Les ors éclatants ou cuivrés, les allées couronnées de ramures généreuses, les enfants honorant les lieux de leur pétulance mal réprimée, et les pierres tombales ou stèles où la main du graveur a ajouté un nom au grand registre des passants.

 

Le jour des morts. La fête des morts

 

Fête, elle l’est vraiment sous certains cieux, comme au Mexique ou Nouveau-Mexique, Texas et Californie parmi la population d’origine mexicaine, qui a, au cours des siècles, fait un chatoyant tissu des traditions indiennes et chrétiennes. Car  au lieu de triompher par le choix de l’une contre l’autre, ces coutumes ont cédé à l’attrait d’un mariage que l’on peut qualifier d’amour.

 

Fête vieille d’environ 3500 ans elle commença à l’époque de Moctezuma, le dernier empereur aztèque. Les familles venaient plusieurs fois par an sur les tombes de leurs défunts pour y danser, chanter et y déposer des offrandes afin de prendre soin  de leurs parents partis dans l’au-delà.

Autel de la fête des morts

 

Et les futurs conquérants, les Espagnols, célébraient la Toussaint, le jour de la fête des morts, déposant des fleurs,  du pain et du vin sur les tombes. Alors que les Aztèques pensaient que l’âme des morts reposait dans l’au-delà, les Espagnols croyaient qu’elle flottait autour d’eux  et parcourait la Terre.

 

L’arrivée de Colomb et surtout de ceux qui lui succédèrent apporta un catholicisme fervent qui se greffa simplement sur les coutumes locales. Lesquelles, il faut le dire, ont su imposer une joie de vivre assez surprenante pour des morts. Car ce jour- là ils ont droit à un nettoyage de la tombe et élévation d’un autel où tout est fait pour leur bonheur : des offrandes de fleurs, des objets personnels qu’ils ont aimés, leur plat favori et parfois même un verre de tequila s’y trouvent. Le rapport entre morts et vivants est donc nettement plus tactile que dans la culture catholique en général, et dans certains villages on ne se contente pas de nettoyer la tombe mais on déterre annuellement les morts pour les laver, leur montrer que l’on continue de les aimer.

 

"Catrinas", figures populaires de la fête des morts mexicaine;

Elles représentent les squelettes de dames de la haute société.

 

Une mort qui n’est pas vue comme une fin mais le début d’autre chose avec, aussi, le sens d’une continuité. Bien sûr, la douleur de l’arrachement existe tout comme on souffrirait d’accompagner un ami cher à une gare pour un train qui nous éloignera à jamais. Mais on sait que le disparu, celui qui est parti… est ailleurs et pense à nous. A jamais aussi.

   

Chez nous, même  si la beauté du jour des morts sous nos cieux est plus contenue, on ne peut nier que les cimetières ne manquent pas de ce qu’il faut pour apaiser les larmes de ceux qui viennent de perdre quelqu’un, ni de leur parler de la beauté du monde. Ceux qui sont partis sont vraisemblablement ailleurs que dans ce lieu où ils nous accompagnent ce jour-là pour ne pas nous faire faux bond. Mais là ne reste que le peu de matière qui était le visible. Une parcelle infime de l’être. Quant à tout ce qui était invisible… voilà que sans le support de ce zeste de visible on est tous perdus.

  

C’est leur fête pourtant. Célébrons le privilège de les avoir connus et aimés, d’être nés de leur chair, d’avoir appris de leurs voix, d’avoir ri de leur esprit et pleuré de leur sensibilité. De tout cela, il reste quelque chose en nous. Quant à ceux que nous n’avons pas pu aimer… éteignons à tout jamais notre inimitié, qui s’est éteinte avec eux.

 

Bonne fête à tous nos disparus, si présents pourtant dans nos histoires et souvenirs.

 

                                                                                         Suzanne DEJAER

 

 

 

Poème de Mary-Elizabeth Frye (1905-2004)

 

Do not stand at my grave and weep - Ne pleure pas devant ma tombe

 

 

 

Do not stand at my grave and weep,
I am not there, I do not sleep.
I am in a thousand winds that blow,
I am the softly falling snow.
I am the gentle showers of rain,
I am the fields of ripening grain.
I am in the morning hush,
I am in the graceful rush
Of beautiful birds in circling flight,
I am the starshine of the night.
I am in the flowers that bloom,
I am in a quiet room.
I am in the birds that sing,
I am in each lovely thing.
Do not stand at my grave and cry,
I am not there. I do not die.