La loi est claire. Les départements ont perdu la clause de compétence générale et leur compétence économique qui est confiée aux régions dans un rôle renforcé dans la mesure où elles sont désormais seules habilitées à attribuer les aides aux entreprises.

Conséquence: exit Yonne Développement (1), Yonne Équipement (2) et Yonne Active Création, bras armé du conseil départemental de l'Yonne en matière d'aide aux entreprises et à l'emploi.

En 2014, Yonne Développement a initié plus de 100 projets dont 15 créations, 42 développements et 44 prospections soit 280 emplois créés accompagnés et 460 en cours de création pour l'année 2015, selon le président du CD 89 André Villiers.

En ce qui concerne Yonne Équipement, plus de 75 millions d'euros d'investissement ont été réalisés en local en 20 ans. 150 000 m2 construits, plus 4 000 emplois créés qui n'auraient pas pu obtenir l'agrément régional car en-dehors d'une stratégie macro et jugés "trop petits".

Yonne Active a accompagné 180 entreprises et a permis le maintien ou la création de 400 emplois dont nombre en insertion professionnelle, toujours selon André Villiers.

 

Lutte d'influence

 

La dissolution ou la cession ainsi que le transfert des compétences n'est pas évident.  Les conditions sont à l'appréciation des parties prenantes qui doivent contractualiser la nouvelle donne conformément à la loi. En outre, cela concerne aussi les hommes et des femmes qui n'ont pas forcément les mêmes points de vue non plus que les mêmes ambitions.

En tout état de cause, le dossier doit être bouclé pour le mois d'août, dernier délai.

Comment se pose le problème dans l'Yonne ?

Si l'agence Yonne développement est une association, créée par Jean Chamant, en 1989, pour en faire le bras armé du département en fédérant l’ensemble des partenaires économiques du territoire dont la Chambre de Commerce et de l’Industrie, Yonne Équipement est une SEM (société d'économie mixte dont les actionnaires sont majoritairement le conseil départemental de l'Yonne à hauteur de 52 %, des banquiers et des intercommunalités (Sens, Auxerre, Migennes, Avallon) principalement.

Il faut donc que le département cède au moins les 3/4 des 52% d'actions qu'il détient au sein de Yonne Équipement.

Qui détiendra la majorité au sein de la SEM, détiendra sans doute aussi l'agence Yonne Développement.

 

Bonus aux intercos ?

 

Quels sont les candidats repreneurs en piste ?

Le syndicat d'électrification de l'Yonne que préside Jean-Noël Loury, la puissante SEM 92 qui veut étendre sa zone d'influence dans le cadre d'un rapprochement de l'Yonne avec l'Ile-de-France que tous les politiques - sans exception - semblent appeler de leurs voeux - , les intercommunalités (Avallon, Sens et Auxerre, Migennes sont déjà actionnaires) associées à la compétence du développement économique, et enfin, last but not least, la région Bourgogne France-Comté.

Mais le conseil départemental pourrait, hypothèse qui paraît peu probable, tout aussi bien décider de supprimer "ses" outils de développement économique. On voit mal, en effet, les conseillers départementaux de tout bord, détruire des réseaux qui ont le mérite, au moins, d'exister et de fonctionner.

On ne peut cependant, totalement exclure cette hypothèse d'autant qu'André Villiers, dans l'absolu, voudrait pérenniser sous une autre forme ces bras armés du développement économique estampillés CD 89, quitte à les fusionner. Cela impliquerait  des mutualisations donc un tri parmi le personnel avec les sempiternels enjeux de pouvoir y afférent. Inutile de dire que les rumeurs vont bon train et que les uns et les autres se positionnent.

Pourquoi dans ces conditions le président de l'agglomération des communes de l'Auxerrois, Guy Férez, a-t-il signé, il y a quelques jours, avec le président de Yonne Développement Alain Drouhin, une convention de prospection en Île-de-France pour vendre la parc d'activités d'Appoigny ? Sachant qu'au mois d'août, l'association Yonne Développement pourrait être éteinte ou reprise sous une autre coquille ?

Réponse : pour le moment, personne ne connaît le devenir de l'agence Yonne développement. Si, toutefois, le département venait à supprimer l'agence, d'autres options pourront être mises en œuvre : reprise, création ex-nihilo d'une nouvelle agence, avec reprise des compétences internes de l'agence.

Par ailleurs, les deux structures (agence de développement et SEM Yonne Équipement) ont deux objectifs différents : la 1ère s'occupe de conseiller les entreprises, de les accompagner dans leur implantation, de prospecter et de "vendre" le territoire, etc. La SEM s'occupe de construire des bâtiments industriels. "Comme elles sont de statuts et d'objets différents, elles ne peuvent pas fusionner ". Elles sont cependant complémentaires ainsi que leurs compétences. On ne confondra donc pas les idées et les mots : en l'occurence l'existence même de la structure et qui la finance.

 

Qui décide en définitive ?

 

Tout le monde ne partage pas ce point de vue. Là encore, différents scénarios sont en cours d'examen et des décisions doivent être prises rapidement.

Un scénario possible est que la communauté d'agglomération des communes de l'Auxerrois souchée sur le PETR (pôle d'équilibre territorial et rural du Grand Auxerrois) crée ses propres outils de développement économique. Dans cette hypothèse, pourquoi le PETR du Grand Sénonais ne ferait-il pas de même ? Et d'autres avec. En somme, chacun son outil de développement. D'un mot là où il y en avait trois distincts pour l'Yonne, il y en aurait davantage, dimensionnés autrement. À moins que les PETR du Grand Sénonais et du grand Auxerrois ne se mettent d'accord pour à la fois racheter les actions de la SEM et reprendre Yonne Développement, ce qui irait dans le sens de l'histoire.

