Paul Girard est arrivé à Saint-Jacques-de-Compostelle à 15h50, samedi, veille de Pâques  

 

 Sous la pluie , le V de la victoire sur lui-même après un long périple de  deux mois et 19 jours de marche. Une seule phrase : "content que c'est fini..." (DR)

 


 

 

       Sarria-Santiago 

       La Finale

 

L’arrivée du chemin à Sarria, citadelle encore bien campée sur ses murs, se fait par une montée redoutable qui pèse en fin d’étape. Je suis heureux, car c’est demain une journée de repos et le jour où Corentin et Mar me rejoignent pour les 5 derniers jours menant à Compostelle. Après la montée, c’est pour finir un escalier qui conduit à la vieille ville. C’est sur le parcours de cet escalier, que je trouve l’alberge « Escalinata » et je demande une chambre pour deux nuits successives. C’est José, qui m’arrange le coup, car c’est le début de la « Semana Santa » et beaucoup d’hébergements affichent complet. Il peut me loger si j’accepte de changer de lieu entre la nuit de dimanche et celle de lundi. Accepté !. Je logerai donc le dimanche soir dans un immeuble proche, dont un appartement semble avoir été réquisitionné pour des locations temporaires. Pour la nuit du lundi soir, il n’y a plus de question de saturation et je réintégrerai l’ « Escalinata », d’ailleurs, quand je lui demanderai « un otros habitation por mi hiro », il n’y aura pas de problème car la fin de semaine des rameaux est passée. J’envoie un texte à Corentin, pour lui confirmer l’adresse (7 Calle Mayor, sur le chemin) et la réservation.

Reste à leur trouver le crédential, document qui tamponné a chaque étape, permettra d’obtenir à Compostelle, la  Compostela, document attestant du pèlerinage (car Sarria est à 113 kms de Compostelle, le minimum requis étant 100 kms). Je trouverai le bureau, en compagnie d’une ukrainienne, qui le cherche aussi, dans le fond de l’église, en fait dans la sacristie, où un homme attend le « pèlerin », jusqu’à minuit. Je rentre à l’Escalinata avec les deux documents.

Tortillas et cerveza dans une petite brasserie et au lit. Journée bien remplie.

Pour la journée de repos à Sarria, c’est simple : lever tardif, mais contraint par l’entretien des locaux et le rapatriement à l »Escalinata avant 11h. Puis laverie automatique, poste et pharmacie, les classiques en somme.  Installation dans la chambre et lorsque je regarde le point de vue par la fenêtre, ce sont Mar et Corentin que je découvre sur le trottoir devant le Bar.

Retrouvailles ! Je ne suis plus seul pour terminer mon périple vers Santiago. Visite de la vieille ville et repas. Coucher de bonne heure, en vue de l’étape du lendemain. Ce village, a été reconstruit entièrement, en raison de l’implantation d’un barrage hydraulique qui a noyé la vallée.

 


 

Ce sont 20 kms sous le soleil et à travers un paysage bien vert et boisé, des petits villages disséminés sur le chemin. Nous marchons avec des rythmes différents, Corentin nous sert de lièvre, Mar le suit en discutant et je ferme la marche, Corentin s’arrête régulièrement pour m’attendre, je crois que le poids des kilomètres commence à se faire sentir pour moi. J’espère que mes chaussures, qui elles aussi sont fatiguées, tiendront encore 5 jours.  Nous passerons, durant cette étape la borne des 100 derniers kilomètres, mais nous ne verrons pas la borne, car le tracé a été modifié et aménagé pour être plus sécurisé, c’est-à-dire suivre moins de routes.

 


 

Le lendemain, le beau temps perdure et nous permet de randonner tranquillement avec comme objectif Palas del Rey à 25 kms. La semaine sainte a amené de nombreux marcheurs-pèlerins sur le chemin, qui prend un petit air d’Auxerre-Vézelay.

 


 

 Les traditionnels séchoirs à Maïs, marquent le paysage et deviennent objet emblématiques déclinés en boite aux lettres, niches à chiens. Dans la province (département) d’A Corunia, ils ont même bénéficiés d’un programme de réhabilitation, nous en voyons donc de nombreux repeints et rénovés.

De Palas del Rey, le troisième jour, nous devons aller à Arzua, mais les 28 kilomètres, seront au-dessus de nos forces (surtout à Mar et à moi), nous en resterons à Ribadiso, découvrant ainsi un ancien Hospital de pèlerins, entièrement reconstruit dans son style et état initial, proche du rio Iso (Riba del Iso = Rive de l’Iso => Ribadiso). Dans cet Alberge, nous retrouvons Norbert, le marcheur, avec lequel j’avais partagé une fin d’étape difficile à El Acebo. Après un petit repas au restaurant voisin, le coucher sera rapide.

Pour ce quatrième jour, nous marcherons à quatre avec Norbert.

 


 

 Le Temps est gris, mais il ne pleut pas beaucoup.  L’objectif est le village d’O Pedrouzo, à 21 kilomètres (+ les trois que nous n’avons pas faits hier). Je ressens une certaine fébrilité, car c’est le 79ème jour et avant dernier de mon périple et le but est proche. Nous bavardons avec Corentin et Mar, ce qui était devenu inhabituel pour moi pendant la marche, c’est bien agréable. L’environnement est comparable au Morvan avec le climat de la Bretagne, nous arriverons plutôt à peu près secs à l’étape.

L’alberge de la Région Galicia, est impeccable, nous nous y installons. Le lendemain matin, nous retrouvons Norbert au petit déjeuné dans le bistrot d’en face.


 

 Il est intarissable sur « Le Chemin » qu’il parcourt depuis 10 ans à chacune de ses vacances, dans tous les sens, sur les différents itinéraires, c’est un passionné ! Pour la dernière étape (19 kilomètres), le temps a changé, il pleut. Il pleut vraiment, une pluie dense, accompagnée de bourrasques de vent qui rendent la pluie encore plus frappante. Nous cheminons sous nos capes de pluie.

 


 

 C’est bien le climat de la Bretagne pour 5 jours : 3 de grand beau temps, 1 gris et 1 de pluie torrentielle. Norbert nous fait découvrir les installations du Monte de GOZO (Montjoie), un alberge de 600 places ! D’où, l’on est censé voir pour la première fois la cathédrale de Santiago, mais avec ce temps, nous ne verrons rien. La fin du parcours se fait en ville, quartiers périphériques, puis constructions plus dense, puis centre-ville historique, puis…. Au détour d’une rue, une tour de la cathédrale et enfin la Cathédrale de Santiago ! J’y suis après 80 jours de pèlerinage ! ! !

 


 

On se félicite, on s’embrasse, l’émotion est visible, ce moment tant attendu est arrivé. Je suis heureux d’avoir réussi, car nous sommes bien à Santiago pour Pâques. La cathédrale est en travaux et je ne pourrai (tradition) mettre ma main dans l’emprunte qui marque la colonne centrale de l’entrée principale de la Cathédrale. La bise de la coquille dans le dos de la statue de Santiago et la visite de la crypte où l’on vénère la chasse contenant les reliques du Saint, marqueront symboliquement la fin du pèlerinage.

Le jour de Pâques, nous assisterons à la grand-messe solennelle présidée par l’Archevêque (Archiobispo), et chantée par des choristes de niveau professionnel.

C’est sublime, dans cet environnement, un monde fou, un rituel développé en espagnol et en latin (dans ce cas véritable espéranto des catholiques).

 


 

Nous ne verrons pas balancer le « Botafumero » (énorme encensoir), accroché dans la voute de la cathédrale et mis en mouvement par 5 personne. Il avait pour fonction de purifier, par ses fumées, les pèlerins, qui en fin de parcours ne devaient par dégager des effluves très subtiles.

 


 

Voilà, je suis arrivé (merci Corentin et Mar) au bout de ce chemin. Merci à tous ceux, amis, parents, marcheurs, inconnus, professionnels qui m’ont aidé à un moment ou un autre de ce périple. Cette chronique (la 9ème) est la dernière que vous pourrez lire sur le site d’ AuxerreTV (merci Pierre-Jules), Maintenant je vous dis, à bientôt dans l’Yonne, pour ceux qui y résident, j’y rentre retrouver les miens ( qui m’ont bien manqués) et comme tout au long de ce chemin, je vous souhaite « Buen Camino ». La coquille, devenue symbole de St Jacques de Compostelle (nous n’avons pas pu savoir comment et pourquoi, même en visitant le musée du pèlerin), reflète la diversité des chemins, qui tentent tous un parcours pour se rejoindre mais par des voies différentes, c’est la tentative de la vie, rassembler ce qui est épars, un petit bout de ma vie, mais aussi une parcelle de la vôtre.

                                    « Buen Camino en su Vita»*

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*« Bon Chemin dans ta Vie »

 


 

Le 29.03.16, 9h30  , Gare de Paris-Bercy

 

 

 

8 Burgos-Sarria            

 

La Longue marche

 

En quittant la cathédrale de Burgos, je traverse les quartiers périphériques de la ville et le chemin « serpente » entre les rocades et les bretelles d’autoroute en « obras » c’est-à-dire en travaux, après quelques kilomètres je suis arrivé à Tardajos, village de mon étape. L’alberge : la fabrica est dans une ancienne usine qui fonctionnait à la force du courant de la rivière.

 


 

Le lendemain, c’est le début de la fameuse « meseta », étape de plateau quasi désertique, débutant par une montée d’environ 6 kms, par un petit vallon qui réserve la découverte de ce plateau totalement dépourvu d’arbres. Le panorama est bientôt totalement identique devant et derrière moi. Après une pause, il faut bien vérifier que l’on repart dans le bon sens, le soleil y aide bien. A droite et à gauche ce sont des immensités de culture d’orge et en cette saison j’ai d’animation faite par le ballet des tracteurs et semoirs d’amonitrates. Le vent est fort et permanent, le béret est aux yeux et aux oreilles pour ne pas être arraché. Après le passage dans le village d’Hontonas, blotti dans un vallon pour se protéger du vent, invisible du plateau et très bien restauré dans le style local.

 


 

J’arriverai à Castrojériz et son alberge municipal. Ce soir le groupe est international, Jim anglais, Tim écossais, Clara allemande, Thomas allemand et Liev russe (orthodoxe), nous prendrons le repas au restau du village. Tous ont bu à ma santé car cela fait juste deux mois que je suis sur le chemin (07/01 – 07/03), Le grand dortoir de 70 places est très bien chauffé, au point que j’hésite à me mettre dans mon duvet.

 


 

Pour rejoindre Fromista, ville signalée comme site « clunisien », j’aurai encore une immense traversée  de plateau à faire , accompagné du vent et du soleil. Je longe le canal de Castille (ramal norte), canal construit pour la navigation (celle-ci sera arrêtée avec l’avènement du train) et pour l’irrigation qui elle est encore fortement utilisée.

