La foire du 1er mai, célèbre dans les temps anciens, et qui coïncidait avec la fête de Saint-Amatre, se tenait dans le haut du bourg, sur la route des Capucins et sur la vaste place qui sert aujourd’hui aux exécutions publiques (La foire subsistait encore en 1511 (Archives de la Côte-d’Or, B.2607). Le nom de calendes de mai, par corruption chalendemai ou chalandemas fut donné à la place. La porte qui y conduisait fut même appelée Porte des Calendes de mai (Acte de 1237, petit Cartul. Saint-Germain).
La croix qui s’élevait sur la place conserva ce même nom jusqu’au commencement du XVIIe siècle. L'historien abbé Lebeuf dit dans la "Prise d’Auxerre" ( p. 44) : "Il y existe un gros chapiteau roman renverse qui a servi de piédestal à une croix". Ce chapiteau supporte actuellement une statue de Saint-Amatre
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Le quartier faubourg Saint-Amâtre est situé au sud de la ville et à la porte du Temple. Il a vu, depuis un demi siècle, modifier beaucoup sa physionomie. La population s’y est portée; des établissements de commerce s’y sont élevés. La route de Clamecy, qui était autrefois bordée de jardins, l’est maintenant de maisons.
Le « bourg Saint-Amatre » a reçu son nom d’un illustre évêque du Ve siècle qui y fonda un oratoire sous le vocable de Saint-Symphorien, évêque d’Autun, et où il fut inhumé. L’emplacement actuel de la maison Souplet indique celui de l’église de Saint-Amatre et du cimetière public gallo-romain.
Il n’est pas rare de trouver, quand on fouille à une certaine profondeur dans les alentours de cette maison, des cercueils de pierre des premiers siècles chrétiens. Maximilien Quantin en a recueilli lui-même deux composés de portions d’une pierre qui portait une inscription romaine et qui avait été sciée pour cet usage.

Lebeuf rapporte qu’on trouva au dernier siècle dans ce cimetière, proche l’église, un gros bloc de pierre, reste d’un criobole, portant cette inscription :
  Pro salvte Dominorvm
Dedicavit Modesto et Probo cos. 
 

Cette pierre avait servi de cercueil comme les morceaux dont je parlais tout-à-l’heure (Conservée au Musée d’Auxerre, n° XXII).
La date du consulat de Modestus et de Probus fait remonter l’âge de ce monument à l’an 228 de notre ère. Ce n’est pas le seul morceau d’antiquité qu’on ait trouvé sur ce point.
Le cimetière de Saint-Amatre était, selon les légendaires un lieu saint. Les premiers évêques d’Auxerre y furent inhumés. C’est dans le cimetière Saint-Amatre que Mamertin, prêtre païen, venu des pays de Puisaye auprès de saint Germain, s’arrêta, en arrivant à Auxerre, et eut, en dormant, cette vision miraculeuse racontée par Constance, où figuraient les cinq premiers évêques Auxerrois sortis de leurs tombeaux et célébrant l’office divin. Les solitaires s’y retiraient et y vivaient dans des oratoires. Saint Urse, l’un d’eux, était célèbre au commencement du VIe siècle ; il arrêta, par ses prières, un incendie qui dévorait la ville.
Le Chapitre d’Auxerre allait souvent en procession dans l’église Saint-Amatre dont le clergé ne paraît pas avoir été monastique avant le XIe siècle.

L’église, aujourd’hui détruite, avait, en 1791, 63 pieds de longueur; la nef, avec ses bas-côtés, 33 pieds de largeur, et le chœur 18 pieds. Elle avait été reconstruite dans les temps modernes. Le clocher était ruiné. La crypte dans laquelle on descendait par la nef, à droite, avait 24 pieds de long sur 18 de large. Elle subsiste encore en partie et date du XIIe siècle. Le corps de saint Amatre y reposa depuis l’an 860 et y resta jusqu’au XIe siècle, époque de sa translation dans la cathédrale.
Il y a encore un tombeau de pierre encastré dans le mur, et qu’on suppose être celui d’un saint personnage. Derrière l’église existait la chapelle élevée en l’honneur de saint Didier, évêque de Langres, au VIle siècle; ce n’était plus qu’un pressoir en 1790 ; les paroissiens l’échangèrent alors avec le prieur contre un ornement complet qu’il avait fait faire pour la fabrique.

