À compter du 18 juin, date de son élection au Palais Bourbon, André Villiers président du conseil départemental de l'Yonne depuis 2011 réélu en 2015, dispose d’un mois (30 jours) pour quitter son perchoir du conseil départemental, comme la loi sur le non-cumul des mandats l’y oblige.

André Villiers a déjà fait savoir qu’il exercera la présidence jusqu’au terme de ce délai réglementaire. Il aime aller au bout du bout jusqu'au bout, comme il l'a fait pour déclarer sa candidature à la députation dans la deuxième circonscription Avallon-Tonnerre-St-Florentin-Migennes, la veille de la clôture des inscriptions, en catimini l'après-midi, mais Auxerre TV l'a débusqué et il a eu l'élégance, d'en donner acte en publiant sa fameuse affiche sur fond de château de Maulnes le pentagone de Pershing. Une photo sympa du journaliste sénonais Alain Chaboteau hissée dans le ciel étoilé.

Le conseil départemental se réunira en séance plénière, le 7 juillet, suivie d'une commission permanente à huis clos. Cette séance sera présidée par André Villiers président sortant qui devrait en toute logique, démissionner le soir même ou le lendemain matin. Encore que le fameux mois ne sera pas écoulé et que l'éleveur du sud de l'Yonne habitué du marché de Corbigny, dont on oublie qu'il fut soutien de famille à l'âge de dix ans, une confession lourde de sens devant la caméra d'Auxerre TV lors du grand débat avec Jean-Yves Caullet,  voudra aller au bout de sa parole et de son plaisir de faiseur de roi, comme un jeu qu'il affectionne à l'image de la vie.

 

Apocalypse now

 

Autrement dit, l'élection de la nouvelle gouvernance, ne pourrait dans le premier cas de figure, avoir lieu que dix jours plus tard délais légaux obligent, soit le 18 juillet au mieux, ce qui n'arrange pas tout le monde car d'aucuns seront en vacances qui en Thaïlande comme Marie-Laure Capitain, qui au Maroc tel Pascal Henriat, qui en Corrèze, qui en Patagonie.

Dans l'hypothèse extrême, celle du mois jour pour jour jusqu'au dernier jour (avant l'apocalypse ... ?), la réunion du conseil départemental aurait lieu dernier délai ultime, le 28 juillet. Pour élire un nouveau président et la nouvelle gouvernance.

Qui sera présent dans l'hémicycle à cette date inédite ? Pas grand monde d'après nos informations. Autrement dit la machine à procuration devrait fonctionner à plein régime sauf que cela peut changer la donne car le mandaté peut faire ce qu'il veut en glissant le bulletin dans l'urne. Autrement dit il faut avoir confiance dans la personne à qui vous confiez la procuration. De un, un élu ne peut posséder qu'une seule procuration. De deux, il faut le quorum physique pour élire un président : soit deux tiers des élus présents. Rien n'est moins sûr.

André Villiers a donc, objectivement, toutes les cartes en mains ce qui n'est pas pour lui déplaire. D'abord il va obliger ses collègues, toutes et tous, à organiser leurs vacances autrement. Lui ses vacances, c'est à la ferme, à l'exploitation et en été, ça tourne à plein régime. Donc les vacances, connaît pas. C'est un autre monde. On se demande d'ailleurs comment il va pouvoir assister à la session législative que Macron impose aux députés, cet été, jusqu'à la mi-août. Un don d'ubiquité ?

 

Le long duel Villiers-Moraud

 

Villiers .... vous avez dit André Villiers ? C'est qui ça ... ?

 

 

S'il fait ça c'est tout de même, tout à son honneur, car il a le département à coeur, que l'on soit d'accord ou pas avec sa politique et son mode de gouvernance. Autrement dit, il entend mener les actions jusqu'au bout et bien vérifier que les actions entamées iront jusqu'au bout.

