Les parvis de l'abbaye Saint-Germain à Auxerre. Devant ces lieux sacrés, dans les parvis, les profanes se disputent sur un principe celui de la pérennité de l'espace public (DR)

 

 

Le projet d'aménagement de la place Saint-Germain est destiné à améliorer l'esthétique et la fonctionnalité de la petite place située devant l'abbaye idoine monument insigne d'Auxerre et entre deux rues principales, la rue Saint-Germain à un bout la rue Cochois à l'autre qui permettent de descendre vers les quais de l'Yonne.

Le projet s'inscrit dans le cadre d'une végétalisation du vieux quartier dont des ruelles et rues ont été bordées de fleurs et autres légumes qui embellissent le cadre et favorisent les contacts entre citoyens developpant le lien social.

Trois réunions ou plutôt deux car il n'y avait personne à la première, ont permis à la direction de l'urbanisme d'Auxerre de présenter les esquisses aux riverains, par la parole et par les images sur l'écran, salle des conférences à l'abbaye.

Il est apparu que de 29 ou 30 places, le parking allait être réduit environ de moitié favorisant une végétalisation (arbres, arbustes) et une mise à niveau de la place avec des dalles peut-être de massangis ou autres pierres de carrières locales. La circulation des touristes dans ce quartier chargé d'histoire en serait améliorée, et ils bénéficieraient d’une meilleure vue sur la tour et l'entrée de l'abbaye dont les parvis seraient mis en valeur.

 

Une pétition d'une soixantaine de signatures

 

Il y a eu bien sûr des discussions et échanges sur le projet d'aménagement de la petite place proprement dite. Ainsi que sur la fermeture du secteur par deux bornes escamotables comme celles contrôlant l’entrée du secteur piéton. L’une au départ de la rue Saint-Germain à l'intersection Jacam, et une autre dans le bas de la rue Cochois.

D'emblée d'aucuns avaient émis des réserves sur cette disposition consistant à fermer le quartier à la circulation, seuls les riverains disposant de badges spéciaux leur permettant d'entrer et de se garer. De fil en aiguille, et en l'absence de garanties ou de nouvelle réunion de concertation, une pétition a été rédigée à l'initiative de Roland Jehl, architecte connu à Auxerre et d'une poignée d'autres riverains. Elle a été signée par Jean-Paul Rousseau, résidant du quartier et qui fut adjoint aux travaux de Guy Férez pendant les deux premiers mandats de 2001 à 2014.

Cette pétition a recueilli rapidement une soixantaine de signatures et a été transmise à la mairie d'Auxerre. Interrogé Guy Paris, premier adjoint au maire en charge des travaux, a expliqué qu'il n'y aurait pas de nouvelle réunion, qu'il allait répondre poliment à ces pétitionnaires, mais le projet ne changera pas. Sauf, peut-être, à la marge, au niveau du choix des matériaux.

Une attitude interprétée comme étonnante voire méprisante par certains qui n'ont pas digéré ce qui ressemble à une fin de non recevoir en bonne et due forme.

 

Pas de débat

 

Au cours de ces deux réunions, le débat a été limité déplore Jean-Paul Rousseau." Il n’y a eu aucun vote. C’était à peine consultatif ", estime Roland Jehl.  D'autres riverains très remontés, utilisent des termes que nous ne reproduirons pas ici mais que l'on peut deviner.

Sur le fond, Jean-Paul Rousseau est en désaccord avec le blocage de la circulation dans ce quartier qu’il assimile à une "privatisation rampante de l'espace public" ce qu'il juge contraire à l’intérêt général.

"C'est sur ce point que j'ai signé la pétition, pas sur le reste de l'aménagement dont on peut toujours discuter des détails. Ce n'est pas parce qu'on enlève la moitié voire plus des places de parking, que le quartier ne pourra plus fonctionner. Des places existent alentours et on peut en trouver."

"Ma signature de la pétition, que l'on ne s'y trompe pas, ne remet d'aucune manière en cause la gestion du maire d'Auxerre. Simplement je suis en désaccord sur le projet présenté que je trouve néfaste. J'ai été adjoint pendant deux mandats et je sais ce que c'est les oppositions, j'en avais l'habitude. Simplement, il faut écouter et échanger et puis il faut du temps et en donner."

Selon Jean-Paul Rousseau, si cette opération va à son terme, elle transformerait ce  quartier en un ilot réservé aux seuls riverains à l’image des quartiers privatisés de certaines villes américaines. De plus elle créerait une vraie difficulté en empêchant la circulation  des véhicules venant de la rue du Lycée Jacques Amyot et de la rue Saint Vigile, et qui veulent rejoindre les quais.   "Une rue", dit-il," en général c'est fait pour passer."

