CULTURE
Des Å“ufs, des cloches et des crocus
le jeudi 10 avril 2014, 10:24 - CULTURE - Lien permanent
Après un hiver si clément qu’on n’osait dire qu’on était en hiver, si long pourtant parce que les semaines de gel n’ont pas alterné avec les jours plus chauds ou ceux que le vent du nord fouettait, nous voici au printemps…
Pousses, bourgeons, herbe tendre, timides pétales surgissent en silence et explosent en couleurs sous les rayons du soleil, heureux de ne plus servir qu’à faire fondre de la neige ou caresser sans force des joues refroidies. Ici il frôle, nourrit, réchauffe déjà avec une ardeur parfois déconcertante. Il gonfle toute chose, des jonquilles qui trompettent le retour des beaux jours au pelage des chats paresseux, qui regardent s’éveiller le monde à nouveau : on gratte dans les jardins, remue la terre, y enfonce primevères et fleurs annuelles, tandis que les jacinthes émanent, avec fierté, le parfum de la vie nouvelle, se riant quelque peu des tulipes raides aux fragiles turbans. Les pimpants crocus se dressent dans les pelouses. Haies et buissons tremblent sous l’ardeur des moineaux et merles qui, chantant le nid qu’on remplira bientôt, ramènent bruyamment leurs trouvailles de matériaux : poils de chiens que l’on vient de brosser, branchettes fatiguées, liserons tués par l’hiver…
Printemps New Yorkais, triomphe des jonquilles - Photo AuxerreTV - D.R.
L’eau court, suivant des veines invisibles et telluriques, retentissant du rire de ses minuscules ondines moqueuses. La terre est pulpeuse, les odeurs sont intenses. Les violettes forcent leur passage hors du tapis de feuilles mortes aux teintes de chêne et tabac. Dans les bois ou à la campagne, si on a beaucoup de chance, on rencontre le regard surpris de jeunes animaux qui découvrent l’ivresse de la vie.
Les violettes, pas si humbles que le dit la légende - Photo AuxerreTV - D.R.
Mais que font ces étranges bipèdes dans mon domaine? Photo AuxerreTV - D.R.
Que nous glisse la glycine à l'oreille? - Photo AuxerreYV - D.R.
La fête sera à son apogée lorsque pelouses et massifs « cacheront » sans trop de sévérité, les œufs de Pâques que des enfants ravis n’auront qu’à cueillir. Joie et rires, parfois un pleur pour un œuf pas vu à temps que l’on piétine, un autre que l’on casse, et ceux que le chien a trouvés en premier, ou encore celui que la pie voleuse, séduite par le papier doré, a emporté pour en faire son trésor.
Chaque année, c’est la même chose. Mais jamais tout à fait. Tout ce qui recommence à l’infini est pourtant en mouvement. Hier nous étions plus jeunes et d’une autre humeur qu’aujourd’hui. Hier était exceptionnel. Aujourd’hui l’est aussi.
Bonne chasse aux œufs aux enfants et… bonne partie de cacher les œufs – pas trop bien – aux adultes.
Suzanne DEJAER
Commentaires
Encore un grand merci à vous, Mme Dejaer, pour une si belle poésie printanière qui nous transporte dans l'espoir de jours meilleurs et dans la renaissance des sens et de la vie. Le sourire revient progressivement, timidement sur les visages soucieux de nos citadins, de nos proches, de nos collègues.... Les couleurs vestimentaires se font encore bien timides alors que celles du printemps éclatent au soleil ! Rien n'est perdu, nous avons tout à gagner... Le rêve, la joie, la vie, sont de mise. Hier est terminé. Vivons le Présent en acceptant tout ce qui se produit chaque jour, en bien, en plus difficile, en fataliste, en hédoniste.
Très belle journée et donnez nous encore de jolis textes, de jolies pensées agrémentés de belles photos. Faites nous encore rêver ! Merci !