Chritian Billebault originaire de Turny, ici en Corse, il y a trois ans (Photo Ph. M.)

 

 

L'allée centrale de la cathédrale était bordée des fleurs offertes. Comme pour tracer le chemin vers la nef.

Une belle photo de Christian, souriant, en noeud papillon, figurait dans un cadre, sur le cercueil.

Dans la foule de nombreux élus, amis et proches de Christian Billebault, ancien directeur du CFA Bâtiment de l'Yonne.

La cérémonie  a débuté par 45 minutes d'hommages.

Le premier à prendre la parole fut Guillaume Larrivé qui a rappelé qu'il a été convié à prendre parole au titre de député mais surtout au titre d'ami, puis comme ils furent annoncés, les trois amis du conseil municipal d'Auxerre à savoir Isabelle Joaquina, Michele Bourhis et Jean Pierre Bosquet.

Vinrent ensuite deux interventions de  Jacques Maupetit, vice-président de l'association ADM et Soulemane Koné
qui évoquèrent les chantiers en Afrique.

Enfin, son ami proche, Philippe Minard, lui rendit un hommage sensible.

Le père Lhost reprit la main sur la partie religieuse de la célébration  et choisit l'evangile de Matthieu   25.31  à  25.46

 

"31. Or, quand le fils de l'homme viendra dans sa gloire, et tous les anges avec lui, alors il s'assiéra sur le trône de sa gloire ; 32. et toutes les nations seront assemblées devant lui, et il séparera les uns d'avec les autres, comme le berger sépare les brebis d'avec les boucs ; 33. et il mettra les brebis à sa droite, et les boucs à sa gauche. 34. Alors le Roi dira à ceux qui seront à sa droite : Venez, vous qui êtes bénis de mon Père, possédez en héritage le royaume qui vous a été préparé dès la fondation du monde ; 35. car j'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger ; j'ai eu soif, et vous m'avez donné à boire ; j'étais étranger, et vous m'avez recueilli ; 36. j'étais nu, et vous m'avez vêtu ; j'étais malade, et vous m'avez visité ; j'étais en prison, et vous êtes venus vers moi. 37. Alors les justes lui répondront disant : Seigneur, quand est-ce que nous t'avons vu avoir faim, et que nous t'avons nourri, ou avoir soif, et que nous t'avons donné à boire ? 38. et quand est-ce que nous t'avons vu étranger, et que nous t'avons recueilli ; ou nu, et que nous t'avons vêtu ? 39. et quand est-ce que nous t'avons vu malade, ou en prison, et que nous sommes venus vers toi ? 40. Et le Roi répondant, leur dira : En vérité, je vous le dis, toutes les fois que vous l'avez fait à l'un de ces plus petits de mes frères, vous me l'avez fait à moi-même. 41. Alors il dira aussi à ceux qui seront à sa gauche : Allez loin de moi, maudits, dans le feu éternel, qui est préparé au diable et à ses anges ! 42. Car j'ai eu faim, et vous ne m'avez pas donné à manger ; j'ai eu soif, et vous ne m'avez pas donné à boire ; 43. j'étais étranger, et vous ne m'avez pas recueilli ; nu, et vous ne m'avez pas vêtu ; malade et en prison, et vous ne m'avez pas visité. 44. Alors eux aussi répondront disant : Seigneur, quand est-ce que nous t'avons vu avoir faim, ou avoir soif, ou être étranger, ou nu, ou malade, ou en prison, et que nous ne t'avons pas servi ? 45. Alors il leur répondra disant : En vérité je vous le dis, toutes les fois que vous ne l'avez pas fait à l'un de ces plus petits, vous ne l'avez pas non plus fait à moi. 46. Et ceux-ci s'en iront au châtiment éternel, mais les justes à la vie éternelle."

Puis, le dernier texte fut lu par un bénévole de la paroisse Saint-Germain avant la bénédiction du cercueil ou le geste d'amitié.

L'assistance fut conviée à un pot de l'amitié au Club Vert à 16h30.

Élisabeth Gérard-Billebault, l'épouse du défunt, salua chacun, à la sortie sur les parvis.

 

 

Le témoignage de l'ami Philippe MInard



"Au temps de Koroni


"En m'invitant à dire un mot aujourd'hui, Zabeth m'a touché autant qu'elle m'a mis en difficulté. Comment dire (ou redire), un peu au nom de tous ceux qui sont là,  cet après-midi,  ce qu'ils ne savent déjà ? Comment rappeler un parcours professionnel  exemplaire, déterminé et ambitieux ? Comme dire tous les éclats de rire,  tous les doutes,  tous les excès, tous les tourments, tous les voyages partagés intimement. Après tout, cela ne regarde que nous. ..

Nous avons tous en nous une image précise mais forcément différente de Christian Billebault.

