Gadine Barbara Moreau, écrivain et comédienne, pendant la lecture de sa lettre à Julie pour Auxerre TV (DR)

 

A l'occasion de la soirée de soutien pour Julie Michel,  vendredi 27 septembre à la salle des fêtes de Brienon (89), Gadine (alias Barbara Moreau, écrivaine et comédienne auxerroise) a lu un texte qu'elle venait d'écrire pour Julie, Julie Michel, disparue depuis juillet dans l'Ariège.
Au programme de cette soirée de solidarité, chorale, Claudine Creach conteuse, Guy Chapalain à la guitare et Jean-Michel Solesle, Benoit Pichot, batteur, ont toutes et tous apporté leur énergie.
La maman de Julie Michel, Betty Lefebvre était présente ainsi que des membres de la famille et des amis proches.

Gadine a relu son texte devant la caméra pour Auxerre TV. Ce texte a déjà été lu par plus de 1 000 personnes sur le Facebook de Gadine.

 



 

 

A Julie 

 

Julie Michel, jeune Auxerroise de 26 ans disparue à la mi-juillet dans l'Ariège (DR)

 

Il était une fois une petite poule blanche, toute blanche, tellement blanche qu'on aurait dit que ses plumes avaient des reflets d'eau. Elle était coiffée d'une huppe toute noire et quand on la croisait, on disait : « Tiens, voilà la petite poule blanche aux cheveux noirs ! ».
Elle vivait à la campagne. Enfin... à la campagne... si on considère qu'en dehors des grandes fermes, c'est la campagne partout.
Un jour, elle eut envie de voyager, de prendre de la hauteur et de voir une montagne, une grande montagne, une vraie, avec des sommets, des pics, des cascades. Elle en avait assez des collines de Bourgogne, de ses plaines et de ses bois détrempés. On finissait toujours par se cogner dans quelqu'un de connaissance et la petite poule blanche à la huppe noire rêvait de changement, de solitude et de liberté. Elle salua donc ses parents, sa sœur, ses amis et un lundi du mois de juillet, elle prit la route des Pyrénées. Ainsi, elle pourrait passer l'été à crapahuter sans craindre le froid et serait de retour avant les premières neiges. Elle avait bien entendu parler des loups et des ours des montagnes, mais comme la petite chèvre de M Seguin, déjà ivre de vent et du parfum des aspérules, elle n'y pensa plus aussitôt l'Ariège en vue. Elle se disait qu'au village, à Auxerre, on serait bien surpris de son audace, de son courage à se lancer toute seule à l'assaut d'une chaîne de montagnes, comme une brave petite poule blanche qu'elle était. Elle disparut au détour d'un chemin.
Au bout de quelques semaines, on commença à s'inquiéter de son silence. Chez elle, l'inquiétude vira à l'angoisse et à l'épouvante. La petite poule blanche n'avait pas donné signe de vie depuis trop longtemps. On finit par s'alarmer et on se lança à sa recherche. Rien ! On découvrit ses affaires près du col du Port de l’Hers, mais de la petite poule blanche à la huppe noire, on ne trouva nulle trace. L'oiseau s'était envolé !
La nouvelle se répandit comme une traînée de poudre jusqu'au village. Il est bon parfois d'être d'un village. Les habitants des fermes de Bourgogne se réunirent et décidèrent de chanter ensemble un hymne au retour de la petite poule blanche à la huppe noire.
Ils se disaient que leurs chants monteraient tellement haut, encore plus haut que le haut du pic le plus haut que la petite poule blanche à la huppe noire l'entendrait et qu'elle reviendrait. Ils se disaient que la somme de toute leurs énergies déplacerait la montagne, que l'amour de toute la Bourgogne ainsi conjugué irait jusqu'au cœur de la pierre qui elle-même se mettrait à chanter le retour de la petite poule blanche à la huppe noire.


Gadine, à Julie, 19 septembre 2013

 

 Julie Michel