Le groupe d'Icaunais en visite à Palmyre (DR)

 

 

Après s'en être pris à plusieurs joyaux du patrimoine mondial, les islamistes de Daech menacent cette fois-ci la cité antique de Palmyre, déjà considérablement endommagée par des tirs de roquette. Comme le krac des chevaliers près de Homs ou encore Alep et ses souks ravagés, Alep d'où partit Laurence d'Arabie.

Au-delà de ce massacre archéologique, l'obsession qu'ont les islamistes à détruire des joyaux du patrimoine mondial interpelle.

En 2001, ce sont les Bouddhas de Bâmiyân qui ont été victimes du fanatisme islamiste. Ces statues bouddhistes monumentales bâties entre le IIIe et le Ve siècle au nord-est de Kaboul (Afghanistan) ont subi des tirs d'artillerie après que l'influent mollah Omar les ait décrétées "idolâtres". Pendant 25 jours, des centaines de talibans venus de tout le pays s'étaient acharnés à les détruire, à coups de roquettes et de dynamite, indique Romain Herreros pour le Huffington Post.

Partout où le terrorisme islamiste s'installe, il reproduit le même schéma. En Syrie, en Irak, à Tombouctou au Mali, mais aussi en Libye où des islamistes ont démoli et profané dès 2012 plusieurs mausolées à coup de pelleteuse (à Tripoli et Zliten notamment)... Une bibliothèque et une université ont également été la cible d'actes de destruction et de pillage dans le pays dirigé par Mouammar Kadhafi jusqu'en août 2011.

La progression du groupe islamiste Ansar Dine dans le Nord Mali à l'été 2012 a coûté cher au patrimoine ancestral de Tombouctou. L'objectif des islamistes: y "détruire tous les mausolées", comme l'avait expliqué l'un des porte-paroles du groupe armé à l'époque. Au total, ils parviendront à en détruire sept sur les seize que compte "la cité des 333 saints", classée au patrimoine mondial de l'UNESCO en 1988.

D'un point de vue théologique, il s'agit d'"éradiquer toute forme matérielle de notre civilisation" explique à L'Obs l'anthropologue Malek Chebel. Selon ce chercheur, "nous sommes face à un mouvement fondamentaliste qui veut revenir aux premiers jours de l'islam", ce qui équivaut à rejeter tout ce qui est antérieur au coran.

"Deux formes d'Islam difficilement compatibles s'opposent", commente aussi pour Sciences et Avenir l'archéologue et anthropologue suisse Eric Huysecom.

"Pour la première, ces monuments sont le témoignage d'un islam 'd'ouverture', d'un islam 'rayonnant', tant dans le domaine des arts, de la littérature que des sciences ou de la médecine, mais aussi d'un islam de tolérance, où le non-musulman avait aussi sa place.

Cette image d'islam tolérant, brillant par la culture et le savoir, est contraire à celle que prônent les mouvements intégristes et radicaux tels qu’Ansar Dine ou Aqmi (Al-Qaida au Maghreb). Pour ces derniers, les cultes personnalisés dont font l’objet les saints inhumés dans ces mausolées sont incompatibles avec un islam où seul le Prophète peut être invoqué. Je me permettrais la comparaison entre la révolte protestante contre le culte des saints pratiqué par la religion catholique, il y a quelques siècles."

Au moment de la destruction des mausolées de Tombouctou, la Cour Pénale internationale prévenait que ces actes étaient qualifiés de "crime de guerre" par la justice internationale. Reste désormais à savoir ce que donneront ces appels à la justice et si des actions concrètes de sauvegarde seront menées par la coalition.

Quatre sites en Irak sont inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO, dont deux sont en péril. Six sites syriens sont inscrits dont la cité antique de Palmyre, tous en péril. À titre de comparaison, 39 sites français sont inscrits.

 

 

 

 

L'entrée du groupe d'Auxerrois dans un mausolée à Palmyre (DR)

 

 

Le risque


La cité antique de Palmyre peut-elle subir le même sort que l’antique Ninive en Irak
?

Cela effare Jean Baillot, professeur honoraire Auxerrois, qui a organisé en collaboration avec l'agence universitaire Athena de nombreux voyages autour des pays de la méditerranée.

"Ces extrémistes déments, sans culture ni raison, sont capables de faire disparaître un patrimoine d’exception, un fonds culturel sans pareil. Déjà Apamée a été ravagée à coups de bulldozeurs. Que restera-t-il après le passage de ces hordes de Vandales des temps d’aujourd'hui ?

"Notre Syrie ne sera plus que champs de ruines, et nous n’aurons plus rien à transmettre... que nos souvenirs, en tentant de faire passer le choc émotionnel reçu au contact de ces superbes vestiges de l’antiquité, avec la leçon dont ils étaient porteurs : ces hommes ne construisaient pas seulement pour eux et leur culte, ils pensaient aussi aux générations à venir et au message qu’ils voulaient transmettre : pensez à l’avenir et à la beauté qu’il faut offrir à nos successeurs.

N’aurons-nous, en ce qui nous concerne, autres sites à offrir à la méditation que des murs en poussière ? ... interroge Jean Baillot.

 

Le guide expliquant aux Auxerrois un bas relief devant le temple de Bêl (DR)

 

Les propylées du temple de Bêl (DR)

 

Les colonnades de l’avenue principale (DR)

 

 

 

 Le petit temple de Baalshamin (DR)

 

 

 La Scaena du théâtre (DR)

 

À Damas (DR)