Evoquons tout d'abord les chauffe-eau solaires classiques qui diminuent la facture énergétique des foyers voire de certaines entreprises. Contrairement à une idée répandue, ces chauffe-eau peuvent fonctionner partout y compris dans le nord, même par temps relativement couvert. Ils n'ont besoin que de... lumière et la seule restriction n'est pas la froidure, mais la durée d'exposition: il est clair que l'hiver, quand le soleil est bas sur l'horizon et que la nuit dure seize heures, le rendement est inférieur: un complément classique (ballon électrique chauffé par résistance) est nécessaire.
A priori, l'utilisateur privé y trouve intérêt, à une réserve près: le racket opéré par les entreprises qui les commercialisent à un prix scandaleux (des milliers d'euros), tant la technologie de base est simple. Je le sais pour en avoir bricolé un en Guyane au moment où je vivais dans la jungle: vingt mètres de tuyau d'arrosage plié en serpentin, recouvert de noir de fumisterie, le tout conditionné dans un caisson de contreplaqué marin peint lui aussi en noir, avec une vitre sur la face supérieure; à la sortie, un baril métallique de 200 litres isolé avec du polystyrène de récupération bien cerclé. Une petite journée de travail pour votre serviteur qui est tout sauf bricoleur et 900F (environ 180 euros en réactualisant les prix) de fournitures pour obtenir un excellent rendement sans aucun entretien six années durant (l'eau ressortait à 60° environ et en pleine saison sèche, quand l'ensoleillement était maximal, je devais couvrir une partie du caisson pour éviter la surchauffe). Nul doute qu'avec une fabrication en série sur une chaîne adéquate, même en peaufinant l'esthétique, on pourrait obtenir des performances similaires pour un prix dérisoire (d'ailleurs à Djerba en Tunisie, la quasi totalité des demeures sont équipées d'un chauffe eau solaire venu 300 euros)
Pour la collectivité, il en va autrement. Parce que du fait de l'intermittence (période de faible rayonnement, nuit, surconsommation au mauvais moment, l'utilisateur "tire" sur le réseau général en période de pointe. Il actionne donc des centrales à flamme, génératrices de CO2, sous-exploitées puisque peu sollicitées l'été. Outre l'émission de CO2 et d'autres polluants, on déplore un surcoût dû à cette sous-utilisation d'un équipement collectif onéreux.

Le consommateur avisé est donc parfaitement fondé à utiliser son chauffe-eau (s'il l'a acquis à un pris raisonnable) à des fins d'économie, mais l'écolo militant ne saurait tirer argument de son installation... sauf s'il se douche à l'eau froide quand il n'y a pas suffisamment de soleil.


Le photovoltaïque maintenant


Sous couvert "d'écologie", on a également incité à la production de cette énergie dite propre qui a le même défaut que l'éolien: son intermittence (la nuit). Comme pour l'éolien, EDF est tenue d'acheter l'énergie venue des producteurs, que la société en ait besoin ou non, à des prix obscènes comme cela fut expliqué dans la note précédente. Même manipulation que pour l'éolien, avec compensation du prix surrévalué par la contribution au service public d'électricité qu'on devait nommer "taxe pour satisfaire les lubies des ayatollahs verts et des spéculateurs". Là encore, des petits malins se sont octroyés une rente pharamineuse sans débourser un centime. Des sociétés spécialisées prenaient tout en compte, depuis la recherche des crédits jusqu'à l'ingéniérie elle même réduite au minimum: la signature du contrat avec EDF contrainte et forcée et l'installation des panneaux en général de piètre qualité et importés de Chine.
Kosciusco-Morizet a mis le holà à ce racket sur la note d'électricité du consommateur lambda en diminuant le prix de rachat obligatoire, ce qui en soit paraît une bonne chose. En réalité, le remède est pire que le mal pour deux raisons...

