Les observations de la chambre régionale de la cour des comptes sur la gestion du département de l'Yonne de 2012 à 2016, salue les initiatives louables, sous la présidence d'André Villiers, pour maîtriser les dépenses et pour éponger de lourds engagements pris par les précédentes mandatures, 250 millions d'euros d'endettement (Jean-Marie Rolland et Henri de Raincourt).

La chambre indique que le département ne peut plus investir sinon en recourant à l'emprunt donc à l'endettement, ce qui est impossible.

La cour pointe aussi une gestion pas assez anticipée et invite à davantage de fréquences de contrôles des établissements sociaux.

Elle pointe aussi la longue durée (70 à 80 jours) d'instruction des dossiers d'aide personnalisés à l'autonomie (APA) contre 35 jours en moyenne en France.

Enfin, la chambre régionale de la cour des comptes conclut que le CD 89 doit abandonner des compétences facultatives et créer une comptabilité analytique ... et développer les outils de prévision.

 

 

 

La chambre régionale des comptes de Bourgogne-Franche-Comté a procédé à l'examen des comptes et de la gestion du Département de l'Yonne concernant les exercices 2012 et suivants.

 

 

Outre le contexte socio-démographique et économique, le rapport porte principalement sur les points suivants :

  • l ’information budgétaire,

  • la situation budgétaire,

  • les dépenses sociales du Département.

  •  

 

S Y N T H È S E

 

Sur la situation financière du département de l’Yonne

 

Le département de l’Yonne est confronté, notamment depuis 2012, à une situation budgétaire sensible. Il subit, en effet, un « effet ciseaux » budgétaire qui le fait désormais entrer dans une zone de risque de déficit structurel en raison de plusieurs facteurs : une dette importante de 250 M€ ; des engagements pluriannuels pris lors des mandatures précédentes vis-à-vis des communes, certes aujourd’hui réduits de 15 à 8 M€ par an ; la contrainte commune à tous les départements français de l ’inflation des dépenses du revenu de solidarité active (RSA) ; enfin, la contraction sensible des contreparties et dotations de l’ État.

Les initiatives louables du département pour maîtriser ses dépenses, les faibles perspectives d’économie s que peuvent représenter les transferts de compétence prévus par la loi NOTRé et les priorités politiques mises en œuvre depuis 2015, ne seront peut-être pas suffisantes à court terme pour rétablir le déséquilibre entre les évolutions de dépenses et de recettes de fonctionnement, tout en maintenant, eu égard à ses faibles capacités d’épargne, une politique d’investissement, certes réduite, mais déjà handicapée par le poids d’une dette importante.

Au titre de la maîtrise de ses charges, la collectivité départementale a développé des dispositifs tendant à augmenter l’engagement financier, d’une part des usagers des transports par la fin de la gratuité, orientation permettant en outre de récupérer la TVA, et d’autre part des contribuables, avec l’ instauration de la taxe d’aménagement en 2012, le relèvement du taux de la taxe sur la publicité foncière en 2014 et de la taxe sur le foncier bâti en 2015. Elle a parallèlement obtenu des aides exceptionnelles de l’ État en 2013 et 2017.

Le département a également fermé le laboratoire départemental d’analyses ( IDEA), réduit de 38,2 % sur les quatre dernières années le montant de ses subventions aux organismes de droit privé et de ses contributions aux acteurs institutionnels (dissolution de l’EPCC de l’Yonne ), même si le secteur associatif demeure sensible en termes de retombées économiques et d’emplois.

D’autres mesures ont été déployées : le gel ou la réduction des effectifs, le cofinancement de certains projets - ainsi en matière de numérique - ou la recherche de recettes exceptionnelles comme les cessions d’actifs mobiliers de la SEM Yonne Équipement, la cession d’un collège d’Auxerre, auxquelles s’est ajoutée une aide exceptionnelle de l’État en 2017.

Ces dispositions ne peuvent contribuer que très momentanément à limiter les difficultés budgétaires du département qui devra rester vigilant s’agissant de ses obligations financières (AIS, SDIS) dont il semble avoir aujourd’hui une vision par trop optimiste, prévoyant autour de 2 % d’augmentation annuelle alors qu’elles ont augmenté de 4,55 % de 2014 à 2015.

Malgré ses efforts, le département reste confronté à de lourds engagements financiers imposés (électrification de la ligne ferroviaire Auxerre-La Roche Migennes, reprise des baux emphytéotiques administratifs ( BEA d’un parc de gendarmeries) ou difficilement éludables (programme numérique), ainsi qu’ à la nécessité d ’entretenir un patrimoine vieillissant (routes, collèges, équipements administratifs, foyer de l’enfance) et de procéder à des mesures de reclassement et de gestion des personnels originaires de la fonction publique de l’État.

S’agissant de sa politique d’investissement, le département souhaite, selon ses études prospectives, maintenir un volume d’investisseme nts atteignant 20 à 30 M€ annuels, alors que ce volume a chuté de près de 62 % depuis 2009 et se situe aujourd’hui à un niveau faible comparé aux autres départements. Premiers indicateurs d’une forte dégradation de ses équilibres, à paramètres actuels constants, sa trésorerie diminue : - 13,5 % depuis 2012.

Ne bénéficiant plus d’aucun autofinancement, l’investissement ne pourra donc être soutenu désormais que par un recours à l’endettement.

Toutefois, avec une capacité de désendettement supérieure à 10 ans, une augmentation des charges d’intérêt de 8 % et un encours de 250 M€ (soit 728 €/habitant, niveau supérieur à la moyenne de la strate : 534 € /habitant), l’endettement du département atteint en 2016 ses limites et semble incompatible avec l’objectif d’investissement affiché, quand bien même la dette est saine en termes de produits financiers.