 


 

L’église de Saint Martin est de style roman clunisien (octogonal). Je ferai une lessive totale et donc resterai en pyjama pendant celle-ci.

A Carrion de los Condes, plusieurs personnes craquent et vont prendre le train pour finir leur parcours. Le chemin suit l’autoroute, et à l’horizon, au nord, j’ai les monts d’Europe enneigés comme décor. L’accueil dans l’alberge, sera fait par les sœurs qui tiennent la maison, avec des chants, accompagnés de guitare,  dans les langues des « peregrinos » qui arrivent.

Lors de l’étape suivante, le groupe éphémère éclate, chacun suivant son « Camino ». Certains s’arrêtent à Sahagun, d’autres vont plus loin, les salamalecs de séparation retardent l’heure du départ, Katia (slovène), Lars, Nathalie et Michel (allemands), Léonie et Kim (australiens) et Tim (écossais). Aujourd’hui grand soleil, mais plus de vent, ce qui fait qu’à partir de 11h, j’ai trop chaud, je profiterai d’un passage aux toilettes pour enlever une épaisseur avant de repartir de Calzada del coto. Là je prends l’option «  voie romaine » (à Escolives, je connais), ici c’e n’est pas la voie Agrippa mais la voie Trajan, ce seront 9 kms sous le soleil, sans une seule ombre, ce qui me laisse imaginer ce qui peut se passer en plein mois de juillet ou aout au même endroit.

A Calzadilla de los Hermanillos, les indications du guide sont fausses, la casa rural est fermée, je me repli dans l’alberge communal, en libre-service, la clé est chez la voisine d’en face. Pour le repas le bar du village assurera en me servant une sopa et une morcilla (boudin cuit dans la poêle) excellent !

L’alberge n’est pas chauffée, mais dispose de bonnes couvertures. Ce sera une bonne nuit avant une étape de près de 30 kms dont 18 d’un seul jet sans relais ni villages sur la « meseta ». Je bénéficierai d’un beau temps .Je comprends la nécessité d’un ombrage le long du chemin. Dans les villages quelques signes annoncent les festivités de la « Semana Santa » : des annonces d’interdiction de circulation pour cause de processions, des musiciens qui répètent.

 


 

Traversée de la Ville de Léon, avec visite de la cathédrale. Il fait chaud, j’arrive à Virgen del Camino, où, pour la première fois une alberge m’est signalée comme complet. J’ai eu trop chaud aujourd’hui, je suis atteint, la forme s’en ressent et je décide donc de partir plus tôt le lendemain, pour marcher à la fraiche. Ce soir-là, je rencontre Ravier, 73  ans, originaire du pays basque qui marche sur le chemin deux fois par an, en mars et en octobre.

Le lendemain, donc départ à 7h30, il fait -2°C, mais pour marcher je suis bien. Destination Hospital de Orbigo. Le chemin suit le tracé de la N120, à distance. Seul le bruit des camions est en commun. Véhicule tricycle sur cette nationale, pas vraiment rassurant, le Twizy est nettement plus sûr !

 


 

Au repas de midi, à St Martin del Camino, dans un alberge très sympa, je demande du papier et du scotch pour rallonger mon crédential, qui ne dispose plus de suffisamment de cases pour les « Sellos » tampons, justifiant de mon passage sur le chemin.

Je finirai l’étape en passant sur l’immense pont datant du moyen-âge qui franchit le Rio de Orbigo.

Je passerai la nuit à l’alberge « Encena ». Je prévois une grosse étape pour demain, jusqu’à Rabanal del Camino.

Mauvaise nuit, je suis réveillé vers 0h30 par une douleur à …l’oreille droite. Elle est toute chaude et gonflée.

Annie me conseille l’huile essentielle de Lavande, mais la Farmacia est fermée à l’heure ou je pars.   Je quitte donc Hospital de Orbigo, après avoir pu acheter des timbres pour poster les cartes écrites à Léon.

 


 

Je croise en sortant du bureau de tabac, un troupeau de 1600 moutons qui transhument en passant par le pont historique. Embouteillage de moutons sur le pont, dépose de nombreux « raisins secs » sur le pont et nettoyage immédiat par l’employé communal, pour qu’on n’en traine pas trop sous les chaussures. La plupart des chapelles sont squattées par les cigognes.

Arrivé à Astorga, je passe dans la citadelle, visite la cathédrale, vois le palais Gaudi et achète en traversant le marché trois paires de chaussettes pour 1€. Je prends le repas de mi-journée dans un bar. Les cloques des piqures évoluent, celle de l’oreille a été réduite par le froid du matin, celles du mollet se sont rejointes et il en est gonflé, rouge et très chaud.  Ce sont les piqûres de la fesse gauche qui me font le plus mal lors du mouvement de la marche.

En repartant après la pause de mi-journée, je m’aperçois que mon mollet droit et ma fesse gauche ont une contracture musculaire gênante et douloureuse pour la marche. Je décide donc de réduire mon étape et au lieu d’aller jusqu’à Rabanal del Camino, je m’arrête à Sta Catalina de Somoza.

Lors de cette étape, l’horizon se redresse et se dessine progressivement la  Sierra Cantabrico, qui sera le dernier franchissement entre la Castille et la Galice sur le chemin de Compostelle.

Le lendemain matin, les douleurs au mollet et à la fesse se sont estompées, même si les deux endroits restent sensibles. je repars donc, plutôt rassuré, dans une étape de 28 kms qui me fera passer de 800 m à 1430 m. Au sommet, dans le village de Foncebadon, je prendrai le repas avec Damien, espagnol de Valence et nous terminerons l’étape ensemble, en nous aidant mutuellement à atteindre El Acebo. C’est à Molinaseca, que je trouverai une Farmacia, avec une pharmacienne à qui je montre mon mollet et lui explique ce qui m’arrive. Elle est impressionnée et me dit d’aller tout de suite à l’hôpital de Ponferrada, pour une injection d’antistaminique, vue la réaction que j’ai faite. Cela ne m’enchante pas et en lui expliquant que cela fait déjà 3 jours que les piqûres ont eu lieu et que mon mollet est moins gonflé qu’hier (anglais, espagnol pour expliquer tout cela), elle me donne un traitement antistaminique par voie orale et un répulsif des insectes à appliquer pendant 5 jours.

La descente vers Ponferrada, est très jolie et j’arrive en ville pour admirer la citadelle des templiers du XIIIème siècle, restée et restaurée complètement. La ville traversée, mon étape sera Cacabelos, dans le Bierzo, région de culture de la vigne. Le soir traitement complet des vêtements. L’antistaminique est efficace, mon mollet est redevenu normal, mais le médicament me fatigue énormément.

 


 

A partir de là, c’est la dernière traversée montagneuse, celle de la sierra Cantabrico. L’approche du massif se fait par la remontée de la vallée du Rio Carce où le Rio, la N6, l’A6 et le chemin se disputent la place à coup de ponts, de viaduc et de tunnels. Arrivé à Ambasmestas, la pluie est si forte que j’arrête et demande une chambre à l’hôtel du village. Traitement des vêtements, douche, changement de vêtements, mettre une chemise blanche et propre, traitement de moi-même, repas. Pendant le repas discussion avec la serveuse (je suis le seul client) qui été un an à Nancy et qui parle très bien français. Vous trouverez, me dit-elle, la basilique de Santiago très belle, mais moi, qui suis galicienne et qui a habité à côté de la basilique, je trouve la place Stanislas de Nancy plus belle. Je suis exténué et m’endormirai vite ce soir-là.

L’étape suivante sera très belle, c’est le passage de Castille en Galice par le col du Cébréiero, situé à 1330 m. remontée par un chemin agréable et varié, pâturages, bois, forêts, landes et pour descendre après le monastère implanté au col, ce sera de la neige accumulée sur le chemin depuis une à deux semaines. Je rallierai Fonfria, juste avant une pluie diluvienne. Repas dans le restaurant de l’alberge dont la charpente traditionnelle ressemble à celle d’un courte-paille. J’ai fait connaissance avec Norbert, passionné du chemin et informaticien à l’AP-HP (on évitera de parler hôpital et CPAM).

 


 

De Fonfria, je descends à Sarria, où je dois retrouver Corentin et Mar pour la dernière semaine de marche vers Compostelle. En arrivant je trouve une alberge qui dispose de chambre et je fais les réservations pour Corentin et Mar. Le lendemain, je ne marche pas Ce sera une journée repos qui me remettra complètement d’aplomb. Les traitements sont finis, tant pour le répulsif que pour l’antistaminique. Je trouve deux crédentials pour Corentin et Mar. Journée à Sarria, visite, courrier et lessive, journée tranquille en somme


 

 

7  La Rioja  

De Pampelune à Burgos

 

De Pampelune, le chemin, très bien balisé, conduit à Puente la Reina (Pont de la Reine). Déjà quelques pèlerins-randonneurs peuplent le chemin.


 

 Nous aurons de la pluie en permanence toute cette journée. Cape de pluie oblige, le terrain et les et chemins sont affreusement boueux et glissants. Nous, Roger, Mikaël et moi, prendrons notre casse-croûte dans un bistrot.

 


 

Calés devant le poêle, où nous tentons et de nous réchauffer et de nous sécher. Ce soir-là, à l’alberge, ce sera lessive et séchage de tous les vêtements.

Le lendemain, paradoxalement, l’étape sera totalement sèche. Après un arrêt café, croissant, pain au chocolat dans une « panadéria », le chemin traverse de jolis villages bien serrés au sommet de collines alternant avec des ponts médiévaux permettant de franchir le lit de rivières souvent presqu’à sec. Le dimensionnement des ponts médiévaux, laisse deviner une saison où les inondations sont sans doute la règle. La région est une région de culture sèche (sans irrigation), de vigne, d’oliviers et d’orge.

 

 


Pour la vigne, je suis étonné de voir les tailles rester sur le sol, alors qu’en Bourgogne elles sont immédiatement brulées.

Le chemin commence aussi à cohabiter avec des autovia et auto pista, ce qui est moins agréable. En effet le tracé historique du chemin est celui de la liaison entre villes qui sont aujourd’hui reliées par autoroutes.

 


 

 Arrivés à Estrella, nous sommes secs et même avons un petit rayon de soleil. Contrairement à hier, nous sommes partis mouillés ce matin et arrivés secs ce soir. A l »Etape, une marcheur allemand, Yves-Marcel, fête ses 36 ans et nous invite à une pizza-partie en ville. Après cette sortie, retour à l’alberge, tisane de gingembre (bon pour la gorge) préparée par une anglaise de Manchester qui en fait profiter tous les présents et au lit, les australiens ronflent déjà.

