Jean Podor et sa casquette, Jean Podor et cette manière unique de raconter la vie sur le mode mineur enjoué avec un humour incomparable. Jean Podor homme de coeur, homme curieux de l'autre, prêt à le ramener au bercail quitte à passer la nuit à le convaincre. Il était communiste ou/et anarchiste. Oui, c'était un pur, un idéaliste. Il a rêvé d'une société plus juste où chaque homme serait suffisamment responsable et civilisé. Une société où il n'y aurait plus besoin d'Etat. C'était le rêve de Bakounine, le révolutionnaire, théoricien de l'anarchisme et philosophe. Il posa dans ses écrits les fondements du socialisme libertaire.

Au-delà du rêve, Jean Podor était aussi un réaliste, les deux pieds profondément fichés dans le terroir et ces coteaux d'Irancy qu'il aimait tant parcourir et travailler de ses mains fortes, de belles mains sculptées par le labeur du vigneron. Ses vignes, ils les cajolaient à sa manière, bourrue parfois mais tellement tendre. Car Jean était un grand tendre. Un bon, un homme de bonté et un gentil, un vrai gentil, la gentillesse, cette rare vertu.

Sa personnalité ne laissait personne indifférent et sa présence dans une pièce, changeait l'atmosphère et la vie.

Il en a reçu des personnages plus ou moins célèbres dans son caveau, puis dans ses caves de l'autre côté des Promenades qu'il fallait traverser parfois avec prudence, pour gagner le saint du saint et goûter aux nectars enfouis de longue date couchés au ras du sol. Que l'on soit prince ou manant, Jean recevait de la même manière, la sienne. Le seigneur c'était lui. Ces moments de grâce personne ne les oublierait non plus que ses Mazelots ou Palotte.

Avec P'tit Louis de la Celle- Saint-Cyr, Adémar Boudin de la Chapelle-Vaupelteigne ou encore Lonlon Bienvenu à Irancy, parmi d'autres, Jean Podor figure au panthéon des personnages du vignoble.

La qualité de son vin avait franchi les frontières. Ceux qui disposent encore d'une caisse du millésime 2002, le dernier de Jean Podor, peuvent en témoigner. Le pinot noir de Bourgogne, c’est compliqué. Au bout de quelques années, il se rendort. Il n’y a rien à faire. Il faut attendre qu’il se réveille et faire confiance. Le dernier cadeau de Jean Podor. Les bouteilles ont dormi longtemps, dans le coin d’une cave humide et accueillante. Un vin d’amitié et de soif, avec du cassis et de la vanille à n’en plus finir...

Un homme qui laisse autant derrière lui - cet homme toujours exactement à sa place, ni humble ni pédant, seulement là où il devait être - ne disparaît pas complètement. Au-delà du souvenir, des anecdotes, des descriptions... c'est tout le bouquet d'une vie vraie qui demeure.

 

Pierre-Jules GAYE