Il règnait une ambiance très particulière au pied du perron de l'Hôtel de ville, vendredi soir, dans la chaleur moite au commencement de l'été indien. Plus précisément une douceur ineffable. Il y avait du monde et tout le monde se parlait. Pas de musique, pas de hauts parleurs. Sur le pavé devant la Botte d'Or qui n'aura sans doute jamais chaussé pareil parterre. Un pavé autrefois battu par les chevaux et les roues de calèches dans ce coeur de cité où trois villes sont empilées en commençant par l'espace romain puis la crypte de Saint-Germain prémices d'une suite d'édifications humaines.

On oublie que les villes et leurs monuments, leur patrimoine, ont été imaginées et construites par les hommes. Elles ne sortent pas du néant ou de nulle part, même les plus futuristes.

Une telle cérémonie, quelque 120 ans après les conquêtes des radicaux-socialistes et des socialistes avant le congrès de Tours, révèle et exprime la prégnance d’une culture politique latente très forte dans la cité de Paul-Bert. Politique au sens de vie de la cité.

La douceur évoquée en cette fin d'été, fut peut-être celle aussi qui naît des bonnes nouvelles, l'implantation d'une librairie reconnue. Et ce forum du centre ville, place publique d'échange mais aussi, centre géométrique commercial, social, administratif, religieux et politique était voué autrefois aux vives affluences.

Une douceur tranchant avec les tragédies subies et vécues ces derniers mois, depuis l'invasion de nouvelles formes de barbarie sur le territoire national. Car c'est ici que le peuple auxerrois et au-delà, s'est rassemblé à plusieurs reprises par milliers, pour être ensemble et marquer sa solidarité aux victimes.

Une douceur oui, libérée, et même un parfum de liberté avec Lydie Salvayre, prix Goncourt 2014, revenue à Auxerre, transfigurée, fidèlement. Contactée par Grégoire Courtois bien avant d'être primée pour Pleure pas, elle était à Auxerre quelques jours après sa consécration, comme prévu, et se souvient de cette soirée auprès des Républicains Espagnols.

La romancière eut des mots chauds, simples, de tous les jours mais dits par elle, à sa manière, ils donnèrent écho et firent caisse de résonance au propos éminemment politique du libraire indépendant qui sut trouver le ton pour dire avec délicatesse les choses qu'on ne dit pas en matière de petit commerce face aux géants y compris des multinationales.

Acheter un livre dans une librairie indépendante du centre ville n'est pas un acte anodin. Ce n'est pas la fin de l'histoire à Auxerre.

P-J. G.

 

Le public se pressait place de l'Hôtel de Ville (DR)

 

Foule dehors, du monde à l'intérieur (DR)

 

La foule s'est longtemps attardée devant le perron de l'Hôtel de Ville d'Auxerre (DR)

 

Lydie Salvayre et Grégoire Courtois, une idylle littéraire empreinte de fraternité (DR)

 

 Marie Noël à gauche veille sur le forum animé de la place de l'Hôtel de Ville où elle contemple au quotidien les vitrines de la librairie Obliques (DR)

 

Applaudissements nourris sous les colombages

 

 Grégoire Courtois des mots qui portent et qui ont aussi ému les siens