 


 

Au matin, le chemin reprend en direction de Los Arcos, je suis seul, car suite à un incident qui s’est produit en soirée, alors que je dormais déjà, Mikaël à cassé une vitre dans un moment de crise et mes deux compagnons doivent rester sur place pour régler la question avec la responsable de l’alberge, la police locale et l’association. C’est par le souhait désormais classique de « Buen Camino » que nous nous séparons, même si mon chemin est beaucoup plus simple que celui qui les attend, en particulier celui de Mikaël (police, assurance, justice, récidive, prison…. Et réhabilitation, j’espère), l’angoisse de Mikaël était visible, il sait ce qui l’attend et Roger organise la suite.

 


 

Le paysage d’oliviers, de vigne et de céréales reprend, traversé par le chemin, le village de Los Arcos n’apparaitra qu’au dernier moment au détour d’une colline. Contrairement à ce que dit le guide, l’alberge municipal sur lequel je comptais est fermé, je logerai dans à l’Alberge Austria.

 


 

Ce, soir je fais le point sur mon avancement, pour constater qu’il me faut augmenter la longueur de mes étapes pour rester dans le calendrier que je me suis donné. Avec Roger et Mikaël, je me suis un peu reposé (étapes moins longues). Demain, je ferai 30 kms, pour tester ma résistance. Plus concentré sur la marche, je repars donc seul, en prenant un repas vers 15h30, soupe aux haricots rouges et lomo accompagné de frites.

Logroño, capitale de la Rioja, sera l’objectif du lendemain, sous un joli soleil, alternant avec des nuages et un petit vent tempère les rayons du soleil qui commence à être chaud.  Je marche ce matin avec un coréen.

 


 

Heureusement pour moi, il est prof d’anglais en Corée, et donc habitué à entendre et comprendre un anglais plus que torturé qui est le mien. Il m’explique que le chemin de St Jacques est très populaire en Corée et peut faire même partie d’un CV, attestant d’une capacité d’autonomie et de mobilisation personnelle. Il est vrai que depuis St Jean PdP, la présence de coréens et coréennes sur le chemin, est constante.

 


 

Pause-café à l’ Hermitage de Poyo. C’est Pedro, qui me fera un café, à l’aide de son groupe électrogène. Il est venu retaper son cabanon qu’il prépare pour la fréquentation attendue de la semaine sainte (dans trois semaines). Il refusera que je lui paye son café, au motif que c’est le premier qu’il prépare pour cette année 2016.

Il me parle d’un pèlerin qui a fait à pied, Istanbul – Santiago et retour soit environ 16 000 kms, cela relativise. Ce midi, je déjeunerai à Viana, et l’entrée dans  Logroño se fera par la traversée de zones industrielles récentes et de nœuds routiers flambants neufs. J’avais repéré dans le guide, l’alberge paroissial qui jouxte l’église Saint Jacques. Roberto, bénévole des amis du chemin, m’accueille et je mangerai entête à tête avec lui, étant ce soir-là le seul pèlerin. Il me fera visiter l’église, comportant un retable monumental entièrement sculpté en bois et doré à la feuille.

Pour l’étape suivante, je sortirai de la ville, où un passant spontanément m’indique le chemin, avec un vent qui se renforce. Béret aux yeux, c’est un parcours dans les vignes, longeant l’autoroute qui me conduit à…… Ventosa !

Najéra, but de l’étape est encore à dix kilomètres, le vent forcit, le plafond gris s’abaisse de plus en plus, j’ai mal aux pieds (à surveiller, étape de 30 kilomètres ?). Accueil à l’alberge par Luis. Déchaussage avant de faire les papiers. Ambiance de dortoir, la nuit est rythmée par les redémarrages du climatiseur et les ronflements des dormeurs. Le matin, dès 5h30 les premiers mouvements se font entendre, las alarmes des réveils se succèdent et peu à peu l’ensemble des marcheurs et marcheuses se préparent et si quelques-uns cherchent à prolonger le séjour dans le duvet, vers 8h le dortoir est vide. Je déjeunerai dans une « panadéria », intermédiaire entre boulangerie et bistrot.

Pause casse-croûte à Ciruena, où ont été réalisés des programmes immobiliers délirants autour d’un golf, alors que des systèmes d’irrigation sont nécessaires pour les cultures ! J’ai Corentin au téléphone, nous convenons de nous retrouver le 21 mars dans la ville de Sarria, pour marcher ensemble la dernière semaine avant Compostelle.

 


 

L’alberge de Granon, étape suivante, est particulier puisqu’il est inclus dans la structure de l’église, lui donnant un caractère architectural certain. Accueilli par Chema et Maria, tous deux bénévoles, je retrouve Connor, un jeune anglais que j’ai déjà croisé (je ne sais plus où, mais sur le chemin). Chéma explique que l’Alberge n’est jamais saturé, car une fois rempli, il loge les pèlerins dans la mezzanine de l’église, réservée initialement au Chœur, puis carrément dans la nef de l’église si besoin. Il ne peut pas refuser l’accueil ! Ici pas de tampon, c’est trop administratif, le chemin c’est d’abord une affaire de cœur. Au revoir Chéma, au revoir Maria, le chemin continue.

Le lendemain, le départ est dur, j’ai passé une mauvaise nuit, ai eu froid, alors que c’était chauffé, j’ai mis mes pieds dans mes moufles et mes genoux me font mal. J’en ai un peu assez d’être seul, le moral en prend un coup, je m’arrête à Viloria , prends un café et une tortilla, la musique du film Amélie Poulain est diffusée dans le bistrot et veille que vaille, je repars, cela va mieux, le vent est toujours très fort, progression à découvert dans des chemins retaillés par remembrement et arrivée à Villafranca-Montes de Ocas.

Cette étape sera celle d’une grand traversée dans les bois ( plus de 10 kms), mais sonorisée par les poids lourds qui circulent sur la route, invisible mais proche. Je croise un troupeau de sangliers, heureusement pendant cette traversée, je suis protégé du vent par les arbres.

 


 

À Orbaneja-Riopico, c’est José-Luis qui m’accueillera dans l’alberge municipal qui est aussi le bistrot du village, où les gens jouent aux cartes. J’ai choisi de loger aux portes de Burgos, que je traverserai demain. Sur les recommandations de José-Luis, qui m’indique bien « après auto pista, Isquierda Isquierda ! » à gauche après l’autoroute, car le signalement est troublé, chacun retraçant les flèches jaunes pour que le chemin passe devant son commerce.

 


 

C’est ainsi que j’entrerai dans Burgos, avec les deux tours de la cathédrale en référence, mais en traversant des échangeurs routiers et des zones d’activité. Je découvre, au détour d’une rue, La Cathédrale et son architecture ! Splendide ! ! !  J’y associe tout de suite deux autres cathédrales, celle de Strasbourg pour la dentelle de pierre  et sa structure tellement légère qu’elle est aussi doublée d’une structure récente métallique pour en assurer la stabilité et celle de Barcelone du célèbre Gaudi pour son inspiration et la multitude des flèches qui s’élancent vers le ciel. Les quelques photos de la cathédrale ne rendent qu’incomplètement compte du choc visuel et du plaisir esthétique qu’elle m’a procuré.


 

6  Saint Jean-Pied-de-Port – Pampelune

 

L’Abbaye de Roncevaux

 

En franchissant la porte St-Jacques de la citadelle de St-Jean-Pied-de-Port, je découvre une rue de la citadelle, entièrement bordée de maisons anciennes rénovées dans leur caractère d’origine. Je trouve sans peine l’accueil pèlerin qui est au 39, rue de la Citadelle. La spiritualité provoque des expressions diverses et je vous livre deux photos prises sur le parcours.

 


 

L’accueil des pèlerins est permanent, il est tenu par les bénévoles de l’association des Amis du chemin de St-Jacques du département des Pyrénées atlantiques (64). Un grand bravo à ces bénévoles qui se relaient, pour tenir le point d’accueil toute l’année de 14 h à 22 h.

Il faut préciser que c’est à St-Jean-PdP, que convergent trois des quatre grandes routes qui partent de Tours, de Vézelay et du Puy-en-Velay (la route d’Arles passe elle par le col du Somport).

En saison, de 4 à 500 personnes par jour, transitent à St-Jean-PdP. Ces bénévoles sont une mine inestimable de renseignements pour un pèlerin ignare, comme moi. J’apprends ainsi que le passage dit « par la montagne », est fermé aux pèlerins pour cause d’instabilité de neige (???), il semble que c’est plutôt par l’absence de sécurité côté espagnol, que ce chemin est fermé.

Papiers faits et crédential tamponné, je suis envoyé au 53 de la même rue, où se tient le gite pèlerin. C’est Mme Jeannine, qui règne dans ce lieu (depuis plus de 30 ans me dira-t-elle). Premier dortoir sur le chemin. Bonne nuit, pas de ronfleur trop sonore. Parmi les informations qui m’intéressent, je cherche à savoir combien de jours, met un pèlerin, pour parcourir le chemin de Saint PdP à Compostelle. Les réponses obtenues vont de 26 jours à 35 jours !?. Nous sommes le 23 février, il me reste donc 6 jours en Février et 26 en Mars, cela fait 32, j’ai donc des chances d’arriver la veille de Pâques.

 


 

Ce sera donc par le chemin de vallée que je me dirige vers l’Espagne et Roncevaux. En fait, il n’y a pas de col de Roncevaux, mais une Abbaye de Roncesvalles (Roncevaux = Vallée des Ronces), établie en Espagne juste après le Puerto de la Ibanieta. L’autre passage est le col de Bentarte qui prolonge sur le territoire français la route Napoléon. Donc il ne faudrait donc pas dire : le col de Roncevaux, mais le col qui mène à Roncevaux. Ce chemin de vallée, est vraisemblablement celui des pèlerins, qui ne devaient pas passer à 1400 m, mais se contenter du passage de l’Ibanieta qui lui culmine à 1057 m.

 


 

En partant de St Jean PdP, je suis la Départementale 933, qui passant en Espagne ( à Arneguy) deviendra D 135, puis une petite route goudronnée, puis un chemin forestier, puis un sentier qui arrivera au Port de l’Ibanieta.

Mais revenons sur la N 933, qui suit la vallée de la petite Nive, faisant frontière entre la France et l’Espagne sur environ 6 kilomètres. Versant ouest c’est L’Espagne, versant Est, c’est la France. Et c’est par une petite passerelle que je franchis la frontière, pour me retrouver…… dans un bureau de Tabac ! J’interroge deux clients qui en sortent, en leur demandant si l’on est bien en Espagne ? Ils ne sont pas sûrs de la réponse. « Mais vous venez d’acheter des cigarettes, à quel tarif ? »,  « au tarif espagnol », me répondent-ils, donc nous sommes en Espagne. La commune de Valcarlos, a aménagé un centre commercial, des hôtels, des restaurants, qui tous ont des prix espagnols pour des clients français (et autres européens).

