Emmanuel Limido avait recruté Guy Alvès alors qu'il était chef de cabinet de François Copé, alors ministre du budget (2005-2007) avant de devenir dirigeant de Bygmalion.

Selon "Le Point", une société de communication créée par deux proches de Jean-François Copé (dont Guy Alvès) a encaissé 8 millions d’euros pour des prestations, alors que l’UMP appelait à renflouer les caisses du parti. Le président de l'UMP va porter plainte pour diffamation.

 

Emmanuel Limido (à droite) propriétaire de l'AJA, est mis en cause par l'enquête du Point (DR)

 

"L'affaire Copé : Sarkozy a-t-il été volé ?", titre de manière très spectaculaire le magazine Le Point dans les kiosques, jeudi matin.

Notre confrère affirme, enquête détaillée à l'appui, que Jean-François Copé aurait sponsorisé avec l'argent de l'UMP, une  société de communication fondée par deux de ses fidèles amis, société qui a largement participé à la campagne présidentielle perdue de Nicolas Sarkozy en 2012.

Tout y est sur le papier, tous les ingrédients sont réunis : des hommes et des femmes politiques de premier plan, des jeux de pouvoir, beaucoup d'argent, des magouilles supposées, un monde sans pitié. Les prochaines heures seront décisives : Jean-François Copé, qui était en meeting à Nantes mercredi soir, réfute ces accusations et va occuper les prochaines heures de cette journée qui s'annonce longue à porter plainte contre le magazine, les auteurs de l'enquête, et à organiser sa riposte.

La particularité est que nous sommes à 24 jours du premier tour des municipales. Quelle que soit l'issue de cette histoire, avec une telle publicité, le coup est rude pour le principal parti d'opposition.

Selon des documents dont Le Point a eu connaissance, Event & cie, la filiale événementielle de Bygmalion, a profité de la période faste de la présidentielle pour charger la mule sur certaines prestations facturées à l'UMP hors appels d'offres. Lors des meetings, les frais de traiteur, de retransmission vidéo et d'éclairage atteignaient parfois le double des tarifs habituels ! Parti de 11 millions d'euros, l'agence de communication appartenant à deux de ses anciens collaborateurs venait d'empocher de l'UMP huit millions d'euros pour avoir organisé les meetings de la campagne 2012.

Le Point a enquêté sur ce que certains au sein du parti qualifient de véritable "hold-up" : entre 2010 et 2012, alors que les finances de l'UMP sombrent dans le rouge, la petite boîte de com connaît, elle, une santé florissante... Dès la création de Bygmalion en 2008, Jean-François Copé, président du groupe UMP à l'Assemblée nationale puis secrétaire général du parti, multiplie les commandes auprès de l'agence de com de ses amis Bastien Millot et Guy Alves, qui ont travaillé plus de dix ans à ses côtés, d'abord à la mairie de Meaux, puis à son cabinet chaque fois où il a été ministre.

 

Mystérieuse société

Mais le plus troublant, c'est l'origine même de Bygmalion. En épluchant les statuts de la société, Le Point a découvert un montage financier particulièrement sophistiqué avec un actionnaire resté caché pendant trois ans : une société logée au Luxembourg...appartenant à Emmanuel Limido, le proprio de l'AJA.

Derrière cette mystérieuse société se dissimule le holding familial d'Emmanuel Limido, un gestionnaire de fonds très lié au Qatar. Coïncidence : en 2006 et 2007, Jean-François Copé, alors ministre du Budget, avait donné son feu vert pour la vente au Qatar de deux joyaux immobiliers de l'État. Dans ces deux transactions, l'intermédiaire n'était autre que le fonds d'investissement dirigé par Emmanuel Limido. Ce dernier avait entre les deux transactions embauché le chef de cabinet de Jean-François Copé, Guy Alves, devenu depuis patron de Bygmalion. Un étonnant mélange des genres que Le Point révèle dans son article sur l'argent de l'UMP et la galaxie Copé...

Avoir donné 11 millions d'euros pour rembourser les frais de la campagne présidentielle invalidés de Nicolas Sarkozy alors que la somme incriminée dans l'enquête du Point s'élèverait à 8 millions d'euros, ça va faire réfléchir.

Où est passé l'argent ?

Pourquoi la société Bygmalion ne publie-t-elle pas ses comptes ?

Sur Twitter, le député savoyard UMP Lional Tardy, n'hésite pas à corroborer les accusations du Point. «Tout le monde savait pour Jean-François Copé: c'est la raison pour laquelle je n'ai pas participé au ‘Sarkothon'», comme est surnommée la souscription nationale lancée suite à l'invalidation des comptes de campagne de Nicolas Sarkozy.

Lionel Tardy dénonce les «coûts stratosphériques» des meetings de la campagne présidentielle et reproche à l'équipe Copé son manque de «transparence». Le bras droit du président de l'UMP pourrait porter plainte.

Pour l'instant, il n'y a pas d'action judiciaire autour de cette affaire. En soi, le fait que Bygmalion ait bénéficié de l'essentiel des marchés de communication et de formation de l'UMP n'est pas illégal s'agissant d'un parti politique. La surfacturation, elle, pourrait l'être, si elle est établie.

L'aspect le plus nouveau des révélations du Point concerne en fait le montage financier entre Bygmalion et Centuria Capital, et les relations entre M. Copé et son dirigeant, Emmanuel Limido, qui fut un intermédiaire entre l'Etat français et la monarchie qatarie lorsque le président de l'UMP était ministre du budget et Guy Alves son chef de cabinet.

 


 Homme de réseaux, Emmanuel Limido a des entrées partout. À gauche, elles lui permettent d'être proche de l'Élysée et de faire inviter Fabrice Hérrault lors de voyages présidentiels dans les pays du Golfe et en Iran, dans le groupe des grands chefs d'entreprise accompagnant le Chef de l'État ou avec le MEDEF. Il aurait aussi ses entrées à l'UMP si l'on en croit le Point. Avec Centuria Capital, holding, société d'investissment située au Luxembourg, Limido fait du business avec les pays dits émergeants, Inde, Chine, Iran, Pays du Golfe Persique. Ici à gauche en Chine avec le gouverneur de la province du SIchuan (DR)

 

 

Emmanuel Limido, le 3 décembre 2013, au meeting annuel du Center for Global Dialogue and Cooperation, en présence d'un intervenant de premier rang, Bill Clinton (DR)