En regard de l'attitude à adopter au second tour des élections départementales dans l'Yonne, il y a mille nuances et pas que sémantiques.

Le nouveau patron de l'UMP Nicolas Sarkozy a été clair, dimanche soir : la consigne de vote est "ni FN ni PS". Une consigne qui fait polémique dans les rangs de l'UMP. Une attitude de Ponce Pilate (qui s'en lave les mains) qui ne correspond guère au personnage, ex-président de la République, en contradiction totale avec ses déclarations antérieures où il menace d'exclusion quiconque ferait un arrangement avec le FN.

Une première banderille ou coup de canif dans le contrat a été portée d'emblée par le député UMP de l'Yonne Guillaume Larrivé, qui, de sa main (lire ci-dessous), adapte la consigne en appelant à "voter pour les candidats de la droite unie UMP-UDI, seul vote utile pour battre le Parti socialiste". C'est finaud et élusif car cette position évite d'aborder la question posée frontalement, si l'on ose dire, et réduit la problématique au combat droite-gauche en excluant objectivement le FN, ce qui revient à mettre en avant l'essentiel à ses yeux dans la perspective de l'alternance : la victoire l'opposition UMP-UDI.
La ligne d’union de la droite et du centre est celle d’Alain Juppé et Nicolas Sarkozy l’a contredite lui-même en droitisant sa campagne avec les thèmes du voile à l’université ou du porc obligatoire dans les cantines, et avec son choix du « ni-ni »

Cela dit le député de l'Yonne a sans doute tiré avec intelligence les conclusions de la réalité du terrain (les élus notamment) qu'il ne peut tordre à l'envi selon ses désiderata en Puisaye sa terre d'élection par excellence. Une attitude d'autant plus significative que Guillaume Larrivé figure dans le staff de Sarkozy où il exerce des responsabilités qui devraient le propulser ministre en cas de d'alternance et de victoire en 2017 à l'élection présidentielle. Le député de l'Yonne s'était déjà démarqué de l'ex-président de la République pendant la campagne en estimant publiquement que l'expression "FN-PS" brandie par son  (ex?) mentor était inappropriée à ses yeux.

Celui qui se veut libre et indépendant - il a claqué la porte de la présidence de l'UMP dans l'Yonne - creuse son sillon, celui qui lui permet de s'allier à l'UDI André Villiers que combat ouvertement Henri de Raincourt qui n'a jamais approuvé son coup de force pour prendre le département en 2011. Guillaume Larrivé sait donc qu'il ne peut prétendre être le logiciel de la droite dans l'Yonne, une droite qui a toujours été très diverse, avec des sensibilités différentes, une droite que Jean Chamant et H2R ont, seuls été capables d'unir durablement.

Un autre coup de canif est celui donné par le secrétaire départemental (interimaire) de l'UMP le Migennois François Boucher. Il appelle à voter "pour les candidats les plus enracinés sur les territoires. " ce qui revient à conforter  le personnel politique en place aux dépens du FN dont nombre de candidats sont plus ou moins parachutés, sans connaissance réelle du territoire. Mais la prise de position est subtile dès lors qu'elle suggère une contrepartie. En demandant publiquement au PS de se retirer des deux triangulaires d’Avallon et de Pont-sur-Yonne où le risque est réel de voir le binôme FN l'emporter.

Dominique Bourreau, le conseiller général socialiste sortant dans le canton de Pont-sur-Yonne, et Françoise Martin, le binôme soutenu par l'ACSY (Ambition citoyenne et solidaire pour l'Yonne), ont finalement décidé de se désister pour barrer la route au FN.

Pour Avallon, réponse, mardi soir, après la fermeture des dépôts de candidatures en préfecture.

 

Avallon le symbole

Ces prises de position publiques ne sont qu'une facette émergée de l'iceberg. Les vraies tractations - car il y en a - se déroulent sous le sceau de la confidentialité dans le microcosme politique. D'ailleurs elles "n'existent pas". Par ailleurs, le citoyen est seul juge, dans sa liberté de conscience, au moment de déposer un bulletin dans l'urne.

La reconquête par la droite du canton d'Avallon serait un symbole fort, au pays des dynasties Flandin et Laurent où Jean Chamant fit son lit suivi par le regretté et feu Yves Van Haecke.

Ce serait un coup fort porté à Jean-Yves Caullet le député socialiste qui apparaît au-dessus du lot, enraciné dans ces terres du sud où il s'est attaché à construire et à faire vivre une ruralité en déclin.