Passé Valcarlos, la route monte avec beaucoup de virages, la signalisation est adaptée au passage de ces dangereux personnages que sont les pèlerins.

 


 

La montée ne finira qu’au port de l’Ibanieta. 22 kms de montée continue pour passer du côté de l’Abbaye de Roncevaux, qui est à 2 kms après le point de passage.  Cette montée suit les courbures du terrain passe d’un côté à l’autre de la vallée pour régulièrement s’élever de 244 m (Valcarlos) à 1057 m. Bien sportif comme parcours, mais avec un joli soleil qui rend le décor sympathique.

 

 


 

C’est sur la fin de cette montée, que j’aurai un des épisodes, le plus étonnant, de loin.

Sur le chemin j’aperçois un vêtement qui a dû tomber du sac d’un marcheur, mais en me rapprochant, je découvre qu’il s’agit d’un homme allongé en travers du chemin, j’accélère le pas en me demandant ce que je vais trouver ? À mon arrivée l’homme jeune, m’invective et je comprends qu’il veut que j’appelle les secours, les pompiers, les bombéros, l’hôpital,…. Il a les yeux qui se révulsent et est très paniqué. Ma présence soudain semble le rassurer, il se calme, je lui propose de l’eau et des raisins secs, il refuse, mais ne demande plus d’appeler les secours.

Je lui explique (il semble Italien, ne parle pas français, ni espagnol, c’est donc en anglais que j’essaie de me faire comprendre) qu’il est à environ 500 m du sommet et donc qu’avec un petit effort il devrait y arriver. Il n’avait pas de carte géographique et donc ne savait pas du tout où il était, seul, sans savoir qui pouvait passer après lui à cette heure là. il a dû sérieusement paniquer.

Je l’aide à se remettre debout, il accepte quelques raisins secs et je lui explique que je ne peux pas ni le porter, ni le laisser là et donc qu’il doit marcher (j’utilise un ton autoritaire qui, quelle que soit la langue est compris)  « steppe bail steppe, steppe bail steppe, …….Smol steppe bail Smol steppe, beute steppe !!!… ».

Lentement, mais sûrement il se remet à marcher. Je le suis de près, car il est un peu incertain, et nous arrivons au Puerto de la Ibanieta. Il a repris ses esprits et nous discutons, c’est là que j’apprends qu’il n’a rien mangé depuis son départ de St Jean PdP, que sa copine est partie devant et l’attend à l’abbaye de Roncevaux.

Je vois qu’il porte à la main, une bible du volume d’un petit Larousse ! Il va mieux, en jargonnant, j’apprends qu’il s’appelle Francisco (comme le Pape, me dira-t-il), qu’il a 26 ans. Nous passons le port de l’Ibanieta, en prenant quelques instants pour admirer la vallée que nous venons de remonter, avant de descendre vers l’abbaye, qui nous hébergera pour la nuit. Arrivé à l’auberge, une fois les papiers faits, je vais prendre une douche et mets en route une lessive de mes vêtements de « travail ».

 


 

Le repas est servi à la « Casa Sabina » et à 21h30, après une messe dans l’abbaye, le Père-Abbé qui s’appelle Valentin, nous fait visiter l’abbaye (heureusement il parle un peu le français). Cloître du XIIIème, salle capitulaire, nef de l’église, copie de celle de ND de Paris (en plus petit quand même), vitraux faits en Allemagne (années 1940-45), statue du XIVème faite en métal repoussé à Toulouse.

Sortie de la lessive, mais je ferai sécher, demain matin, car tout le monde dort et le bruit du sèche-linge à cette heure-là, serait catastrophique. (Fin de la 7ème semaine)

Les deux étapes suivantes, Zubiri et Pampelune, seront des étapes de descente, la pluie est annoncée, mais ce sera une journée grise mais sans pluie. La descente se fait en continu de 950 m à 230 m. Le matin, je marche en compagnie des deux italiens Francisco et Désira, ils parlent en continu et à la pause de midi, je les laisse repartir avant moi, pour être plus en silence.

 


 

Le chemin jusqu’à Zubiri est glissant, je le parcours donc à vitesse réduite. Arrivée à Zubiri vers 17h, des pèlerins, m’indiquent la seule auberge qui est ouverte dans le village, cela m’évite de chercher.

Repas au restaurant du village, ambiance Foot (c’est un match entre Marseille et Bilbao) Ambiance dans le bistrot. Soupe aux haricots rouges puis escalope d’agneau, frites et glace. Dans l’Alberge, nous prenons une tisane et je fais connaissance avec Roger et Mikaël. Ceux-là, que, déposés par un taxi à Roncevaux, j’avais pris pour deux copains marchant ensemble. En fait Roger est éducateur et l’association qui l’emploit, lui a confié Mikaël, garçon autiste, qui a déjà connu la prison, pour un parcours de réhabilitation par la marche longue (environ 2 mois), permettant si l’expérience est concluante, une alternative au CER ou au CEF.

 


 

Nous cheminerons toute la journée suivante, le long du Rio Arga, le chemin est très bien balisé (c’est le chemin officiel « Camino Frances »), il nous conduira à Pamplona, dans un enchaînement de villages et de chapelles. Je prendrais le casse-croute tiré du sac, avec Roger et Mikaël, car il n’y a pas de restaurant dans le village traversé. Ce sera Chorizo de sanglier, mousse de foie, fromage, pain de mie et orange. Mikaël nourrit le chien de la maison devant laquelle nous nous sommes arrêtés, il se prendra en photo avec lui avant notre départ.

Entrée dans la citadelle de Pamplona, par le Pont Magdalena (Vézelay ?)

 


 

Nous serons logés à l’alberge « Jésus Y Maria » aménagée dans une ancienne église, classée monument historique ou la hauteur de la Nef, permet 4 niveaux de lits. Je réussirai ce soir-là, à manger dans un restaurant, mais après m’être fait éconduire dans deux autres, car je m’y suis présenté trop tôt. C’est l’Espagne, le repas du soir, ce n’est pas avant 20h30.

 


 

Après une visite rapide de la citadelle, je retrouve l’alberge et mon lit, où je m’endors rapidement.


 

 

Lourdes à St-Jean-Pied-de-Port            

 

Le Piémont

 

Dès le matin, à Lourdes, je suis à la recherche de l’endroit où je pourrai faire valider mon crédential. Cela n’a pas été facile car dans l’immense sanctuaire, il faut trouver le bureau compétent, j’en ai trouvé pour commencer mais il validait les pèlerins de Lourdes et non ceux de St Jacques. Le Saint Esprit devait être en RTT, finalement j’aurai le saint tampon de Lourdes.





La dévotion auprès de la grotte est intense, un groupe d’italiens célèbre une messe dès 8h30 sous une forêt de parapluies. Je me joins quelques instants à eux, c’est intense. Je traverse la basilique souterraine entièrement vide, elle n'en parait que plus immense, c’est une belle structure en béton.

Puis retour en ville pour acheter des cartes postales et timbres.



Je prends un café pour rédiger et pouvoir poster mes cartes depuis la ville. Je retourne boucler mon sac et rendre ma chambre avant 11 heures.
Au vu de l’heure je décide de déjeuner avant de partir de Lourdes.
Cette étape me mènera à Asson, où j’ai réservé une chambre d’hôte dans la ferme de La Palu. Je quitte donc Lourdes. En longeant le sanctuaire je retrouve, rive gauche du Gave, le balisage du GR 78, qui sera mon fil rouge jusqu’à Saint Jean Pied-de-Port.



 Ce chemin est répertorié comme chemin de Compostelle. Il suit la vallée du Gave jusqu’à St Pé de Bigorre; au passage, tampon de l’Office de tourisme, et déjà, ma nouvelle cape de pluie est déchirée par des branchages.



Elle n’aura fait que deux heures, fendue en deux au milieu du dos, elle est inutilisable. Je me sers de l’ancienne, qui bien que partiellement coupée assure une meilleure protection. Cela tombe bien puisqu’il ne pleut presque plus.

J’arrive à 19 heures à la ferme. Repas avec Pierre et Lucienne.

Pierre a fait le chemin de Compostelle depuis sa ferme, mais par le col du Somport. Discussion sur les étapes, le trajet, sur la vie agricole, l’élevage (ils ont 280 brebis dont ils vendent les agneaux), le vin, le madiran et le jurançon, le foot, Guy Roux et Auxerre. Vous dites Bérou ou Baillerou (François) le y vaut deux i dans ce pays.

Le lendemain je repars « par le haut », comme me l’a expliqué Pierre, pour arriver à Arudy où je dormirai à l’hôtel de France.
L’étape d’après se terminera à Oloron Ste Marie, aussi à l’Hôtel de France où je serai accueilli par Bernadette (qui n’est pas celle de Lourdes, me précise-t-elle) et Robert.
Ils ont habités Sens il y a bien des années. Seul client de l’hôtel (qui est en travaux) ils allumeront le chauffage et le chauffe-eau pour moi, en me demandant d’attendre pour avoir de l’eau chaude.


Toujours avec les Pyrénées sur mon côté gauche, je continue sous un grand soleil, qui me fait apprécier les passages du chemin qui sont ombragés.
Une Pause à Ogeu les Bains, où la discussion s’engage sur l’origine du Béret, (Basque ou Béarnais ?) qui d’après mes interlocuteurs est réellement Béarnais d’origine, mais popularisé par les Basques, qui l’ont diffusé dans le monde entier.

Le chemin suit les vallées des gaves, gave d’Ossau, gave d’Aspe qui forment à partir d’Oloron le gave d’Oloron.
L’arrivée à Oloron est un peu confuse en termes de balisage, puisque deux GR balisant deux chemins de Compostelle se croisent et sont même en sens inverse sur le même chemin pendant deux à trois kms (chemin du Piémont et chemin d’Arles). Après avoir coupé à travers bois (le tracé du GR est un peu tordu), je retrouve le GR au pont…du diable (encore un !) sur le Gave d’Aspe et je découvre la ville d’Oloron Ste Marie en arrivant par la citadelle d’Oloron…Ste Croix, qui domine la ville.

Les deux villes seront historiquement regroupées au XIXème siècle. La ville d’Oloron est dotée d’une cathédrale devant laquelle une borne indique Compostelle, 950 kms.



 

Par un beau soleil, je rejoins le jour suivant la ville de Mauléon-Licharre. J'entre dans le Pays basque à partir du village d’Esquiule, drapeau basque à la Mairie et fronton coincé entre l’église et la mairie.

A Barcus, je déjeune en compagnie des accompagnateurs du match de rugby qui se jouera sur le terrain du village à 15h, devant un joli public en tribune.

