Woodstock, Woodstock, juste à côté de la ville de New York, au milieu des champs de blé, disait une chanson d'alors. Bon. Il y a quand même deux heures de route entre New York et Woodstock !

Et les champs de blé étaient en fait les champs de luzerne de Max Yasgur, un bon fermier idéaliste de Bethel, à 69 kms au sud-ouest de Woodstock! Woodstock n'avait même pas été proposé pour accueillir ce festival d'Art et de Musique des 15 au 18 août 1969 désormais passé à la légende. Trop petit, Woodstock!

Le bon Max sur l'insistance de son fils, avait accepté de prêter ses terres pour cet évènement musical qui tout comptes fait a été plutôt "calme" si on considère que 400.000 jeunes y sont venus !

On n'avait cependant pas prévu tout ce monde, et il manquait de toilettes portables sur les lieux, ainsi que de tentes médicales. Et si on ajoute les quelques averses qui ont rendu le sol spongieux et boueux sous les piétinements, et sans doute quelques excès, on comprend que la ferme de Max et ses terres ont été pratiquement détruites, ce qui lui a valu des dommages de $50.000, et que ses voisins lui ont fait des procès parce que la destruction s'était étendue jusque chez eux. Le festival a été la scène de deux morts (une overdose d'héroïne et un malheureux qui s'est fait écraser par un tracteur dans son sac de couchage) et deux naissances.



Woodstock, la vraie petite ville de Woodstock, a été le berceau de l'Art and Craft Movement en 1902, ce qui en fit tout de suite un centre artistique très actif, abritant des peintres de la Hudson River School. Dès 1903 des artistes y enseignent et font des meubles, du tissage, des travaux sur le métal, de la céramique.

En 1916 Hervey White, philosophe et poète, y construit une chapelle de musique, et ce sera le début de la musique de chambre en Amérique du nord. Bien des célébrités y ont vécu pour un temps plus ou moins long: Jimi Hendrix, les membres du groupe "The Band", David Bowie, Bob Dylan (qui y a enregistré "The basement tapes" avec The Band), Ethan Hawke, Lee Marvin, Uma Thurman, Johnny Cash et bien d'autres.

Maintenant, Woodstock est une charmante ville touristique et havre artistique. Beaucoup de boutiques où l'on vend de beaux produits artisanaux, tissage, poterie, batiks. Des étals regorgeant de bijoux de rêves tibétains ou navajo, de travail du cuir.

Des maison de bois gentiment vieillies et entretenues avec amour, avec des jardins un peu sauvages et exubérants, des chats paresseux et repus se pourléchant sur le seuil, des pots de basilic aux fenêtres, des tournesols levant la tête au-dessus des barrières de bois peint. Des chardons altiers dans le potager communautaire de la ville.

Un plaisir de vivre évident, le respect de ce qui est beau et bon.

Et le skeedaddlehopper, il ne faut pas l'oublier! Je pense qu'il est interdit depuis 2006 parce qu'il lui fallait pas mal de place pour manoeuvrer et qu'il entravait le trafic, mais qu'il était amusant! L'invention de "Sage" Darin Selby, qui y dormait la nuit. Une structure d'aluminium recouverte de tissu bleu, décorée de pendeloques, attrappeurs de rêve, tubes de bambou chantant dans le vent. Il y chargeait des touristes qui subissaient pas mal de balancements avant qu'il ne puisse les emmener pour un tour houleux du quartier. Les roues principales étant situées pratiquement au centre, et le bras-balançoire de cet étrange pousse-pousse plutôt long, "Sage" effectuait de gracieux sauts en cadence pour avancer, qui l'élevaient dans les airs comme un danseur hirsute.

Le skeedaddlehopper

L'Art et une sorte de paix ensoleillée habitent Woodstock, et nimbent les hippies, ces fameux enfants des fleurs d'autrefois de la lumière d'une jeunesse intemporelle.
Rien ne paraît tout à fait réel, tangible. C’est un peu comme si on entrait dans une poche du temps oubliée par le grand sablier. C’est calme, silencieux, fleuri avec cette passion love and peace. C’est ancien, à la fois bourgeois et maison de la grand-mère MacDuck, et partout on trouve les traces d’une activité culturelle et artistique née de la soif de vivre des artistes, et non du mercantilisme citadin. C’est souvent joli, charme et mauvais goût  s’alternant à l’abri du foisonnement sauvage des Catskills. Des façades de bois aux teintes pastels, des jardinets de contes de fées, des échoppes peinturlurées vendant des horreurs, des constructions austères et centenaires. Du laid, du joli, du délicat, du vulgaire.
 

Dans les rues de Woodstock

De l’art sur le trottoir

Dutch reformed church, 1799

 

Les jardins parlent des enfants des fleurs apaisés

Aller à Woodstock est une promenade. Il faut juste se faire à l’idée que, sans passeport, on changera d’époque et de rythme, deux fois. Et on ramène avec soi le flottement qui accompagne le réveil après un rêve plus vrai que nature.