"Monsieur Cotret a utilisé certaines méthodes avec moi. Je ne suis pas du bois dont on fait les flûtes. Je ne veux pas entrer dans les détails, je ne veux pas polémiquer. J'étais là pour construire et avancer. Je démissionne parce qu'il y a incompatibilité d'humeur entre Guy Cotret et moi. Je ne peux pas travailler avec quelqu'un comme lui  et je n'ai pas de leçon à recevoir de ce monsieur".

C'était vendredi en fin d'après-midi. Et Robert Clairay d'annoncer qu'il démissionne de sa charge de président mais aussi de son mandat d'administrateur et de membre de l'association AJA, actionnaire de la SAOS AJA que préside Guy Cotret. Ce dernier ne souhaite pas s'étendre sur le sujet qu'il qualifié "d'épiphénomène". Rideau, circulez, il n'y a rien à voir.

Le plus fort dans l'histoire est que les deux hommes ne se sont jamais rencontrés. Et ne se connaissent pas. Robert Clairay, un passionné de l'AJA depuis 30 ans (son entreprise fut sponsor maillot Eurotyre au début des années 2000) a été coopté et élu au conseil d'administration de l'association AJA au mois de septembre. Alors que s'est-il passé en trois jours, de mardi soir à vendredi après-midi) qui justifie un tel divorce ?

Guy Cotret a demandé à voir le nouveau président de l'association AJA. Ce dernier qui vit dans le Loiret où il gère son entreprise, a répondu souhaiter se mettre au courant des dossiers avant de rencontrer le président Cotret.

Il a dégagé le jeudi après-midi, dans son emploi du temps, pour se rendre à une réunion du conseil d'administration de l'association qu'il préside, prévue dans les locaux de l'AJA. Il faut savoir que son prédécesseur, Henri Maupoil, y avait son bureau où il allait travailler tous les jours, en coopération avec le personnel et la direction générale du club. On notera que le président Guy Cotret n'était pas là.  Des membres du personnel avaient exprimé le souhait, auprès d'Alain Gehin, administrateur, de faire la connaissance du nouveau président de l'association. Ce dernier n'y tenait pas, dans un premier temps, avant d'avoir connaissance des dossiers.

Après avoir visité les installations de l'AJA dont l'association qu'il préside est le propriétaire, après avoir rencontré les membres du personnel et après avoir tenu une réunion du conseil d'administration, où tous les dossiers en cours ont été examinés (y compris le cas des vestiaires incendiés non réglés qui pénalisent les jeunes... Guy Roux menace le cabinet du maire d'amener 400 gamins devant la mairie pour protester) , coup de théâtre, Robert Clairay annonce sa démission à tous les administrateurs, vendredi après-midi.

Motif invoqué : Guy Cotret avait adressé un SMS désagréable au nouveau président de l'association AJA ainsi qu'un mail véritable brûlot. Mais qu'est-ce qui a motivé Guy Cotret pour expédier de tels missiles via internet ?

 

Non pas une mais des vérités

À défaut d'avoir accès aux pièces du dossier, AUXERRE TV a enquêté et recoupé les infos puisées à différentes sources, car il y a eu des témoins directs des événements. Voici ce que l'on peut dire en substance et cela ne doit pas être loin de la vérité objective, sachant qu'il n'y a jamais UNE vérité mais des vérités.

Robert Clairay a été reçu dans la salle de vie des joueurs pros, située à côté des vestiaires, avec les administrateurs de l'association AJA (Truffaut, Cool, Maupoil, Parmentier, Gehin, Roux, Hébert Ndlr) jeudi après-midi. Après s'être présenté, comme le demandait le personnel, le nouveau président a répondu aux questions posées dans l'assistance. Il lui a notamment été demandé son sentiment sur la situation actuelle du club.

Robert Clairay a rappelé que le président Cotret avait tenu un discours fondateur dans les celliers du département à la préfecture, voilà quelques mois. Un discours faisant notamment référence à l'ADN de l'AJA, à savoir la formation. Robert Clairay s'est dit surpris d'observer que la suite avait contredit cette affirmation dans le sens où des entraîneurs historiques de l'AJA avaient été écartés (Henna, Guerirreiro, Vahirua...) du centre de formation.