A Mauléon, je n’ai rien retenu et tout est fermé. Gite communal fermé, aucun hôtel. Par téléphone, pages jaunes, je finis par laisser un message à l’hôtel Bidegain…qui me rappelle. Ouf, je suis logé. Pour le repas ce sera une pizza délivrée par un appareil automatique, où je ferai la queue derrière un groupe de copains.
Cette fois-ci, pour cette avant-dernière étape du Piémont, j’ai les Pyrénées en face de moi.

Ce matin, lacets cassés. Heureusement Annie m’en a envoyés dans son dernier envoi.



En sortant de Mauléon, c’est un chien, bien tranquille celui-là qui me montre le chemin pendant le premier km.

Habitude de quémander auprès des pèlerins, ou empathie pour ceux-ci ? Il connait parfaitement le parcours et n’hésite pas du tout à chaque bifurcation, il anticipe les balises et paliie leur absence, me facilitant la navigation.

Pour éviter la départementale trop fréquentée, je suis le parcours jacquaire passant par Ordiarp (site Jacquaire) où la secrétaire de mairie et la dame de service m’ouvriront la cantine pour que je puisse manger mon casse-croute à l’ abri, et me feront un café avant que je ne reparte (merci à elles).

Viendra ensuite l’ascension du Col de Napale très sportive, au long duquel s’étagent des fermes de bovins, où l’actualité du moment est de curer les étables et de composter les fumiers, la vallée est pleine d’odeurs spécifiques de cette activité.



Arrivé à St Just-Ibarré pour l’angélus du soir (19h), il fait nuit et mon hébergement est à 4 kms. C’est mon logeur qui viendra me chercher avec son Kangoo pour m’éviter de marcher le long d’une route sans accotement et très passante. J’arriverai ainsi à sa ferme qui s’appelle « Oyhanartia ».

Il me prêtera même son Kangoo pour que je puisse aller manger dans un petit restaurant du village. Potage de légumes, poulet basquaise, fromage de Brebis et retour à « Oyhanartia » pour dormir.

L’habitat, au pays basque est très dispersé, le bourg ou chef-lieu rassemble quatre éléments, l’Eglise, la mairie, le Trinquet et le bistrot.



Par la route d’Ibarolle, je passe dans ce village, où j’aurai le plaisir d’expérimenter pendant un bon quart d’heure le jeu de Pala, sur un « fronton avec retour à gauche ». Avec une « raquette » en bois massif, qui me rappelle un peu le jeu de Jokari. Elle est dotée d’un manche courbe (un peu comme un gouet) pour libérer le poignet et pouvoir fouetter la balle…J

e repars en direction du Col de Gamia, petite route qui grimpe et me permet de franchir le col dominant Saint Jean Pied-de-Port. A St Jean-le-Vieux, je mangerai mon casse-croute dans le café Béra.



 

J’entre dans Saint Jean Pied-de-Port par la rue de la porte St Jacques et arrive rue de la citadelle, où l’accueil des pèlerins (c’est ici que se rassemblent les 4 chemins de St Jacques, Tours, Vézelay, Le Puy et Piémont) est organisé par des Bénévoles.

 


4 Toulouse-Lourdes

La Traversée

 

Après avoir récupéré de cette dernière étape, je quitte l’Ibis en direction de St Sernin. Cette Basilique est un chef-d’œuvre d’art roman entièrement en briques (ce qui surprend ceux comme moi qui sont habitués à l’art roman en pierre taillée). La journée de pluie se prête bien à une visite intérieure de cette basilique St Sernin. Elle est impressionnante de précision et de complétude d’architecture romane, rien ne manque, plan général, nefs latérales, absides, absidioles, crypte sur deux niveaux, déambulatoire,  galeries hautes, …..

 

 

 

C’est un chef d’œuvre ! Les quelques photos ci-dessus n’en donnent qu’un petit aperçu. L’arrivée de la descente Bonnefoy, se prolonge par la rue Matabiau et la rue Roquelaine dans l’axe de la flèche de St Sernin.

Le chemin de St Jacques est inscrit dans la géographie de la ville, d’autant qu’à la sortie côté ouest ce sera l’hôpital St Jacques qui marquera cette empreinte. Il pleut tellement que l’après-midi, après être allé expédier un colis à Annie (Cartes, doc divers devenus inutiles mais restant pesant dans le sac), je vais au cinéma.

Le soir j’ai rendez-vous avec mes ex-collègues de la CCI de Toulouse. Nous nous retrouvons sous la pluie au siège de la CCI où je suis récupéré par Alain, collègue qui m’a succédé à la trésorerie du Syndicat CFDT. L’Hôtel consulaire (Bâtiment de la CCI Toulouse) est lui aussi un monument classé.

Nous passerons une sympathique soirée chez Pascale, qui a préparé un bon repas, et je découvrirai que Frédéric connait bien Conques, où il a habité 15 ans, son père ayant été receveur de la poste de Conques. Il me précisera que le tympan de l’abbatiale était à l’origine exposé vers l’intérieur et que son exposition récente vers l’extérieur le rend vulnérable aux intempéries.

Belle soirée, de souvenirs communs, d’histoire de Conques et de problématiques actuelles des CCI. Je dormirai dans le chalet de jardin aménagé en chambre d’amis. La maman de Pascale a habité l’Yonne pendant de nombreuses années.

 

 

L’étape suivante sera celle de St Lys ; commune située sur le tracé de Toulouse à Lourdes que j’ai découpé en tronçons réguliers.

Ce sera une étape de sortie d’agglomération, dans un environnement pavillonnaire, mais aussi d’aménagements piétons très agréables pour le marcheur que je suis. J’enchaînerai avec des ruisseaux et fossés débordant des pluies des jours derniers, le niveau des routes se jouant de quelques centimètres avec celui des ruisseaux et fossés, me demandant parfois de trouver un passage délicat, car je n’ai pas de bottes.

J’aurai le temps en arrivant de bonne heure (étape courte) de visiter le village et sa halle circulaire (en briques et intégrant à l’époque les premiers éléments de charpente métallique.


 

L’étape suivante sera sur fond de Pyrénées, un parcours qui me mène à Samatan, capitale du Foie gras (32-Gers), Je n’aurai que le tampon du bar des sports car la mairie a fermé plus tôt qu’annoncé sur internet. Logé à Lombez, j’en profiterai pour visiter sa cathédrale. Toute la famille qui tient l’hôtel a attrapé la grippe, sauf Madame qui s’est fait vacciner. Elle me loge et accepte de me nourrir en extension de sa cuisine familiale; cette dame originaire du Nord sera aux petits soins pour moi et le lendemain, me gratifiera d’un énorme sandwich « pour la route » (encore merci à elle)

La journée suivante aura pour objectif Péguilhan, où j’ai retenu un gîte dans une ferme (élevage de blonde d’aquitaine pour la viande) qui fait aussi table d’hôte.

Au soleil, le matin sur fond de Pyrénées, en particulier un sommet se détache dans la chaîne des montagnes et je rage de ne savoir quel est son nom.

Un peu avant d’arriver à L’Isle en Dodon, où j’ai prévu de manger le midi, je fais avec ma boussole un alignement entre ce sommet enneigé et le clocher du village,  exactement SE (Sud-Est), (cap 225 diraient les navigateurs). Le soir en reportant cet alignement sur la carte je trouverai que ce sommet n’est autre que le Pic du Midi de Bigorre, pourtant reconnaissable à l’observatoire qui couronne son sommet, mais j’étais encore trop loin pour le distinguer.

Je passe à côté d’un mimosa en fleurs, dont l’odeur tranche avec, celle courante des élevages de la région. Le temps se gâte l’après-midi et c’est trempé que j’arriverai tard à Péguilhan, causant quelque inquiétude à Mme Castex, qui gère le gîte. Je n’ai pas le moral, j’ai très mal à mon petit orteil gauche qui est tout rouge, gonflé et douloureux, les pieds mouillés et trop sollicités dans l’après-midi me le font savoir. D’autant que je me butte cet orteil là sur le pied de la chaise !

                 

 

Le giîe est doté d’une immense cheminée, et je passe un bon moment à allumer et faire brûler un bon feu qui permettra de sécher mon exposition de chaussettes, d’une part et de m’installer le dos, bien au chaud, pour rédiger ma petite chronique.

Après une nuit sous les couvertures et l’édredon, je suis incapable de repartir. Ainsi se passe la matinée, sans départ, je doute même de ma capacité à faire une étape aujourd’hui. Le midi, je mange au restaurant fermier, un véritable repas de poule : Bouillon de poule-vermicelle, salade de gésiers, foie,….. Puis pièce de volaille avec ses pommes frites et haricots verts, le tout arrosé d’un quart de vin rouge. Le service assez tranquille se termine vers 15h.

Il est hors de question de partir maintenant, il reste 3 heures et demi de jour. Je demande donc à Mme Castex de rester une nuit de plus dans le gîte, ce qu’elle accepte immédiatement (« pas de souci » me répond-elle) . C’est donc parti pour une bonne sieste, qui une fois lancée durera 2h et demi. Je me réveille, à la nuit tombante, me sens mieux et j' ai de nouveau l’envie d’aller plus loin (Ultréïa !).

Je relance le feu dans la cheminée et fais le compte de ce qui me reste à manger dans mon sac. J’y trouve 4 patates cuites à l’eau, du jambon, du pain et du fromage, tout ce qu’il faut pour faire l’équivalent d’une raclette et une orange pour le dessert. Ce qui fut absorbé. Je vais mieux, mon orteil s’est calmé et j’envisage sérieusement de repartir le lendemain matin après une bonne nuit de sommeil. Je retrouve le lit, les couvertures et l’édredon avec plaisir. Je m’endors ragaillardi.

L‘objectif de cette étape, c’est le village de Galan (65 Htes Pyrénées, département de Lourdes), et plus particulièrement « la Villa Bleue », chambre d’hôtes. Cette étape sera sèche d’un bout à l’autre, hormis quelques flocons en fin d’après-midi. Le village de Galan n’a pas de restaurant ouvert le soir, aussi Steevy et Véronique (Anglais), le couple qui tient les chambres d’hôtes, me propose de dîner avec eux. Ce fut un repas très sympathique avec les limites de la langue, explication sur le phénomène Compostelle, pour eux qui travaillent beaucoup avec les visiteurs de Lourdes (pourtant à 50 kms)

Après une bonne nuit chez les anglais et surtout un petit déjeuner copieux à l’anglaise, je reprends la route pour atteindre le village de Tournay, inconnu des autochtones, car ils me répondent « vous voulez dire Tournailles !? », effectivement la prononciation fait la différence (diriez-vous Charentenailles ou Voutenailles ?).