De sa terre natale de Turny, il  avait conservé le goût de la nature, des choses simples et utiles. Une rusticité de bon sens qui conduit toujours à l'essentiel. Sans s'encombrer de mots et de faits inutiles. De Turny, il avait longtemps gardé le goût de la chasse et des grands espaces, le goût des gars simples comme il disait.  Mais ce gars de la campagne était trop curieux de l'horizon  pour ne pas aller goûter d'autres sensations. Ce fut l'appel de la ville. Les copains, les virées, les beaux costards, les restaus, les filles, les belles voitures, les années 60 à Auxerre… Puis il y eut  l' entrée déterminante au CFA où très vite, et sans jamais le dire, sa croyance  en l'apprentissage et à la transmission du métier  lui  on fait réaliser qu'un jour, il  devait être le pilote, qu'il serait le pilote, le guide,  le patron. Le premier de cordée pour reprendre un expression à la mode. 

Quand ce jour est arrivé à la fin des années 80, l'apprentissage des métiers du bâtiment  n'a plus eu le même profil dans l'Yonne. Christian  a donné à  des milliers de gamins  le goût d'apprendre un beau métier et d'oser l'aventure des bacs pros. Il a convaincu  leurs parents d'être fiers et  a offert à tous des remises de prix dignes de celles  d'Harvard ou de Cambridge.

Pour cela  il a été ferme, dur, exigeant, intraitable, obstiné, voire pire. Il n'avais cessé de m'expliquer  tout cela là haut, dans la petite cuisine privée du CFA ou le chef, Jojo, veillait sur son impatience en  répétant : "M. Christian, il n'y a pas le feu au saloon!"
En coulisse, avec Zabeth  son  indéfectible conseiller et soutien, nous l'avons vu bosser comme un fou pour être à la hauteur de ses responsabilités,  nous l'avons vu se remettre en question. Le gars de la campagne s'imposait définitivement à la ville,  à ses codes, à ses cercles.  Sans ne jamais rien dévoiler de ses efforts  et de sa duplicité.

Car pour Christian, tout ce qui le représentait devait être impeccable :  ses contenus pédagogiques, ses budgets, ses phrases, ses costumes, sa voiture, son jardin,  ses vignes,  les gravillons de son allée., tout ! Il en est ainsi des perfectionnistes.

Malgré cette vie professionnelle chargée, qu'il lui fallait nourrir un  peu plus chaque jour, Christian a toujours su garder du temps pour cette montagne qu'il aimait si profondément.  Pour skier, pour escalader, pour marcher. Et c'est bien naturellement qu'il reposera, s'évadera,  là bas, au pied de la Grande Casse, à Pralognan.

Quand la retraite l'a enlevée au CFA, à dos de scooter, Christian a  su conjuguer  ses deux passions,  la formation et les grands espaces, en Afrique. La Côte d'Ivoire  a été une de ses grandes conquêtes, un terrain d'expérience et d'espoir, le rêve d'enfant d'une authenticité retrouvée. Dès qu'il revenait à Auxerre,  il n'avait cesse d'entretenir la belle maison, - son refuge - et l'immense jardin de Montmercy, d'aller au bois, et de marcher. Depuis quelques années, le rire de ses petits enfants comblait son bonheur de patriarche. Voilà cette vie, en quelques lignes.

Christian, mon Christian,

Je n'oublierai jamais que tu as été mon  éphémère prof de patin sur glace,  que tu m'as sorti tous les mots anglais de ta connaissance au sommet de l'Empire State Building , que nous avons fait de la pêche sous marine à notre façon,  que nous nous  sommes recueillis sur la tombe du Ché,  que tu nous présentais ta cousine à chaque réveillon,  que nous avons fait, presque clandestinement, une campagne électorale en 2001, que tu m'as fait louper un énorme brochet dans l'Armançon, que tu  as été coiffeur pour nos dames, l'été, dans une crique du Péloponnèse. Je n'oublierai jamais que tu as toujours été là.

Je te remercie, avec Evelyne, de nous avoir offert tant de fous rire,  tant de situations cocasses et décalées, tant de vie.

J'ai été ton témoin  heureux de mariage,  je suis le témoin anéanti de ta mort.

Plusieurs fois,  après le dernier des derniers verres, tu m'as dit  que je ferai  moins le malin le jour où, "chaussé de mes  petits souliers  vernis", j'aurais à prononcer LE  "discours devant ta petite boîte". Mes souliers ne sont pas vernis, et je ne fais pas le malin.

J'ai décidé de  graver une image de toi : tu es  à mes côtés en voiture, le bras à la portière. On roule  sur les chemins de terre au milieu des vignes de Koroni, en écoutant Paolo Conte.
 

Au revoir mon Christian.
                               

Philippe Minard

 

https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/f9/1240-Auxerre.jpg

Chritian Billebault était un bâtisseur