La première est pratique : Il faut savoir que cela fait six ans que j’habite dans la partie Malaisienne de l’ile de Bornéo où j'enseigne aux enfants. L’Indonésie n’est donc pas fort loin. Pas besoin d’un billet d’avion à 700 € et de 20 heures de voyage pour y arriver !


John en Indonésie à vélo par AUXERRETV

 

La deuxième raison est que l’Indonésie est incroyablement diversifiée. C’est un archipel géant. Il y a une multitude de cultures, religions et ethnies, et en voyageant d’ile en île, on a l’impression de visiter plusieurs pays.

 

John Lonhienne (DR) No comment

La troisième raison est sociale/humaine : en voyageant au Vietnam, en Thaïlande ou au Cambodge, je me souviens avoir été fort frustré par l’impossibilité de communiquer avec la plupart des habitants. En traversant les villages en vélo ou en mobylette, j’avais l’impression d’être dans une bulle qui me permettait uniquement d’être un spectateur distant et passif. La langue officielle de l’Indonésie est fort similaire à celle de la Malaisie, un peu comme le français et le Québécois. Me débrouillant assez bien en Malaisien, je n’ai aucune difficulté à comprendre (et à me faire comprendre) dans le moindre petit village des îles les plus isolées. Et puis, c’est assez amusant quand un indonésien me fait remarquer que j’ai un accent malaisien !

Le pire restaurant du monde

Un soir, après 70 km de vélo, et 2 heures de bateau, j’arrive essoufflé, crevé, sale et affamé dans le seul « gros » village de l’ile de Pantar. Après y avoir trouvé l’unique « motel », je m’empressai de demander au propriétaire où je pourrais trouver un restaurant. Fièrement, celui-ci m’indiqua le petit magasin d’en face. Après une douche rapide, je marchai d’un pas empressé vers ce « restaurant ». Je demandai à la femme installée derrière le comptoir s’ils faisaient encore la cuisine. Celle-ci me répondit « bien sûr » avec un grand sourire et me demanda ce que je désirais manger. Naturellement je rêvais comme tous les soirs de lasagne, de steak frites et hachis Parmentier mais bon, elle n’aurait sans doute jamais compris de quoi je lui parlais. Je lui demandai donc s’ils avaient du riz… et la, à ma grande surprise, elle me répondit que non!

Apres six années vécues en Asie du Sud-est, c’était la première fois que je me retrouvais dans un restaurant où on ne servait pas de riz ! Je demandai alors s’ils avaient du poulet et la réponse fut la même ! Réalisant que mon repas ne serait pas le festin dont j’avais rêvé, je ne perdis pas pour autant espoir. Etant sur une petite ile, ils devaient sans doute avoir une multitude de poisson et autres fruits de mer. Mais là encore, la réponse fut négative. Perdant patience, je lui demandai de me montrer quels légumes elle avait… mais elle fit non de la tête. Je lui demandai alors ce qu’elle avait, et elle me montra un paquet de noodles (genre Aiki noodles). Comprenant que je n’avais pas le choix, je lui demandai de les bouillir et d’y ajouter les épices fournies dans le paquet. Dix minutes plus tard, elle m’apporta les noodles servies à même la casserole, avec une cuillère. Ma dernière question fut « avez-vous une fourchette ? » et sa dernière réponse fut, sans surprise, « non » !

 

Tout le long de mon voyage, j’étais régulièrement salué par les villageois d’un agréable  Hello Mister. J’ai toujours essayé d’y répondre avec la même chaleur. J’ai dû certainement en ignorer quelques-uns, je ne me fais pas d’illusion, car j’écoutais souvent ma musique en pédalant. Toujours est-il qu’il y a une région, dans la partie est de l’île de Flores pour être précis, ou les professeurs d’Anglais ont dû tous recevoir et enseigner une erreur pourtant assez basique car durant 3-4 jours, le Hello Mister !  a soudain laissé place à un tout aussi chaleureux Hello Miss ! 

Une autre grosse faute d’anglais que les enfants faisaient tout au long de mon voyage : quand ils voulaient me demander mon nom, au lieu de dire « What is your name ? »,  ils demandaient « My name is ? » avec une intonation tout aussi interrogative, ce qui était en fait assez mignon.

                                                                                                       John Lonhienne

" Une île est à la frontière entre l'être humain et l'univers". Marguerite Yourcenar.

Le périple

Décembre 2011-Janvier 2012

Un mois et demi et 1.314 kilomètres de vélo et solitude en Indonésie. Un vélo acheté à Lombok (à côté de Bali) et alterné par des ferries en faisant les îles de Sumbawa, Flores, Adonara, Lembota, Pantar, Alor, Timor et Rote, pour finir juste au-dessus de l’Australie.
Une région bien peu connue des touristes, extrêmement montagneuse – l’île de Flores l’est tellement que par deux fois il fallut profiter de l’aide d’un van pour arriver à Ruteng et Bajawa - et d’une grande beauté et diversité autant de paysages que de visages : plus l’on va vers l’est et plus le type papou s’affirme au détriment des traits ciselés aux yeux en amande. Un voyageur solitaire avec son vélo et ses sacs inspirait donc la curiosité et faisait l’évènement.