Cette étape d’environ 20 kms, sera froide malgré quelques apparitions du soleil, mais sans pluie et j’ai remis un caleçon long. Je traverserai la forêt de Castelbajac où les pluies récentes ont détruit le chemin forestier et où le ruisseau a confondu le chemin avec son lit. Résultat, je finirai l’étape boueux du côté gauche jusqu’au genou.  Arrivé à Burg, pas de restaurant, c’est donc après une bière, la trace directe en direction de Tournay, à travers bois grâce au Géo-portail, ce qui me permettra de gagner suffisamment de temps  pour arriver avant la fermeture du restaurant de la Maison Cazaux. Passage à la mairie pour tampon du crédential et repos l’après-midi.

C’est maintenant  la dernière étape pour atteindre Lourdes. J’ai fait une réservation pour la nuit prochaine, 2 avenue du Paradis, (cela me convient bien car comme tout le monde je ne suis pas pressé d’atteindre l’autre bout de l’avenue ( J). L’arrivée sera tardive (19h), car cette étape fait 35 kms, ce qui fait beaucoup pour une seule journée. Pensant trouver un restau-bar à Montgaillard, j’ai été déçu, car il n’y en a pas et j’ai pique-niqué dans un abribus avant de finir l’étape dans la ville mariale. L’avenue de Sarzan, me parait interminable pour atteindre le centre-ville de Lourdes. Repas du soir à la hauteur de l’étape, assiette ibérique et pennes aux tomates et piments.

                                 

 

Lourdes, fin de la traversée de Toulouse à Lourdes, pour demain ce sera le chemin du Piémont (l’un des chemins de St Jacques répertoriés), après visite du sanctuaire de Lourdes.

 

 

3    De Conques à Toulouse

La liaison

 

Accueilli par Frère Jean-Daniel, devant le porche de l’abbatiale de Conques, celui-ci m’installe dans la chambre A de l’hostellerie de la communauté. Chambre simple, avec sanitaires sur le couloir. Office à 18h30 (vêpres) et repas à 19h00, puis office à 20h30 (complies). Je prendrai le repas avec un couple de Bretons qui font du tourisme cultuel d’abbayes en monastères.

Le lendemain, je me suis voté une journée de repos, c’est donc la visite de Conques aussi bien le village que l’abbatiale. Le village est lové dans une petite vallée, telle une coquille (conques) contrairement à beaucoup de sites qui sont emblématiquement situés au sommet d’une colline (Vézelay, le Puy,…) . Il est regroupé sur une petite plateforme, se resserre autour de l’abbatiale et se prolonge vers le pont romain tout en bas et vers le chemin du plateau vers le haut.

L’ensemble du village a été restauré dans un style homogène, pierres pour les murs et lauzes pour les toits ce qui lui donne une ambiance particulièrement sereine d’autant que le village est désert et que je l’ai pour moi seul. L’abbatiale, c’est du roman, d’une simplicité extrêmement pure, dépouillée. Le tympan de la porte principale est remarquable. Dans ce lieu règne une sérénité qui conduit à s’asseoir simplement dans les bancs pour « y être ».

Les vitraux sont surprenants; ils sont l’œuvre de l’artiste Soulages qui s’est fait une spécialité du noir (je devrais dire des noirs), et ces vitraux sont gris, prenant des teintes changeantes en fonction de la couleur du ciel et de la lumière du soleil. Pour moi, compte tenu du temps, ce sera gris. Ces vitraux à l’approche de l’abbatiale sont tellement surprenants que je les avais pris pour des planches avec lesquelles on occulte les fenêtres pendant des travaux. 

La journée passe vite, un peu de courrier, quelques cartes postales, lecture de la presse, sieste, revisite du village et surtout la surprise : Jean-Claude, l’agriculteur propriétaire des chiens qui m’avaient importuné la veille, alerté sans doute par le Frère Jean-Daniel, me rapporte ma carte Michelin, très détrempée. Fixée par des aimants sur le tableau blanc de l’espace accueil, au-dessus du radiateur, elle reprendra forme à l’aide de quelques morceaux de scotch.

Pour la suite : je vais suivre la «  Liaison Conques-Toulouse ». Cette liaison identifiée récemment par des balisages de type GR, se compose partiellement de différents GR. D’abord le GR65, puis les GR62B, puis le GR 36, un morceau identifié comme liaison et le GR 46 qui conduit à Toulouse.

La première étape sera pour Montbazens. Cette étape commence par le pont romain de Conques, tout en bas sur le Dourdou, puis remonte sèchement sur le plateau en passant par la chapelle dédiée à Ste, où (comme le veut la tradition) je sonne la cloche pour indiquer à la communauté de Conques que je suis bien parti sur le chemin.

Une réponse de quelques coups de cloche résonnera quelques instants après (sans doute Frère Jean-Daniel). Le profil très montagnes russes, de ce début d’étape jusqu’à Firmi, me fait prendre beaucoup de retard, et la deuxième partie sera plus calme sur des RD. C’est sur cette départementale, qu’un minibus scolaire s’arrête à ma hauteur, que la vitre du chauffeur se baisse et qu’il me dit : «  Je suis Alain, votre logeur de ce soir à Montbazens, bon courage ! à ce soir ».

Effectivement je termine l’étape à la lampe frontale vers 20h30. Alain et Michèle m’accueillent très sympathiquement et m’indiquent qu’ils ont téléphoné au Bar-Pizzeria du village pour qu’il m’attende avant de fermer. Ce qui fut fait.

De Montbazens, la route me conduit à Villefranche de Rouergue. Après passage à la mairie de Montbazens pour tampon. La route que je suis est une vielle route datant du XVI ème siècle, à l’époque où la fortune de la région était le pastel, cette route facilitait le transport du pastel vers la ville. Après un orage de grêle ce fut un après-midi bien ensoleillé. Panne de téléphone donc plus de Géo-portail. Le chemin est bien balisé.

Je découvre la ville de Villefranche par le haut, le sentier arrivant sur un promontoire entre les gorges de l’Ardou et celles de l’Aveyron. D’abord, trouver une boutique de téléphone pour savoir ce qui ne va pas car le téléphone me sert à téléphoner, envoyer des textos, faire des photos et naviguer avec géo-portail. C’est chez Orange que je suis rassuré, car c’est seulement le câble de chargement qui ne fonctionne plus. À Villefranche, je loge à l’Hôtel de la poste tenu par Jean et Ghislaine, tous deux largement septuagénaires, mais côté cuisine je ne suis pas déçu. D’ailleurs j’ai trop mangé et demain me le rappellera !  Visite trop rapide de cette ville et surtout de son centre-ville dont la rue principale est la rue….Saint Jacques.

 



    Rue St Jacques à Villefranche et chemin du même nom avant Najac qui domine au loin (DR)

 

Depuis Villefranche, le GR, suit les gorges de l’Aveyron, et joue une partie de cache-cache avec l’Aveyron et la ligne SNCF, dont les franchissements mutuels sont nombreux, un tunnel en dessus, un pont en dessous. Pause Bourguignon-riz « chez Marie » à Monteils, qui me servira même en dehors de ses heures de service (merci encore). Ce village est celui du couvent où s’est retiré Monseigneur François MARTY, archevêque qui est mort écrasé dans sa 2CV, par un train à un passage à niveau. (2CV offerte par ses amis, à qui il avait dit  « Cette 2CV, elle m’emmènera au paradis ! » (Sic).

Le soir j’arrive à Najac, village perché sur une arête en lame de couteau, auquel j’accède par une montée depuis la gare, qui vaut bien 3 fois Vézelay par la Cordelle. Je suis très bien accueilli par Dominique Castagnié, qui a des chambres d’hôtes. C’est lui qui m’explique que la ligne SNCF de Villefranche à Cordes, a demandé 5 ans de travaux et la réalisation de 7 tunnels et 8 viaducs sur un parcours de 6 kms et qu’à l’époque (1858) c’était la ligne Paris-Toulouse.

Étape ensoleillée de Najac à Laguépie, passage à la mairie de Najac, puis sortie-descente du village en direction du vieux pont, remontée dans les bois, perte du chemin dans cette forêt encombrée de chablis. Géo-portail au secours, je retrouve le chemin qui suit les gorges de l’Aveyron jusqu’à Laguépie. Je trouve une chambre d’hôte chez Mme Cuvelier (recommandée par l’Office de Tourisme). Mais Mme Cuvelier n’est pas là, elle est chez son fils pour une quinzaine ! Las, elle téléphone à une voisine qui va venir m’ouvrir la maison. Bon, je suis logé. Merci. Bonsoir. 

 


     
De Laguépie, le chemin me conduit à Cordes-sur-Ciel (quel nom !). En sortant de Laguépie (Tarn et Garonne 82), je franchis le pont pour atteindre Saint Martin-Laguépie et son château qui est dans le Tarn (81), alors que Najac était dans l’Aveyron (12). Le parcours de l’étape est bien balisé et alterne des fonds de vallée sans vent mais encore gelées et des franchissements ensoleillés mais très ventés.

Sur un de ces emplacements ensoleillés, je croise un homme âgé qui promène son chien et qui inévitablement me demande «  Eh ! d’où vous venez comme ça ? », de l’Yonne, je lui réponds et sa réponse fuse « Ouuuuuuuuuh ! C’est le Nord ! » (je ne sais pas si la réplique de Galabru dans les Ch’tis l’a inspiré mais c’était spontané). Je trouve par téléphone, tout en marchant, un gîte s’appelant AHUTI sur Ciel (contact : Michel Blanchet), je découvre que ce gîte est associatif, qu’il est fermé, mais qu’il sera ouvert pour moi ce soir car l’association fête son troisième anniversaire aujourd’hui et que si j’arrive vers 13h, je pourrai manger avec tout le monde (si tu arrives plus tard, il y aura des restes).
L’association propose tous les samedis midi une soupe populaire participative, chacun apporte un plat et l’un du groupe prépare une soupe pour tous.

 


 

Installé dès la mi-journée à Cordes, je prends dans l’après-midi le temps de visiter la ville sur son piton. C’est très beau. Elle a été construite sur ordre de Raymond VI, comte de Toulouse, pour résister aux armées du roi de France et permettre aux populations rescapées de la croisade contre les cathares et éparses de trouver un lieu sécurisant où la vie pouvait de nouveau s’organiser.
De Cordes, la liaison me conduit à Gaillac (une ville à plat, dixit les habitants de Cordes). C’est une étape bien arrosée avec une intermittence d’averses toute la journée. Peu à peu le paysage se transforme et bientôt, la vigne a envahi tout le paysage (coteaux de Gaillac). Les constructions sont toutes exclusivement en briques, qu’il s’agissent de pont, de chapelle, de mairie, de réservoirs d’eau, de maisonnette de cantonnier,….. la brique est partout.

 



La brique est omniprésente dans les constructions : mairies, églises, cabanes de cantonnier, ponts, réservoirs d’eau,… l’exemple parfait sera la basilique St Sernin de Toulouse, ville  qui a hérité du surnom de la ville rose.

