SOCIETE
Nuit de maraude moments d'humanité à Auxerre
le mardi 10 janvier 2017, 10:53 - SOCIETE - Lien permanent
Ils sont entre 10 et 15, SDF à Auxerre. Du 1er novembre au 31 mars, les bénévoles de la Croix-Rouge maraudent deux fois par semaine réconfortant avec des collations mais surtout des mots et des gestes. En période de grand froid comme la semaine dernière, les maraudes ont lieu tous les soirs
Devant Monoprix au pied de Cadet-Roussel, le carrefour vous emmène dans un ailleurs, sur un chemin inexorablement. On quitte doucement la société de consommation qui nous abreuve et nous bouche les pores des sens de la perception. On change de lunettes malgré soi. De nouveaux regards naissent et font couler dans les veines des ondes, des fluides suscitant des impressions, des sentiments refoulés, nouveaux, comme une montée de sève brute, pas sucrée, au printemps. Qui vous extirpe d'un état de dormance.
Là, à côté de soi, tout à côté, se profilent d'autres univers, d'autres profils, d'autres vies, d'autres formes d'exercice de la condition humaine, si complexe et si riche. Tellement insondable, indicible, surprenante parfois.
Lundi soir, il ne faisait plus grand froid comme la semaine dernière. Mais l'humidité, la pluie glaçante en a fait frissonner plus d'un, transi, au cours de la maraude.
Les maraudes auprès des personnes SDF, ou tournées de rue, sont une forme de visite à domicile dans l'archéologie urbaine et celle de la nature multiformes. Participer à une maraude, c’est aller visiter ceux qui vivent dans la rue. Il y vivent non pas de manière statique, il faut balayer cette image du mendiant assis la casquette devant lui avec de rares pièces dans les replis.
Équipés entre autres d’un thermos de café ou thé et de sandwichs, de biscuits et quelques douceurs telles un mars, les bénévoles se déplacent de point en point en camionnette de la Croix-Rouge et en voiture puis attendent ou cherchent à rencontrer des personnes sans-abri. Qui sortent parfois du bois.
Le plus important murmure Bernard qui ne cache pas vouer de l'amour à ceux qu'il appelle ses amis avec fierté, est de prendre le temps de la rencontre : discuter, s’intéresser, écouter, partager autour d’une boisson chaude. Petit à petit, les langues se délient, une relation de confiance se crée. Lundi soir, Bernard a ainsi pris sous son aile un jeune qui venait de Lyon et était accablé. Il repartait à Lyon aujourd'hui.
Les tournées de rue sont aussi un moyen de lutter contre la solitude des personnes SDF, qui souffrent de leur exclusion, même s'ils ont fait ce choix et l'assument pleinement avec dignité. Les bénévoles sont comme des oiseaux sur la branche qui les raccroche encore à la société.
"De belles personnes ..."
Sur le parking Leclerc à Auxerre, il n'était pas là le pensionnaire du soir, Bernard. Pas d'inquiétude comme parfois, dans les rangs de la Croix-Rouge. L'ami SDF a du se mettre à l'abri car il pleuvait. On a zappé le quartier de la gare ainsi que le parking souterrain de l'Arquebuse où d'aucuns trouvent refuge même si, dit-on, le lieu n'est pas vraiment prisé.
Ils sont entre 10 et 15 à Auxerre sur lesquels veillent les bénévoles comme des anges gardiens qui se sont pris d'affection pour leurs SDF. Ce n'est pas forcément la misère. Du 1er novembre au 31 mars.
La maraude représente l’engagement solidaire de bénévoles et de professionnels. Lundi soir, les chefs de service de diverses instances départementales et communales participaient à la maraude.
Il reste que ce beau monde, ou plutôt "ces belles personnes", comme le relève Bernard Nodot, témoignent au quotidien, dans les espaces méconnus de la cité et face aux situations parfois extrêmes, du devoir de sollicitude et de non-abandon.
Dans la continuité de leurs interventions, ils privilégient l’exigence de relation, du lien, du contact physique, soucieux du respect de l’autre dans sa dignité, ses attachements, sa façon de penser et d'agir et ses droits.
Il saute aux yeux que la préoccupation éthique se situe au cœur de l’activité de maraude. Cette éthique en forme de coeur vivant battant la chamade, détermine les conditions mêmes de l’exercice de missions complexes, incertaines, où culminent les fragilités humaines et les précarités sociales. Respect, écoute et pudeur.
Françoise Fugier aux Bourdillats, près de chez Youri, transie mais lucide, trouva les mots pour résumer. "J'observe des bénévoles extrêmement présents, attentifs et bienveillants, j'observe des personnes qui sont en attente de cette bienveillance. On a tous la fibre de l'amour, il faut simplement la cultiver ..."
P-J. G.