Il s'est également étonné que l'AJA se prive de l'expérience de son entraîneur historique, Guy Roux, pour qui il dit vouer un vrai respect. Robert Clairay dit qu'il parlait avec ses tripes et son coeur et qu'il était comme ça (il a même tapé du poing sur la table pour exprimer ses dires Ndlr). D'un mot un homme entier. Un homme à prendre ou à laisser.

Il faut dire que certains ne peuvent s'empêcher de penser que Guy Roux, prisonnier du club qu'il a fait monter, tire toujours les ficelles pour contrer une direction dont il n'épouse pas les décisions dès lors qu'elles ne sont pas les siennes. C'est vrai mais loin d'être aussi simple. AUXERRE TV ne fera pas l'injure à Henri Maupoil et Robert Clairay, deux présidents démissionnaires, à avoir claqué la porte de Guy Cotret, de les considérer comme des marionnettes.

 

Péché capital

Toujours est-il que ces propos tenus par Robert Clairay (déformés de manière malveillante ?) ont été relayés vers le président Cotret qui a réagi aussi sec. Sans rencontrer l'homme. Péché.

Cela s'appelle un "pétage de plombs" dont aucun humain n'est à l'abri. Par texto d'abord puis par mail, adressés au président Clairay. Des contenus qui ont manifestement blessé le chef d'entreprise rompu aux négociations et aux relations humaines. Un homme proche des gens selon les témoignages recueillis. Un homme, aujourd'hui, profondément blessé.

Voilà l'histoire. Elle n'est guère brillante ni passionnante. On se croirait dans une cour de récréation en présence d'amateurs. Mais c'est une histoire d'hommes, donc humaine. C'est la vie.

Il reste à connaître la suite. Lundi soir, le conseil d'administration de l'association AJA se réunit pour examiner la situation après la démission du président Clairay dont le siège est désormais vacant ainsi que celui d'un autre membre, M. Billotte,  décédé voilà peu. Bref, les 8 administrateurs de l'association AJA ne sont plus que 6.

Deux hypothèses : soit le conseil d'administration de l'association AJA élit un nouveau président qui va se retrouver confronté aux mêmes problèmes frontaux, soit il décide de rendre compte et consulter les membres sur la marche à suivre, le 7 janvier, puisqu'une assemblée générale de l'association AJA est prévue à cette date.

Raison garder et prendre le temps de la réflexion et de l'apaisement, à la veille des fêtes de fin d'année, symbole de paix, semblent devoir s'imposer. Et puis bientôt, la lumière va revenir avec l'allongement des jours après le solstice d'hiver. De lumière, tout le monde en a grand besoin. Y compris à l'AJA, ce club aimé de toutes et de tous, de multiples manières.

 

Pierre-Jules GAYE

 

 

À QUOI SERT GUY COTRET ?

 

Guy Cotret, un seigneur, un homme au-dessus de la mêlée, un homme seul, qui semble sûr de lui, qui tranche. Un homme qui donne l'impression de mépriser les autres mais qui a un  besoin irrépressible de reconnaissance. Un président physiquement absent qui communique difficilement (DR)

 

Qui est Guy Cotret ? À quoi sert-il, objectivement ?

Il est le président de la SAOS AJA (SA société à objet sportif)  qui dirige et gère la section professionnelle du club,

L'ancien banquier originaire de Reims où il était responsable de la caisse locale de la Caisse d'Épargne, est mandaté par l'actionnaire majoritaire - sauveur du club en avril par un apport de 5 millions d'euros qui permit d'éviter le dépôt de bilan - Emmanuel Limido, président de la holding Centuria Capital, modeste société d'investissement en capital risque, dont le siège est au Luxembourg, avec un chiffre d'affaires d'un peu plus de 100 millions d'euros.

Au travers d'une filiale PLP (Paris-Luxembourg participation), Emmanuel Limido, un ancien gestionnaire du patrimoine de Liliane Bettancourt avant de faire fortune dans l'immobilier et de se lancer dans le capital risque en Centre  Afrique en s'appuyant sur le réseau familial local très fortuné (un homme de relations donc Ndlr ) est l'actionnaire majoritaire de la SAOS AJA dont il détient 60% des actions à travers sa filiale AJA XXL, elle-même filiale de PLP, filiale de Centuria Capital.

Il n'y a qu'un seul autre actionnaire, minoritaire, à savoir l'association AJA, qui détient 40 % des actions mais aussi la propriété des terrains et du bâti route de Vaux, le centre de formation compris ainsi que la licence FFF et la marque AJA.