La crypte Saint-Amâtre située dans la cave d'une maison particulière la maison Souplet, là où était l'église autrefois et le cimetière Saint-Amâtre, à ne pas confondre avec l'actuel (DR)

Le faubourg Saint-Amatre se divise en deux parties : 1° la rue en face de la porte du Temple qui conduit au cimetière actuel dit des Capucins et qui est aussi la route impériale n0 65 ; 2° la rue qui, en sortant de la porte du Temple, détourne à gauche et mène à la route de Clamecy. Des rues latérales relient ces deux parties principales.
N’oublions pas une petite chapelle de Saint-Sébastien élevée dans le faubourg Saint-Amatre, lors d’une peste du XVIIe siècle.
Les protestants eurent leur prêche, dans ce faubourg, d’après l’édit de janvier 1561.

Pendant le moyen-âge la physionomie du bourg de Saint-Amatre a bien changé. La construction du mur d’enceinte au XIIe siècle a fait cesser peu à peu l’usage d’enterrer dans la partie du cimetière de Saint-Amatre laissée en dehors, et bientôt chaque paroisse eut son propre cimetière. On établit sur la douve des fossés de la ville un chemin pour conduire de la porte du Temple à la porte Chantepinot. Plus tard, le cimetière extérieur, abandonné, devint un champ cultivé. La promenade actuelle du Temple, la route, les jardins voisins, tout cela n’était que des cultures aux XVe et XVIe siècles.

La croix qui s’élevait sur la place conserva ce même nom jusqu’au commencement du XVIIe siècle. Lebeuf dit dans la "Prise d’Auxerre" ( p. 44) : "Il y existe un gros chapiteau roman renverse qui a servi de piédestal à une croix". Ce chapiteau supporte actuellement une statue de Saint-Amatre.

Une autre partie du bourg, qui était au-dessous du Prieuré, avait le nom de champ du Lendit ou de l’indict, parce qu’il était désigné ou indiqué, indict, pour servir à la foire de la Tannerie ou de la Pelleterie (On l’appelait au XIIe siècle la foire de Tanneto) que Lebeuf rapporte avoir été transférée par le comte Guillaume III, en 1166, auprès du château.
On l’appelait aussi le Champ de l’Orme Billon à cause d’un arbre de cette espèce qui s’élevait en cet endroit.

La fontaine de Saint-Amatre doit aussi venir à son tour au rang des objets intéressants de ce bourg primitif d’Auxerre. Placée au fond de la vallée, au milieu des prés, non loin du moulin Durand, elle alimente encore d’eau les habitants du quartier qui, bien que fort éloignés, étaient, avant l’établis­sement des fontaines actuelles, fort heureux d’y venir puiser à une source saine et limpide. Saint Amatre lui a donné son nom, sans doute parce qu’il la purifia des traditions païennes qu’elle avait conservées. Peu éloignée du temple d’Apollon, elle devait nécessairement servir aux prêtres de ce dieu.
Il y avait auprès, en 1253, un clos et un filandrerium ou filoir appartenant à un nommé Simon, de Saint-Amatre.
L’évêque d’Auxerre, P. de Cros (1350), allant à Avignon, fut reçu au faubourg Saint-Amatre, dans la prairie proche la fontaine, où il harangua le peuple et le clergé.

