AJA
L'AJA n'a jamais eu de cagnotte
le mardi 17 avril 2012, 13:48 - AJA - Lien permanent
Mauvais résultats sportifs et perspective de relégation en Ligue 2 alimentent les rumeurs qui circulent sur les finances de l'AJA, provenant notamment d'anciens dirigeants. AUXERRETV a enquêté aux sources et dans le temps. Auxerre n'a jamais eu de bas de laine et a toujours accusé un déficit structurel. Affirmer le contraire est donc faux
Le budget de l'AJA a toujours présenté une structure déficitaire au niveau de ses comptes. Au cours des vingt dernières années, le déficit a tourné autour de 3 à 5 millions d'euros en moyenne par an, avec des pointes à 6-7 millions.
Il fallait donc compenser pour équilibrer les comptes. Comment ? Par la vente de joueurs formés au Centre de Formation ou/et par des recettes tirées des participations aux Coupes européennes.
Ainsi, les recettes de la Ligue des Champions en 2010 ont-elles servi à éponger les déficits des années précédentes (2007, 2008, 2009).
Autrement dit, structurellement, le budget de l'AJA n'a jamais été compatible avec les recettes.
Inflation salariale
Depuis cinq années, en outre, pas moins de 40 joueurs ont été recrutés, augmentant sensiblement la masse salariale par les primes à l'achat et les salaires versés.
Dans le même temps, la politique de formation se dégradait : moins de joueurs formés issus du Centre trouvaient place en équipe première tandis que les conditions de logement et d'enseignement laissaient de plus en plus à désirer d'autant que la loi a fait obligation à tous les clubs de posséder un Centre de Formation ce qui a accru considérablement la concurrence dans le repérage et le recrutement de futurs talents.
L'AJA au temps du binôme Rolland-Roux, disposait d'un premier choix puisqu'elle faisait partie des trois Centres de Formation les plus huppés et reconnus en France, avec Sochaux et Nantes.
En 1979, l'AJA atteint la finale de la Coupe de France. Cette épopée rapporte un million deux cent mille francs de bénéfice au club. Forte de ce pactole l'AJA hésite entre le recrutement d'Olivier Rouyer et le rachat de la ferme Râteau, lieu ou sera érigé le centre de formation. Jean-Claude Hamel et Guy Roux optent pour la construction. La fameuse Pyramide (Pagode signée Bosquet) inaugurée par Mitterrand en septembre 1981, d'où sortirent les Boli, Cantona, Martini, Dutuel, Cissé, Kaboul, Dutuel, Mexès etc., aujourd'hui, obsolète (DR)
Depuis 2005, voire avant, l'AJA ne dispose plus, dans le nouveau contexte, que de troisième choix. Pourquoi ? A cause de la concurrence accrue pour s'attacher les meilleurs jeunes espoirs et parce que les locaux de la Pyramide historique datant de 1980, n'étaient plus adaptés (toilettes sur le palier, fuites dans le toit, équipement obsolète, bref, état lamentable) les jeunes et leurs familles marquant leur préférence pour des Centres plus accueillants. En outre, l'AJA ne pouvait suivre les offres financières aux parents consenties par d'autres clubs plus huppés.
La dérive et la rupture
On voit bien la dérive de l'AJA, depuis plusieurs années, qui remonte autour de 2003-2004-2005. L'année de la dernière Coupe de France remportée, 2005, constitue le point de rupture, symbolisée par celle entre Guy Roux et le président Jean-Claude Hamel.
Il faut se souvenir qu'au soir de la quatrième victoire en Coupe (1994, 1996, 2003, 2005), l'entraîneur manager de l'AJA, Guy Roux, annonça qu'il prenait sa retraite, au grand dam de Hamel qu'il n'avait pas consulté. Roux a choisi de sortir "beau" après 5 années difficiles pour lui, tant sur le plan de la santé (qui lui valut un pontage cardiaque) que sur le plan du management sportif, son message ne passant plus auprès des jeunes générations.
C'est à partir de cette date que le recrutement a dérapé et la masse salariale avec. L'AJA a fait signer des joueurs qui n'ont jamais joué mais à qui elle devait verser des salaires. Du jamais vu. Un directeur de Centre de Formation payé cher, fut embauché qui a fait doublon avec le responsable du Centre.
En un mot, Jean-Claude Hamel a voulu démontrer que l'AJA pouvait survivre sans Guy Roux, à qui il n'a jamais pardonné d'avoir annoncé sa retraite sans lui en avoir parlé. Trois jours après, il embauchait Jacques Santini, ex-sélectionneur des Bleus alors que le vice-président Gérard Bourgoin voulait Laurent Blanc. Dès lors Guy Roux fut tenu à l'écart d'autant que sans fonction, il ne représentait plus rien sinon un futur retraité grassement payé par ailleurs dans ses activités de consulting. Les dirigeants en place réussirent cependant à l'éloigner objectivement en le faisant enrôler à Lens, en juin 2007, mauvaise pioche et triste fin pour le sorcier Bourguignon qui démissionna quatre mois plus tard : Lens fut relégué en L2 et y croupit encore.
Une erreur monumentale
Roux détient le record du nombre de matchs dirigés en première division en tant qu'entraîneur avec 894 rencontres sur le banc entre 1980 et 2007. On notera que c'est cette année là qu'Auxerre vendit Sagna à Arsenal, Akalé à Lens, Kaboul à Tottenham, principalement, une vente qui rapporta environ 23 millions d'euros et permit d'effacer les déficits structurels des années précédentes.
