Quoi qu'il en soit, il appartiendra à  l'assemblée départementale de l'Yonne d'adopter ou non la cession des deux tiers des actions que le département détient majoritairement dans la SEM Yonne Équipement, si un accord est acté avec les intercommunalités de l'Yonne sur le prix de l'action. Mais n'est-il déjà pas trop tard d'un point de vue procédural légal ... ? (DR)

 

 

Une ultime possibilité existe. Elle est née d'une réunion, lundi, entre les présidents d'intercommunalités de l'Yonne (14 dont les poids lourds Raincourt, Férez, Boucher, Courtois, Soret et le président des maires de l'Yonne Mahfoud Aomar) et d'André Villiers et ses vice-présidents du conseil départemental, à l'exception de Christophe Bonnefond.

Une ultime proposition de compromis, après que toutes les fausses barbes ont été tombées, une à une.

Le département a budgété 2,1 millions d'euros en recettes, pour la cession d'une partie des actions qu'il détient majoritairement dans la SEM Yonne Équipement. Soit 78 000 actions vendues à 27 euros.

L'idée est que Yonne Équipement serve 1 million de dividendes aux actionnaires, prélevés sur la trésorerie. Le département possédant 52% des actions de Yonne Équipement, il lui reviendrait 520 000 euros. Il manquerait donc 1,6 millions d'euros pour boucler le budget. 1,6 million divisé par 78 000 actions, cela revient en gros à 20 euros l'action. Ce montant pouvant être minoré et ramené aux environs de 18 euros dans l'hypothèse où le département serait vendeur de plus d'actions que les 78 000 qu'il détient.

L'idée est que les intercos fassent un effort raisonnable en passant de 15,30 euros l'action à 20 euros.

Celle solution qui paraît du moins à première vue, raisonnable et empreinte de sagesse, aurait l'immense avantage de corriger une erreur, celle d'avoir acté et voté un budget qui risque d'être insinçère, engageant la responsabilité de la direction générale des services du conseil départemental tout autant que celle du président.

Elle aurait enfin l'insigne avantage d'éviter la liquidation de la SEM Yonne Équipement, un outil qui a démontré objectivement qu'il était performant au service du développement économique dans l'Yonne.

 

Impéritie aux effets bénéfiques

 

En attendant, quel gâchis. Cela fait longtemps que la loi NOTRe, quoi qu'on puisse en penser par ailleurs, est connue dans ses détails. Et cela fait plus de seize mois que le conseil départemental aurait pu se saisir de ce dossier qui concerne directement deux de ses satellites, l'association Yonne Développement et la SEM (société d'économie mixte) Yonne Équipement.

Aux termes de la loi, le 31 décembre 2016, la SEM Yonne Équipement sera éteinte. La SEM Yonne Équipement avait saisi son principal actionnaire dès la publication de la loi fin août 2015, pour l'alerter de la problématique.

Plus aucun acte juridique ne pourra être établi, par exemple la simple convocation d'un conseil d'administration. Dès lors c'est la responsabilité personnelle des 15 administrateurs qui sera engagée, ainsi que celle du président du conseil départemental, représentant la personne morale.

En admettant que l'ultime proposition  de compromis soit effectivement actée en séance plénière du CD 89 programmée fin novembre, le préfet pourra-t-il déroger à la loi en ne déférant pas  (au tribunal administratif), par exemple ? Autrement dit pourra-t-il prolonger le délai utile pour que les actes de procédures légales puissent être correctement exécutés et notamment la clause d'agrément de la cession (compromis) des actions du CD 89 aux intercos ? La clause d'agrément comporte un délai de deux mois.

L'impéritie de la collectivité territoriale aura au moins eu un effet bénéfique, celui de fédérer et de nouer des liens forts entre tous les présidents d'intercommunalités de l'Yonne (21) à l'exception de celle du Tonnerrois présidée jusqu'à l'automne par Maurice Pianon, vice-président du conseil départemental et président de la commission de développement économique.

