Ce fut une exception dans le monde de la presse quotidienne régionale : l’Yonne Républicaine, le seul journal dont le capital soit détenu à 100% par ses salariés.

Fac similé numéroté à l'occasion du Cinquantième anniversaire de l'Yonne républicaine

Il fut créé par arrêté préfectoral le 24 août 1944, jour de la libération d’Auxerre, et remplace alors le Bourguignon, suspendu pour avoir paru sous l’Occupation et conformément aux ordonnances du gouvernement provisoire de la République siégeant à Alger.
Le premier numéro est diffusé deux jours plus tard et sort de l'imprimerie de la rue René-Schaeffer, à Auxerre. Ce jour là, "L'Yonne Républicaine" prend la suite du "Bourguignon" qui existait depuis 80 ans à Tonnerre.
A la libération, le conseil d'administration de "L'Yonne Républicaine" était composé de représentants des différents mouvements de la résistance et de membres du personnel, gestion assurée sous forme de société coopérative de consommation.
En 1955, le conseil d'administration fut amené à transformer la société en coopérative ouvrière de production, sans modifier la ligne directrice du journal « ouvert à toutes les tendances ». 

Initialement dirigé par des représentants de plusieurs mouvements de résistance, l’Yonne Républicaine adopte les statuts d’une Société coopérative ouvrière de production en 1955 et est dirigée par Louis Clément jusqu'en 1985.

Toutes les catégories de personnel sont représentées au sein du conseil d'administration et chaque salarié devient sociétaire au bout de deux ans.

Louis Clément (au centre) avec des membres du comité d'entreprise en 1981, de gauche à droite, Gérard Collin Bernadette Evezard, Daniel Marmagne, Pierre-Jules Gaye, André Gérardin et Marie-Claude Bailly

Les bâtiments de la société commençaient alors à se faire trop petit pour l'entreprise grandissante, si bien qu'en 1965, l'entreprise décida de la construction d'un immeuble, avenue Jean-Moulin, entièrement dédié à l'entreprise, toujours situé à Auxerre. Cela permit alors l'installation d'une rotative de type Wifag et de réaliser les premiers tirages. Dix ans plus tard, la rotative Wifag fut modernisé par l'introduction de deux nouvelles tours équipées du procédé d'impression offset, si bien qu'en 1979, le dernier numéro de "L'Yonne Républicaine" fut fabriqué en typographie, marquant alors la disparition de la réalisation au plomb.

L'entreprise continua alors son expansion avec, en 1982, la création d'un journal d'annonces gratuit, intitulé "Sens Annonces". Cela fut couplé à l'apparition d'une association pour les radios locales. En 1986, L'Yonne Républicaine arrivait alors directement dans votre boîte aux lettres, avec la création d'une société de portage de journaux à domicile. Durant la même période voit paraître "L'Yonne Magazine", qui est alors diffusé chaque week-end.

Tout numérique

En 1989, l'entreprise grandit de nouveau avec la commande d'une rotative offset Dev, bien plus performante que la précédente. Le logo "L'Yonne Républicaine" voit également le jour. En 1991, le journal s'étend une fois de plus, en proposant alors le portage à domicile en zones urbaines, mais également en lançant deux éditions : une pour le nord et une pour le sud du département. En 1993, le journal passe progressivement au numérique, avec l'achat d'un nouveau réseau pré-presse qui intègre le texte et les images numériques directement au journal et à l'imprimerie. Et c'est en 1994, pour son 50e anniversaire, que L'Yonne Républicaine passe au tout-numérique.

Le quotidien opte pour un format tabloïd dès 1998, compte deux éditions. L'entreprise lance dès 2001 son propre site Internet de lyonne-republicaine.fr. En janvier 2009, l'Yonne républicaine est rachetée par le groupe la Montagne Centre-France.

Son titre phare la Montagne est une allusion aux idées révolutionnaires de 1793, celles des Montagnards, les amis de Robespierre et de Danton. La Montagne a été fondée le 4 octobre 1919 par Alexandre Varenne.

L’objectif du député socialiste était d’affirmer son attachement aux valeurs républicaines mais aussi de se démarquer des idéaux de la révolution bolchevique. De «quotidien de la démocratie socialiste du centre», le journal clermontois devient, en 1931, le «quotidien régional des gauches».

