Entre volonté de pédagogie, critique de choix et options ou volonté d'en découdre sur le fond, ce fut un peu à qui décalquerait le mieux l'autre, jeudi soir pendant une heure, lors des explications de vote qui précédèrent le vote final du budget 2017 du conseil départemental.

Sous l'oeil amusé de Jean-Baptiste Lemoyne, conseiller départemental en passe d'être exclu ou radié du parti Les Républicains pour avoir rallié Emmanuel Macron la veille au soir. Les commissaires Larrivé et Accoyer n'ont pas perdu de temps pour enclencher la procédure.

Car celui qui fut le perdant malheureux de l'élection à la présidence du CD 89 en 2015 face au centriste UDI André Villiers qui a été élu pour un bail de six ans (Un président pour 6 ans) mais qui est désormais candidat aux législatives ..., ne prononça mot se contentant de sourire. Au moment du vote, il s'abstint ainsi que d'autres lemoynistes tels Valérie Leuger (Auxerre), Clarisse Quentin (Sens), Irène Eurliet-Brocardi (Charny), Marie Evrard (Migennes) et la surprise du soir amorcée le matin il est vrai, François Boucher maire LR de Migennes et président de la comcom.

C'est ce dernier, membre de la majorité départementale qui porta la charge la plus structurée et la plus cruelle, non sans élégance et sans aucune agressivité dont il est parfois le porteur, François Boucher, qui exprima ses désaccords avec les options choisies et s'interrogea sur certaines décisions. La charge ne porta pas que sur le fond mais aussi sur la forme puisque au sujet de certaines questions, il dit les avoir apprises en lisant la presse, pointant le mode de gouvernance.

 

Pourquoi une hausse ... ?

 

Sur le fond, François Boucher s'interroge encore sur le pourquoi de la hausse de la fiscalité, y compris sur le fléchage de trois projets deux ponts et une déviation dans la 3ème circonscription, que faut-il comprendre ? La liste est longue des déviations nécessaires. François Boucher estime qu'à l'aune de la loi NOTRe, le CD 89 ne peut pas ne pas revoir les différentes composantes de la structure du budget, la masse salariale car il faut calibrer les services par rapport aux compétences restantes.

Les quelques aides aux communes sont du saupoudrage estime François Boucher qui pointe que cela aide ces communes tout en excluant celles de plus de 5 000 habitants. L'élu migennois relève la vente des actions de la SEM Yonne Équipement aux intercos qui financent, les intercos qui ne disposent que du levier fiscal, elles.

Il explique aussi avoir découvert dans la presse la fermeture du collège Bienvenu-Martin ainsi que la construction d'un collège dans le nord qui n'est pas encore acté, le million supplémentaire offert aux agriculteurs, les astuces du budget entre le réalisé et le non réalisé qui permettent de jongler. La hausse de la fiscalité servira-t-elle vraiment à financer l'investissement ou bien à d'autres choses, interrogea sceptique, le maire de Migennes ?

François Boucher regrette que le reprofilage de la dette (248 millions d'euros au taquet selon le président Villiers Ndlr) n'a pas eu lieu alors que les taux étaient historiquement au plus bas fin 2016. Il juge que l'augmentation de l'enveloppe allouée au RSA en augmentation de 2% seulement ne sera pas suffisante et se demande si l'exécutif du CD 89 n'anticipe pas la présidentielle et une reprise par l'État de ce budget géré par les départements ?

François Boucher interrogea également sur la décision du tribunal administratif de recaler le budget du Sdis (service départemental d'incendie et de secours) suite au recours de la ville de Sens et de la Communauté d'agglomération de l'Auxerrois sans compter le paiement probable rétroactif de sommes versées abusivement.

 

La légitimité d'André Villiers

 

L'élu migennois ancien suppléant du RPR Jean-Marie Rolland, ex-député et ex-président du conseil départemental, aborda pour conclure la question politique du choix d'André Villiers président du conseil départemental de se porter candidat aux élections législatives dans la deuxième circonscription alors que le budget du département est fragile et qu'il a été élu sur le slogan un président pour six ans. En opposition à la situation de son concurrent le sénateur LR Jean-Baptiste Lemoyne qui aurait dü démissionner, en 2017, soit du Sénat soit du conseil départemental s'il avait été élu, frappé par la loi sur le cumul des mandats. Comme le serait André Villiers s'il est élu au mois de juin.

Bref, que fera André Villiers s'il est élu ? Et que fera-t-il s'il ne l'est pas ... ?

Pascal Henriat et les membres de l'opposition qui s'étaient exprimés largement le matin après le rapport du président, enchaîna en affirmant qu'il était difficile d'intervenir après l'intervention de François Boucher. Il posa néanmoins la question de la légitimité du président s'il n'est pas élu aux élections législatives.

Xavier Courtois, conseiller départemental LR d'Avallon, membre de la majorité départementale, candidat investi par son parti LR aux élections législatives dans la même circonscription que l'investi UDI André Villiers, mit en cause sur le fond comme sur la forme, le dossier des maisons de l'enfance dans l'Yonne dont une fermera ou bien des lits seront supprimés ici et là, suite au million d'euros en moins au budget. Il pointa également la politique d'éducation dans l'Yonne dont les résultats ne sont guère performants ainsi que la fermeture contre-nature du collège Bienvenu-Martin à Auxerre, avant de signifier au président qu'il voterait contre le budget, que lui et l'exécutif départemental soumettaient au vote des élus.

