Le maire de Cravant Colette Lerman a regretté la méthode d'une concertation foireuse et biaisée (DR)
 

3h30 de réunion tendue, salle des Maréchaux à Avallon en présence de 200 personnes. À la manoeuvre, Michel Neugnot 1er vice-président du conseil régional en charge de la mobilité et du "rendu de concertation" (sic) et les responsables de la SNCF venus présenter la future desserte TER du Morvan, car tel est l'intitulé du document sans même que précaution ait été prise d'y glisser le terme "projet". Voilà qui suggère fortement que le dossier est d'ores et déjà ficelé et que la concertation annoncée n'y ferait rien. D'autant que d'entrée, il a annoncé que les arrêts à Vermenton et Champs-Saint-Bris seraient maintenus, pensant déminer un dossier explosif.

En somme, les représentants de la Région Bourgogne et de la SNCF seraient venus expliquer aux populations rurales que, pour mieux remplir les trains il fallait supprimer des arrêts, au nom de la sacro-sainte "intermodalité" (traduction le car ou le taxi) qui améliorera le sort des ruraux qui ne seraient plus desservis par le train.

 

Taxi driver

On peut résumer ainsi : à partir du mois de juillet 2014, moins de trains (3 au lieu de 5) à des horaires différents (moins compatibles Ndlr), des arrêts supprimés remplacés par des taxis et bus à la demande, pour un temps de parcours plus court.
 
De fortes oppositions se sont manifestées dans la salle. Première salve en forme de moquerie contre les glissements sémantiques d'une technocratie qui use le plus sérieusement du monde des concepts éléments de langage destinés à enfumer : le bilan carbone meilleur, grâce à la suppression d'arrêts dans des gares ? Comment un esprit libre comme celui de Michel Neugnot, honnête homme, peut-il se laisser abuser par une telle stupidité ? À moins qu'il n'ait cru impressionner les membres de l'assistance dans son souci de déminer ce dossier. Bâton merdeux. Mais alors, aurait-il pris les gens pour des gogos, en Morvan par surcroît ? L'homme de Semur-en-Auxois qui professe chambres d'hôte ne devrait pas raconter ces bobards à ses visiteurs.
 
Colette Lerman, maire de Cravant, a regretté une "concertation foireuse" ainsi que le "revirement" de la région qui masque peut-être ses problèmes budgétaires derrière de fausses raisons, des minutes gagnées entre Avallon et Auxerre, mettant de côté, outre les usagers, tous les acteurs économiques du sud de l'Yonne.
 
André Villiers, président du conseil général, a proposé d'augmenter la vitesse des TER et a mis en garde contre le système taxi qui pourrait annoncer la fin de la ligne en cas de non renouvellement de la convention. Le sénateur Jean-Baptiste Lemoyne propose un moratoire et l'engagement d'une vraie concertation.
 
 

André Villiers le président du conseil général s'oppose à la desserte et propose d'aumgenter la vitesse des trains pour gagner le temps recherché. Il a insisté sur le potentiel du Morvan, l'accroissement du tourisme et demande qu'il soit rendu au territoire ce qu'il a donné avec les nourrices et le transport du bois. André Villiers redoute la fin de la ligne que signerait une non reconduction de convention avec la compagnie de taxi-bus, comme cela vient de se produire dans les Cévennes (DR)

 

Le nouveau et jeune sénateur Jean-Baptiste Lemoyne a solennellement demandé aux représentants de la Région Bourgogne un moratoire sur ces mesures élaborées sans tenir compte de la réalité de des territoires ruraux. Un schéma régional sur la mobilité et l'intermodalite doit être élaboré par la Région pour janvier 2016 : il propose donc de mettre à profit 2015 pour travailler à une desserte intelligente et ambitieuse pour la ligne Morvan-Paris. Si rien ne bougeait, une marche solidaire sera organisée sur Dijon pour que les "sans trains" ne restent pas sans voix. (DR)

 

 

Objectif gain de temps, la voie à suivre ... ?

 

Michel Neugnot précisa qu'il y avait 10 arrêts sur 55 km entre Avallon et Auxerre. Quel est l'objectif identifié ? : « Raccourcir la durée de transport, ne pas modifier les habitudes des usagers, rester dans le même prix » . Améliorer le temps de parcours sur les trajets ferroviaires entre Clamecy et Paris-Bercy de 25 minutes (soit 4 minutes entre Clamecy et Laroche Migennes). Idem pour Avallon-Paris et donc Avallon-Auxerre. Or ce gain de temps fut largement contesté par des élus et de nombreux usagers, pour lesquels, «l'amélioration des temps de parcours, c'est secondaire ».