Autrement dit, pour répondre à la question, qui est le président Guy Cotret, premier élément de réponse, ce dernier n'a pas misé un seul kopek dans l'AJA. C'est un dirigeant gestionnaire, mandaté par l'actionnaire principal pour gérer l'AJA. Point.

Donc il gère pour le compte d'un autre, depuis le mois d'avril 2013 et la reprise du club.

Que fait-il ? Il recrute sans débourser un cent en enrôlant des joueurs en fin de contrat disponibles sur le marché.  Et il vend ce qu'il peut vendre en fonction d'une situation dont il hérite. Par exemple Sanogo dont le contrat venait à expiration et qui n'a pas été renouvellé... car le verdict médical était négatif. Aujourd'hui, Sanogo est à Arsenal et ne joue pas. Arsène Wenger dit que si Sanogo lui marque le but de la victoire en finale de la Champion's league, il est content.

Que fait-il ? Il gère depuis Paris où il a ses affaires. Il est rarement à Auxerre comme il l'avait annoncé dès le départ, donnons-lui en acte. Il est vrai qu'il a placé un homme route de Vaux, en la personne de Fabrice Hérrault, une pointure, une cylindrée intellectuelle style énarque, passé par Andersen Consulting et Ernst and Young. Objectif : dégraisser, se séparer des gros salaires (Coulibaly, Sorin, Hengbart... notamment) réduire les coûts à marche forcée, en effectuant des coupes claires dans le personnel. Ramener le budget de 21,5 millions à 14 puis 12 en deux ans. Un budget qui ne correspond plus à la Ligue 2 et à ses recettes limitées.

 

Emmaneul Limido piégé

Un plan social est mis en oeuvre qui prévoyait 7 licenciements parmi le personnel. Les contrats de l'encadrement principal du centre de formation sont dénoncés ou non renouvelés (Henna champion de France avec les U19, Gueirreiro, directeur du centre de formation, entraîneur de la CFA, Vahirua entraîneur... sans compter le kiné et d'autres). La direction et la gestion des études au centre de formation sont sous-traitées à une entreprise parisienne. Les 40 profs historiques sont débarqués sans préavis, certains estent en justice, tout comme des entraîneurs écartés (jugement aux Prud'hommes le 13 janvier). Enfin, coup de théâtre, le bras armé du président Guy Cotret, son homme lige route de Vaux, Fabrice Hérrault, directeur général, est débarqué car il "a failli dans toutes les missions qui lui avaient été confiées" à en croire Guy Cotret, qui s'est exprimé ainsi en réunion de personnel à deux reprises. Bref la rupture.

Le vrai boss, Emmanuel Limido, qui n'en demandait pas tant, est contraint à jouer les pompiers et à prendre en mains la "communication" du club dans laquelle certains médias locaux n'hésitent pas à s'engouffrer. Il rapatrie dans ses bureaux parisiens Fabrice Hérrault et lui confie la mission de trouver en Chine ou et dans les pays du Golfe Persique, des partenaires financiers pour vendre ou entrer au capital de l'AJA. Poste en jeu. Moins d'un an pour réussir.

Il y va de la survie du club qui affiche un déficit conséquent qu'il faut combler sous peine d'être sanctionné par la DNCG (direction nationale de contrôle de gestion) ou d'être contraint au dépôt de bilan.

Ce n'est un secret pour personne : Emmanuel Limido ne mettra pas plus des 5 millions d'euros déjà consommés. Or ce n'est pas 5 millions dont l'AJA a besoin, mais 10 pour respirer...

Enfin, at last but not least, Guy Cotret n'a toujours pas renouvellé le contrat de l'entraîneur Bernard Casoni, le seul homme qui fait l'unanimité à l'AJA et dans la cité, à la fois pour ses qualités professionnelles et ses qualités humaines. Lui, il tient son vestiaire. Sans commentaires.

Force est de constater que Guy Cotret fait le vide autour de lui. C'est un homme seul, qui en deviendrait dans une chute vertigineuse, presqu'attachant ... Il dit tout faire en concertation avec Emmanuel Limido l'actionnaire principal. On ose espérer que non.

 

P-J. G.

 

 

Cotret croit en la force du groupe ...Cotret un homme de plus en plus seul