André Villiers fut cinglant avec son adversaire en évoquant des propos de café de commerce confus, longs, qui se perdent dans les méandres embrumés d'une soirée avancée. Puis le président administra une leçon d'appartenance à une majorité dont les membres doivent apporter des propositions et débattre dans les instances adéquates (commissions, CP à huis clos Ndlr), où certains brillent par une absence coupable.

Le président s'adressa à François Boucher disant respecter son credo mais ne pas être d'accord avec la volonté de privilégier l'emprunt qui est le remboursement de demain. Pas question dans l'Yonne dont l'en-cours d'emprunt qui a quasiment doublé de 2008 à 2011, d'ajouter de la douleur à la douleur, de l'emprunt à l'emprunt et pas question d'aller au-delà du volume de 248 millions d'emprunt actuel. Une ligne absolue, une barre à ne jamais dépasser. Alors on fait comment ? Faites-moi des propositions.

 

Les oreilles du préfet ont sifflé

 

Il peut être tentant d'aller taper dans l'enveloppe de 3 millions d'euros alloués à la culture et au sport.

Sur la politique de l'éducation, André Villiers a pris un chemin de traverse en fustigeant et en accablant la rectrice d'académie qui à peine arrivée sur le territoire, sans connaître le dossier, a pris une position politique sur le collège auxerrois Bienvenu-Martin, ce que Villiers juge scandaleux et ne s'inscrivant nullement dans la continuité de l'État comme le suggéra Nicolas Soret.

Concernant le préfet de l'Yonne dont les oreilles ont du siffler jeudi soir, André Villiers pointa des comportements inadmissibles du représentant de l'État, tel celui à l'égard d'un maire de l'Yonne (Guy Bourras, St-Julien-du-Sault Ndlr). Un personnage qui n'est pas à la hauteur de la façon de conduire la représentation de l'État, les exemples étant nombreux, martela André Villiers mettant au défi quiconque d'infirmer ses dires.

Inutile de préciser qu'André Villiers confirme la fermeture du collège Bienvenu-Martin. Pas une lubie mais une gestion responsable qui s'impose. Le département a par exemple investi 15 millions d'euros dans le collège Denfert-Rochereau dont la moitié des places sont vides.

Et le président de fustiger les rendez-vous biaisés de l'Éducation nationale pour le collège de Puisaye. Dans la Nièvre, dans le même environnement que dans l'Yonne, les ratios (H, heures sur E, élèves) ne sont pas les mêmes, dénonce le président Villiers remonté comme une pendule, haut le pied, à la mesure de ses convictions et de son indignation. Il a fallu le débrancher par deux fois : ce n'est qu'à la deuxième fois qu'il se résolut à couper le micro avouant qu'il avait été trop long.

Le président enfin détendu, eut encore la ressource, après le vote et les recomptages, de faire applaudir les deux sténos qui consignent avec patience et rigueur le contenu des séances. Lucides. Comme l'a glissé un excellent confrère, en partant, ça a piqué les yeux cette journée. Vrai Mesdames ?

 

Pierre-Jules GAYE

 

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Le budget adopté à la majorité

 

Le CD 89 (conseil départemental de l'Yonne) qui a planché depuis 9 heures jeudi matin, quasi non stop, a voté à la majorité de 28 voix pour sur 42, le budget 2017 à 21h30. Soit une augmentation de la pression fiscale de 3,5% (2,6 millions d'euros) une thésaurisation en vue de la restauration de trois ouvrages dont le pont de Cézy et celui de Pont-sur-Yonne.

14 se sont prononcés contre l'augmentation de la fiscalité proposant des alternatives. Le budget présenté s'élève à 404 millions d'euros dont 350 millions en fonctionnement.

222,7 millions sont consacrés aux actions pour les personnes âgées (66 millions d'euros), au RSA (54,4 millions), à la protection de l'enfance (50 millions d'euros) et aux personnes handicapées (44 millions d'euros).

Ont voté contre : Xavier Courtois, Delphine Grémy (majorité), Yves Vecten, Nicolas Soret, Pascal Henriat, Monique Hadrbolec, Françoise Roure, Christiane Lemoyne (opposition)

Se sont abstenus : Valérie Leuger, Jean-Baptiste Lemoyne, Marie Evrard, Clarisse Quentin, François Boucher, Irène Eurliet-Brocardi

 

Le vote à main levée de membres de la majorité mais pas de François Boucher (Migennes) ici au premier plan à droite, qui s'est abstenu

 

 

André Villiers a repoussé et contré tous les arguments avancés par les uns et les autres et a fustigé la rectrice d'académie et le préfet de l'Yonne (DR)

 

Jean-Baptiste Lemoyne, jeudi soir, n'a pipé mot, Valérie Leuger non plus (DR)

 

Pascal Henriat, MoDem membre de l'opposition s'est amusé des contradictions de la majorité et de l'avenir d'André Villiers en termes de légitimité à la tête du département  compte tenu sa candidature aux élections législatives (DR)

 

 

La séance du matin avec les interventions de l'opposition