La triangulaire qui s'annonce présente trois binômes arrivés dans un mouchoir de poche, UMP-UDI en tête devant le FN et le PS. Quoi qu'il en soit cela s'annonce très serré pour le deuxième tour.

Henri de Raincourt qui contrairement à ce que certains imaginent, possède encore de forts réseaux dans l'Yonne, après avoir été écarté par l'UMP Jean-Marie Rolland puis l'UDI André Villiers, ne s'y trompe pas qui propose un gambit pour Joigny où le premier secrétaire fédéral du PS est opposé au binôme FN au deuxième tour, ainsi que pour Villeneuve-sur-Yonne avec Cyril Bouleaux.

L'ancien ministre de la francophonie et de la coopération, fin politique, voit plus loin et a toujours manifesté un art consommé de la politique où comptent certes les élections mais aussi et surtout l'entre élections où il s'agit de travailler, ensemble si possible, pour le bien commun.

Les régionales - au scrutin proportionnel, ce qui change tout - du mois de décembre, sont en point de mire dans les négociations en sous-main. Le maire de Saint-Georges-sur-Baulche s'est abstenu aux cantonales dans cette perspective. De nouveaux enjeux politiques se dessinent à l'horizon qu'il est encore difficile de décrypter voire de formuler.

Le troisième tour des élections départementales dans l'Yonne pourrait surprendre ainsi que le "quatrième tour", l'élection des vices-présidents, tricotant de nouveaux rapports de force politiques derrière un langage consensuel d'appel au rassemblement et au travail. Clause de compétence générale en moins. Ça va faire mal aux associations et à la culture ...

 

Pierre-Jules GAYE

 

 


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Le communiqué de l'UMP

"Nous félicitons l’ensemble de nos candidats pour leurs bons résultats obtenus lors du premier tour des élections départementales sur l’ensemble des cantons de l’Yonne.

Nous remercions vivement l’ensemble des électeurs qui se sont mobilisés à cette occasion et nous leur demandons de se mobiliser dimanche prochain, en votant massivement au second tour pour les candidats UMP, UDI et Divers Droite présents dans leurs cantons.

Nous appelons à la responsabilité les candidats de gauche en leur demandant de se retirer des deux triangulaires d’Avallon et de Pont-sur-Yonne. Ces retraits seraient l’occasion pour la gauche de traduire ses propos par des actes concrets.

En effet, en cas de refus, elle serait la seule responsable de l’élection dans ces cantons de conseillers départementaux Front National.

Nous appelons de notre côté à voter pour les candidats les plus enracinés sur les territoires.

Nous invitons enfin les électeurs à ne pas se tromper d’élection.

"Ces élections départementales visent à choisir les élus qui défendront leurs intérêts au sein de la nouvelle assemblée départementale. Nous invitons les électeurs à porter leurs choix sur des candidats de proximité et d’expérience qu’ils connaissent et les connaissent et non pas sur des parachutés qui surgissent de nul part, avec comme seul programme leur étiquette politique."

François Boucher, secrétaire départemental de l'Yonne de l'UMP

 

La consigne du député UMP Guillaume Larrivé

 

 

 

 

Pas de consigne à gauche de la gauche

À gauche, les choses semblent plus claires. Le Front de Gauche-Europe-Écologie-les-Verts ne donne aucune consigne de vote. Sous-entendu : les citoyens sont assez grands pour savoir ce qu'ils ont à faire, en toute liberté.

 

Le communiqué de L'alternative citoyenne, sociale, écologique et solidaire

"Le 22 mars, vous avez été plus de 13 000 à soutenir le rassemblement « Alternative Citoyenne, Sociale, Ecologique et Solidaire » que nous proposions. Nous vous en remercions.

· L’extrême droite, FN, parti de la division xénophobe et raciste, amènerait la régression au plan social, économique et écologique

· Depuis 70 ans, la politique à courte vue de la droite UMP-UDI a mené le département à une situation catastrophique

· La fausse gauche et ses représentants locaux (ACSY-PS-MODEM) soutiennent depuis 3 ans la politique libérale et d’austérité du gouvernement.
Là n’est pas votre avenir.
"A travers les mobilisations futures, ensemble, nous travaillerons à la poursuite de notre projet pour une alternative citoyenne, sociale, écologique et solidaire."

L'alternative citoyenne, sociale, écologique et solidaire 

(Europe Écologie les Verts, Front de gauche, PCF)