Que manque-t-il à ce carrefour à Sauvigny-le-Bois en Avallonnais sur la D 606 ... ? Un motard a été tué par une voiture conduite par une nonagénaire venant d'Avallon, qui lui a coupé la route alors qu'il circulait en direction d'Avallon. Sa passagère grièvement blessée, est décédée la semaine dernière (DR)

 

 

La série de morts sur les routes de l'Yonne au mois de juillet, notamment, a bouleversé bien des Icaunais. L'accident terrible non loin du Pont de Pierre à Auxerre, au carrefour de l'échangeur de Perrigny a frappé les consciences. Une collision de plein fouet sur l'axe à trois voies le plus fréquenté de l'Yonne, mettant en cause un couple de sexagénaires et une famille avec trois enfants.

Certes, la vitesse, l'alcool, les fautes d'attention, des comportements potientiellement criminels tels qu'user de son téléphone portable au volant, ont une bonne part de responsabilité dans les drames de la route.

Mais cela n'explique pas tout loin de là.

Des ronds points mal conçus ou mal signalés tel celui par exemple au sud d'Avallon sur le contournement où une trentaine de voiture l'ont récemment traversé tout droit. La vitesse mais aussi l'absence de signalisation (panneaux, bandes rugueuses) expliquent le phénomène qui n'est pas nouveau.

" Nous avons, nous conseillers départementaux, la responsabilité du réseau routier départemental car les routes sont une des compétences majeures du conseil départemental avec le social et les collèges. Chaque fois qu'un accident mortel survient, cela provoque en nous une émotion, nous sommes atterrés.  Il est normal que l'on se pose des questions ... ", affirme Xavier Courtois, maire de Massangis et conseiller départemental d'Avallon.

Ce dernier souhaite la constitution d'une commission d'enquête départementale sur la sécurité routière dans l'Yonne, qui réunirait toutes les parties prenantes et permettrait de faire travailler ensemble les gens de terrain, les administratifs et les élus qui ont la responsabilité des routes.

"Le conseil départemental n'est pas au courant des accidents sinon par la presse. Et tous les accidents qui n'ont que des conséquences matériellles se règlant à l'amiable entre assurances, ne sont pas recensés..." indique Xavier Courtois.

Le colonel de gendarmerie De Meyer a récemment affirmé que dans l'Yonne on avait de cinq à sept fois plus de chance de mourir sur la route en cas d'accident que dans les autres départements de France. Et que si le nombre des accidents était en baisse dans le département, le nombre de morts, lui, était en hausse. Le double de morts sur les six premiers mois par rapport à l'année dernière.

"Pourquoi ..." ? interroge le maire de Massangis.

Autrement dit, les statistiques sont incomplètes et ne permettent pas une vue objective de la situation et des problèmes sur les routes de l'Yonne. Il faut souvent un mort pour attirer l'attention des autorités et pour que soit examinée de plus près (?) la problématique.

Les gens de terrain, pompiers, gendarmes surtout, élus, citoyens usagers, connaissent la situation et les points noirs d'un réseau routier quasi abandonné en raison du manque d'argent public et d'un renoncement des élus diriigés vers d'autres priorités.

 

Points noirs

 

" En moyenne, une route est regoudronnée tous les 7-8 ans. Dans l'Yonne c'est désormais tous les 15-20 ans, sauf exception. Sans parler des dysfonctionnements institutionnels telle l'absence de vrai dialogue entre élus et agents. En règle générale, les fonctionnaires n'en ont strictement rien à faire de ce que pensent les élus de terrain. J'en ai fait l'expérience à plusieurs reprises en Avallonnais. Ils appliquent les consignes venues d'en haut et font leur boulot. Moi je dois être trop con ...". ajoute Xavier Courtois qui poursuit :

" Je parcours plus de 70 000 kilomètres par an et suis un usager privilégié de nos routes départementales. J'ai alerté à de nombreuses reprises le SRD (service routier départemental) d'Avallon (les petites voitures jaunes) des dangers de la D 606 dans sa portion Avallon-Côte d'Or, remplie de pièges. Mais rien n'y fait.

Le conseiller départemental d'Avallon pointe tous les carrefours d'Avallon jusqu'en Côte d'Or et Rouvray, qui sont extrêmement dangereux selon lui. Rien n'est fait pour prévenir par des matérialisations au sol ou des bandes où s'insérer dans le trafic.