Ce pactole constitua la dernière pioche de taille avec les recettes directes nettes de la participation à la Ligue des Champions, en 2010, évaluées à 12 millions d'euros qui ont servi à éponger les déficits antérieurs.
L'inflation des charges salariales font, qu'aujourd'hui, la masse salariale est de 30 % supérieure à ce que peut supporter le club. Sur un budget de 35 à 40 millions d'euros, la masse salariale représente 82% du résultat brut d'exploitation.
Et le centre de formation ? Un projet de nouveau centre était ficelé en 2009. Il n'a vu le jour qu'en juillet 2011, dans des conditions de conflit entre l'équipe dirigeante sortante et rentrante. Les premiers voulaient refaire un autre projet ce qui eut encore retardé le début des travaux, à supposer qu'il eut reçu l'aval des collectivités pour son financement.
Ce fut une erreur monumentale de retarder la construction du nouvel outil dont a besoin de manière vitale l'AJA pour survivre, un outil, à savoir la formation, qui a fondé son identité et expliqué sa réussite.
Bref, depuis quatre années, le club n'a pas tiré de revenus significatifs de son Centre de Formation et pour cause. Le nouveau centre ultra-moderne sera terminé, en principe, à la fin de l'année 2012, en mettant les bouchées doubles. Encore une année de perdue.
Un outil et pas de dettes
Si l'AJA ne redresse pas la situation, elle mourra.
Quels sont les atouts principaux ? D'abord le club n'a pas de dette. Tout le monde ne peut en dire autant. PSG et Auxerre sont les seuls clubs dans ce cas de figure dans l'hexagone. Ensuite, la construction d'un nouveau Centre de Formation haut de gamme que devraient envier nombre de clubs, dit-on, à l'image des nouveaux vestiaires parmi les plus modernes de France. Un plan stratégique a été mis en place pour mieux recruter qui porte déjà des fruits. Les équipes de jeunes U 15, U 16, et U 19, ne sont-elles pas premières de leurs championnats respectifs ?
Enfin, de nouvelles activités, telle la "vente de la formation" sont susceptibles d'apporter de l'eau au moulin. Bien des clubs étrangers sont à la recherche de systèmes d'amélioration de la performance des footballeurs. Des recettes nouvelles en perspective qui permettraient d'alléger le budget pour l'heure plombé par des charges salariales trop importantes, par le déficit structurel prévu autour de 7 millions cette année, et par le manque à gagner de recettes de droits télé (- 8 millions environ), consécutif au mauvais résultats sportifs.
Si l'AJA avait terminé à la sixième place le championnat qu'elle dispute actuellement, elle aurait équilibré les comptes mais elle serait repartie avec un déficit prévisionnel de 5 à 6 millions pour la saison 2012-2013.
Que se passera-t-il si Auxerre est relégué en Ligue 2 ? Quelles seraient les conséquences ?
D'abord les recettes tirées des droits de télévision s'effondreraient. On peut dire sans se tromper que le budget devrait être divisé par trois dès lors que les recettes seraient divisées par 3. Donc un budget de 11 à 12 millions d'euros au lieu d'un budget de 36 millions. Si le club veut conserver sa masse salariale, il devra trouver des recettes ailleurs, soit en vendant des joueurs, au risque d'affaiblir l'équipe, soit en faisant entrer un partenaire au capital.
On aura compris qu'il est grand temps que le nouveau Centre de formation tourne à plein régime pour apporter de l'eau au moulin de Preuilly. Guy Roux, délégué de l'association AJA football, propriétaire de l'ASOS professionnelle AJA, est sur le chantier.
Pierre-Jules GAYE
Le projet de nouveau centre de formation a pris au moins trois années de retard et pénalise la PME AJA. Une erreur monumentale (MC2 Architectes)
Commentaires
J'ai bien compris que c'est le divorce Hamel-Roux qui est à l'origine de la dérive. J'ai compris aussi que l'épisode Dujon (piloté par Hamel) est anecdotique, qu'il n'a rien économisé et surtout rien fait pour accélérer la construction du nouveau centre de formation, au contraire.
Cherchez l'erreur....
Merci, cet artcile est limpide
Excellente enquête.
Article intéressant !
Le football moderne ou business ne laisse place qu'aux grandes capitales nationales ou régionales, très attractives. Auxerre n'est qu'un grand village, un peu esseulé, qui a une capacité commerciale que trop faible pour accueillir un club de haut niveau (théoriquement). L'AJA est bel et bien une erreur statistique du paysage footballistique hexagonale et européen. Elle a triomphé certes, grâce à un modèle particulier qu'elle a totalement délaissé depuis quelques années. Compliqué alors de faire machine arrière, d'autant que l'on sent peu de soutient derrière elle (supporters, collectivités, entreprises etc).
Alors qu' Eric Cantona disait "La France ne mérite pas Auxerre, l’Angleterre sans doute, mais pas la France." Je me pose la question suivante depuis quelques temps :
Auxerre mérite t-elle l'A.J.AUXERRE ?
"Si l'AJA ne redresse pas la situation, elle mourra." C'est lapidaire mais ça semble juste... Quel dommage!
Voilà un reportage fouillé et équilibré. On comprend enfin ce qui se passe dans ce club et ce qui s'est passé. Merci Auxerre TV Continuez comme ça
Une belle et bonne enquête !
Excellent article !