... Ah oui.... ?

 

L'info a circulé rapidement, vendredi après-midi. Les intercos de l'Yonne ont reçu un mail du président de l'association des maires de l'Yonne pour leur faire part de l'échec cuisant de la rencontre de vendredi matin, où aucune discussion n'aurait été possible. Certains présidents et élus ont réagi vivement mais n'ont pas souhaité s'exprimer publiquement pour l'instant, jouant la solidarité.

La réunion aura duré à peine une demi heure, sans négociation ou échanges possibles.

Entre André Villiers, ses vice-présidents du conseil départemental et Mahfoud Aomar, président de l'interco de l'Aillantais, coordonateur des intercos de l'Yonne depuis un an et président de l'association des maires de l'Yonne.

Il était accompagné par Luc Maudet, président de l'interco de la Vanne et du Pays d'Othe venu en tant que témoin. Il est l'époux de Catherine Maudet, conseillère départementale du canton de Brienon-sur-Armançon.

Pianon et Villiers veulent un prix de 31 euros l'action pour céder deux tiers des actions détenues par le conseil départemental dans la Société d'économie mixte Yonne Équipement, la loi NOTRe l'imposant aux collectivités departementales qui perdent leur compétence économique au 31 décembre 2016.

Et ils n'y dérogent pas.

Deux hypothèses ont été proposées par Villiers-Pianon,  qui reviennent à surrenchérir la proposition des intercos qui avaient fait un effort et trouvé une solution, combler le différentiel de l'action valorisée à 27 euros. Proposition repoussée aussitôt par André Villiers qui veut 31 euros.

1) Une rémunération du capital majorée de 500 000 € par rapport à l'offre, soit 1 500 000 € de distribution de dividendes de la SEM YÉ, et une cession des 78 197 actions pour une valeur unitaire de 21 €,
ou
2) Une distribution de dividendes à hauteur d’un million d’euros comme proposé, et un prix de cession des 78 197 actions majoré du différentiel non perçu à titre de dividendes, soit environ 24,30 € par action.

Dans la première hypothèse, la surrenchère dépasse les 2,1 millions de recettes budgétées à cet effet de 800 000 euros ...

Or la valeur faciale de l'action est de 15,30 euros et c'est le prix de base proposé par les intercommunalités de l'Yonne quelque soit leur couleur politique.

"Si la SEM est bien formellement une entreprise commerciale, en fait il s'agit d'un établissement créé par une personne morale de droit public, dont le "capital" est entre les mains de personnes de droit public, et dont l'objet est une mission de service pubic. Donc aucune valeur marchande. On ne peut prendre en compte, dans une opération de régularisation comptable, que la valeur nominale de l'action. Il n'est pas non plus certain que le departement ait le droit de livrer à la spéculation un élément du patrimoine public departemental. Il y a des règles à respecter en cette matiere." commente un spécialiste, un commentaire intéressant qui met en lumière l'enjeu de la transaction prévue par la loi.

 

La riposte

 

Or les intercos dans un souci de faire avancer le dossier dans l'intérêt commun, étaient prêtes à monter et augmenter le prix d'achat avec un maximum situé autour de 18-19 euros, pas plus. L'objectif souligné maintes fois par le président de l'association des maires de l'Yonne, Mahfoud Aomar, étant de sortir par le haut.

Que nenni ! La mauvaise farce, le marché de dupes continue. La proposition est jugée inacceptable.

Pianon l'homme de l'ombre et Villiers ont même donné le coup de pied de l'âne aux intercos de l'Yonne : tenez, vous dites que vous avez soif et que vous voulez boire eh bien buvez ce breuvage empoisonné.

Le plus cocasse et qui ne manque pas de piment, est l'argumentation de Maurice Pianon qui, lorsqu'il était président de l'interco du Tonnerrois, a dit ne pouvoir acheter les actions de la SEM Yonne Équipement car sa petite interco n'avait pas les moyens financiers. Or, le prix demandé par le CD 89, ou plus exactement par Villiers Pianon et compagnie car l'assemblée départementale n'a pas été encore saisie de ce dossier, pénaliserait les petites intercos davantage encore au profit des grandes intercommunalités.  Où est dans le cas d'espèce la défense de la ruralité et ses petites communes, politique chère à André Villiers et ses acolytes ? C'est tout le contraire.

Les intercos ont mis leur veto à une ligne symbolique en-dessous de 20 euros l'action.

C'est l'impasse et même le cul de sac.

D'après nos informations et selon des sources proches du dossier, les présidents des intercos de l'Yonne vont contre-attaquer, en prenant les élus, la population et l'opinion à témoin.

- Un courrier va être adressé par le groupe des intercos à tous les conseillers départementaux de l'Yonne pour expliquer la situation

- Un courrier va être adressé à tous les maires de l'Yonne dans le même sens.

- La semaine prochaine, une conférence de presse va être organisée en présence de tous les présidents des intercos de l'Yonne.

- La création d'une nouvelle SEM propre aux intercommunalités de l'Yonne va être engagée.

La volonté de passage en force de l'exécutif départemental principalement le tandem Pianon-Villiers s'explique-elle par une volonté politicienne de politiser le dossier afin de remettre en cause la loi NOTRe s'il y a un changement de majorité après les élections législatives du mois de juin ? Quitte à se mettre au passage les intercos et les maires ruraux à dos ?

Ou bien s'agit-il d'une volonté politique affirmée de vider Yonne Équipement de sa substance en la rendant exsangue et d'offrir une coquille vide aux intercos ? Ou alors, s'agit-il d'un refus, par procastination, de renoncer à la compétence économique ?

Quoi qu'il en soit, il y en a un qui guette et a tout ce beau monde à l'oeil, c'est le préfet de l'Yonne Jean-Christophe Moraud. Il attend André Villiers au tournant. Villiers qui, lui, attend le départ du préfet faisant savoir qu'il y aura du peuple pour le déménager.

Si le CD 89 ne vend pas avant le 31 décembre deux tiers des actions de la SEM Yonne Équipement dont il est l'actionnaire majoritaire, le budget primitif 2016 sera déclaré insincère (le CD 89 a voté 2,1 millions en recettes sur la vente des actions SEM YÉ) dans le cadre du contrôle de légalité exercé par le préfet.

Le conseil départemental de l'Yonne sera-t-il placé sous tutelle comme autrefois, référence à la loi de 1982 ?

Il faudrait La Fontaine pour réécrire la fable du petit chaperon rouge et du grand méchant loup de Perrault. Qui donc portera le chapeau dans cette farce grossière et burelesque ?

 

Pierre-Jules GAYE