Autrement dit, pourquoi multiplierait-on de nouvelles structures qui ne vont pas forcément travailler ensemble ?

On mesure à cet aulne, les enjeux de la reprise, si reprise il y a, ce qui semble le plus raisonnable.

Qui décide en définitive ?

Les actionnaires de la SEM Yonne Équipementet en filigrane, l'assemblée départementale de l'Yonne qui devrait décider à qui vendre et in fine le préfet de l'Yonne, qui possède le contrôle de légalité (est-ce le rôle d'un syndicat d'électrification de devenir actionnaire majoritaire au sein de la SEM ?) ainsi que le point de vue de l'État qui a initié la réforme territoriale, le préfet étant le garant de son exécution.

Or dans l'esprit la réforme n'est-elle pas la première étape vers une modification du paysage institutionnel qu'avaient proposés l'ancien président de la Répblique Nicolas Sarkozy et le Premier ministre Emmanuel Valls dans son projet initial de réforme territoriale ? À savoir, la montée en puissance des intercommunalités qui, en se fédérant, pourraient se substituer avantageusement aux conseils départementaux dont on n'arrête pas d'annoncer la mort imminente, tant à droite qu'à gauche, selon qu'elles sont ou non au pouvoir.

C'est ainsi que les présidents d'intercos d'aujourd'hui, seront peut-être les conseillers départementaux de demain.

Mais cela est une autre histoire. Qui pourrait s'accélérer si l'État décide de se réapproprier les guichets sociaux et la solidarité (70% des budgets départementaux) en commençant par le RSA (revenu de solidarité active créé par Sarkozy) qui subit une forte inflation, comme il en est fortement question, qui serait une aubaine pour l'équilibre des budgets 2016. Des départements sont en cessation de paiement.

 

Pierre-Jules GAYE

 

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(1) Yonne Équipement : bâtiment sur mesure

Yonne équipement est un partenaire dans le montage et le suivi des projets immobiliers d’entreprises : définition de la typologie du bâtiment, élaboration du cahier des charges, achat de la parcelle, financement et construction… Lorsque le bâtiment est achevé, signature avec l’entreprise d’un bail de location de 10 ans avec option d’achat. Le patrimoine de Yonne équipement est aujourd’hui constitué de plus de 45 bâtiments.
Le conseil d'administration est présidé par Michel PISANI.

Yonne Développement : facilitateur d’implantation

Yonne développement accompagne

  • l'élaboration des dossiers de financement, mise en relation avec des financiers…
  • l’entrepreneur aux différents stades de son projet : création, rachat, augmentation de capital, défaillance, achat de matériel,développement.  Le conseil d'administration est présidé par Alain DROUHIN, maire de Bléneau.

Yonne Active Création : insertion professionnelle

Créée par le conseil énéral de l’Yonne en 1996, Yonne Active Création accompagne et finance les porteurs d’un projet de création et reprise d’entreprises, les développements ou le soutien d’entreprises. Le conseil d’administration est présidé par Malika OUNES, conseillère départementale

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 (2)   Actionnaires en  % de la SEM Yonne Équipement


Conseil Départemental de l'Yonne    52,3%
Communauté de l'Auxerrois    10,9%
Yonne Développement    5,0%
Caisse des Dépôts et Consignations    14,2%
Dexia    0,9%
Crédit Agricole Champagne - Bourgogne    0,9%
Banque Populaire Bourgogne    0,8%
Caisse d’Épargne Bourgogne    1,6%
Bernard Krief Consulting    0,1%
Chambre de Comm. Indus. de l’Yonne    0,7%
Chambre de Métiers de l’Yonne    0,2%
Fédération des Entrepreneurs du BTP de l'Yonne    0,0%
SAFIDI    1,3%
Communauté de Communes Forterre-Val d'Yonne    0,2%
Communauté de Communes de l’Agglomération migennoise    1,2%
Communauté d'agglomération du Sénonais    2,4%
Communauté de Communes Avallon-Morvan-Vauban    2,4%
Ville d’Auxerre    4,8%
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(3) La loi NOTRe

 

Tout d'abord, la loi NOTRe supprime la clause générale de compétence pour les départements et les régions, et renforce le rôle des régions en matière de développement économique. Les régions seront responsables :

  • de la politique de soutien aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire. A cet effet, elles établiront le schéma régional de développement économique, d'innovation et d'internationalisation (SRDEII) qui fixera les orientations régionales sur 5 ans ;
  • de l'aménagement durable du territoire. Un schéma régional d'aménagement durable du territoire (SRADDT) présentera les orientations stratégiques en matière d'aménagement du territoire, mobilité, lutte contre la pollution de l'air, maîtrise et valorisation de l'énergie, logement et gestion des déchets ;
  • du transport routier départementaux et de transports scolaires. Toutefois, les régions pourront déléguer leur compétence en matière de transport scolaire aux départements.

Les départements conservent leur compétence en matière de solidarité, de gestion des collèges et de voirie départementale.

Concernant les intercommunalités, elles passeront de 5.000 à 15.000 habitants et seront organisées autour de bassins de vie. À noter que tous les conseils des intercommunalités seront ainsi élus au suffrage universel direct lors du prochain renouvellement en 2020.

La promotion du tourisme, dont on mesure l’importance pour l’attractivité de des territoires, continuera aussi d’être partagée entre  les intercommunalités, les départements et les régions. De manière cohérente avec la réforme des régions, ces dernières ont été désignées « chefs de file » dans ce domaine.