 

Des traversées en ferry qui ont à la fois le charme et l’inconfort de l’authentique, le charme bariolé et étrangement paisible l’emportant sur la simplicité rustique de l’endroit, des repas frugaux mais appréciés et qui, conjugués à l’effort physique du voyage ont coûté 1kg par semaine à notre voyageur heureux.

Coucher vers 19 heures, une moyenne de 9 litres d’eau bus quotidiennement, un coût de 15 €/jour en moyenne, 14 jours d’affilée sans voir de blancs sinon celui dans le miroir… Sans changer de fuseau horaire et en allant de plus en plus vers l’est, l’appel à la prière le plus matinal fut celui de 3h30…


Le trait bleu figure le trajet accompli par John Lonhienne

 

Qui es-tu donc, John?

 

Quelle est ta formation au départ?

J’ai fait 4 années d’études à l’université de Louvain-la-Neuve, prés de Bruxelles. J’y ai fait une licence en Education Physique. Je pense que c’est l’équivalent belge de ce que vous appelez le «  STAPS » en France.

Quel destin ou hasard t'a amené en Malaisie?

Après avoir voyagé en Australie pendant six mois, j’ai fait une « escale prolongée » à Kuching, sur l’île de Bornéo. J’ai adoré l’ambiance décontractée, les singes dans les parcs nationaux et les randonnées dans la jungle. J’ai réussi à décrocher un contrat renouvelable pour y travailler dans une école internationale… et je commence maintenant ma sixième année dans cette même école. Je pensais au départ n’y rester qu’un ou deux ans… mais je suis tombé amoureux de l’endroit… (Pas seulement de l’endroit d’ailleurs !)

 Qu'y fais-tu exactement? 

Je donne des cours de science, éducation physique et histoire/géo à des élèves de 11-13 ans. Du moins, ça c’est ce que je fais du lundi au vendredi entre 8 et 16 heures, et j’adore ça ! En dehors des cours,  je fais beaucoup de sport, de musique, de lecture et de randonnées dans les environs. Mes vacances sont généralement dédiées a des voyages a vélo sur l’ile de Bornéo (qui a environ la même taille que la France).

As-tu trouvé l'adaptation difficile?

Aussi étonnant que cela puisse paraitre, extrêmement aisée ! La plupart des gens éduqués parlent bien l’anglais et puis le malaisien est assez facile à apprendre. Je ne suis pas trop difficile niveau nourriture : s’il y a un plat qui me plaît, je peux manger la même chose tous les jours ! La chaleur et l’humidité sont parfois, je l’avoue, oppressantes… mais on s’y fait !

Qu'est-ce que te manque le plus de l'Europe et au contraire qu'est-ce que tu considères un bonus?

Ce qui me manque le plus : Le fromage ! Et puis, comme je ne suis pas un grand cuisinier (et je n’ai pas l’intention de le devenir), il y a pas mal de plats, pourtant assez simples, qui me font rêver. Lasagnes, hachis Parmentier, Tomates farcies…

Plus sérieusement, ce qui me manque le plus, c’est d’être auprès de ma famille et de mes amis. Enfin, je rentre en général une fois par an pour un peu plus d’un mois… donc je fais le plein à ce moment-là ! Une autre chose qui me manque, ce sont les saisons. Ici, c’est toujours plus ou moins pareil et je trouve que le rythme des saisons, c’est charmant et même  romantique !

Le principal bonus, c’est le temps ! En Belgique (et en France, j’imagine), les gens courent après le temps... mais ne l’attrapent que rarement !  Ici, la vie est plus simple ; il y a moins de distractions… mais le temps, on en a ! Souvent, mes weekends se résument a ceci : boire quelques bières avec des amis le vendredi soir, jogging, tennis et musique le samedi et enfin lecture, frisbee et DVD le dimanche ! Comme vous le constatez, ca n’est pas trop stressant et je pense que c’est comme ca que la vie devrait être vécue !

Te sens-tu déphasé lorsque tu rentres en Europe, et à propos de quel genre de choses?

Comme je le disais, c’est la vie stressante et surmenée que beaucoup de gens ont qui me choque le plus. Une autre chose, c’est le prix de la vie. A chaque fois que je convertis les prix européens en ringgits (monnaie malaisienne), je n’ai plus envie d’acheter le produit !

Qu'est-ce qui t'a conduit à faire de la vidéo et des montages?

D’abord, étant un fan de nature, c’est la photo des paysages et des animaux qui m’a initié. Ensuite, comme ma famille et mes amis me demandaient souvent des nouvelles, j’ai trouvé qu’envoyer quelques vidéos, c’était plus évoquant que d’écrire des longs emails. Et puis, mes élèves adorent regarder mes photos/vidéos. Je les utilise pour mes cours de science et géographie (animaux, plantes, volcans, pays…)