En revanche, la suppression d'arrêts dans certaines gares ne passe pas. Non plus que le  transport à la demande : des taxis TER afin d'assurer l'acheminement des voyageurs entre les communes où les arrêts sont supprimés et la gare desservie la plus proche.

Michel Neugnot qui a beaucoup utilisé la truelle, mardi soir, a constamment enfoncé le clou, celui du gain de temps, « sans dégradation de l'offre ». Et en demeurant ferme sur ses positions. SNCF-Conseil régional, même combat ... celui contre la réduction des charges. La SNCF veut se défaire de ce qui n'est plus rentable et vendre les bâtiments qui coûtent cher. Telles des gares peu fréquentées. Les cadencements TER seraient-ils délaissés au profit de celui des TGV ? Le conseil régional dépense 200 millions pour les TER, subventionnant ainsi aux deux tiers le billet de train, ce qui peut paraître énorme.

Les régions de France vont voir leur nombre divisé par deux et les élections sont pour l'an prochain, en principe. La répartition des compétences va changer sans qu'on en connaisse précisément les contours. Les routes, les transports ne seraient plus de la compétence des conseils généraux mais des régions. Transfert de compétences signifie-t-il transfert de ressources ? Et quelles ressources pour faire face ?

 

Le fer dernier symbole de survie

Force est de constater que c'est l'imbroglio. C'est dans ce contexte presque délétère, que s'inscrit la future desserte TER du Morvan. Les usagers, les élus, les artisans, la population tiennent dur comme fer à leur chemin de fer qui irrigue le territoire. Et d'autant plus qu'il apparaît comme l'ultime rempart après la perte de biens des services publics, telle la poste. Aussi comment s'étonner qu'une gare, un arrêt représentent le symbole fort de la survie, même s'il ne sont pas nombreux, pour l'heure, à monter sur les quais.

Il est révélateur qu'aucune des parties n'a communiqué les chiffres de fréquentation et leur répartition dans le temps, de la ligne du Morvan. On touche à l'irrationnel, à l'instinct,  au sacré.

Comment croire qu'à terme ces lignes rurales ne sont pas condamnées à la fermeture, à défaut d'une véritable politique d'engrossement volontaire du territoire ? Comment ne pas faire le lien entre l'annonce par Michel Neugnot, mardi soir, de l'inscription au contrat de plan État-région de l'électrification de la ligne Auxerre-Laroche-Migennes, demandée depuis les années 70, repoussée constamment à force d'études plus coûteuses les unes que les autres, avec la suppression d'arrêts de train dans les gares de l'Yonne ? Auxerre vouée à devenir la gare terminus de la ligne de Paris.

Mais comment alors expliquer les investissements consentis au cours des dernières années pour améliorer les dessertes ? Les travaux dans les gares et sur les voies. Les 35 millions d'euros pour permettre d'accélérer le trafic ferroviaire entre Auxerre et Avallon afin de pouvoir rouler à 110 km.h ? Pour entendre dire, aujourd'hui, que rouler à 110 km/h ce n'est pas possible, en excluant la fameuse rampe d'Avallon. Ou apprendre que l'électrification de la ligne Auxerre-Laroche-Migennes allait être inscrite au contrat de plan État-région, après 44 ans de demandes réitérées refoulées car jugées d'un coût démesuré pour un gain très marginal ? Alors qu'est-ce qui fait bouger les lignes, enfin ? Le bilan carbonne... ? Si ce n'est pas de l'enfumage, va-t-on électrifier sans doubler la voie entre Chemilly et Auxerre ?

Quelle impression de gâchis et d'inconstance dans le discours politique. Quels hésitations et revirements au plus haut niveau. Quel manque de visibilité et de vision.

Alors faut-il se résigner à accepter stoïquement ce qu'on appelle les tendances lourdes en dépit de toutes les politiques affichées et des campagnes de communication coûteuses, l'exode rural inexorable, la baisse de la démographie, le gonflement parfois hideux des villes qui n'offrent pas davantage de travail aux jeunes ... ?

Quelle politique aura le courage de dire les choses vraies plutôt que de continuer à faire semblant et à maquiller la réalité ?

Ce dont a besoin le Morvan et nos campagnes, c'est d'un vrai projet de territoire, volontariste, d'ailleurs amorcé dans le domaine du tourisme, des activités du parc régional, des canaux et véloroutes.

 

Pierre-Jules GAYE



AUXERRE TV propose la video première partie de la réunion d'Avallon, consacrée à la présentation de la nouvelle desserte TER Morvan.

Une deuxième video sera consacrée aux questions des opposants et aux propositions de ces derniers.

 

 

 

Les questions et les propositions

 

 

 

Dernière partie de la réunion