Ainsi la fermeture du collège Bienvenu-Martin, tant controversée. Qui devrait être un des objets sinon l'objet principal à l'ordre du jour de la réunion du conseil départemental du vendredi 7 juillet à laquelle semblerait-il il tient comme à la prunelle de ses yeux. Pourquoi ? Devinez.

André Villiers miserait-il sur le départ du préfet Jean-Christophe Moraud, qui aurait sans doute déjà fait partie du mouvement préfectoral acté en conseil des ministres, s'il avait "aligné trois députés LREM" comme cela a failli se produire. Nous voulons signifier que le président du conseil départemental qui a livré une bataille permanente, pas facile à vivre, avec le représentant de l'État dans l'Yonne - qui aime ça, la confrontation, en bon Breton du Finistère ce bout du bout de la terre où les choses et les relations ne peuvent être que vraies de vraies - depuis des années. Ce qui fait dire à Villiers qui n'a jamais molli, après avoir été humilié à Joigny devant les maires de France, qu'il y aurait des bras pour déménager le préfet à son départ.

D'un mot, Villiers arrière latéral droit besogneux, mettrait un point d'honneur à partir après Moraud. C'est comme ça. On est paysan ou on ne l'est pas. Cela nous fait dire que le préfet Moraud en question, ancien troisième ligne aile de rugby capable de plonger dans les rucks et de gratter mais aussi de viser le large, au-delà de sa mission et de son devoir, doit apprécier l'homme Villiers en ce qu'il lui résiste encore et encore.

 

Trahi par ses amis pas par ses ennemis

 

Jean-Christophe Moraud considéré par beaucoup d'élus de l'Yonne comme un préfet brutal, direct, parfois méprisant, n'est pas que cela en apparence. C'est avant tout un serviteur de l'État compétent, et un homme adroit, d'une grande finesse intellectuelle pour qui prend la peine de l'écouter et de dialoguer avec lui, un homme ouvert, qui s'est évertué à faire avancer ce département truffé de chausse-trappes et de mines mortifères, un département qui n'a pas la cutlure de la coopération sauf peut-être en Puisaye mais qui peut affirmer que cela va durer ? Construire prend beaucoup de temps, détruire, ça va vite. Un département qui a fait tomber nombre de préfets.

Mais la question qui concerne André Villiers est : le pouvoir peut-il se transmettre ? Et si oui comment ?

André Villiers se défend d'être un faiseur de roi. Le fait de l'exprimer montre qu'il y pense et agit en conséquence. Tout en sachant que la décision finale ne lui appartient pas.

L'homme connaît les hommes autour de lui. Leurs forces et leurs faiblesses. Voire leurs petites lâchetés. Ainsi va la vie. Il sait aussi qu' l'on n'est jamais mieux trahi que par ses amis. Les ennemis il s'en charge ! Bille en tête.

Tout le combat de Villiers, toute son action après avoir raflé la présidence à la droite dure et multiple du département, est d'avoir résisté dans une conjoncture inédite. Après la période faste des conseils généraux où les uns et les autres pouvaient dépenser sans compter et pire, il y avait tellement d'argent qu'il fallait l'utiliser donc tous se sont mis à construire des Hôtels du département dans toute la France, comme on a construit des Hôtels de la Région. Aveu de toute puissance et surtout aveu d'impuissance de l'imagination à définir des territoires sociaux à conquérir. Là où le politique est attendu par les citoyens.

La force de Villiers qui a, objectivement amené le troupeau là où il le voulait, là où il le veut, retombant toujours sur ses pattes tel un matou, quitte à déplacer le sujet au point que plus personne n'est en mesure de suivre sa dialectique si personnelle et particulière, qui fait que l'on s'y noie et en tout cas on s'y perd et use ; est de ne jamais négliger l'aspect humain individuel. Villiers ne fait pas du copier-coller ou du marketing. Il est pronfondément humain, c'est-à-dire que l'homme est en souffrance et est capable de reconnaître en chacun sa souffrance. Et chacun peut le reconnaître, lui, car qui n'est pas en souffrance ?

