D’après Dom Bullet, qui écrivit un Mémoire sur la langue celtique en 3 volumes, Morvand veut dire Montagnes noires et vient de deux mots celtiques mor, « noir »  et ven ou vand, «  montagne ». La même étymologie est attribuée au Morven écossais, montagne du comté de Caithness célèbre dans les poésies d'Ossian.

Terre nourricière par excellence, que ce soit géologiquement, historiquement, traditionnellement…

 

Le lait des Morvandelles a nourri nombre d’enfants dès le XIXème siècle, ceux de l’assistance publique qu’elles prenaient chez elles – « sur place » - ou ceux des riches dames qui ne pouvaient allaiter et les accueillaient alors « sur lieu ». Ces dernières étaient particulièrement choyées et avaient un statut spécial dans la famille, la suivant en déplacement et ayant parfois droit à leur propre servante. Certaines restaient attachées à la famille après la période d’allaitement comme nourrice sèche. La révolution industrielle avait eu raison des ressources des familles paysannes ou des artisans et c’est donc bien naturellement que les femmes vendirent ce bien précieux.

De la même manière, les propriétaires forestiers morvandiaux ont grandement approvisionné Paris en bois de chauffage de 1549 à 1939… 

Le mont Beuvray, autrefois domaine des Eduens, aux flancs boisés de vagues vertes et au sommet plat où, dans l'opppidum de Bibracte, Vercingétorix fut choisi comme chef des Gaules coalisés dans un effort tardif et noble qui rappelle celui des Amérindiens contre l’envahisseur… trop tard hélàs. Le sol du mont Beuvray a encore la mémoire des Celtes libres qui croyaient en l’immortalité de l’âme et sa migration d’un corps à l’autre, en la puissance du chiffre trois, vénéraient le chêne et avaient un mariage d’amour avec la nature.

(Plus loin, en Côte d'or, Alésia, l’endroit où, en 52 avant J-C le monde celtique disparut de la Gaule au profit de la domination romaine. La reddition de Vercingétorix le beau guerrier. La fin d’un mode de vie, imprégné par un autre. Tout le monde n’est cependant pas d’accord et il existe une théorie selon laquelle Alise Sainte-Reine aurait été à tort identifiée comme Alésia  parce que les noms se ressemblent et qu'un poème du moine Herric d'Auxerre, au IXème siècle, à la gloire de Sainte-Reine suppliciée et enterrée sur le mont Auxois, a confondu Alisiia (Alise) et Alésia. Alésia se trouverait dans le Jura, à Chaux des Crotenay. La polémique mérite d’être signalée mais rien n’empêche d’imaginer l’histoire telle qu’on la désire là où les historiens ont voulu la mettre en scène depuis Napoléon III.)

La roche de Solutré, un tremplin de calcaire posé sur des vignes gardant jalousement leur secret, berceau de l’extraordinaire Pouilly-Fuissé. Par beau temps son ascension donne la sensation d’une toute puissance grisante, avec le regard qui peut caresser les hameaux et vignobles, le village de Vergisson dont on reconnaît la roche, la voie romaine, des forêts, le Mâconnais, l’Ain et la Dombes, les Alpes et même le Mont Blanc. Repaire de chasseurs dès la préhistoire en raison de sa situation surélevée, il a assuré une présence humaine robuste et continue. Sa faune et sa flore particulières font de cette roche une sorte de réserve pure, de lieu exemplaire tant pour son histoire dont les racines s’avancent à la fois dans le temps et le sol, que pour ce que le présent y offre aux promeneurs et amants de la nature.

 

                                                                                                                Suzanne DEJAER