Autorité, cap et détermination : la conférence de presse de François Hollande s'est révélée un excellent exercice de communication pour un chef de l'État accusé en vrac de reniement, d'indétermination et d'immobilisme.

Le chef de l'État revendique de conduire à son rythme et en cohérence une politique pleinement social-démocrate. Cela suffira-t-il?

François Hollande voulait donner du sens à ses six premiers mois passés à l'Elysée? Mission accomplie. Face à la presse, et après une petite demi-heure d'allocution destinée à dessiner la cohérence de sa politique contre la crise et le chômage, le président de la République est sans conteste parvenu à tracer une perspective et un nouveau cap pour les mois à venir.

La priorité est claire : désendetter la France en maintenant l'objectif des 3% de déficits publics pour l'an prochain; combattre le chômage en relançant la compétitivité des entreprises; réorienter l'Europe pour sortir de la crise des dettes souveraines et bâtir une Union plus forte.

Se revendiquant comme un "président responsable", François Hollande a défendu point par point les arbitrages du gouvernement Ayrault, se livrant à l'occasion à un discret exercice d'auto-critique sur les couacs et tâtonnements de l'exécutif. Relativement à l'aise dans ce jeu de questions-réponses, à tel point qu'il a eu toutes les peines du monde à y mettre fin, l'ancien député de Corrèze s'est ingénié à se hisser au-dessus de la mêlée en endossant pleinement son costume présidentiel.

 

C'ÉTAIT JUSTICE ...

 

 

PAS LE RECORD DES COUACS

 

 

L'ESSENTIEL EN 4 MINUTES

 

 

 

 LA CONFÉRENCE DE PRESSE

 

«Une alternance change le pouvoir mais elle ne change pas la réalité. Je comprends donc l’inquiétude des Français face à la crise et les doutes qu’ils peuvent eux-mêmes exprimer par rapport à la capacité du politique à surmonter cette crise.»

Engagements. «Depuis le 15 mai, bien des engagements ont été tenus.» «Ma mission: redresser la croissance et réduire le chômage.» «Je demande à être jugé sur ces seuls résultats.» «J'ai voulu relever les trois défis majeurs: la réorientation de l'Europe, le désendettement de la France et le redressement de la productivité du pays.» «Nous vivons bien plus qu’une crise, nous vivons un changement du monde. Et, c’est pourquoi depuis six mois, j’ai fait mes choix et je m’y tiens sans avoir besoin de prendre je ne sais quel tournant, je ne sais quel virage car ces choix sont conformes à mes engagements, à mes principes et surtout, aux intérêts de la France.» «Depuis six mois, je me suis fixé un but, régler les problèmes lancinants de la zone euro d’ici à la fin de l’année.»

Allemagne. «Les rapports avec l'Allemagne sont bons.»  Evoquant les taux d’intérêt pour rembourser la dette de la France, François Hollande a souligné qu’ils étaient aujourd’hui parfois «négatifs». «Nous avons réduit l'écart avec l’Allemagne de près de 40%, pour ceux qui s’interrogent sur les rapports que nous avons avec l’Allemagne, et qui sont bons.»

Comptes publics. «J’ai demandé au gouvernement de Jean-Marc Ayrault de mener à marche forcée le redressement de nos comptes publics.» «Il nous faut faire la réforme de l’Etat, de notre système social pour qu’il soit plus efficace, plus juste. Nous devons être capables de faire mieux en dépensant moins», avec un objectif de 50 milliards d’euros d'économie sur cinq ans.

Compétitivité. «Monsieur Gallois est un homme de bien qui mérite toute notre estime.» «Aussitôt remis, aussitôt traduit (le rapport Gallois, ndlr)» Le pacte de compétitivité, «ce n’est pas un cadeau, c’est un levier, qui offre au système productif un moyen de traverser la crise.» «C’est un pacte de confiance pour que l’investissement soit préféré à la distribution de dividendes». «Un choc (de compétitivité, ndlr), ça faisait chic, paraît-il»

Hausse de la TVA. «Je propose une restructuration de la TVA. Elle n’interviendra qu’au 1er janvier 2014.  La refonte de la TVA - prévue par le pacte de compétitivité -, permettra de régler une fois pour toutes la question de la TVA dans la restauration. Ce sera 10% au 1er janvier 2014, contre 7% aujourd’hui.»

Chômage. «Toute ma politique, c’est une mobilisation contre le chômage. ce n’est pas la première fois qu’un président fait cette promesse. Les Français, à juste titre, sont sceptiques. Tout a été dit, mais tout n’a pas été tenté.» «Je reprends l’objectif» d’inverser la courbe du chômage d’ici fin 2013. Mais «nous allons avoir une hausse continue du chômage pendant un an». Sur la réforme du marché du travail, «j’appelle toutes les organisations syndicales et les employeurs à faire un compromis historique, sinon le gouvernement prendra là encore la décision».

Education nationale. «Nous devons agir pour l'éducation nationale. Je le fais dans l’urgence, c’est l’idée des contrats d’avenir».

Réforme des institutions. «Le non-cumul des mandats, nous le ferons.» La proportionnelle, «c'était un engagement, nous en discuterons avec les forces politiques».