Je quitte Gaillac le lendemain, après avoir fait une opération lessive (- de 40°C sur le conseil de mon routeur)  au LAVOMATIC de l’avenue Saint Exupéry.  
Je repars tout propre, par de petites routes  en direction de Saint-Sulpice-La-Pointe et soudain sous le soleil apparaissent les Pyrénées; elles se dressent et barrent la moitié de l’horizon, et l’absence de pré-Pyrénées en fait une majestueuse barrière enneigée. L’arrivée de nuit à Saint-Sulpice sera compliquée par la traversée d’un pont sur le Tarn très étroit (beaucoup de voitures) et sans éclairage, que je franchirai en courant pour y rester le moins longtemps possible.

 



La dernière étape pour Toulouse se révèlera difficile, car je l’ai programmé trop longue (34-35 kms) et surtout que la pluie n’a pas arrêté. Le parcours du GR 46 est très bien balisé et dans cette entrée d’agglomération c’est efficace. Enfin marcher en ville, le soir, avec de la circulation qui asperge, des trottoirs et passages piétons compliqués, les feux,….
J’arrivai enfin à l’Ibis-budget du quartier de Matabiau, trempé et refroidi, j’ai immédiatement pris une douche bien chaude surtout pour me réchauffer. Bon je suis à Toulouse. Demain, journée sur place, mes pieds vont se reposer.

 




2- Le Puy – Conques

Quelques nouvelles de mes pérégrinations hivernales

Arriver au Puy en Velay, c'est terminer la marche d'approche, puisque ce segment du chemin de Compostelle est le plus emblématique, le plus pratiqué et le plus équipé, balisé, exploité, surtout en haute saison.

Mon séjour au Puy fut particulièrement agréable grâce à Christine et Alain Olivès, anciens Auxerrois recemment installés dans la paroisse protestante de l'EPUdF (Eglise Protestante Unifiée de France) dont Alain est le pasteur, après avoir été pasteur à Auxerre. Merci à eux pour leur accueil, qui me permit de me reposer, de bien manger et de visiter la ville.

Les activités de scoutisme de nos enfants nous avaient rapprochés à Auxerre. Christine, me fit tourner une lessive (mes habits « de travail » en avaient bien besoin, elle me prépara des lentilles du Puy à la vinaigraite (qui ont la propriété de se conserver dans un sac à dos pendant des jours) et Alain me fit visiter la ville. Que de choses à voir, heureusement tout était fermé (un dimanche en janvier !) ce qui nous permit de repérer les visites des monuments et musées, mais de les réserver pour une autre occasion avec Annie.

Après ce tour de ville, sous le soleil, nous avons pris un café en terrasse, ce qui à cette saison est assez inhabituel.


 «  La dure vie du pèlerin, au soleil du Puy-en-Velay » DR



Cette ville est dominée par des statues impressionantes voir oppressantes de la Vierge Marie (27m), de Saint Joseph (22m) d'une chapelle dédiée à saint Michel (sur son piton) et de sa Cathédrale.


                                              « L'église dédiée à St Michel sur son Piton » DR

Celle-ci a d'ailleurs une particularité étonnante, on y entre par le sous-sol. Oui, une vaste porte métallique s'ouvre dans l'allée centrale et permet l'entrée en procession par le « ventre » du monument. Elle est d'ailleurs dépourvue de Portail et le fond de la nef est un simple mur sans ouverture. Ceci est dû au fait que la plateforme sur laquelle repose la cathédrale était trop petite pour permettre un agrandissement, aussi celui-ci a été fait, mais sur des pylônes de plus de 10m de haut.


                        « Le Temple de la Paroisse Protestante du Puy-Yssingeaux (EPUdF) » DR

Ce dimanche, j'ai participé à l'office protestant de la paroisse de mes hôtes, qui bénéficie d'un temple bien modeste en comparaison de la cathédrale (nous sommes dans la partie de la Haute-Loire où les protestants sont moins nombreux que les catholiques, contrairement au secteur du Chambon où c'est le contraire).

Le lundi 25 janiver au matin, après avoir pris un petit déjeuner avec Alain, j'ai repris le chemin, quel chemin ! Il s'agit de sortir de la ville et en même temps de sortir des gorges de la Loire pour monter sur le plateau (massif de Devès). Ça tire et le sac semble plus lourd, mais cela passe en allant lentement. C'est que sans en être forcement conscient j'abordais la partie la plus élevée du chemin, tant sur le plan de l'altitude que sur celui de la spiritualité.

Cette première étape me mène des gorges de la Loire (Le Puy) aux gorges de l' AllIer à Monistrol d'Allier. Le chemin est tellement inscrit dans le paysage par une bordure de murs et un balisage de croix, que la navigation est simple, je peux ranger le Géo-Portail. Cette étape est dure par son profil et parce que c'est le redémarrage après deux jours d'inactivité physique.

La descente sur Monistrol, m'ayant été décrite comme très raide et glissante en ce moment je terminerai par la départementale en arrivant à 18 heures, de jour, contrairement à beaucoup d'étapes que j'ai terminées à la lampe frontale. L'Hôtel du Pain de Sucre, est ouvert (c'est le seul), j'avais téléphoné pour vérifier, Peter et Patrick, patron et garçon de l'établissement, m'ont téléphoné pour me proposer de terminer l'étape en quad (ce qu'ils m'ont dit faire couramment en été). Peter, anglais implanté depuis plus de 30 ans en France puis à Monistrol, me régale de saucisses et de  pâtes fraiches de sa confection agrémentées de champignons du cru (un régal).

 



« Le pont Eiffel de Monistrol d'A. » DR

 

 

« La chapelle Ste Madeleine dans la falaise » DR

Le parcours du lendemain, m'extrait des gorges de l' Allier, pour prendre pied sur la Margeride, en passant devant la chapelle Ste Madeleine (coucou Vézelay). Mon objectif est d'atteindre, après une pause repas du midi à Saugues, le gîte du Sauvage, situé sur la commune de Chaneleilles, il est aux confins des deux départements de la Haute-Loire (43) et de la Lozère (48), le passage de l'un à l'autre se faisant par le col St-Roch, lui aussi estampillé jacquaire. Le gite du Sauvage (1350m), je l'atteindrai après une progression nocturne dans la neige et dans les bois, à la lueur de ma frontale, qui au détour du chemin (je suis d'arbres en arbres, les balises « blanches-rouges » du GR) me fait découvrir le panneau «  Ici Réserve de Bisons d'Europe » ! .

Bon, réserve peut-être, mais heureusement pas de Bisons cette nuit là. Après consultation de deux agriculteurs quand à la réussite de mon parcours pour atteindre le gîte du Sauvage, l'un d'eux me dit : "ça passera dans la neige, suivez les traces, j'y suis allé ce matin en tracteur."

Accueilli par le couple de gardien, qui sur ma demande me vend du fromage de chèvre et du pain, je m'installe et fais un repas assez simple. Bouillon Rapounzel (de chez Germinal) pain saucisse sèche, fromage et poire, et puis au lit. Je ne verrai que le lendemain la beauté du Lieu, entièrement cerné par les forêts, construit par les templiers, c'est à dire que les étables et granges sont construites comme des batiments religieux (Ogives, contreforts,....)



                     « Chemin du Sauvage » DR            

 

 

« Col St Roch et la chapelle » DR

 



Et ce jour, la marche vers Aumont-Aubrac, commencera par 4 kms dans la neige (il fait -3°C) pour rejoindre la route du Col St Roch, mais sous le soleil, ce qui est un vrai bonheur. Puis descente vers St Alban/Limagnoles et fin de parcours à Aumont-Aubrac.

L'étape d'Aumont-Aubrac à Nasbinals, qui commence par le croisement du Chemin avec l'autoroute A75 (les gibiers ont des ponts sur l'autoroute, les pélerins eux passent en dessous :-)), sera l'une des plus sportives que j'ai connue, car ce sont des chemins encombrés de neige transformée plusieurs fois par le soleil et le gel. Il est parfois plus simple de parcourrir le haut des murs bordant le Chemin que de tenter de passer sur une couche de neige qui craque et me fait descendre d'un demi-metre dans..... au mieux de la poudreuse, au pire dans un ruisseau de boue.

J'en sortirai bien trempé accélérant le pas sur la fin de l'étape pour aller me changer, me sécher et me réchauffer. A Nasbinals la famille Bastide tient le secteur d'accueil (propriétaire des 4 restaurants, de Trois hôtels, proposant des parcours et séjours,...). Je suis très bien accueilli et incidemment en parlant rugby, j'apprends que le fils Hugues Bastide est pro au Club de...Nevers.
                                                 

             « Chemins d'Aubrac enneigés » DR

 

Paul Girard a du racheter un poncho car le premier n'a pas résisté (DR)



Pour poursuivre la traversée de l'Aubrac, je décide de passer directement par Laguiole (j'avais besoin d'un vrai couteau avec un tire-bouchon). Pour cela à partir de Nasbinals, je suivi le GR 65, mais le quittai, lorsqu'il tourne brutalement vers Aubrac. C'est à travers les patures enneigées que je « grimpais » (orientation Géo-portail aidant) jusqu'à la croix des trois évèques (point culminant de l'Aubrac à 1400m), croix située à la limite des trois départements-diocèses du Cantal(15), de la Lozère (48) et de l'Aveyron (12).

Encore une fois bien trempé par la progression dans la neige, je hâtais le pas sur la départementale en direction de Laguiole, pour découvrir, qu'au delà des couteaux qui ont fait sa renommée mondiale, Laguiole était aussi une station de ski alpin et nordique (remonte-pentes et pistes !). A Laguiole, donc achat d'un couteau (avec tire-bouchon et manche de bruyère), coupe de cheveux (14 €) car le port du béret va bien avec les cheveux courts et bon repas devant un feu de cheminée.

Après ces deux dernières étapes bien « mouillées » , celle qui me mène à Entraygues-sur-Truyère, sera, elle, très sèche. C'est un profil de descente de 960m (Laguiole) à 280m (Entraygues) sur des petites routes départementales bien nettoyées, qui me conduisent au fond des gorges... du Lot, cette fois ci. Entraygues (Entre les eaux) est un village fortifié à la pointe du confluent du Lot et de la Truyère (rivière qui passe sous le viaduc de Garabit).

Ce sera la dernière étape de cette traversée de l'Aubrac. Entièrement sous la pluie, « j'ai bâché le camion dès le matin ». Durant cette étape un peu avant Conques au village de Saint-Marcel, je serai agressé par 4 chiens (j'en menai pas large !), qui faisiat un ballet à mes dépens, tournant tous les 4 en rond autour de moi et se lançant chacun leur tour en ma direction pour montrer les dents et grogner de manière menaçante.

Quand je me suis décidé à ramasser un bâton, leur hargne commença à baisser, c'est bien après que je m'aperçus que lors de cette séquence, j'avais perdu ma carte Michelin, mise sous plastique pour cause de pluie, elle avait glissé lors du ramassage du bâton.