Le bassin de la fontaine, fort large et profond, est aujourd’hui construit en pierres de taille qui n’ont rien d’antique. Cependant les traditions superstitieuses ne l’ont pas aban­donné. Les anciens racontent qu’il y a au fond une pierre énorme scellant un orifice sous lequel passe un bras de mer; que sur cette pierre sont écrits ces mots: Qui m’ôtera périra! et que si jamais on l’enlève, le faubourg sera inondé. Aussi n’a-t-on jamais pu la soulever malgré les plus grands efforts!

Le prieur de Saint-Amatre jouissait des droits censuels dans le bourg. Son terrier parle de la grande rue allant à Vallan, de la rue d’En-Bas allant au même lieu, de la rue d’Auxerre à la Croix-des-Mars ou rue d’En-Haut, appelée aussi rue des Capucins ; de la rue montant de l’église à la Croix-d’En-Haut; de la rue descendant de la rue d’En-Bas aux Saulces de l’Orme-Billon; enfin, de la rue de la Mouchette ou de la Mouquotte, du nom d’une chapelle. On connaît la grande rue de Saint-Amatre dès 1339. Celle du Four-l’Evêque et une rue, dite rue Neuve, existaient aussi à cette date, suivant le Livre des rentes de l’Hôtel-Dieu. Mais où est la rue devant l’orme des Belles-Filles qui existait en 1440 ?

C’est dans une maison du faubourg Saint-Amatre que le pieux Henri Bargedé, juge criminel à Auxerre, a composé une Histoire d’Auxerre en 2 vol. in-f°, résumée des grands ou­vrages de D. Viole et de Dom Cottron, et un volume sur le Martyrologe auxerrois. Ces manuscrits sont à la Bibliothèque de la ville.

Les Capucins qui furent établis à l’extrémité du faubourg Saint-Amatre, sur la route impériale n0 65, ne datent que de 1606. Parmi les six premiers frères, on remarque le fameux frère Ange du Bouchage, connu dans le monde sous le nom de Henri, duc de Joyeuse. Ces religieux, dont la pauvreté était proverbiale, portaient une robe de laine grossière et de couleur fauve; la barbe longue et les pieds nus dans leurs sandales. Il leur était défendu de se coiffer de chapeaux. Leur capuchon carré, auquel ils doivent leur nom, leur attira, dans l’origine, de grandes tribulations.
Les Auxerrois accueillirent les Capucins avec empressement, et ils n’eurent qu’à s’en louer dans les maladies contagieuses du XVIIe siècle.
L’église du couvent, démolie en 1844, n’offrait rien de remarquable. — Voyez plan de l’ancien couvent en 1750, Alm. de l’Yonne, 1860; et Notice sur le couvent, par A. Lechat, Ann. de 1842.

Le Cimetière dit des Capucins a reçu son nom de l’emplacement qu’il occupe. Il ne date que de 1790. Des accroissements successifs et des améliorations lui ont donné un aspect régulier et décent. Il renferme quelques tombeaux remarquables. Dans un de ses compartiments, appelé le cime­tière Dunand, existe une chapelle monumentale fort massive qui rappelle le legs généreux que fit de ce terrain et d’une somme de 40.000 francs, Mlle Thérèse Dunand, en 1832. La construction de la chapelle n’eut lieu qu’en 1840.

En face, et sur le plateau dit de la Mocquette, a été creusé le réservoir des fontaines de Vallan qui contient 6.282 hecto­litres d’eau. L’établissement de ce réservoir en 1852 fut l’objet d’une cérémonie solennelle et d’une fête organisées par M. Martineau des Chesnez, alors maire de la ville, qui avait réussi à mener à bien le grand projet de conduite des eaux de Vallan (Voyez Relation de la cérémonie, le 7 novembre 1852, Auxerre, 1852, in-8°).

Ces informations sont basées sur l'ouvrage que Maximilien Quantin a écrit vers 1850 et qui traite pour l'essentiel du centre ville historique. (Extrait de auxerre.historique.free.fr)