A 39 ans, elle a poursuivi l’activité de son mari André, brutalement emporté suite à une opération : commerce de chevaux et viande en gros.

Ses obsèques auront lieu, lundi 7 novembre, à la cathédrale d’Auxerre, à 15 heures.

Avec sa disparition, s’efface en pointillé un pan de l’histoire locale, qui mérite mémoire. Le couple Guinant, marié en 1951, habitait une demeure située à l’angle de la rue du Moulin-Président et de l'avenue Bourbotte au numéro 3 à Auxerre, devenue, aujourd’hui, le 1 bis après la vente de la propriété et la construction d’immeubles contenant une soixantaine d’appartements de standing. La villa Alexandrine livrée en 2009, dans le prolongement du pont Jean-Moreau, pont de la Tournelle. Un quartier vivant et animé. La propriété au 3 avenue Bourbotte comprenait une demeure indépendante ainsi que des box, écuries et un petit manège. C’est là que les jeunes chevaux effectuaient leurs premiers pas avant d’aller aux prés à Augy et à Champs-sur-Yonne, sur surface totale de 6 hectares.

LES TRACTEURS VIRENT LES CHEVAUX

André Guinant était un passionné de chevaux. Outre le commerce de chevaux - un marchand de chevaux est un intermédiaire entre les éleveurs de chevaux et les cavaliers qui les montent, dont le métier est de valoriser des chevaux pour les revendre - qui s’estompa avec la multiplication des tracteurs ; il vendait et distribuait de la viande en gros dans l’Yonne et les départements limitrophes. Parallèlement et naturellement, il a développé une activité de chevaux de course, de trot attelé et trot monté, sans compter les concours hippiques. Le couple Guinant faisait tout ensemble et ils partaient parfois loin roulant toute la nuit, pour participer à une course à Cannes. André Guinant était très proche des chevaux sous tous les aspects. Il vivait littéralement avec eux au quotidien et en prenait soin comme la prunelle de ses yeux. Sous l’oeil de Hortense.

Une anecdote était racontée par Hortense qui mettait en évidence cet amour de la bête. Un cheval plus tout jeune, avait la manie quand il courait, de taper la patte avant avec la patte arrière alors qu’il semblait présenter quelques dispositions pour le trot. Avec un maréchal ferrant, ils cherchèrent à trouver un remède à la cause. Le maréchal-ferrant est un artisan dont le métier consiste à ferrer les pieds des chevaux et autres équidés et à s'occuper de leur parage. Arrivé à Cagnes-sur-Mer pour une course, son cheval fut moqué mais André Guinant exigea du maréchal ferrant local qu’il pose un fer plus lourd à la dite patte arrière, ce qui provoqua dans un premier temps le refus de l’artisan puis sa désapprobation. Le cheval gagna la course.

AUXERRE ET VAUGIRARD

Les Guinant emmenaient chevaux et viande à Vaugirard à Paris pour leurs activités de commerce et de distribution dans plusieurs départements. Ils pouvaient être abattus à Auxerre non loin de leur exploitation et bercail. De 1944 à 1966, le hangar de la Maladière a accueilli un abattoir. Après le décès de son mari, Hortense, contre bien des avis contraires, décida de poursuivre les activités et s’associa à un ami de l’Oise pour la gestion des chevaux de courses et leur progéniture. En 1966, Hortense faisait figure de pionnière et d’exception dans ce département rural de l’Yonne relativement pauvre, où les femmes étaient loin de la possibilité de l'émancipation. Elle a sorti des cracks qui ont remporté des courses dont un tiercé dans les années 80, qui la vit bondir de joie. Un Noël aux couleurs de magie à Chassy avec une autre belle récompense.. Avec une partie de la dotation, elle s’en alla acheter une Porsche qu’elle conduisait tranquillement, avec plaisir. Au nez et à la barbe des machos.

ORFEU LE FEU DE DIEU

Les cracks ? Ils étaient connus dans le monde hippique : le plus exceptionnel fut sans conteste ORFEU champion du trot monté, fils de ERGOYA, élevé dans l’axe du jardin de Guy Roux, habitant du quartier depuis toujours, sa maison étant orientée en direction des boxs et écuries des Guinant. ITCHEA lui remporta deux courses importantes en 2000. Le trot attelé est un type de sport hippique dans lequel des chevaux trotteurs tractent un sulky, menés par un driver. Ces chevaux doivent trotter le plus vite possible, pour atteindre la ligne d'arrivée en premier, sans jamais se mettre au galop, sous peine de disqualification. Idem pour le trot monté, cavalier sur la bête. Au cours de son parcours, Hortense Guinant, veuve, a trouvé en d’autres veuves, des appuis et une force, et notamment Paulette Billelaudet qui a perdu son mari chirurgien à Courchevel fauché par une chute malheureuse. Hortense adorait l’Italie, le bridge, le golf, les bonnes tables mais tout cela n’était prétexte qu’à entretenir et développer l’amitié autour d'elle avec son compagnon pendant 25 ans, le chinacusien Jean-Claude Robineau. Elle avait un humour dévastateur, au fil du temps, à la hauteur des épreuves qu’elle a subi et toujours su relever.

CLASSIEUSE JUSQU'AU BOUT SUR SON LIT

Notre article sur l’annonce de sa mort, a suscité nombre de commentaires, ce qui peut paraître étonnant compte tenu de son âge (95 ans) qui l’isole biologiquement, nombre de ses amis et connaissance étant passés. Parmi ces commentaires, beaucoup de témoignages de femmes, ex petites filles habitant le quartier des écuries et de cette Hortense toujours souriante, une femme belle une femme d’exception, qualifiée de grande classe jusque sur son lit de souffrance, ces derniers mois, de St Germain à Régennes puis à Perrigny.

Femme de caractère, hors du commun, Hortense Guinant impressionnait par sa grâce, son allure et son sourire permanent sans oublier sa gentillesse, a fait rêver une génération de femmes. Elle était très engagée dans tout ce qu’elle entreprenait et menait au bout ses actions.

Cette femme née dans le Béarn a fait honneur à Auxerre et à l'Yonne.