On prétend le mois de janvier stratégique en ce qui concerne une élection présidentielle ayant lieu fin avril début mai. Les politologues en jugent ainsi à l’examen des élections antérieures mais rien de scientifique ne peut venir étayer cet aphorisme. Puisque nous y sommes, regardons les éléments en présence et examinons les tendances. Les derniers sondages font état d’une remontée de Sarkozy, toute relative et interprétée par rapport à la baisse de Hollande, toute relative également puisque jaugée à l’aune des scores irréalistes prêtés au lendemain des primaires. On savait avec certitude que cet étiage d’automne ne saurait se maintenir. Ces estimations portent sur un premier tour, celles qui prétendent préfigurer le second ne sont que des plaisanteries ou des gadgets. Encore faudra-t-il être présent à la finale. Les enquêtes qui évoquaient le second tour entre Jospin et Chirac en 2002 avant le séisme de triste mémoire sont depuis belle lurette à la poubelle.

Marine Le Pen, François Bayrou ne seront-t-ils pas capables de créer une surprise de premier tour ? Si Bayrou ne rencontrera aucune difficultés pour recueillir les 500 signatures de parrainage, il n’en est pas de même pour la fille Le Pen. Comme à chaque élection présidentielle, le FN par la voix de son représentant, commence à alerter les foules avec ses difficultés pour remplir les conditions du parrainage.

"Marine Le Pen a affiché lors de ses voeux, de vives inquiétudes à propos de la question des 500 parrainages d'élus pour être la candidate du FN à la présidentielle, en réfutant tout bluff mais en refusant à nouveau de révéler le nombre de promesses déjà obtenues." Se disant "loin du compte", la présidente du parti d'extrême droite a brandi le "risque" qu'elle ne puisse carrément pas concourir.

Les conséquences sur le scrutin d’un tel « empêchement » de figurer sur la liste des candidats sont d’ailleurs très difficilement mesurables. La leader du FN déclare « Si d’aventure je ne pouvais pas me présenter, je peux vous assurer que Nicolas Sarkozy perdra l’élection. Mes électeurs se souviendront qu’il m’a empêché d’être dans la course. » Mais revenant aux deux protagonistes qui se claironnent présents au second tour et plus particulièrement à Sarkozy, on peut également penser que les enquêtes d’opinion éprouvent une certaine difficulté à estimer chez lui, les votes masqués. Il s'agit de ceux qui ont du mal à affirmer clairement un choix Sarkozy, qui répugnent à se ranger du côté du proscrit. Les « correctifs » existent mais ne prennent en compte souvent que des attitudes passées. Le phénomène est bien connu pour le FN, relativement nouveau pour Sarkozy il n'en est que plus difficile à estimer. Ainsi, il n’apparaît pas de bon ton dans les salons, mais aussi derrière le bar ou sur le trottoir d’avouer un vote potentiel pour le sortant, pas plus au téléphone du sondeur. Certains ont pu écrire que « l’apparence extérieure du président de la République constituait à elle seule un « crime » social ! » Son « inculture supposée » fait le reste.

« le Président avait disserté sur la célèbre fresque de Zola : les Rougon-Macquart. Ce jour-là, il prononça « RouJon Macquart ». Clins d’œil entendus, coups de coude dans les côtes et scoops dans les dîners en ville : le Président est un crétin. Et la presse entière de moquer ce chef d’État citant si souvent La Princesse de Clèves. « C’est le seul livre qu’il a lu », rigolaient les 37 000 cartes de presse du pays. »

En son temps Jacques Chirac avait été l’objet de sous-entendus semblables mais sa « com » avait rapidement corrigé le tir en accréditant une posture : le bougre lisait du St John Perse à l’intérieur d’albums de Tintin et les Taïnos avec Michel Field avaient terminé le rafistolage culturel, rendant le manger des pommes plus digeste. Ce phénomène « vote caché », les sondeurs n' en apprécient sans doute pas l’ampleur et par conséquent corrigent mal. Ajoutons à propos du second tour « estimé » une facétie supplémentaire de l’éternel prédicateur Jacques Attali. Il déclare au « grand rendez-vous d’Europe 1 », affichant la barbe poivre et sel d'un «professeur autoproclamé, «Cette élection n’est pas jouée», notamment en raison de l'absence de programme annoncé par les deux principaux candidats. Au point, selon lui, qu'«on ne peut pas exclure un second tour Bayrou - Le Pen». Voyez-vous, en ce mois de janvier dit stratégique, les supputations de tout acabit ne manquent pas et, en clair, c'est la bouteille à l'encre.

JLH