Le pari Gendraud

 


Patrick Gendraud, 1er vice-président du conseil départemental, maire de Chablis

 

Patrick Gendraud, l'amène maire de Chablis, 1er vice-président du conseil départemental placé par André Villiers, devrait logiquement succéder au président sortant. Il l'a d'ailleurs annoncé clairement, vendredi dernier, en marge de la session plénière du conseil départemental. Au moins là, n'a-t-il pas été faux frère, lui le président de Yonne musique en faillite de 25 millions d'euros et le président malheureux de Domanys (32 millions de déficit) en 2012.

Cela dit, Gendraud a une particularité, c'est qu'il a beaucoup navigué dans le sérail. Sa mère fut la secrétaire de Jacques Chirac pendant longtemps qu'il cotoyait jeune. Il aime à le rappeler et on peut comprendre. L'homme, qui a développé une activité d'Auto-école à Chablis, a été élu conseiller général après l'épisode Georges Maingonat, poète déchu, s'est retrouvé président du RPR dans l'Yonne pendant quatre années, avant d'être méchamment débarqué.

À l'UDI, auprès de André Villiers avec lequel il a cheminé au conseil départemental ayant pris du recul avec la droite républicaine incarnée par Jean-Marie-Rolland et François Boucher. Cheminé avec d'autres centristes, Alain Drouhin (Bléneau), Michel Pellerin (Noyers-sur-Serein), Guy Bourras (St-Julien-du-Sault) Marie-Laure Capitain (Flogny-la-Chapelle), Jean-Claude Lemaire (Isle-sur-Serein), Maurice Pianon (Tonnerre) et Robert Bideau (Monéteau). C'est avec eux qu'il a fait le coup. Une bande, une génération de gais lurons à leur manière, assez complémentaires. Ce sont cinq de cette bande, sur un coup de bluff incroyable, qui prit le pouvoir en 2011 au nez et à la barbe des Bordier, Rolland, Raincourt, avant de s'élargir.

Alors Patrick Gendraud qui a pu regarder le jeu des deux côtés, chez les RPR-UMP-LR puis à l'UDI, aurait-il donc la capacité de rassembler ? Sans aucun doute oui, car l'homme est sympathique, porte beau et un art consommé pour se raconter tout en s'attachant à signifier l'essentiel. Cela lui a parfois joué des tours cette façon d'exprimer sa sincérité, la main sur le coeur.  Comme lorsque président de la structure, il traversa impuissant la crise de l'enseignement de la musique dans l'Yonne et son déficit abyssal de 25 millions d'euros, faisant la comparaison avec un élève harcelé par  ses camarades en cours de récréation à Saint-Jo, qui se suicida. Au-delà de l'épisode, l'intervention en dit long sur la pression qui peut peser sur les élus en certaines circonstances.

Patrick Gendraud est aussi celui qui obtint la mise au ban de la caméra d'Auxerre TV dans l'enceinte de l'assemblée départementale, contraignant au repli dans les tribunes réservées au public. Aux dépens de la qualité du son et de la retransmission. Personne n'a cillé. Faut-il en déduire pour autant que Patrick Gendraud possède une réelle influence ? Oui sans doute. C'est un homme ouvert et amène qui sait aussi dire les choses. Depuis vendredi dernier, il consulte et reçoit individuellement les conseillers pour leur signifier qu'avec lui président, les choses allaient changer.

 

 

Paulo Da Silva Moreira, Maryline Martin et André Villiers

 

 

L'inconnue des recompostions politiques

 

Si le premier vice-président paraît effectivement tenir la corde, encore lui faut-il, arithmétiquement, faire la différence. Si autrefois, l'affaire eut été entendue, discipline de groupe oblige, il n'en est plus de même en 2017. L'état d'esprit a changé, le monde a évolué, le godillot main sur la couture du pantalon ça marche de moins en moins et on est d'ailleurs curieux de voir comment ça va marcher avec La République en Marche.

