Paris, 29 mai 1760 – Paris, 21 janvier 1793

 

Il est né dans la politique, a grandi dans la conscience d’une société sans cesse en évolution et en proie aux remous. Il descend d’une lignée de parlementaires, de noblesse de robe, d’hommes de pouvoir. Il est membre de la loge maçonnique Phoenix,  au Grand Orient de France.

 

A 19 ans à peine il est conseiller au Parlement de Paris par dispense d’âge, ainsi qu’avocat à la prison du Châtelet. A 28 ans il préside la chambre des vacations (Pendant les vacations, une chambre du tribunal ou de la Cour d'appel est chargée de statuer sur les litiges urgents (Lemeunier1969). Lors du retentissant procès du banquier strasbourgeois Kornmann (une surprenante histoire d’adultère, de dot, d’épouse libre et libertine), son avocat lyonnais, le célèbre Nicolas Bergasse, l’honore d'un éloge révélateur « Et vous, qui présidez ce tribunal ; vous, l’ami des mœurs et des lois ; vous, dans lequel nous admirons tous, à côté des talents qui font les grands magistrats, les vertus simples et douces qui caractérisent l’homme de bien et l’homme sensible… recevez mes serments…. »

 

 

Il occupe une charge importante après l’autre : député de la noblesse de Paris, où il fera voter que désormais on ne portera que le nom de famille réduit à sa plus simple portion  – ce qui le fera dès lors renoncer à la mention de son titre et de toute rallonge à son propre nom.  Président de l’Assemblée nationale constituante. Membre et président de l'administration départementale de l'Yonne, puis député. C’est alors qu’avec les plus à gauche des députés il se joint aux montagnards. Il soutient aussi la liberté de la presse et rédige un mémoire dans lequel il résume ses idées sur l'éducation de l'enfance. Celles-ci stipulent notamment que tout enfant doit appartenir à l'État et non pas à ses parents. Le plan d’éducation qu’il prépara alors et qui fut ensuite présenté par Robespierre après son décès ne fut pas adopté. Cependant Jules Ferry fut séduit par plusieurs de ses  idées, comme par exemple l’éducation à partir de 5 ans, aux frais de la République, des garçons jusqu’à 12 ans et des filles jusqu’à 11.

Dans un premier temps, ses opinions le conduisent à s’opposer à la peine de mort que d'ailleurs, le 30 mai 1791, il tente de remplacer, dans un projet de code pénal, par l’emprisonnement. Sans succès car en octobre de la même année, l'Assemblée nationale constituante abolit la torture, mais pas la peine de mort, qui dorénavant aura lieu uniquement par décapitation. Lors du procès de Louis XVI pourtant, il revoit son opinion et, le 20 janvier 1793, bien qu’avec quelques hésitations, vote la mort du roi.

 

C’est ce qui lui coûtera la vie, quelques heures à peine avant que le roi ne perde la sienne : Philippe Nicolas Marie de Pâris, un ancien garde du corps royal, l’agresse verbalement alors qu’ils se trouvent chez Février, le restaurateur au Palais-Royal, lui reprochant d’avoir voté la mort de Louis XVI. Il lui enfonce son épée, qu’il avait tenue dissimulée sous son manteau, dans le côté et s’enfuit. « J’ai froid », se plaint la victime, qui ne survivra que quelques heures.

 

L'assassinat de Lepeltier

 

Derniers moments de Lepeltier - Gravure de Tardieu d'après David

Premier martyr de la révolution, sa mort sera récupérée à grand spectacle. On expose fastueusement son corps place Vendôme puis inhumé au Panthéon. Immortalisé par le peintre Jacques Louis David, on ne retrouvera hélas jamais le tableau, sujet lui-même d’un mystère passionnant. Mais la roue tournant sans cesse, le 8 février 1795, la réaction thermidorienne annula le décret qui avait accordé à Lepeletier une sépulture au Panthéon, et sa famille récupéra ses restes, pour les transférer au château de Saint–Fargeau.

 

Château Saint-Fargeau (D)

                                                    Suzanne DEJAER