C'est la première fois, en France, que des élections ont lieu sous le régime de l'état d'urgence. Avec des milliers de policiers et soldats patrouillant, avec des perquisitions quotidiennes.

Le parti de Marine Le Pen a capitalisé sur les attentats du 13 novembre à Paris qui ont fait 130 morts, pour devenir en nombre de voix, ponctuellement, le premier parti de France lors du premier tour des élections régionales que le Front national a remporté haut la main. Effectuant un bond de 11% à 29% par rapport aux élections régionales de 2010.

Les thèmes porteurs de la sécurité et de l'identité nationale ont propulsé le FN en tête dans un contexte politique d'exception.

Le parti anti-immigration, anti-rhétorique musulmane et anti-européen, s'il parvenait à maintenir son avance au second tour, remodelerait le paysage politique français, à un peu plus d'un an de l'élection présidentielle en ligne de mire, dont la perspective a brouillé les cartes et les stratégies.

Le premier perdant est la France car la moitié des citoyens ne sont pas allés voter.

Le second perdant est François Hollande qui n'a pas su répondre au chômage grandissant et à la dégradation des conditions de vie des Français appelés à se serrer la ceinture.

Le troisième perdant est Nicolas Sarkozy le patron LR dont la stratégie d'unité et celle du ni ni sont aujourd'hui en échec et critiquée à l'intérieur de son parti.

Mais le plus gros perdant c'est le citoyen français qui n'a pu entendre les propositions concrètes des uns et des autres pour améliorer son cadre de vie.

D'abord parce que la campagne a été raccourcie par le deuil national et nationalisée par l'onde de choc des attentats de Paris, ensuite parce que les candidats n'ont pu décliner leurs propositions concrètes demeurant souvent dans le flou des propositions générales en fin de réunion. D'autant que certaines sont surréalistes. Notamment celles du FN (financé par la Russie) qui prône après la sortie de l'euro, une alliance Européenne avec la Russie et la Suisse. Sans parler de la politique discriminatoire vis-à-vis des étrangers dont l'Insee démontre pourtant que ces derniers rapportent plus à la France qu'ils ne lui coûtent.

Le FN a-t-il surfé sur une vague exceptionnelle générée par le drame, l'angoisse et le ras-le-bol ? D'un moment paroxystique ? Ou s'agit-il d'un élan et d'une dynamique de fond qui traverse notre société et auquel on ne peut échapper ?

Les abstentionnistes, l'armée de l'ombre, le peuple silencieux, vont-ils se décider, dans ces cicronstances, à aller voter au match retour ? Si oui, qui en profitera ?

À analyser les scrutins, on observe qu'il y a toujours une correction au second tour de scrutin. Si le FN a fait le plein au premier tour, il ne dispose plus de réserves importantes. Leader au premier tour, la dynamique gagnante lui apportera-t-elle un bonus décisif qui annulerait le mouvement de correction ?

La prise de conscience, lundi matin, de la réalité vraie - et non du mauvais rêve - modifiera-t-elle la donne ? Une gueule de bois peut-elle devenir conquérante ?

La question n'est pas "faut-il espérer ?", mais "en quels termes faut-il dessiner l'espoir ?"

La question est : que veulent vraiment les Françaises et les Français ? Pas sûr que cela passe par le FN d'autant qu'ils n'y croient pas au programme FN (en témoignent sondages et études) mais ils en ont tellement ras-le-bol d'être tirés vers le bas ...

 

Pierre-Jules GAYE