- Quelques entreprises françaises commençaient à peine à démarrer la production en série de panneaux photovoltaïques et la baisse du prix d'achat les a tuées dans l'oeuf. Comme au nom du dogme sacro-saint de l'ouverture des frontières et de la concurrence libre et non faussée il n'était pas mis un frein aux importations chinoises à prix cassés, la rentabilité restant confortable mais cessant d'être obscène, les courtiers en énergie se sont massivement repliés sur le matériel importé. On parle de 15.000 emplois productifs détruits en quelques mois.

- parce qu'il est inacceptable de remettre en question la parole de l'Etat. C'est une question d'éthique et de bon sens: ensuite il pourra toujours inciter des entrepreneurs à investir, des SCOP à se constituer pour sauver un outil de production dans tel ou tel secteur... Si on se dit qu'une signature ministérielle peut tomber comme un couperet quelques temps après, on hésite. Plus que des aides, le véritable entrepreneur a besoin de visibilité. 
Quelques convaincus - en plus des gens contraints par les circonstances telles que l'isolement extrême - se sont mis au photovoltaïque individuel pour tendre à l'autosuffisance. C'est une expérience que j'ai également connue en Guyane avec pas mal de déboires. Outre les panneaux, il faut une réserve composée de batteries chères à entretenir en permanence (charge de travail pas énorme mais constante: en cas d'absence il faut trouver quelqu'un pour le faire) et une électronique de régulation sophistiquée. En outre le recyclage des batteries au plomb est plus que problématique (pour une charge plus conséquente, l'emploi du Lithium ou du Cadmium n'est guère envisageable tant le coût serait élevé; en outre si cela se généralise, le prix de ces matériaux déjà très élevé comme celui de toutes les terres rares, commercialisées à 80% par la seule Chine, explosera).

L'ensemble de la filière plomb, depuis l'extraction jusqu'à la fin de vie est une abomination, tant pour l'environnement que pour les humains: il vaut mille fois mieux travailler dix ans dans une centrale nucléaire que six mois au contact de cette saloperie!
Sincèrement convaincu au départ, toutes ces contraintes m'ont amené à en rabattre tant je manquais de fiabilité et de disponibilité. Mes panneaux solaires ne servaient finalement qu'au cours de la journée en branchement direct et la nuit venue, je basculais pour l'éclairage sur le pétrole et le gaz. Pour le frigo j'ai opté, résigné, pour un modèle à gaz en plus... d'une bonne glacière et de pains de glace achetés, deux fois par semaine, cela avant de passer au pétrole (7 litres par semaine pour un froid très satisfaisant, y compris dans un petit compartiment ***)
Un modèle énergétique fondé sur les énergies renouvelables - surtout le photovoltaïque - est survendu avec une propagande mensongère.

C'est celui de la Réunion dont on nous assure qu'elle tend vers l'autosuffisance énergétique "propre". Il faut qu'on m'explique comment fonctionneront les dizaines de milliers de climatiseurs dès la nuit tombée, quand les panneaux ne produiront plus, lorsque la Réunion sera "autosuffisante en énergie propre"!
rgument émis... la possibilité de recourir à la biomasse en complément. On cite la bagasse, résidu d'exploitation de la canne à sucre - en omettant le fait que cette culture est tout sauf rentable en appliquant les standards sociaux européens. Le sucre réunionnais est subventionné à plus de 85% pour être à peine vendable, et cela cessera lorsque Merkel dira "Nein". En outre, cette culture sur le mode relativement intensif est terriblement polluante (engrais, pesticides, fumées et cendres toxiques lors des brûlis, etc.)

Enfin, ce qui est pudiquement passé sous silence, c'est que l'électricité produite dans les DOM coûte de quatre à dix fois plus cher que dans l'hexagone (y compris en Guyane malgré l'existence d'un énorme barrage hydraulique qui a noyé 37.000 hectares de jungle... ce qui génère des centaines de millions de tonnes de méthane. On fait mieux sur le plan environnemental - bien que ce fut présenté comme une prouesse écologique.

Seule la solidarité nationale permet d'offir aux DOM une énergie peu ou prou au même prix qu'en métropole. Que la Réunion facture son énergie photovoltaïque au prix de revient... et 90% des abonnés se passeront de courant, ou le produiront eux même à partir d'un groupe.

(à suivre)

benjamin borghésio