Cette impéritie aura par ailleurs donné le temps à la nouvelle région Bourgogne-Franche-Comté de prendre ses marques et décider très clairement qu'elle souscrirait à une augmentation de capital de la SEM Yonne Équipement si cette société anonyme d'économie mixte au capital majoritairement public, était détenue par les intercos, comme le prévoit la loi, les départements ayant perdu la compétence économique au profit des régions et des intercos.

Or le conseil départemental de l'Yonne a fixé arbitrairement dans le budget 2016 un prix de 27 euros l'action alors que les intercos en proposent 15,30, soit la valeur faciale.

Des audits réalisées par les deux parties prenantes ont fixé des prix variant entre 10,50 euros à 36 euros (sic). Un vrai loto en Icaunie.

 

 Le délire CCI

 

Le bras-de-fer immobile a amené André Villiers, président du CD 89 à rechercher des partenaires privés dès lors que l'appel à manifestation d'intérêt lancé en septembre, s'est avéré infructueux par le fait d'imposer un prix à 31 euros l'action (sic), sachant que toute proposition inférieure à ce prix, n'était pas retenue. Jusqu'où cet AMI n'est-il pas contestable devant le tribunal administratif, les intercos ayant toutes délibéré à la valeur faciale, le CD 89 les ayant ainsi exclus de fait ?

Après quelques touches hasardeuses, on prête à Malika Ounès vice-présidente du CD 89 également présidente de Yonne Active Création, autre satellite du conseil départemental dont l'objet est la réinsertion des bénéficiaires du RSA, et à Guillaume Larrivé proche de Christophe Bonnefond, autre vice-président du conseil départemental - missionné sur la vente de bâtiments départementaux dont le parc est important et coûteux d'entretien à l'instar du 89 boulevard de la Marne, gouffre énergétique amianté - d'avoir sollicité Alain Pérez, président de la CCI désormais légionnaire.

L'idée était la reprise par la chambre consulaire de la SEM Yonne Équipement. Comment ?

Le schéma proposé au CD 89, aurait impliqué que toutes les intercos délèguent leur compétence de développement économique qui leur est dévolue par la loi, à l'agence de developpement. À charge ensuite pour l'Agence de lancer une DSP (délégation de service public) et de confier la gestion de cette compétence à la CCI (chambre de commerce et d'industrie).

Pour la SEM, Alain Pérez aurait proposé que la CCI rachète les actions et devienne majoritaire - partenaire privé -  via une transformation de la forme juridique en SAS (société anonyme par actions simplifiées) qui offre la plus grande souplesse, à charge pour la CCI de gérer le patrimoine avec les bâtiments du CD89 par surcroît. Et de faire au passage main basse sur la trésorerie pour gérer au mieux la crise budgétaire de la CCI.

Le Préfet de l'Yonne a bloqué net ce "délire" vendredi dernier, en indiquant à Alain Pérez qu'il n' autoriserait pas cette opération en sa qualité de tutelle de la CCI qui n'a pas les moyens d'une telle politique. La CCI accuserait en effet un déficit d'1 million d'euros pour boucler son budget 2016.

Et de rappeler à la loi : les actions doivent être en priorité cédées aux collectivités locales. C'est l'esprit et la lettre de la loi NOTRe.

Le plan qui consisterait à vendre à un privé ne peut tout simplement pas marcher. 51% des capitaux de la SEM doivent être détenus par des capitaux publics.

Mais le pire finalement, ne serait-il pas qu'une directive ministérielle tombe avant le 31 décembre, fixant le prix de cession de l'action à la valeur nominale, comme ce fut le cas pour les Offices d'HLM lors de cessions d'actifs ? Comme le fit remarquer l'élu du Gâtinais en Bourgogne Jean-Baptiste Lemoyne lors d'une précédente assemblée départementale, suite à une question au gouvernement posée par le rapporteur, sur cette question précise. Dont on attend la réponse.

 

Pierre-Jules GAYE