Il pointe aussi le phénomène du trafic 24 heures sur 24 des routiers qui transfèrent leurs charges et remorques à la sortie de l'autoroute A 6, après le rond point au péage. Ils détellent et réattellent de l'autre côté de la route pour repartir dans l'autre sens. Une quinzaine de camions sont garés à cet endroit toutes les nuits sur la voie de décélération. S'il n'y a pas la place, ils vont à Cussy-les-Forges dételer et coupent la nationale pour réatteler.

Les transporteurs rationalisent. Les camions en provenance de Paris s'arrêtent à Avallon, détellent et réatellent les chargements amenés de Lyon par d'autres camions. Cela permet aux transporteurs de faire l'économie d'une nuit.

Voilà qui explique pourquoi il y a beaucoup de chauffeurs routiers installés dans le secteur, car ils font ces navettes là.

Autre point noir relevé par Xavier Courtois, l'épingle à cheveu à Cussy-les-Forges devant le Courte Paille où il n'y a pas de visibilité, contraignant les camions et bus à se déporter sur la gauche de la chaussée. Par quel miracle n'y a-t-il pas des morts à cet endroit où l'automobiliste peut se retrouver nez-à-nez avec un camion. Sur le parking du Courte Paille, les camions se garaient ce qui était gênant pour la clientèle de passage. Des rochers ont été posés pour empêcher l'entrée. 200 mètres avant le restaurant des stations services sont situées de part et d'autre de la route. Or les camions coupent l'ex route nationale. Il y a déjà eu trois morts. " Qu'attend-ton pour sécuriser ?", interroge le conseiller départemental du canton.

Un autre point noir est la sortie de l'autoroute A6 au péage d'Avallon. Il y a une longue route droite d'un kilomètre et demi direction Magny hameau d'Etrée, qui mène au carrefour sur la D 606 et un stop. À en croire Xavier Courtois, les chauffeurs encore dans les nuages  pensent qu'ils sont encore sur l'autoroute et grillent le stop sans s'en rendre compte. Ils ne comprennent pas pensant qu'ils sont prioritaires. Un jeune scooter a été fauché il y a trois semaines.

Quant au carrefour de Sauvigny-le-Bois où il y a une absence de ligne blanche pour marquer le stop, ce carrefour où deux motards de Côte d'Or ont trouvé la mort dans une collision le 9 juillet, "il y a longtemps qu'un rond point devrait exister...", déplore le maire de Massangis.

 

Un laisser-aller et une dégradation générale

 

On pourrait ainsi continuer la litanie, et pas qu'en Avallonnais. Interrogez les hommes de terrain, élus, gendarmes, eux savent mais ne sont pas dans le circuit d'écoute et de remontée des infos qui ne risquent donc pas d'être traitées.

À l'heure où l'on se gargarise de sécurité tous azimuts, celle des routes, celle des vies de nos concitoyens mérite davantage de considération que de simple répression, nécessaire certes, pour dissuader mais aussi réprimer des comportements de conducteurs inadmissibles, qui ont la fâcheuse tendance à se multiplier. Un laisser-aller de plus en plus dangereux.

15 morts en 25 ans au carrefour du Relais fleuri, c'est inacceptable. Ne pas faire des efforts de signalisation et de mise en garde, au moindre coût, ne l'est pas moins.

Continuer de gravillonner relève d'un autre âge. Dernièrement, 150 pare-brises ont volé en éclats au sud de l'Yonne. L'enrobé s'impose partout.

Le réseau routier de l'Yonne se dégrade et tout ce qui va avec et autour, épouse le même profil.

En outre, les routes de l'Yonne sont-elles encore adaptées aux besoins de l'économie ? Les camions et remorques sont de plus en plus gigantesques à l'image des tracteurs et de leurs remorques géantes qui filent sur les routes à la vitesse des voitures.

Et quand des travaux sont entrepris, tout est-il fait en termes de signalisation et de sécurisation ? Ce pont près de l'A6 au péage d'Avallon, qui a été enlevé au profit d'un marquage avec des plots de béton qui coupe la route en direction de Montréal. Un motard connu dans la région a percuté l'un d'eux et est mort, le 9 juillet.

 

Pierre-Jules GAYE

 

 

Xavier Courtois, maire de Massangis, conseiller départemental du canton d'Avallon demande la création d'une commission d'enquête sur la sécurité routière dans l'Yonne (DR)