 

Une ville est un tout pas une juxtaposition d'intérêts particuliers

 

" Quant aux touristes, ce n’est pas ce type d’aménagement qui fait qu’ils apprécient ou non une ville. Mais le plus grave, ajoute Jean-Paul Rousseau "c’est que cela pourrait inciter à ce que chacun veuille sa petite  portion de ville où personne ne rentre que les riverains.

Or une ville c'est un ensemble de quartiers interdépendants ce n’est pas un patchwork d’ilots coupés les uns  des autres. Les problèmes de la place Saint-Germain ne concernent pas que les quelques 150 à 200 riverains mais tous les Auxerrois et toute la ville."

"Imaginez un peu ce qui se passerait si on réalisait le même type d’aménagement dans d’autres endroits ? Je sais bien que jadis, on avait coutume de barrer les rues avec des chaines à la tombée de la nuit, mais il me semble qu’on a un peu évolué depuis. Il y a des lieux, comme l’hypercentre où la piétonnisation se justifie pour des raisons commerciales, franchement ce n’est pas le cas à Saint Germain. »

"Et puis que penser du système d’ouvertures des bornes qui pourra être contrôlé à distance par le Musée et le Lycée Saint-Germain, mais aussi par un cabinet de kinésithérapeutes. C’est une mine à dysfonctionnement.  Pourquoi compliquer les choses ...?

Jean-Paul Rousseau évoque aussi le surcoût de ces deux bornes, pas loin de 100 000 euros pour un projet chiffré à 500 000 euros. Enfin, l'ancien élu précise que son opposition se limite à l'installation des bornes et ne remet pas en cause l'ensemble de l’aménagement de la place Saint-Germain.

"Enlever les bornes ne remet pas en cause ce projet" affirme-t-il. "Il fonctionne parfaitement sans elles. »

Que l'on sache, le projet n'a pas encore été soumis au conseil municipal d'Auxerre.


 

Pierre-Jules GAYE

 

 

  

Bornes escamotables d'illustration (DR)

 

 

Jean-Paul Rousseau riverain du quartier Saint-Germain, ancien adjoint au maire Guy Férez (Portrait Yannick Petit DR)

 

 

 

LA PETITION

 

 

Monsieur le Maire d'Auxerre,


Nous, habitants du quartier Saint Germain, nous permettons d'émettre les plus vives réserves sur le projet d'aménagement de la place, proposé par vos services le 11 Janvier 2019, et ceci pour plusieurs raisons :

– Un déni de démocratie.

Aucune concertation des habitants n'a eu lieu en amont. Il était pourtant facile d'envoyer une lettre circulaire aux résidents du quartier en leur demandant leur avis. La «démocratie» est réduite à quelques réunions de l'association de quartier, qui n'est pas une instance délibérative, mais un bureau d'enregistrement des décisions du conseil municipal.

– Un aménagement hétéroclite.

Les concepteurs ont voulu qu'elle cumule les fonctions les plus variées : parking, espace minéral, espace vert, bancs, arbre, accession des handicapés , sols en comblanchien, enrobé, béton désactivé etc... Un vrai patchwork !

Un parking réduit des ¾ de sa capacité actuelle. Or le stationnement est saturé tous les soirs de la semaine (actuellement on compte plus de 100 habitants dans le quartier). Cette disposition oblige les résidents à stationner dans les rues avoisinantes, au détriment des autres riverains.

Un espace vert de petite taille, qui n'est ni un jardin, ni un square. Espace de rencontre entre voisins, dit-on ? On y trouvera surtout des cannettes de bière et de coca, des papiers gras et des déjections de chiens. L'installation de bancs le long du mur auraient amplement suffi à cette fonction.

– Une privatisation de l'espace public.

Dans l'entre-soi des réunions du conseil de quartier, un petit nombre de résidents ont proposé de fermer le quartier par des bornes escamotables. Les services de la ville ont validé cette idée, illustrée par les vues en 3D montrées le 11 Janvier.

Cette disposition aurait des conséquences multiples


• La suppression d 'un transit important de véhicules vers les quais , la préfecture et la cathédrale.
• Un embouteillage prévisible au carrefour du lycée Jacques Amyot, aux heures de pointe.
• Une gêne supplémentaire pour la majorité des résidents. Que se passera-t-il quand le petit parking sera plein ? Il faudra actionner la borne, traverser la place, redescendre rue Cochois et refaire le tour complet par les quais ?
• Une aliénation de l'espace public au profit de la quiétude nocturne de certains au détriment de la majorité des résidents.
• L'accumulation des obstacles qui s'oppose à la nécessaire fluidité de la ville
• La multiplication de petits ilots privatisés dans la ville, va à l'encontre d'un espace urbain démocratique.

En conclusion, nous pensons qu'un simple réaménagement avec quelques bancs et arbres supplémentaires et la nécessaire accessibilité des kinés et de l'abbaye, auraient largement suffi, ceci pour un coût inférieur à celui de l'actuel projet.

Veuillez croire, Monsieur le Maire, en l'assurance de notre considération.

Auxerre le / /2019

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