Europe. «Au-delà encore de quelques mises au point de modalités techniques», le «soutien» de l’Europe et du Fonds monétaire international (FMI) «est dû» à la Grèce, «pour en terminer aussi avec ce qui a pu être un doute sur l’intégrité de la zone euro».

Clarté. «La vérité, mieux vaut la dire, elle se découvre toujours. La seconde vertu, c’est la clarté. C’est pour ça que je tenais à venir m’expliquer. Je veux qu’au terme de mon mandat, les jeunes vivent mieux qu’aujourd’hui. Je reviendrai régulièrement m’expliquer sous forme de conférence de presse tous les 6 mois.»

Effort des plus riches. «Je ne suis pas l'élu d’une fraction, je dois m’adresser à tous. Néanmoins, je n’ai pas été élu sur une promesse vague.» «Ma responsabilité c’est de faire passer mes engagements sans créer de fracture. J’ai conscience que je demande beaucoup à des catégories supérieures. 70% de l’effort est demandé à 20% de nos concitoyens.» «Notre République a du ressort, et ses bases sont sociales, territoriales, humaines. Ensemble, nous devons faire nation, faire bloc dans un moment particulier.» «Le déclin n’est pas notre destin.»

Mariage pour tous. «Je ne suis pas convaincu que si c’est la droite qui, après-demain ou encore plus tard accède aux responsabilités, elle reviendra sur cette réforme, pas plus que la droite espagnole est revenue sur ce qu’avait fait le gouvernement Zapatero là-dessus.» «Il y a des moments dans la vie d’une nation, et c’est le rôle du président de la République, où nous devons faire des choix, traduire des évolutions de société, ça paraît périlleux et puis, à un moment, c’est accepté par tous, même par ceux qui avaient combattu le texte».

Premier ministre. «J’ai choisi Jean-Marc Ayrault car j’ai une grande confiance en lui. Il est sérieux, c’est important, il est loyal, c’est nécessaire, il est concret. Il sait ce que décider veut dire. Je lui renouvelle ici toute ma confiance.»

Vote des étrangers. Hollande rejette l’idée d’un référendum «aujourd’hui» sur le vote des étrangers. «Un référendum en ce moment, vous pensez que je vais prendre cette décision ? Si nous n’aboutissons pas par la voie réglementaire, je verrai dans quel état est la société pour voir si nous pouvons aller vers un référendum.»

Hollande bashing. «J’ai une conception de la liberté de la presse qui fait que je ne suis touché par rien. Ça fait partie de la démocratie.»

Gaz de schiste. «La recherche est possible sur d’autres techniques que celle de la fracturation hyraulique. Pour l’instant, cette recherche n’a pas abouti, je ne peux pas l’interdire, elle n’est pas interdite pas la loi.»

Président responsable. «Je suis un président aujourd’hui responsable, pleinement responsable, responsable de tout mais qui ne décide pas de tout». «La présidence de la République exige de la hauteur, de l'élevation et en même temps je veux garder de la simplicité autant qu’il est possible».

«Est-ce que je me pose la question de savoir si on fait des erreurs ? On fait toujours des erreurs. Et le premier qui en est responsable, c’est moi. Ce n’est pas le Premier Ministre, ce ne sont pas les ministres, c’est moi, parce que je suis celui que les Français ont élu», a-t-il ajouté. «Est-ce qu’il y a eu des couacs ? Si je regardais la chronique de tous les gouvernements qui se sont constitués après chacune des élections présidentielles de ces trente dernières années, ce n’est pas celui-là qui obtiendrait le record».

Un peu plus tard, alors qu’on lui demandait s’il voulait se désintoxiquer des énergies fossiles, il a plaisanté: «Je ne veux me désintoxiquer de rien, je ne suis dans aucune addiction. Vous avez remarqué: président normal, président responsable, pas d’addiction à aucune substance

Grève du maire de Sevran. «Est-ce que vous pensez que nous sommes responsables de la situation des finances de la ville de Sevran?» «Nous allons agir, je comprends la détresse de ce maire. Il est possible de parler de la méthode (grève de la faim, ndlr), mais il vient parler au nom de cent collectivités parmi les plus pauvres de ce pays.»

Syrie. «J’annonce que la France reconnaît la coalition nationale syrienne comme la seule représentante du peuple syrien et donc comme le futur gouvernement provisoire de la Syrie démocratique permettant d’en terminer avec le régime de Bachar al-Assad.»

Aurore Martin (la militante basque arrêtée et remise aux autorités espagnoles). «A aucun moment, je n'ai donné la moindre consigne pour qu'Aurore Martin soit contrôlée. (...) Cette arrestation a conduit la gendarmerie devant le parquet général. C'est une procédure automatique. A aucun moment, un membre du gouvernement a été interpellé pour dire quoique ce soit au nom de la France. Madame Martin est maintenant en Espagne. L'Espagne est une démocratie, nous avons confiance en la justice. Un grand principe en France vaut aussi en Espagne, c'est l'indépendance de la justice. Je ne ferai aucune concession à ce principe là.»