Il est l'un des rares exemples français qui ont reparu sous le même nom à la Libération. Lorsqu’il meurt, en 1947, Alexandre Varenne est remplacé par sa femme Marguerite, qui dirige le journal jusqu’en 1996. Principale publication du groupe Centre France, la Montagne compte aujourd’hui de nombreuses éditions. Le groupe a racheté nombre de journaux du centre et vieznt de se rapprocher du groupe Rossel (Belge) et son pôle français la Voix du Nord. Le groupe Rossel a longtemps été connu pour son seul journal national belge « Le Soir  ». Mais depuis les années ’90, Rossel est un groupe de presse beaucoup plus vaste, caractérisé par une approche multimédia et une large diversification qui couvre autant la Belgique que le nord de la France. 16 quotidiens, une trentaine d’hebdomadaires et une demi-douzaine de mensuels. Une croissance qui s’est faite progressivement au fil des ans, mais qui s’est considérablement accélérée au cours des années 2000.

Rossel majoritaire dans la nouvelle holding

Depuis la création de la Fondation Varenne et son accession au poste de dirigeant suprême, l'ancien journaliste Jean-Pierre Caillard s’est trouvé progressivement en position de contrôler, directement ou indirectement, un peu plus de 40% du capital de Centre-France du Crédit agricole (12,5 %).

La constitution de la holding associant les groupes Rossel et Centre-France prévoit des apports de capitaux respectifs des deux « mariés ». Via la société Voix du Nord  Investissement, Rossel mettrait au pot quelque 70 % du capital de La Voix du Nord.  Centre-France amènerait 58% de son capital, dont les parts contrôlées par JPC. Plus conséquent, l’apport de Rossel lui assurerait une majorité dans la holding, et donc sa direction, qui sera assurée par Jacques Hardoin, l’actuel directeur général de La Voix du Nord.

Pour Jean-Pierre Caillard, l’objectif serait de réaliser ses avoirs. Une fois la holding officiellement constituée (sans doute fin septembre), il vendrait ses parts. L’opération ne s’est pas préparée en un jour, mais le secret a été d’autant mieux gardé que très peu de personnes étaient dans la confidence des intentions de JPC. Quelques intimes, Gilles Crémillieux, président de l'Yonne républicaine, son « directeur de cabinet », Marc Rivoire, le notaire « historique » de La Montagne, et le courtier chargé de vendre au mieux-disant.

Les membres de la hiérarchie de La Montagne n’ont été mis au courant que très tardivement. Et il a fallu une « fuite » dans les milieux de la finance pour qu’une journaliste des Echos ait vent de l’opération et sorte l’affaire, le 30 juin. L’information a été confirmée, dès le lendemain, par un communiqué conjoint des deux groupes.

S’il se concrétise, le projet donnerait naissance à un nouveau groupe média régional français représentant plus de 800.000 exemplaires vendus chaque jour, un chiffre d’affaires de près de 450 millions d’euros, plus de 850 journalistes et environ 3.400 collaborateurs, précisent les deux groupes de presse dans un communiqué. Le nouvel ensemble rassemblerait notamment les titres La Voix du Nord, La Montagne, Le Courrier Picard, La République du Centre, Le Populaire du Centre ou L’Yonne Républicaine, « tous leaders sur leurs marchés respectifs ».

Le mot des patrons

Bernard Marchant, PDG du Groupe Rossel : « Comme nous l'avons souvent souligné, il est essentiel dans nos métiers de presse et de média de pouvoir bénéficier d'une masse critique suffisante. C'est vrai aussi pour notre groupe de presse régionale La Voix du Nord, en France.
A l'évidence, les synergies potentielles issues d'un tel rapprochement ne pourront provenir d'une proximité géographique entre les deux groupes. Elles se situeront en revanche au niveau des importants investissements qui restent à réaliser notamment dans le domaine numérique, afin de relever les opportunités de mutation et de croissance que réserve le marché actuel de la presse écrite.
Nous y voyons la possibilité de mettre en place et de financer un programme offensif qui permettra aux différents titres de presse du nouvel ensemble de bénéficier des outils, des ressources et des modèles économiques visant à assurer leur développement et leur pérennité. ».


Jean-Pierre Caillard, Président du Groupe Centre France-La Montagne et Secrétaire Général de la Fondation Alexandre Varenne : « A l'unanimité, le Conseil d'Administration de la Fondation Alexandre et Marguerite Varenne se réjouit et se félicite de l'ouverture de ces négociations qui offrent des perspectives prometteuses de pérennité et de développement pour l'avenir de La Montagne et de la Fondation.
Nous militons depuis des années pour parvenir à un seuil critique de niveau indispensable à nos médias. Ce rapprochement, qui doit se conclure dans quelques semaines, est l'aboutissement d'un travail passionné mené depuis des décennies, reposant sur des valeurs fortes et pérennes comme la proximité locale, les valeurs républicaines et démocratiques, l'interaction grâce aux femmes et aux hommes qui œuvrent au sein des quotidiens et hebdomadaires de notre groupe au service de nos lecteurs, du cross média, du numérique et de l'image. La Voix du Nord est le partenaire de choix qui partage les mêmes ambitions. Je serais très heureux d'une conclusion positive de nos discussions. »

 

La concentration de la presse en France pose un vrai problème de démocratie qu'il faudra régler et dont on ne parle jamais.

