Jeff Bersan à droite avec le co-président Stéphane Robert (DR)

 

 

 

 

 

Quelle famille ! Quels éducateurs ! Quel groupe ! Certains les croyaient morts pour de bon.

Dans l'adversité, ce n'est pas l'hallali. Que nenni ma foi, au contraire. On ne se rend pas. Dans l'épreuve, les membres ont fait corps, sans esbrouffe, avec une dignité dépouillée à l'extrême.

À ce point de vue, l'assemblée générale du RCA, vendredi soir, à l'heure du Festival de Musique Catalpa ressuscité et bien lancé par le maire Guy Férez et de la Coupe du Monde de foot, fut un morceau de bravoure.

Silencieux, taiseux mais profond.

S'il y avait eu une mouche on l'eût entendu voler bzzzz. Seuls les bruits feutrés des gamins, ballon ovale en mains et ovalie dans la tête, au fond de la salle, suggéraient la rumeur chaude du stade.

Pas une seule question ne sortit, au bout du bout, d'une salle finalement bien garnie et à l'écoute.

Les rapports s'égrenèrent avec une qualité de propos concis prononcés par des jeunes en majorité, après le rapport moral carré du co-président Stéphane Robert, qui montra qu'il en savait davantage qu'il ne voulait le faire paraître.

 

Le coeur battant du club

 

C'est que le RCA est l'institution auxerroise SDF par excellence. De gros travaux sont en cours depuis la fin de l'été dernier qui devaient être terminés pour la rentrée 2018. Des coups durs imprévus au niveau des travaux qui ont pioché de l'amiante, les intempéries et des retards de fournisseurs ont plombé, psychologiquement le plan.

Le bâtiment essentiel, coeur battant du club, ne sera livré, au mieux, qu'en mai-juin 2019.

En un mot : encore une saison sans. Dans l'inconnu et l'impensable.

Sans ? Sans lieu de vie et de convivialité. Sans vestiaires et commodités utiles. Sans buvettes qui chantent et rapportent espèces sonnantes et trébuchantes. Sans parkings. Sans vraie entrée - encore que ... No man's land.

Ce n'est évidemment pas Sarajevo.

Mais le changement des habitudes et la perte des repères révèlent la fragilité des uns et des autres ainsi qu'une forme de descente aux enfers. Ou plutôt au pays des paumés.

Sur les conséquences psychologiques et psychiques de cette blitzkrieg post moderne, qui dure, sans obus ni trous dans les terrains, nous passons le cuir chéri à l'ami Joël Laporte, troisième ligne d'autrefois en pays Gersois et Montpelliérain, grand connaisseur et amateur pur, qui sait comment sonder les corps défendants.

 

Fidèle au coeur de l'hiver

 

Jeff Bersan, le co-président ancien joueur ouvreur teigneux, qui incarne si bien les valeurs du rugby et du RCA, homme de répondant et de parole - si rare de nos jours - avait annoncé de longue date qu'il arrêtait au terme de cette saison.

Non qu'il n'avait plus envie. Mais son épouse, une fidèle de l'hiver, le long de la lice, qu'il pleuve ou vente ou fasse soleil, après une vie de sacrifice rugbystique, avait fixé l'échéance - depuis un certain temps -, en désespoir de cause il faut le dire. Et pourquoi n'aurait-elle pas le droit de pouvoir, elle aussi, profiter enfin, de son mari, les week end et en semaine itou ?

Tout cela pour dire que les Copains, c'est léger, mais important finalement, dans la vie.

Pascal Pic et Jeff Mark, autres troisièmes lignes de légende des Verts et Rouges - il n'y a que cela qui compte le rouge et le vert -, ont pris leur courage à deux mains. Ils sont allés voir Madame Bersan. Et l'ont convaincue de reporter d'un an la délivrance.

On la connaît un peu. Bien sûr elle a du reconnaître, intelligente, la pertinence des arguments amenés : Jeff ne peut pas partir sans que le chantier ne soit terminé, lui qui a conçu avec d'autres le projet. Jeff ne peut pas partir au moment où le RCA est SDF institutionnel. Jeff ne peut pas partir au moment où tout est difficile.

 

Et pour le pire ...

 

Qu'il nous soit permis d'avancer que ce ne sont pas les arguments, certes de poids, qui ont compté. Mais l'amour qui unit une femme et un homme pour la vie, pour le meilleur comme pour le pire.

Il n'est pas sûr que dans cette décision soumise, ce soit le pire.

Aussi, merci Madame.

Le RCA vous le rendra, peut-être.

À observer le regard de Jeff pendant les rapports d'activité des équipes de jeunes - la video vaut la peine d'être regardée - le sacré bonhomme a réussi la transmission. Les jeunes et l'avenir sont le credo de cet homme de qualité. Et avec des gars de la qualité d'Austrui la terreur et de Coucheney le pédagogue c'est garanti. La preuve.

 

Pierre-Jules GAYE

 

Le RCA ferait-il peur ... ? (DR)

 

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