C'est lui. C'était lui. Le personnage qui faisait le resto.

C'est pour lui et Marie qu'on y allait.

Un homme attachant, même la boule à zéro, toujours de bonne humeur (la moindre des choses pour un commerçant...) Une petite blague toujours au coin des lèvres. Une attention. Il est parti à l'âge de 47 ans. Il est le père de quatre enfants.

Le Schaeffer est un lieu de retrouvailles, des mamans certes de Ste Marie, et non pas des paumés de la vie, quoique, et dès le matin, tôt et ensuite la déferlante des retraités qui se lèvent au gré de leur nuit, bien passées ou pas.

L'endroit est comme un couloir qui aspire et inspire. Plus on avance, en zyeutant de droite à gauche, plus on croise des regards en biais. Et miracle, tout au fond, les tables du restaurant, disposées de la même manière (on ne se refait pas), plus loin encore, les commodités.

Aux tables disposées à l'entrée, de part et d'autre, baignées de clarté, succédaient des espaces comme protégés par une lumière initiatique.

C'est ici, tout au fond, autour de petites tables conçues pour des tête à tête, que j'ai passé de bons moments, à échanger avec un homme sorti de nulle part dans la vie d'un journaleux de province. Au travers de quelques mots signifiants d'un article sur l'aménagement du territoire consacré aux berges de l'Yonne qu'il jugeait massacrées au nom du nettoyage indispensable afin de justifier les fonds programmés en regard de la politique de l'insertion, leitmotiv à l'époque.

Il s'appelle François Morand, directeur honoraire au CNRS (centre national de recherche scientifique). Pourquoi le citer ? Lui le Savoyard républicain avait, au terme de sa carrière, acheté un moulin près de Charny et  luttait contre l'ignorance et la bêtise humaine, malgré lui.

De midi à 18 heures, plusieurs fois nous avons consommé des conversations qui semblaient avoir duré deux minutes. Il avait sa bonbonne d'oxygène et son masque qu'il utilisait ponctuellement. Puis on continuait. Eh oui c'est ainsi. La magie du lieu ou du bonhomme. Et Bouli se marrait en douce.... il était content que les gens chez lui soient contents voire heureux. Tout simplement.

Et il y eut autour des petites tables rondes du Schaeffer, Guy Férez, le jeune maire épris d'urbanisme. Un souvenir inoubliable car il s'est lâché. Un vrai moment de vraie vie. Autour d'un café. Pourquoi donc avoir choisi celui-là ? Qui peut le dire ? Et puis il y a Daniel, Nicole, et tous les autres.

Mais la plus merveilleuse était Marie, qui avec son sourire, sortant de son coeur tout droit et raide, irradiait le bonheur. C'est aujourd'hui, seulement que je m'en rends compte.

 

Pierre-Jules GAYE

 

Christophe et Marie

 

Ciao