Coup de gueule

Ce soir, je suis triste...

Par Gérard Delorme, Samedi 5 Juillet 2008
 
26 août 1944 – 5 juillet 2008. Deux dates qui suffisent à résumer l’histoire de l’Yonne Républicaine. Celle de la liberté portée par les Résistants qui avaient libéré Auxerre ; celle de l’abandon du statut de société ouvrière de production qui marque la fin de l’indépendance. Alors oui, ce soir je suis triste. Triste de voir ce patrimoine, constitué pendant des années par des générations d’ouvriers, d’employés, de journalistes, de commerciaux, cédé à un grand groupe de presse. Triste surtout pour Louis Clément, un des pères fondateurs de la société, qui voit son héritage dilapidé. Patron ouvrier ou ouvrier patron, il était insaisissable, corporatiste, dur en affaire mais respecté. Triste pour les anciens, ses compagnons de route, les Lalande, Bigé, Linderme, Bardin, Mouls, Daudet, Capitaine, Mérat, Pierre, Compérat … qui avaient l’esprit coopératif chevillé au corps.

Triste pour mes anciens camarades journalistes, Charles Rivet, Jean-Claude Charlet, Jacques Pissot , Christian Couronner, Pierre-Jules Gaye et bien d’autres, attachés à l’indépendance de ton qui animait la rédaction. Une indépendance tellement rare aujourd’hui dans les médias. Ce ne sont pas les journalistes de France Télévision qui diront le contraire. Pendant plus de 60 ans, grâce à son statut coopératif, l’Yonne-Républicaine avait su préserver son indépendance. Le journal n’appartenait pas à un grand groupe. C'était une exception. C’était sa fierté de vilain petit canard.

Je suis triste et forcément en colère contre tous ceux (direction, administrateurs, syndicats, comité d’entreprise …) qui ont laissé les clés de l’entreprise à un président qui n’avait pas son permis. Et qui ose parler de partenariat stratégique au lieu de faire un constat d’échec. Je m’en veux personnellement d’être resté inactif après avoir été marginalisé. Nous sommes tous responsables, mais il y a au moins deux coupables. Ce samedi, je ne suis pas allé à la dernière assemblée générale de cette coopérative qui a fait partie de ma vie pendant 36 ans, parce qu'aux enterrements, je n’aime pas croiser les fossoyeurs. Une page se tourne. Le groupe Centre France va élargir son patrimoine d’un nouveau titre, l’Yonne-Républicaine. Les coopérateurs vont devenir de simple salariés ayant perdu la propriété de leur outil de travail et leur pouvoir de décision.

Un paradoxe pour le mouvement coopératif généralement appelé à la rescousse pour sortir de l’impasse les entreprises en difficulté.
 

Discours intégral du célèbre "Paris brisé, Paris outragé mais Paris libéré!" sur la place de l'Hotel de ville le 25 aout 1944 par De Gaulle

Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! Mais Paris libéré !

Il y a 60 ans : la Libération de Paris...
En 1944, la Libération de Paris qui s'inscrivit dans le prolongement direct du Débarquement de Normandie fut un événement de première importance dans le monde entier en raison de son aspect hautement symbolique.

Paris était ainsi la première capitale à s'être libérée elle-même après l'insurrection des Parisiens, avec le concours des FFI de Rol-Tanguy et des hommes de la 2ème DB qui symbolisait toute la France Libre. Fidèle à sa longue histoire, Paris redevenait aux yeux du monde, le Paris de la rue, celui du pavé de la Révolution qui avait vu la Prise de la Bastille et le déclin des despotes.

Pour les alliés, la libération de la capitale française n'était pas un objectif prioritaire bien au contraire. Américains et Anglais n'avaient qu'une hâte : poursuivre sans tarder leur marche vers l'Allemagne (pour entrer à Berlin avant les Soviétiques) et précipiter aussi la fin de la guerre.
Von Choltitz désobéira aux ordres martelés de Berlin persuadé que le führer est devenu fou, Leclerc, lui aussi, désobéira à d'autres ordres avant d'entendre de Bradley : "OK, Leclerc, foncez sur Paris..."
La nouvelle de l'arrivée des troupes de Leclerc dans Paris se répand comme une traînée de poudre. Les cloches de églises de Paris se mettent à sonner, le bourdon de Notre Dame est entré dans la danse le premier.