Aux Bourdillats le long de l'Yonne, la camionnette de la Croix-Rouge attend discrètement à distance du domicile de Youri, situé dans les bois, une tente. Ils attendent que Youri se montre, s'il le souhaite, et lui donne de la soupe en taillant une bavette avec des mots étrangers qu'on arrive à comprendre en fonction de la manière dont ils sont dits avec le langage corporel
Jean-Luc a un hébergement. Il est très connu dans la cité. jean-Luc entraîne au football aux Brichères les SDF et tous ceux qui le souhaitent venus des deux centres d'hébergements d'Auxerre. Tous les lundis soir, les CARITAS s'entraînent de 19 à 21 heures
En face du parking Leclerc, un abri à poubelle protège ceux qui vivent sans toit
Violette Tollot, vice-présidente de l'unité locale d'Auxerre de la Croix-Rouge, qui depuis cette année est autonome et organise les maraudes. Avant, c'était Migennes
Richard Des Courtis, membre de la délégation départementale de la Croix-Rouge, porteur d'un projet d'installation du Pôle enfance de Migennes à Auxerre Avec un espace puériculture qui fait défaut
Youri boit un café assis sur un tronc d'arbre à côté de Violette. Derrière lui, caché comme un trésor que personne n'a le droit de toucher, son mini-transistor d'où sort une musique
Bernard, l'ami des SDF, qu'il respecte, écoute, sans juger, sans faire la morale, qu'il réconforte et surtout à qui il sait parler de manière concrète, sans fioriture. L'homme citoyen auxerrois, militant de la rue, est né aux Champoulains et en est fier. Il va partout où on l'appelle. Après la saison d'hiver des maraudes (1 novembre au 31 mars) il s'occupe des migrants, des inondations et de beaucoup d'autres situations de détresse. C'est sa vie. Il aime les autres, le dit et le fait.
Youri citoyen Russe qui vit sur les bords de l'Yonne aux Bourdillats. Il est estimé et aimé par les bénévoles de la Croix-Rouge qui arrivent à communiquer par le langage corporel. Youri mange deux soupes et boit deux cafés, les soirs de maraude, lundi et jeudi, et tous les soirs en période de grand froid
Au débrief avant minuit dans une pièce du centre d'hébergement Thomas Ancel, rue Thomas-Ancel rive droite à Auxerre
Françoise Fugier secrétaire générale de la préfecture de l'Yonne, sous-préfète d'Auxerre a trouvé les mots pour dire les choses. Elle a aussi remercié les uns et les autres pour l'accueil
Le maire a pu constater que le maillage et le dispositif de lien social fonctionne entre les différentes parties prenantes
Commentaires
bonsoir ,
je viens de regarder le reportage sur ses gens
comment peut ' on en 2017 laisser des humains dehors
je voudrais bien vous aidez mais je ne sais comment m'y prendre
il y a tellement à faire
continuer vos maraudes mais pas seulement en hiver mais toute l'année car ses personnes ont besoin de vous , de nous tous
BRAVO
JEAN CLAUDE
Bonjour je me présente Paule Senez j ai pu apprécier votre reportage "nuit de maraude" il est cependant fort dommage que personne n'est mentionné le fait qu' un collectif de citoyens lambdas se mobilise afin de venir en aide au sdf de l auxerrois et plus récemment des maraudes qui vont se mettre en place à migennes.
Ce collectif a été crée début décembre sur Facebook . De nombreuses personnes se sont mobilisées .Nous avons effectuer notre première maraude le 23 décembre en distribuant soupe café... et un colis de Noël comprenant nourriture et produits d hygiène selon leurs besoins ...ainsi Que des vêtements, des couvertures et de nombreuses choses utiles pour nos sdf et leurs amis à 4 pattes ... nous avons mis en place une distribution fixe le mercredi de 18h à 19h sur le parking du leclerc , et nous recrutons d autres bénévoles pour effectuer d autres tournées les jours où La Croix rouge ne maraude pas (hors période grand froid ).
Ce soir pour exemple nous avons rdv avec une douzaine de sans abris. un restaurateur de Migennes se joindra à nous pour distribuer des galettes des rois à nos amis les sans abris ...
Ce vrai reportage est remarquable à tout point de vue.
Merci et chapeau Auxerre Tv
Oui on est sans voix... Et je dois dire que je suis épatée aussi devant la saine gentillesse des volontaires qui vont ainsi à la rencontre des SDF, sans jugement, avec le respect que l'on doit envers un être humain qui a fait un mauvais choix, ou a eu un moment qui a tout fait basculer, ou est égaré dans sa vie, peu importe... il reste un humain avec une histoire et des sourires à partager si on accepter de ... le regarder dans les yeux, le temps de lire "vie"
moins de 50 000 € serait necessaire pour creer une halte de nuit qui mettrait tout ce petit monde à l'abri. Des solutions existent il ne manque que la volonté ?
superbe reportage qui m'a permis de mieux connaître Youri, que j'ai souvent rencontré du coté de la maladière et sur le bord de l'Yonne, plusieurs fois pieds nus
les chaussures à la main , par un grand froid !
Je savais qu'il n'aimait pas trop etre aidé.
J'ais toujours le plaisir de le saluer lorsque je le rencontre car il répond toujours avec son accent de l'est.
Les mots ne viennent pas.
Un reportage édifiant
Terrible
Tellement que tout le monde reste sans voix...
Auxerre, 2017 ; impensable !