La cartographie politique du conseil départemental, après le séisme Macron, est modifiée. Et personne ne sait exactement ce qu'il en est.

D'abord, il apert qu'il n'y aura plus de groupe d'opposition. De 6 elle va passer à 2 ce qui privera Françoise Roure et Nicoals Soret d'un poste de demi secrétaire de groupe.

Ensuite, va naître un groupe La République en Marche (LREM), qui va rassembler des forces autrefois diverses voire opposées.

Exemples rapides : Ounès+Pianon+Crouzet+Henriat+Hadrbolec+Bouchier+Capitain+Bideau...

Enfin, le groupe déjà divisé du parti Les Républicains entre Lemoynistes et Larrivéistes (favorables à l'UDI Villers), va muter.

Au moins 8 LR constructifs vont former un groupe qui ne sera pas forcément la configuration des LR orphelins de Jean-Baptiste Lemoyne dont d'aucuns doutent qu'on le revoie souvent.

André Villiers président sortant qui continuera de siéger comme conseiller départemental de base, formera-t-il à lui seul un groupe, non reconnu puisqu'il faut être au moins trois, des UDI constructifs ? Ou ralliera-t-il le groupe des LR-UDI constructifs soit Leuger+Quentin+Dorte+Courtois+Serré+Villiers ... ?

Et que feront les non inscrits, telle Delphine Grémy ?

Personne ne sait, d'autant que lors de l'élection d'un président, l'équation personnelle joue aussi un rôle dans le choix, au-delà de la discipline de groupe.

L'affaire serait pourtant pliée : Gendraud président, Pianon vice-président (au grand dam de Robert Bideau le vice-président qui gère 60% du budget du département aux affaires sociales), et William Lemaire (Charny-Aillant) plus Dominique Sineau (Thorigny-sur-Oreuse) élus vice-présidents en remplacement numériquement de André Villiers et de Michèle Crouzet, élus députés. Lemaire c'est la rectification d'une anomalie. Ce dernier est président de la commission d'appel d'offres.

Reste à connaître l'essentiel : la feuille de route du nouveau président et les collaborateurs dont il va s'entourer. Sera-t-il autonome et disposera-t-il des moyens pour inscrire dans le marbre sa politique ? Quelle sera-t-elle ? Patrick Gendraud a fait savoir qu'il souhaitait rassembler et apaiser. Ce message s'adresse à Auxerre et à l'Auxerrois. Au moins deux dossiers cruciaux opposent ces collectivités depuis trop longtemps aux dépens des usagers : la fermeture du collège Bienvenu-Martin et la reconstruction d'un gymnase au collège Albert-Camus. Pascal Henriat, conseiller départemental d'opposition, président du MoDem dans l'Yonne lié congénitalement à LREM, et adjoint aux finances de la ville d'Auxerre, est prêt et a offert ses services en tendant la main. Patrick Gendraud en paroles le suit.

Qu'en sera-t-il dans les actes ?

André Villiers, jusqu'à preuve du contraire, est toujours le patron du département de l'Yonne. Et qu'il entend porter le dossier de femeture du collège Binevenu-Martin jusqu'au bout. À défaut de pouvoir obtenir l'arrêté de fermeture du préfet que ce dernier refuse de signer, le CD89 va vider le collège, le 7 juillet, en actant la répartition des 380 élèves dans d'autres collèges.

Ce qui est sûr c'est que le maire de Chablis, 1er vice-président, ne sera pas le seul candidat à la présidence.

 

Pierre-Jules GAYE

 

 

Qui est le président ... Qui sera le président ...?  ..... "Rester le même au fil du temps contre vents et marées politique avec la force de son affectivité, de son humanisme et ses capacités de soutien ...la cohérence identitaire est toujours reconnue et saluée" (Roger)

 

 

 


Les députés de l'Yonne André Villiers et Gullaume Larrivé