomatériau, seules les molécules d’eau sont capables de passer au travers, les ions formant le sel restant prisonnier de la membrane, séparant ainsi le sel de l’eau.

« En observant attentivement les images de microscopie électronique, nous avons pu modéliser en détail les différents trous dans les membranes filtrantes et simuler le passage des molécules d’eau et des ions. Ce sont des calculs gigantesques avec plus 200 000 atomes à simuler, qui prendraient plusieurs années s’ils devaient être exécutés sur un seul coeur de calcul », commente Adrien Nicolaï.

Si cette méthode de désalinisation fonctionne à petite échelle, un défi d’envergure attend désormais les chercheurs : appliquer cette méthode sur un nanomatériau à deux dimensions plus grand, et donc plus difficile à fabriquer.
L’équipe travaille actuellement sur ce problème, ainsi que sur différentes configurations atomiques des nanopores et de leurs effets filtrants sur l’eau salée qui les traverse. Ils creusent également une autre piste en essayant différentes combinaisons de solutions salées et différentes tailles d’ions.

« La modélisation à l’échelle des atomes du transport des molécules d’eau et des ions au travers des membranes est essentielle pour comprendre et guider les recherches futures », explique le professeur Senet.
Et demain, peut-être serons-nous capable de dessaler l’eau de mer aussi simplement qu’en la filtrant dans une carafe.