Bernard Casoni a des valeurs  et des principes (DR)

 

Avec un budget en diminution de 4,5 millions d’euros par rapport à la saison dernière (de 21,5 millions d’euros à 17), un budget encadré par la DNCG ( en gros, pas question d’acheter sans vendre), on savait qu’il ne fallait pas s’attendre à des miracles, au point du jour de la nouvelle saison 2013-2014.

On oublie l’essentiel, c’est qu’une holding financière luxembourgeoise a sauvé in extremis l’AJA du dépôt de bilan et de la relégation en CFA voire la division d’honneur avec son cortège de licenciements et la fermeture du centre de formation, flambant neuf. La filiale PLP, bras armé de la holding Centuria Capital, société financière d’investissement, a amené les 5 millions d’euros exigés par la Direction nationale du contrôle des budgets de la Ligue professionnelle de football. Avec en contrepartie, la prise de participation majoritaire (plus de 65%) au sein de la nouvelle structure juridique SAOS (société à objet sportif) AJA XXL  dans laquelle l’association AJA (40 membres) présidée par Henri Maupoil, détient un peu moins de 35% des actions.

Le président Guy Cotret a, dès le départ, été clair : il n’y aurait pas un kopek d’investi dans le recrutement d’autant que le marché s’est retourné. Les clubs sont exsangues et certains tel le grand Lyon très endettés. Le phénomène n’est pas français mais touche l’ensemble du football européen. D’un mot, personne n’a les moyens d’acheter (hors Monaco et le PSG qui disposent de fonds puits sans fond) et la plupart des clubs doivent vendre des joueurs. Autrement dit, l’offre de joueurs sur le marché est supérieure de loin à la demande. Sachant en outre que les salaires à servir sont exorbitants pour ne pas dire déments. Le foot professionnel est bien dans une bulle financière qui ne demande qu'à éclater, comme pour les subprimes.

Pas un kopek d’investi par l’AJA parce que le club qui doit réduire ses dépenses de 4,5 millions d’euros, ne va pas commencer par les augmenter sans garanties. La DNCG ne le permettrait d’ailleurs pas et poserait son veto.

Une dizaine de joueurs ont déjà quitté le club sans que ces derniers pourtant formés à Auxerre ne génèrent une rentrée d’argent, à l’exception de deux ou trois d’entre eux, pour des sommes modiques voire symboliques.

 

Une partie de poker

Dans ces conditions, la seule carte à jouer était et est d’être patient pendant le mercato en attendant qu’il se décante avant sa fermeture, le 3 septembre. D’ici là, des joueurs d’Auxerre tels Boly, Coulibaly et d’autres pourraient quitter le club, d’autant que ce dernier cherche à les placer afin d’une part de réduire la masse salariale trop importante et d’engranger, le cas échéant, un peu d’argent frais, d'autre part.

La patience est également de rigueur pour débusquer l’affaire rare, l’opportunité, voire rafler une mise dans les derniers instants début septembre. En somme, cela ressemble à une vraie partie de poker. Ce ne sont pas les cartes qui sont importantes, c’est ce qu’on en fait.

Bernard Casoni, qui a sauvé l’AJA d’une relégation qui semblait promise début janvier, était et demeure parfaitement conscient de ces contraintes. Il en a en outre une expérience certaine par le passé à Bastia et à Évian.

On ne va pas rejouer le match de Jean-Guy Wallemme qui donna pour explication des mauvais résultats en début de saison dernière, la relative démobilisation de joueurs au mois d’août qui ne savaient pas s’ils allaient rester ou pas sachant que d’aucuns souhaitaient partir.

Bernard Casoni entre autres qualités, est un homme droit et fidèle qui tient ses engagements. Il n’est pas du genre à déroger à ses principes.

 

Une pointe, un ailier droit et un patron

Aussi ne faudrait-il mal interpréter ses propos d’après match après la déconfiture (très relative et ponctuelle) face à Metz. Il a fait état de sa perplexité, de son inquiétude et expliqué que « on sait qu’on est en difficulté … je ne suis pas surpris de ce qui nous arrive ». Il a également affirmé que le potentiel de son groupe était limité et qu’il attendait des renforts depuis un mois. Et que ces renforts ne venaient pas.

L’AJA manque de poids devant et de puissance selon Casoni, des joueurs n’ont pas été remplacés. En attendant il faut faire avec et tenter de trouver des solutions.

Les priorités du président Guy Cotret et du coach en termes de recrutement à « zéro euro », affirmées et répétées depuis plus d’un mois, sont une « pointe » et un ailier droit. On y ajoutera, un meneur, un patron au milieu, un joueur d’expérience, style  le danois Poulsen que Casoni réussit à  faire venir de Liverpool en prêt à Évian-Thonon, où il fut le métronome de l’équipe.

Amener un métronome patron à l’AJA et vous verrez qu’il fera jouer l’équipe lui ajoutant un surcroît d’âme et d’intelligence collective, favorisant la confiance qui permet aux jeunes inexpérimentés de se révéler et de s'épanouir. Un patron c’est ce qui manque à Auxerre depuis belle lurette. Non pas une vedette, une star, mais un vrai footballeur professionnel, voué au collectif, chargé d’expérience, de vision et d'esprit de sacrifice.

Il ne nous l’a pas dit mais il y a fort à parier que Bernard Casoni  regrette qu’Auxerre ait laissé passer l’occasion d’enrôler Jérôme Rothen, disponible après son départ de Bastia, même si la personnalité de ce dernier est contestée dans le milieu des amateurs de foot. Rothen a choisi Caen parce que l’offre de l’AJA n’était pas attrayante.

Si tel est le cas, pourquoi le président Guy Cotret, proche de Bernard Casoni en contrat (non renouvelé) jusqu’à la fin de l’année civile, n’a-t-il pas cassé la tirelire ? Il pouvait le faire en dépit des contraintes. Guy Cotret a déclaré lors du grand format  qu’AUXERRE TV lui a consacré, que la holding Centuria Capital pouvait être amenée, à la marge, à apporter des fonds supplémentaires.

 

Les banquiers frileux

Enfin, at last but not least,  ce ne sont pas 5 mais 10 millions d’euros que Centuria Capital a placé pour l’AJA. Cinq autres millions sont bloqués qui peuvent être débloqués à tout moment. Pourquoi le président Guy Cotret n’a-t-il pas cassé la tirelire pour Jérôme Rothen ?

Sans doute n’en voulait-il pas de ce joueur controversé qui a parfois senti le souffre. On ne voit pas d’autre explication.

Il reste que la tirelire existe ainsi qu’une marge de manœuvre certaine.  Mais c’est oublier que les banquiers sont des gestionnaires frileux, nous voulons signifier que leur métier n’est pas de prendre des risques …. C’est bien un des problèmes de l’économie en France : le manque de soutien des banques à l'activité.

Il reste que Bernard Casoni, lui,  anticipe et met en garde. Une manière de placer chacun devant sa responsabilité.

Le championnat débute le samedi 3 août à Nancy pour Auxerre.  D’ici là, le coach ajaïste va faire monter son collectif en puissance et en intelligence car il mise beaucoup sur l’éducation solidaire. Cela prend du temps et les fruits ne tombent pas comme à gravelotte.

Et puis, le match contre Metz est anecdotique donc sans grande signification. D’ailleurs, le nul contre Sochaux (L1) et la courte défaite (0-1) face à Dijon, ont montré des choses intéressantes. Enfin le stage à Vittel de l’avis unanime, fut une réussite totale. Il fallait bien l’air des Vosges pour espérer conquérir la Lorraine.

 

Pierre-Jules GAYE