Elle était saisie par le PS au sujet du règlement de « l’affaire Tapie » et des implications de Christine Lagarde alors Ministre de l’économie et des finances; elle décide une instruction. C’est à croire qu'il est impossible d'occuper la fonction de directeur ou trice du FMI sans être en même temps sous l’emprise d’une enquête. Ce FMI, qui renouvelle d’ailleurs sa pleine et entière confiance en Madame Lagarde. «Le Parti socialiste prend acte de cette décision et compte sur les investigations de la commission d'instruction de la CJR pour apporter des réponses aux questions jusque-là ignorées par Christine Lagarde, y compris quand elles lui ont été posées par les parlementaires» : il désire des "réponses" ...

C'eut été délicat de passer outre et il est ainsi préférable d’entendre exprimer une telle satisfaction plutôt que d’essuyer des lazzis et des accusations du genre « à la remorque du pouvoir » etc.

Certains vont très loin dans le triomphe : On peut se demander si la candidature de Lagarde au FMI n'était pas une opération d'exfiltration pour faire pression sur le choix des magistrats, déclarent certains membres du groupe socialiste. Mais on voit qu'il y a dans ce pays des magistrats qui ont encore des couilles car la pression devait être totale!  De telles formulations sont à garder en mémoire, elles pourraient être opposées à d'éventuelles désillusions voir des argumentations contradictoires dans les mois qui viennent.
L’ouverture de l’enquête est donc une très bonne chose. Il reste à en connaître les conclusions et se prendre à espérer que ceux qui aujourd’hui, à juste titre, encensent l’indépendance de la CJR, accepteront avec le même enthousiasme ses conclusions. Rien n’est moins sûr, tant l’expérience montre que lorsque la fin de l'histoire n'est pas en adéquation avec l’espérance des opposants, les délibérations sont immédiatement contestées.
«L'ouverture de cette procédure, tout à fait normale, permettra avant tout de faire toute la lumière sur ce sujet, loin des vaines tentatives d'amalgames et des insinuations du PS», souligne le parti présidentiel, l’UMP. Voilà qui est bel et bon !
Reste à faire l’exégèse des chefs d’accusation, nous entrons là dans un dédale juridique qui ne fixera pas l’attention de nos compatriotes, seulement éventuellement intéressés par le résultat final de l’enquête et ses conclusions.
Il est reproché à Christine Lagarde d'avoir abandonné en 2007 la voie judiciaire dans un litige concernant la revente d'Adidas en 1993, au profit d'une procédure d'arbitrage. Il lui est aussi reproché d'avoir renoncé à contester l'arbitrage attribuant 285 millions d'euros (dont 45 millions au titre du « préjudice moral ») à Bernard Tapie en 2008. Selon le parquet général de la Cour de cassation, cette enquête va être ouverte « dans les prochains jours » pour « complicité de faux » et « complicité de détournement de fonds publics ». Ces chefs sont passibles de 10 ans de prison et 150 000 euros d'amende. On ne pourra plus affirmer que le « pouvoir » fait pression sur la Justice, ce n’est pas le moindre des intérêts de cette enquête. Son ouverture ne vaut évidemment pas condamnation, et la procédure de la CJR risque de prendre plusieurs années avant d'aboutir. Certains franchissent dès maintenant les barrières de l’attente en déclarant comme Aurélie Filippetti « Sarkozy est derrière l'affaire Tapie »… Jamais contente !
L'avocat de Mme Lagarde estime que cette enquête n'était "aucunement incompatible" avec les fonctions actuelles de Mme Lagarde à Washington et qu'elle était souhaitable pour permettre de "laver" sa cliente de toute opprobre. Tout le monde est content jusqu'à présent, ne boudons pas leur plaisir éphémère.

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