Le blog d’Anne Duvivier sur Médiapart membre comme AuxerreTV du Syndicat de la presse d'information indépendante en ligne -  SPIIL - , dénonce la menace bien réelle qui plane sur ce lieu dont l’évolution ressemble souvent à une mission impossible.


Le 29 septembre 2010, AuxerreTV recevait André Villiers, sénateur-maire de Vézelay, pour un podcast portant sur la visite, le lendemain, de Nicolas Sarkozy. Visite au cours de laquelle le président demanda à Pascal Lelarge, préfet du Département, d’engager une démarche pour le renouveau du Vézelay.


Un programme stratégique pour le renouveau de Vézelay prit alors forme. Son coût estimé était de 45 à 60 millions d’euros, sur une durée de 10 ans. On mentionnait sans s’y attarder en détails le modèle d’aménagement du Mont Saint Michel. On visait particulièrement la restauration de la basilique, la sauvegarde des remparts et du chemin de ronde, la mise en valeur des sites voisins. En passant, on suggérait d’ajouter des hébergements d’un niveau intermédiaire entre les établissements haut de gamme et les gîtes de France et structures d’accueil bas de gamme. La réfection de la voirie et l’accès étaient prévus.

(D.R.)


Le cabinet d’étude de Frédéric Didier fut chargé des études de plans et élabora un schéma directeur, pour la somme de 109.000 euros sortant de la caisse de la Direction régionale des affaires culturelles. Estimant que le village doit être désormais considéré comme une antichambre de l’abbaye (qui n’existe plus…), il imagine à quoi l’ensemble a pu ressembler autrefois et désire lui rendre vie :
« La basilique se retrouverait flanquée d’un cloître de facture moderne, faisant face à une terrasse surélevée ceinte d’un parapet, recouvrant les minces vestiges d’un cellier mis à jour en 2012, et prolongé par un bâtiment imposant, le fameux « centre d’interprétation ». Cette bétonisation venant barrer et supprimer la rue actuelle, longeant une belle propriété au flanc de la basilique, laquelle propriété se verrait simplement amputée d’une partie de ses jardins pour permettre la refonte du paysage ».


Vézelay a beau être « patrimoine mondial », et sans prétendre qu’un cabinet d’étude situé bien loin ne soit pas capable de sentir l’âme de ce patrimoine, il semble légitime de penser que c’est à ceux qui en sont proches que l’on devrait demander où trouver les éléments essentiels, ceux à garder envers et contre tout et tous, et d’indiquer leur vision du futur. Car remplacer les grandes fenêtres vitrées par des vitraux bleus est une gifle au travail d’amour qui a voulu que les premiers bâtisseurs aient compté avec le chemin de la lumière au travers de ces fenêtres qui vient, au solstice d’été, se poser en taches régulières sur le sol. Et la lumière a la couleur cristalline de la lumière et pas d’un saphir. C’est la couleur de la lumière quelle que soit la religion, le pays, ou le temps dans lequel on se trouve.

(D.R.)


Ce schéma directeur, rappelle à Avallon le sous-préfet Jérôme Chappa, n’est qu’un projet, qui se fera avec l’accord des habitants seulement. Habitants bien déçus puisqu’ils ont constitué 5 groupes de travail que la synthèse des études réalisées par eux a mal représenté leur travail, ne débouchant sur rien.


Le nouveau maire de Vézelay, Claude Michon, est bien las d’être embarqué dans cette bataille sans fin contre l’administration et les multiples règlements interdisant ceci et rendant obligatoire cela tout en ne permettant pas ça. Pendant ce temps les remparts se désagrègent et la basilique souffre de multiples maux qu’on ne sait soulager faute de crédits. Position difficile que d’être maire au milieu de ces forces multiples qui agissent par vagues et avec des intérêts bien différents. A la réunion publique d’information du 13 avril dernier, Frédéric Didier n’est pas venu en personne défendre son projet face aux Vézéliens, mais a envoyé un de ses collaborateurs. Il ne sait donc pas ce que Vézelay a donné à l’histoire ni ce qu’elle lui a donné, ce que le recteur de la basilique, Mgr François Tricard a exposé.

 

André Villiers, l'ancien maire de Vézelay est aujourd'hui président du conseil général de l'Yonne. Il explique que les travaux commencés sur la basilique, une partie des remparts et quelques monuments coûtent déjà huit millions d'euros et sont la phase préalable au lancement de  l'Opération Grand site. Une somme énorme. Il suggère donc, avec le soutien de la population de tous bords politiques, que la reconstitution de l'abbaye soit une reconstitution... virtuelle. Après tout, l'informatique ouvre des possibilités multiples et accessibles. Les fonds et énergies pourraient alors être consacrés à l'essentiel, en accord avec tous, les architectes, historiens, élus et amoureux du site.


Une histoire à suivre. Des crédits accordés et qu’il faut attendre pendant qu’on suit l’histoire et que ce patrimoine mondial de l’Unesco se dégrade.

 

                                                                              Suzanne Dejaer