Apparemment, ces chiens n'en étaient pas à leurs premières agressions, m'a précisé le voisin d'après sur le chemin. Remis de mes émotions, mais assez mécontent de la perte de ma carte, j'arrivais à Conques, par un petit sentier creux qui descend du plateau vers le village, le sentier s'élargit, devient pavé, puis apparaissent les premières maisons.


     

       

 

«  Sous la pluie, sur la route , arrivée à Conques » DR



Toutes sont du même style, murs en grosses pierres et toits en lauzes. À l'heure et la saison où j'arrive, j'ai Conques pour moi tout seul. Seul ?

Non, car au moment où je pousse le battant de l'église abbatiale, un homme entièrement vétu de blanc m'interpelle. Je lui dis qu'à Entraygues, il m'a été recommandé de demandé Frère Jean-Daniel à Conques. « C'est moi » me répondit-il .
          

La traversée de l'Aubrac était terminée, une pause à Conques commençait.



Paul

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Paul Girard est arrivé au Puy-en-Velay le 21 janvier, après 16 étapes depuis Escolives d'où il est parti le 7 janvier. Des routes, des sentiers, des vieux chemins, son parcours tient de la course d'orientation ( merci le GPS et le Géo-Portail de l'IGN qui me donne les cartes IGN avec une grande précision). Journée de repos et reprise du chemin le lendemain en direction de Conques. À 64 ans, il marche seul avec un sac de 12 kilos sur le dos

 

 

1- Escolives-Le Puy

"Le chemin, existe-t-il ?

"Oui, dans sa réalité et sa continuité physique, étape après étape il se construit , se nourrit, s'enrichit de tous les éléments qui le constituent et le font vivre.

"Pourquoi Compostelle, me demandes-tu Pierre ?

"C'est une question pour laquelle la réponse est aussi complexe que personnelle, c'est une dimension culturelle de notre culture chrétienne millénaire, un phénomène humain de rupture et d'expérience et pour une bonne partie un défi sportif sur notre continent « tranquille ».

En avoir rêvé, depuis si longtemps et enfin y consacrer 2 mois et demi (80 jours), ma retraite récente, celle d'Annie prochaine, cet hiver sans hiver et un temps frais pour marcher, tout y est.

C'est donc le 7 janvier (lendemain de la fête de l'Epiphanie) que je suis parti du chemin de ronde à Escolives, sac au dos.
Les deux premières étapes d'environ 20 kms, me dérouillent physiquement. Elles me mènent à Vézelay, étape incontournable du Chemin de compostelle. Logé à l'institution Ste Madeleine, je participe à l'office du soir (vespres) de la congrégation de Jérusalem.

Puis l'étape suivante me mènera à Lormes en 27 kms, que j'aurai la joie de faire en compagnie de mon fils Valentin qui est venu voir comment marchait son père. Le midi, grande surprise, Annie et Aurore sont venues nous surprendre, et c'est donc un resto à Bazoche pour le midi.

Ensuite j'attaque la traversée du Morvan, que je ferai en deux étapes, Lormes-Chateau-Chinon (le musée Mittérrand est fermé, ce sera pour une autre fois) et une étape de neige et vent (particulièrement les 10 kms du haut-Folin au Beuvray) qui me conduira de Chateau-Chinon et que je terminerai à Poil.

À Poil, la première personne que je rencontre c'est le Maire en sa mairie, qui me tamponne mon crédential, et m'indique qu'il n'y a aucun hébergement sur place. Vu l'heure (18 heures) et la nuit noire, j'appelle un taxi qui m'enmène à Etang-sur-Arroux, où je logerai au camping des Deux rives ....dans un Mobil-Home, accueilli par une hollandaise très sympatique.
D'Étang, je repars le lendemain pour atteindre Plaige, où est construit depuis les années 70 un temple Boudhiste « KayuLing » autour duquel vit une communauté de moines et moniales.
L'accueil est très agréable, chambre individuelle, office à 18h (Symbales et Tambours) et une partie des textes est dite en français.

De Kayuling, je repars en direction de Montceau-les-Mines, par des vieux chemins, des routes forestières et des routes revêtues, en me guidant au mieux avec mon GEO-portail (appli de l' IGN, qui me donne la carte d'état-major et le point précis où je me situe).

Cette étape sera longue, car j'ai mal évalué les kilomètres, j'atteins le village de Gourdon, après être passé entre les découvertes de Sanvignes-les-Mines (dernières mines de charbon à ciel ouvert exploitées dans le bassin de Blanzy).

Arrivé à Gourdon-sur-son Piton, la montée a été dure, je découvre que ma réservation n'est pas au chef lieu mais dans le  hameau de Serles qui est sur la colline à l'horizon.

Un habitant me met sur le chemin, et à la lampe frontale, je descends, traverse le ruisseau et remonte au hameau de Serles, pour découvrir que la réservation n'a pas été confirmée et que le gîte est fermé ! Téléphone au propriétaire qui m'indique qu'il est en vacances à 600 kms du lieu. Sympa, il appelle l'hôtel local « au Plain Joly », et convainc l'hôtelier de me loger. Ouf, il me reste 4 kilomètres à faire pour aller à cet hôtel, heureusement un éleveur qui pansait ses bêtes dans ce hameau, me redescend à bon port. Fin de journée.

 

Paul Girard suivi par son ombre (DR)

 

De Gourdon, j'irai le lendemain, jusqu'à Taizé, où est implantée une communauté euchuménique chrétienne rassemblant les trois branches du christianisme (cathos, protestants et orthodoxes), ce qui me vaudra de vivre un office au cours duquel les chants seront repris en 5 ou 6 langues différentes, plus de 70 moines participeront à cette célébration, impressionnant.

Taizé, que j'ai connu et fréquenté il y a plus de 40 an,s a bien grandi, et rayonne d'un bel esprit mondialisé (je dinerai ce soir là avec une coréenne, un suisse, une allemande et un australien !)

De Taizé, je prends la voie verte qui me conduit à Cluny, où l' école des Arts et Metiers est toujours en activité, j'aurai le plaisir de déjeuner le midi avec le Président de la Communauté de Commune du Clunisois et son épouse. Jean-Luc était l'un de mes scouts clunisois des années 70-74. Puis déception, je pensais bénéficier de l' abri du tunnel ferroviaire désaffecté du Bois clair, pour me rendre à Berzé-la -ille, où une ancienne collègue de la CCI de Macon, m'accueillait, mais ce tunnel est maintenant fermé pour cause de chauve-souris à sauver (Zone Natura, quand tu nous tiens  !). Il semble bien d'ailleurs que la fermeture de ce tunnel ayant changé les conditions d'aération et d'humidité, les chauves souris soient parties, mais le tunnel est toujours fermé.

C'est donc sous la neige que j'ai fait 4 kilomètres de plus pour passer le col du bois clair, et arriver vers 20h15 chez ma collègue, après l'avoir rassurée par téléphone.
De Berzé-la-ville, en passant par Milly-Lamartine, j'arrivais à Tramayes, où l'accueil de l'hôtel du Marronnier pour le repas du soir et la nuit fut très familial.
De Tramayes, je quitte la Saône et Loire, pour le département du Rhône et le Beaujolais, de Tramayes à Beaujeu, ce sont les premières vignes et le village de Marchampt. Au hameau de Laval, je suis accueilli par la famille de ma belle fille, Hervé est viticulteur en biodynamie.

 

 

Le lendemain, faux départ ! J'ai oublié ma coquille de pèlerin, donc retour à Laval avant un vrai départ vers 9 heures.

Cette étape me conduira à Amplepuis à travers un paysage de bocage peuplé de bovins aussi surpris de me voir dans ces chemins enneigés et boueux que moi de les voir encore dehors. Leur surprise est à son comble quand je dois franchir avec ma charge les barbelés, pour retrouver mon chemin perdu pendant quelques temps. Un petit bout de doigt restera d'ailleurs sur le barbelé.

À Amplepuis, je suis accueilli par François. Quelle soirée, nous nous découvrons des points communs, objecteurs, amateurs de fruits distillés, producteur de ratafia..... Il fabrique ses propres produits de charcuterie et...ils sont très bons. Après une bonne soirée, une bonne nuit.

Le lendemain, après avoir mis la clé de maison de François à l'endroit convenu, je chemine en direction de Feurs, à travers les monts du Lyonnais, pause repas dans la vallée de l'Azergues et arrivée tardive à Feurs, où je découvre nuitamment la plaine du Forez. Ce qui me change des reliefs passés.

De Feurs, mon étape sera Saint Bonnet-le-Chateau, traversée de la plaine, fastidieuse et de Montbrison, avant de reprendre dans les monts du Forez. En fin de cette étape, je serai secouru par un automobiliste qui me fera faire les 10 derniers kms (le bord de route étant très dangereux la nuit compte tenu du passage). J'avais mal évalué cette étape et j'acceptai son aide, ayant été présomptueux sur cette journée.

De Saint Bonnet-le-Château, je traversais, quasiment en course d'orientation, les reliefs, qui me permirent de découvrir le hameau de Charencon et son Pont du Diable. Ce site est du XIII ème siècle dan un environnement préservé, le pont me permit de passer les gorges de l' Ance et de gagner Chamalières ...sur Loire, ou plus précisement son hameau La Fayolle, où le propriétaire du gite retenu, inquiet de mon arrivée tardive et à pied, vint à ma rencontre avec sa lampe électrique.

Enfin, dernière étape de ce parcours, sous un grand soleil pour la plupart de la journée, j'arrivais au Puy-en-Velay, après avoir remonté les gorges de Peyredeyre qui par Chadrac, me permirent d'acceder au Puy, bien sûr dominé par son immense statue illuminée.

Ces journées de 9 à 13 heures de marche, sont de longs moments où le temps qui passe reprend sa place, assez loin du rythme de la vie habituelle. La découverte progressive du paysage, la curiosité d'un nouvel horizon à chaque colline franchie, la recherche permanente du « bon » chemin rend vivant ce parcours et finalement les journées paraissent courtes. L'appétit et le sommeil reprennent leurs droits sans difficultés.

Techniquement, mes étapes ont fait en moyenne 31 kms par jour, de 9h à 13h de marche. Je pars au lever du jour pour bénéficier au maximum de la lumière naturelle, cela ne suffisant pas, je continue à la lampe frontale jusqu'à l'étape programmée.

Cette marche de nuit n'est pas nouvelle pour moi, c'est la même que celle faite en montagne quand on part du refuge à 3 heures du matin. J'ai eu tous les temps, souvent frais donc agréable pour marcher, mais rarement froid, sauf vent sur terrain à découvert.

"Lundi, après visite du Puy-en-Velay et repos ce dimanche, je repars en direction de Conques."

Paul