Face à ces contraintes, les recettes fiscales s’avèrent inélastiques, connaissant à la fois des taux élevés et une diminution des bases - avec une évolution de 0,97 % au lieu des 2 % prévus en 2016 -.

Le caractère très fluctuant des recettes issues des droits de mutations à titre onéreux (DMTO), la faiblesse de la fiscalité reversée et la baisse continue des dotations de l’ État, de – 7 % de 2012 à 2015 expliquent également que les ressources du département de l’Yonne n’ aient pas pu augmenter significativement. Compte tenu du niveau important de rigidité de ses charges structurelles (75 %), le département de l’Yonne sera amené à réduire le montant de ses subventions, le niveau de ses investissements et ses interventions facultatives.

Au regard de telles tensions budgétaires, le département trouverait bénéfice à améliorer significativement ses outils de prévision, lesquels sont à l’état de projets (protection de l’enfance, politique d’insertion).

Il devra également affiner son contrôle de gestion tant interne, car le département ne dispose pas d’une approche analytique des coûts de personnel affectés aux services sociaux, qu’externe, car les contrôles sur place d’établissement s sont insuffisants. Il pourrait ainsi, pour mieux appréhender les hausses à venir, actualiser ou mettre en œuvre ses schémas pluriannuels (personnes âgées et handicapées, collèges, immobilier, enseignement artistique et politique culturelle, espaces naturels, accessibilité des services publics, tourisme) ainsi que son règlement départemental.

De même le débat d’orientation budgétaire et le budget primitif doivent redevenir de véritables outils de prévision ; les variations de crédits ouverts entre le budget primitif 2016 et le total des crédits budgétés la même année, en particulier en ce qui concerne les dépenses sociales, illustrent à cet égard une gestion insuffisamment anticipatrice.

 

Sur les dépenses sociales du département de l’Yonne

 

Le département de l’Yonne subit, à la différence d’autres départements et avec une amplification très sensible depuis 2013, un phénomène d’immigration d’une population en provenance de l’Ile de France, de plus en plus nombreuse et bénéficiaire de prestations sociales (insertion, enfance), notamment dans le Sénonais et le Tonnerrois.

Cette situation est aggravée par l’arrivée concomitante de mineurs non accompagnés (MNA) d’origine étrangère dans des proportions significatives (+15 % dans les six premiers mois de 2016, 8,6 % des effectifs hébergés, 2 M€ de budget).

Dans ces domaines, les marges de manœuvre de la collectivité sont à la fois limitées par des évolutions normatives et une tension économique et démographique sur laquelle elle n’a de facto que peu d’influence .

Le département a procédé avec des résultats variés à une série de mesures de réduction ou de maîtrise de ses dépenses, d’amélioration de l’efficience de sa gestion, notamment en matière sociale.

 

Son premier axe d’actions, qui reste encore à développer, se fonde sur une meilleure maîtrise de l’offre d’hébergement, privilégiant des solutions palliatives : maintien à domicile, accompagnement en milieu ouvert, hébergement en familles d’accueil, accueils séquentiels ou alternatifs.

Il travaille ainsi sur la réduction d’une offre de places trop abondante (enfance, personnes âgées) ainsi que sur une contraction des prix de journée (- 1 % pour 2017). Cette politique devrait porter ses fruits en ce qui concerne les personnes âgées et handicapées, si elle est accompagnée d’un contrôle sur place renforcé des structures financées par le département.

Elle devrait produire aussi des effets sur l’aide sociale à l’enfance dont la caractéristique, exceptionnelle en France, est de constituer le second poste budgétaire de dépenses sociales du département, juste derrière les personnes âgées.

Le département a ainsi réalisé de réels efforts pour rationaliser la prévention avec la municipalisation des actions de prévention spécialisée, privilégier le guichet unique, responsabiliser les parents et les majeurs protégés, réduire les allocations versées, optimiser les coûts en veillant à la subsidiarité de l’aide départementale, le contrôle du service fait des prestataires.

La territorialisation de l’action sociale du département, la mise en place d’agents volants et les redéploiements de personnels mériteraient d’être renforcés par une meilleure synergie avec ses services centraux, une mise à jour de la cartographie de son action eu égard aux mutations intercommunales récentes, une amélioration du suivi des placements familiaux et des outils d’aide au placement d’urgence.

Le département a réduit ses dépenses en internalisant les CLIC, en déployant un dispositif de lutte contre la fraude en matière de RSA, de recouvrement des indus, de poursuite des obligés alimentaires et d’intervention sur les successions.

Cependant, l’augmentation du degré de dépendance des personnes âgées et de leur durée de vie, l’importance historique du nombre de personnes handicapées, celle récente du nombre de mineurs non accompagnés et de bénéficiaires du RSA obèrent l’impact de ces mesures. Ainsi, les frais de séjour de l’ensemble des secteurs ont augmenté à un rythme moyen de 2,7 % par an.

 

Récapitulation des recommandations

 

Recommandation n° 1 : La chambre régionale de la cour des comptes recommande au département de veiller à la sincérité des inscriptions budgétaires, en particulier en section d’investissement.

Recommandation n° 2 : La chambre recommande que le département élabore des documents budgétaires (DOB, BP) se fondant sur des prévisions de dépenses sociales au plus près des tendances constatées, afin de permettre un débat éclairé et l’élaboration d’un budget primitif plus réaliste et ne nécessitant qu’à titre exceptionnel des réajustements majeurs en cours d’exécution budgétaire.

Recommandation n° 3 : La chambre recommande que le département renforce le nombre et la fréquence de ses contrôles sur place des établissements sociaux auxquels elle apporte son concours financier.

 

 

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